30 janvier 2011

BURD EARLY : Leveler


Acquis par correspondance chez Amoeba aux Etats-Unis vers 2008
Réf : west018 -- Edité par Western Vinyl aux Etats-Unis en 2003
Support : CD 12 cm
9 titres

J'écoutais une de mes compilations cassette en voiture quand est arrivé ce titre que j'avais oublié, excellent, plus de sept minutes sans une seconde de trop. Je me suis dit que c'était un excellent titre de Bill Callahan ou de Smog dont je ne me souvenais plus. Ce n'est qu'arrivé à un feu rouge ou à la fin de mon trajet, quand j'ai pu regarder la jaquette de la cassette, que je me suis rendu compte de mon erreur : je venais de réécouter et de grandement apprécier à nouveau Tangent de Burd Early. Mais mon erreur est compréhensible : si James Angelos, le new-yorkais qui se cache derrière le pseudo Burd Early, n'a pas une voix aussi profonde que celle de Callahan, la construction et l'instrumentation de Tangent, et même la façon de poser sa voix et les intonations, me font énormément penser au travail récent de l'ex-chanteur de Smog.
C'est Philippe R. qui m'a mis le premier sur la piste de Burd Early vers 2002-2003 en me donnant le lien vers le MP3 de Dritfwood chez Epitonic. Par la suite, j'en ai récupéré quelques autres, dont Fertilizer waiting to happen, Phonecall away et Tangent. Entre-temps avant de réécouter cette cassette, j'avais aussi acquis d'une manière ou d'une autre deux CD de Burd Early, Observatory et Mind and mother, mais en rentrant à la maison j'avais été déçu de constater qu'aucun des deux ne contenait Tangent. Qu'à cela ne tienne, en quelques clics ce Leveler à la pochette plus qu'insipide était commandé.
La tonalité principale de ce disque est celle de chansons lentes, acoustiques, avec des parties instrumentales qui font penser par exemple au travail de Mick Turner. Une comparaison pas choisie au hasard, vu que Turner et Burd Early ont été compagnons de label chez Western Vinyl et que l'édition originale d'Observatory a même été sortie par King Crab, une étiquette d'Anchor and Hope, le label des Dirty Three.
De ces chansons calmes, je retiens surtout Phonecall away, éclairée sur la fin par la voix de Rosario Garcia-Montero, et Desire asymptotic, très réussie avec sa pedal steel, qui a un petit côté Leonard Cohen dans le chant.
La partie centrale du disque est plus énergique, avec Tangent d'abord, emballée par la batterie de Tim Barnes, et Here we go again, qui me rappelle pas mal de titres instrumentaux de Calexico (mais pas ceux au goût mexicain).

Après 2005, Burd Early a pris la tangente et James Angelos a lancé un nouveau projet, Et Ret, qui a sorti l'album Gasworks en 2006.

28 janvier 2011

THE NITS : New flat


Acquis au Virgin Megastore à Londres au printemps 1984
Réf : CBS 84725 -- Edité par CBS aux Pays-Bas en 1980
Support : 33 tours 30 cm
14 titres

Hors Hollande, la carrière discographique des Nits a démarré en 1979 avec leur premier album chez CBS, Tent. On ne savait pas vraiment à l'époque que le groupe avait sorti en 1977 chez lui un premier single, Yes or no, et même un album, tiré à 1000 exemplaires, en 1978.
Tent, que j'avais trouvé pas cher chez Gibert Jeune lors de l'un de mes premiers périples à Paris, est le premier d'une trilogie d'albums new wave des Nits à ranger à côté de celles d'Ultravox!, de Wire ou d'XTC. J'ai acheté Work, le troisième, à sa sortie en 1981, mais dans un premier temps je n'ai eu New flat, que j'ai toujours plus ou moins considéré comme mon préféré du lot, qu'en copie cassette.
Si, paradoxalement, je me suis retrouvé à acheter à Londres au prix fort (6,49 £) ce disque hollandais bien diffusé en France, c'est pour un ensemble de bonnes raisons, comme le fait que j'habitais à Londres à ce moment-là, que j'avais un peu d'argent, que j'y ai trouvé le disque (of course) mais je crois que ma motivation était surtout de m'assurer que j'avais bien tous mes disques préférés des Nits  quelques mois après avoir acheté au même endroit le mini-album Kilo, trop lent et trop jazzy, une énorme et abrupte déception après la grande réussite pop qu'avait été l'album Omsk.
C'est la mention des Nits dans ma chronique du disque de Oui Oui qui m'a donné envie de ressortir leurs premiers disques, ce que je ne fais pas si souvent. J'ai été très agréablement surpris en écoutant attentivement New flat. Ce disque est moins synthétique que dans mon souvenir et surtout beaucoup plus énergique et même électrique. Il y a des claviers, c'est sûr, mais pas tant que ça. Juste quelques bribes de boite à rythmes, pas mal de guitare électrique, mais à la limite les deux instruments les plus en valeur sont la batterie, très appuyée, et la basse, énorme.
Il n'y a pas une faiblesse sur les quatorze titres de l'album. Il y est question de lieux (appartement, bureau), d'objets, de gens aussi, et même d'un gars qui se transforme en objet (A statue). Tout est abordé sur un ton aussi détaché que le graphisme de la pochette est épuré.
Le nouvel appartement de New flat qui ouvre l'album a son pendant en début de face B, la cuisine différente de Different kitchen. Les deux, tout comme Uncle on Mars, me font pas mal penser à Devo. C'est encore plus flagrant pour New flat dans l'enregistrement live en 1982 à Haarlem qu'on trouve, avec 361 autres titres inédits, dans les Nits Files.
Je ne veux pas multiplier les comparaisons car le disque a sa valeur intrinsèque, excellente, mais les points de référence les plus évidents sont le XTC de l'époque Barry Andrews, Wire (Saragossa notamment) et plus rarement Kraftwerk (His first object). Le chant sur le refrain de Safety in numbers me fait fortement penser à un titre du premier Talking Heads mais je n'ai pas pris le temps de rechercher lequel.
Je ne suis pas loin de penser que les membres du groupe considèrent ces premiers disques - à tort - comme de simples oeuvrettes de jeunesse. En 1989, sur le triple 33 tours/double CD live Urk, l'époque Work était à peine représentée et Tent et New flat complètement absents. Idem ou presque sur la plupart des compilations parues. Ces trois albums ont été édités en CD à une époque mais, comme une grande partie de leurs disques chez CBS, ils sont épuisés depuis longtemps et vendus en occasion à prix prohibitif. Etant donné qu'ils ne sont pas non plus disponibles en téléchargement, le mieux est encore d'acheter les éditions en 33 tours, encore abordables. Ces disques indispensables à tout amateur de new wave valent bien cet effort.




Aloha drums ! en concert pendant la tournée Tent à Udenhout le 22 juin 1980, avec de la vraie guitare hawaïenne sur une rythmique qui rappelle Battery brides de XTC.

23 janvier 2011

WAVE MACHINES : Punk spirit


Acquis au Record & Tape Exchange de Notting Hill Gate le 18 novembre 2010
Réf : NPCDSP0002 -- Edité par Neapolitan en Angleterre en 2009 -- Promo use only not for resale
Support : CD 12 cm
Titres : Punk spirit (Radio edit) -- Punk spirit (Album version) -- Punk spirit (Instrumental)

Ça sert à ça les bacs de disques à 10 pence : à miser quelques sous sur des disques inconnus qu'on n'aurait jamais achetés dans d'autres occasions. Wavves, j'ai vu passez le nom, The Wave Pictures je connais un peu, alors que Wave Machines je ne connaissais pas du tout, mais la pochette et le titre sont accrocheurs, alors...
Wave Machines est un groupe de Liverpool et Punk spirit est son quatrième single, sorti en 2009 quelques semaines après leur premier album (le seul à ce jour), Wave if you're really there.
Apparemment, les premiers titres étaient assez électro, mais celui-là pas du tout. On est dans un registre pop-rock de bon aloi, avec de l'ampleur, une accroche en "Ah ah ah ah ah" sur le refrain, qui est pas mal vu : "Où est mon esprit punk quand j'en ai besoin ?".
Ce CD vient s'ajouter à ma désormais longue liste de CD promo sans équivalent dans le commerce : dans cette phase intermédiaire de décollage de la vente en ligne, Punk spirit est sorti en téléchargement et en 45 tours (avec une pochette légèrement différente et une autre chanson en face B) mais ce CD a été édité uniquement pour la presse et les professionnels, et autant que je sache c'est le seul endroit où l'on trouve la version instrumentale de Punk spirit.

Trois autres titres de l'album sont en écoute chez Sourdoreille.


La vidéo, à petit budget visiblement, de Punk spirit.

22 janvier 2011

DANNY STEWART : Rêveries hawaïennes


Acquis à la Foire à tout du Millésium à Epernay le 16 janvier 2011
Réf : CVL. 55.013 -- Edité par Coral en France vers 1957
Support : 33 tours 25 cm
8 titres

Un très beau dimanche d'hiver, froid, sec et très clair, l'occasion d'une première sortie en extérieur de l'année à la pêche aux trouvailles discographiques.
Je n'étais pas hyper optimiste car je savais ce qui m'attendait au Millésium : une poignée de stands à l'extérieur et une vingtaine d'autres en salle, ceux du marché aux puces, chers et avec peu de disques. Et effectivement, dehors seuls deux des stands avaient quelques disques susceptibles de m'intéresser. Je n'ai trouvé que ce disque, dans le premier des deux, mais cette belle pièce me suffit amplement. En plus, j'ai eu la bonne surprise de m'entendre annoncer un prix unique de 1 € pour tous les disques du stand, ce qui dans le contexte pour ce 25 cm en superbe état était tout à fait correct et presque inespéré.
J'ai donc pêché ce beau poisson rouge ! La pochette fait beaucoup pour le charme de ce disque. Elle est signée Max-Dufour. Il en a fait sûrement beaucoup d'autres, dont plusieurs pour Benny Rock à voir chez Amour du rock 'n' roll.
Danny Stewart est né à Hawaï. Stewart, ça fait bizarre pour un hawaïen, mais ça s'explique très bien car il se trouve que son père était écosso-irlandais. Danny est aussi connu sous le nom de Kalauawa.
Outre les textes au dos de ses disques, le livre The hawaiian steel guitar and its great hawaiian musicans de Lorene Ruymar nous donne des informations sur sa biographie : il est né à Honolulu et il a quitté Hawaï en 1929 pour accompagner un spectacle de Johnny Noble. Il s'est ensuite installé en Californie où il a beaucoup travaillé pour le cinéma et la radio. Il a notamment enregistré avec Alfred Apaka, George Kainapau et Bing Crosby. Il est retourné à Hawaï en 1960 pour y animer une émission de radio et il y est mort en 1962.
Danny Stewart était considéré à l'époque comme un grand de la steel guitar hawaïenne, mais il semble bien oublié maintenant. J'ai bien l'impression qu'aucun des disques sortis sous son nom n'a jamais été réédité en CD.
Ces disques, il les a visiblement enregistrés vers la fin de sa carrière américaine, dans les années 1950. Il chante sur certains d'entre eux, mais pas sur ces Rêveries hawaïennes, qui sont entièrement instrumentales.
Vu le pédigrée du bonhomme, on n'est pas surpris de découvrir un enregistrement très propre, à l'américaine, pas spécialement "roots", tendant vers l'easy listening. Le tempo, marqué par la contrebasse, est globalement lent et l'instrumentation fait la part belle à la guitare steel, soutenue efficacement par de la guitare électrique et un peu de ukulélé.
Le répertoire est à l'avenant. Il est composé d'airs populaires du premier tiers du vingtième siècle (Shine on harvest moon, By the light of the silvery moon, Moonlight and roses, Among my souvenirs, When day is done) et de chansons de films hollywoodiens ayant pour cadre l'exotique Hawaï (My isle of golden dreams, du film Lake Placid serenade et Ka-lu-a, la chanson d'amour du film Bird of paradise). Pagan love song fait le lien entre les deux, puisque c'est à l'origine un grand succès de 1929 qui a inspiré un film hollywoodien du même titre en 1950.

Sur l'alléchant blog Tam tam & mélodie, on trouve deux autres 25 cm de Danny Kalauawa Stewart, Hawaiian favorites et Dance the hula in the moonlight.

21 janvier 2011

OUI OUI : Ma maison


Acquis probablement à La Petite Boutique Primitive à Reims en 1990
Réf : WMD 607 101 -- Edité par Justine en France en 1990
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Ma maison (Nouvelle formule, Edit radio) -/- Bolide

Cette semaine, j'ai regardé avec plaisir Soyez sympas, rembobinez, le film de Michel Gondry, l'ancien batteur et réalisateur des clips de Oui Oui. Du coup, ça m'a décidé à faire ce que j'avais prévu de longue date : ressortir un des disques du groupe pour en parler ici.
Si j'ai bien acheté à sa sortie en 1989 Chacun tout le monde, le premier album de Oui Oui, je regrette amèrement de pas avoir fait de même pour l'épatant Formidable en 1992. D'autant plus que, il y a sûrement presque dix ans maintenant, j'ai remplacé ma copie cassette de l'album par un CD-R (sûrement grâce au Vieux Thorax, avec en bonus les deux titres de ce single) et que, comme beaucoup de mes premiers CD gravés, celui-ci ne passe quasiment plus maintenant !
Comme quoi, un bon vieux 45 tours bien entretenu, si on a gardé une platine en état de marche, c'est parfois plus fiable. C'est le cas pour Ma maison, une chanson qui figurait à l'origine sur Chacun tout le monde. Cette nouvelle formule a été enregistrée spécialement pour ce single l'année suivante, en 1990.
Ma maison est un parfait exemple du style Oui Oui. Musicalement, il y a comme souvent une touche new wave et, vu le thème abordé et le détachement apparent, je pense particulièrement aux Nits des trois premiers albums, de Tent à Work.
Dans les paroles, j'aime particulièrement la phrase "La promiscuité sent le fromage" !
Bolide, en face B, est un instrumental qui ne figurait pas sur l'album (Il y en a une version dub sur le maxi CD), mais c'est quand même un titre du groupe déjà ancien car Michel Gondry avait réalisé en 1988 un film d'animation sur une première version de Bolide, avec plus de guitare. Celle-ci m'évoque plutôt Les Tueurs de la Lune de Miel, et particulièrement J4, dans sa version Subtitled remix.
Avec un nom pareil (Je ne sais pas comment les propriétaires de la marque du personnage d'Enid Blyton ont laissé passer ça) et ses faux airs naïfs, Oui Oui a dû en rebuter plus d'un. Ils n'ont pas été aidés par le fait que les labels qui ont sorti leurs albums ont tous les deux mis la clé sous la porte peu de temps après la sortie des disques.
Etienne Charry, guitariste, chanteur et parolier du groupe, poursuit son parcours musical éclectique et original, hors des sentiers battus du disque, de spectacles en illustrations sonores en passant par des expositions d'art musical.
Sur son site, en réglant la radio sur Oui Oui, on trouve plein d'infos sur le groupe, ainsi que des inédits et les clips vidéo. On y apprend en passant que plusieurs projets de ressortie des disques, depuis longtemps épuisés, n'ont pas abouti. Dommage, surtout qu'une anthologie envisagée aurait pu s'appeler Oui Oui are the World !


Le clip de Ma maison réalisé par Michel Gondry.


Un Oui Oui très rock interprète Ma maison en concert sous la Tour Eiffel en 1992.

16 janvier 2011

JOHNNY KIDD AND THE PIRATES : Shakin' all over


Acquis chez Age Concern à Douvres le 29 décembre 2010
Réf : POP 753 -- Edité par His Master's Voice en Angleterre en 1960
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Shakin' all over -/- Yes Sir, that's my baby

Dans le lot des disques achetés ce jour-là chez Age Concern, voici sûrement ma meilleure pioche, avec le Lonnie Donegan.
Shakin' all over est un classique du rock, repris par à peu près tout le monde, de Vince Taylor aux Who, mais je me rends compte qu'avant d'acheter ce 45 tours je n'avais cette version originale sur aucun disque chez moi et je la connaissais très mal.
Comme beaucoup je crois, j'ai un peu trop tendance à faire démarrer l'histoire du rock anglais avec les Beatles et les Stones, mais avant eux il y avait notamment  Cliff Richard et les Shadows, Vince Taylor et Johnny Kidd and the Pirates, qui ont atteint la première place du hit-parade en 1960 avec ce Shakin' all over, leur quatrième single.
Le 13 mai 1960, jour de l'enregistrement de ce disque, le label avait prévu de faire enregistrer au groupe comme face A Yes Sir, that's my baby, une chanson populaire américaine de 1925, reprise des dizaines de fois et dans tous les styles, y compris, et c'est sûrement le seul point d'intersection de leurs discographies respectives, par Georges Jouvin. Le groupe avait déjà enregistré une version de cette chanson l'année précédente, plus sauvage apparemment, qui n'avait pas été publiée. Elle serait peut-être restée complètement inédite si elle n'avait pas été mise à la place de celle-ci lors d'une réédition du 45 tours en 1976.
En tout cas, telle qu'elle est là, Yes Sir, that's my baby est un rock agréable, très poppy, pas loin dans l'esprit de Buddy Holly. Elle aurait sûrement eu un certain succès, mais au bout du compte elle s'est retrouvée reléguée sur la face B du 45 tours. Pourquoi ? Parce que le label avait laissé au groupe le choix de son deuxième titre et, la veille de l'enregistrement, Johnny Kidd avait écrit en quelques minutes une nouvelle chanson, Shakin' all over. La chanson a été mise en boite avec deux prises maximum, avec juste un overdub de guitare avec un briquet servant de bottleneck improvisé. La guitare solo sur ce classique est tenue par Joe Moretti, qui n'était pas un membre permanent des Pirates (mais il joue aussi sur le single suivant, Restless). Ce nom est inconnu des non-spécialistes, mais le bonhomme a un sacré pédigrée. C'est notamment lui qui, en 1959, a fourni le solo de guitare de Brand new Cadillac de Vince Taylor ! Sur son site, Joe Moretti relate de façon délirante et passionnante sa rencontre avec Johnny Kidd et l'enregistrement de Shakin' all over.
A mes oreilles, qui ont pris les choses à l'envers à partir des années 1980, Shakin' all over sonne comme un concentré de tout le rockabilly des années 1950, le rockabilly déjanté révéré et déterré par les Cramps, celui à la guitare sauvage façon Link Wray.
Si Brand new cadillac s'est peu vendu à l'époque, notamment parce que la BBC, où la publicité est interdite, a refusé de le diffuser, Shakin' all over a été un vrai grand succès en 1960 (s'il ne s'en était pas vendu autant d'exemplaires, il aurait été très peu probable que j'en déniche un dans une boutique de la province anglaise cinquante ans plus tard).
Outre-Atlantique, la chanson n'a été un tube qu'en 1965, après une reprise par Chad Allan/The Guess Who. Ceci explique sûrement pourquoi Johnny Kidd a enregistré cette année-là une nouvelle version, Shakin'all over '65, qui fait la part belle à l'orgue. Mais Johnny n'allait pas profiter beaucoup plus longtemps de son classique, puisqu'il est mort l'année suivante dans un accident de voiture.

15 janvier 2011

FAMILY FODDER : Classical music


Offert par Alig Fodder par correspondance en décembre 2010
Réf : CON147 -- Edité par The State51 Conspiracy en Angleterre en 2010
Support : CD 12 cm
11 titres

En 2008, un groupe nommé Idol Fodder sortait le mini-album Bäbytalk. Ce disque en édition limitée, diffusé de manière confidentielle aux Etats-Unis, faisait partie d'une collection intitulée Pregnancy (Grossesse).
La gestation aura été un peu longue, mais Idol Fodder a finalement accouché fin 2010 d'un album complètement abouti, Classical music, la première sortie en disque de The State51 Conspiracy, attribué cette fois-ci à Family Fodder, le nom utilisé le plus souvent par Alig Fodder et ses complices depuis 1979.
Le nom de groupe est différent mais il s'agit bien du même projet arrivé à maturité. D'abord, la formation de base est la même, soit Alig et Darlini Singh-Kaul (s'agissant d'une affaire de famille, on notera que Darlini est la fille de Dominique Levillain, la chanteuse des plus grands hits de Family Fodder). Et surtout, presque tous les titres importants de Bäbytalk sont repris ici : The onliest thing, Strangest games, Death and the maiden et Analyze my life ?, rebaptisé Be more wise. Ne manque à l'appel, et c'est bien dommage, que l'excellent Infamy, peut-être parce que ce titre était sorti au préalable en Allemagne sur un 45 tours attribué à Alig Fodder.
J'espère que vous suivez car la généalogie de ce disque est décidément compliquée. Il y a en effet un cinquième titre de Classical music qu'on connaissait déjà, le tout aussi excellent Greed and fear. Sur Bäbytalk, on en trouvait une courte version instrumentale intitulée Full term, mais parmi les inédits de la compilation More great hits,c'est bien la même version qu'on trouvait, sauf qu'elle s'appelait Hippy chick !
Mais oublions un peu tout ce lourd passé familial, d'autant que la plupart de ceux qui vont écouter Classical music découvriront ces titres à cette occasion. Ce qui compte surtout, c'est que cet album est un projet cohérent, issu de sessions d'enregistrement dans le Devon avec une formation stable.
De la berceuse Primeval pony à la comptine Do do what you want to do, toute la première partie du disque est marquée par un grand calme et une grande sérénité. Même Whatever happened to David Zé ? et Ancestor's feet, les deux titres qui s'inspirent ouvertement du highlife ou de la rumba africaine, semblent ralentis et tout cotonneux (et ce n'est pas une critique).
Il y a aussi des parties plus psychédéliques et plus enlevées. Greed and fear, qui s'ouvre sur un grincement de porte et fait intervenir un évier de cuisine (d'où peut-être l'illustration de pochette), comporte une partie de guitare qui me rappelle furieusement Playing golf, le tout premier 45 tours de Family Fodder. Pour les paroles de Don't get me high, Alig s'est même fait aider par Ian Hill, un ancien membre du groupe à l'époque notamment du premier album Monkey banana kitchen.
Le bébé Fodder a bien grandi. A plus de trente ans, il a gardé toutes ses qualités et toute son inventivité et est devenu un classique contemporain. Il n'est pas trop tard pour faire sa connaissance, d'autant qu'on peut espérer un événement rare en 2011 : l'annonce de concerts de Family Fodder...

Classical music est notamment en vente sur le site officiel de Family Fodder.


Une version de Primeval pony en direct du toit d'un immeuble londonien pour Balcony TV.


La vidéo d'Ancestor's feet, le single (numérique) extrait de l'album.

09 janvier 2011

THE JASMINE MINKS : Sunset


Offert par Creation Records fin 1986 ou début 1987
Offert par La Radio Primitive au Big Sound System Primitif à l'Appart Café à Reims le 8 janvier 2011
Réf : CRE LP 013 -- Edité par Creation en Angleterre en 1987
Support : 33 tours 30 cm
11 titres

C'est une longue histoire, mais il s'agit bien d'un seul et même exemplaire de ce disque que je me suis fait offrir par deux fois... à vingt-quatre ans d'écart !
J'ai organisé une mini-tournée de deux concerts en France pour les Jasmine Minks en mars 1987. Le premier, c'était le 6 mars Chez Paulette à Toul et le deuxième le lendemain à la MJC Claudel de Reims. Entre les deux, nous nous étions arrêtés à Nancy pour une session dans les studios de Radio France et nous avions appris la catastrophe de l'Herald of Free Enterprise à Zeebrugge (Il me semble que les Minks voyageaient par Calais ce week-end là  mais ça avait quand même secoué tout le monde).
Je ne sais plus si Creation m'a donné un ou plusieurs exemplaires de ce disque en vue de la promotion de la tournée, toujours est-il que je me suis retrouvé à donner mon propre exemplaire à La Radio Primitive parce que je n'en avais pas d'autre. Le disque a alors intégré la discothèque de la radio et y est resté jusqu'à hier. J'y ai souvent repensé depuis car Sunset, le morceau-titre de cette compilation, n'a été publié que sur ce disque, ce qui fait qu'il a manqué à ma collection de Jasmine Minks tout ce temps.
Hier justement, La Primitive organisait un Big Sound System à l'Appart Café avec une bourse aux disques, notamment pour tenter de renflouer les finances de l'association. Je m'attendais à y trouver comme d'habitude des disques donnés ou déposés par des sympathisants de la radio, mais j'ai été surpris de découvrir que, pour la deuxième fois (j'ai raté la première car j'étais en vacances), la radio vendait aussi sa propre collection de disques vinyl.
Proportionnellement, il ne restait plus beaucoup de disques, mais j'ai eu quand même eu quelques coups au coeur en redécouvrant les exemplaires de disques que j'ai beaucoup passés à l'antenne, comme  Don't let's start, le maxi de They Might Be Giants, qui portait encore la mention "Le chouchou de Ketchup" et qui a aussi fourni l'un des indicatifs de mon émission Vivonzeureux!.
J'ai acheté un petit paquet de disques, on aura l'occasion d'en reparler, mais quand je suis tombé sur Sunset, avec encore sur la pochette le tampon des Redditions Prématurées, l'association montée pour organiser ces concerts, je me le suis fait offrir, puisque dans ce cas précis il s'agissait avant tout d'un retour au bercail.


Pas question que je lâche le Jasmine Minks que je viens de récupérer, même pour une photo d'anthologie des cinq derniers présidents de La Radio Primitive. C'est Boris qui rit le plus fort et qui est sûrement le plus courageux car il a accepté d'assumer cette responsabilité dans une période difficile.

Les Jasmine Minks ont vraiment été un groupe important au tout début des années Creation. Avec leur premier 45 tours Think! début 1984, ils ont été le premier groupe signé en-dehors de la bande de copains des fondateurs du label. Ils ont aussi été les premiers à sortir un album sur Creation, le six titres One two three four five six seven, all good preachers go to heaven en septembre 1984. Et, avec ce Sunset, ils ont aussi été les premiers, dès 1986, à sortir une compilation de leurs enregistrements Creation.
Je ne sais pas trop ce qui a motivé la sortie de cette compilation après seulement deux albums. Le plus plausible serait qu'il s'agissait de marquer le coup et de trouver un second souffle après le départ d'Adam Sanderson, l'un des deux auteurs-compositeurs-chanteurs-guitaristes.
En tout cas, s'il s'agissait de vendre des disques, c'était mal parti avec une pochette aussi moche et ratée !  Il n'a rien de génial, mais j'aime beaucoup mieux le verso avec une photo promo des Minks souriants.
Il est précisé dans les crédits que les titres ont été sélectionnés par Alan McGee lui-même. Très bien, mais on ne peut pas dire qu'Alan s'est trop compliqué la vie, puisque l'album nous propose, dans l'ordre chronologique, les faces A et B des quatre 45 tours sortis précédemment par les Jasmine Minks, avec intercalés en fin de face, pour la A un titre du premier album, l'excellent Ghost of a young man, et l'inédit Sunset (Tout à fait dans la lignée des productions du groupe à l'époque, avec les voix des deux chanteurs et des choeurs et des "La la la" sur le refrain qui font penser aux Television Personalities. C'est quand même  un peu en-dessous des autres titres du groupe et on comprend que titre ait été écarté des précédentes parutions.), et pour la B un titre du deuxième album, Forces network (qu'on trouvait aussi, dans une autre version, en face B du maxi Cold heart).
Mais après tout, pourquoi se compliquer la vie puisqu'il n'y a que du bon ici, avec les classiques Think! et Where the traffic goes, mon  chouchou What's happening et le superbe Cold heart. Les faces B sont du même tonneau, notamment l'énergique World's no place avec son refrain "The world's no place for a romantic today".

Ce disque n'a jamais été réédité mais on en trouve huit des onze titres sur la dernière compilation en date du groupe, The revenge of... The Jasmine Minks. Le CD doit encore se trouver (Charlie Dontsurf l'a acheté il y a quelques mois) mais il n'est déjà plus au catalogue de Cherry Red, qui ne distribue plus RevOla. Par contre, l'album est toujours disponible en téléchargement.


Jim Shepherd en session radio à Radio France Nancy le 7 mars 1987, quelques heures avant le deuxième concert des Jasmine Minks à la MJC Claudel de Reims.

08 janvier 2011

THE FABULOUS SOFT CELL : Bedsitter


Acquis chez Indoor Market à Canterbury le 28 décembre 2010
Réf : BZS 6 -- Edité par Some Bizarre en Angleterre en 1981
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Bedsitter -/- Facility girls

Ah, ils sont farceurs les anglais avec leur logique si particulière. Je savais que, chez eux, le jour férié de Noël est suivi du jour férié de Boxing Day, mais je n'avais pas imaginé que, cette année, ces deux jours tombant un week-end, ils seraient suivis d'un Bank Holiday Monday et d'un Bank Holiday Tuesday.
Heureusement pour moi dans ce cas précis, mais malheureusement dans une perspective plus large, dans l'Angleterre libérale et déréglementée du XXIe siècle, où certains magasins sont ouverts tout le dimanche et des hypermarchés 7 jours sur 7 et 24h sur 24, la plupart des lignes de bus fonctionnaient et plus de la moitié des magasins étaient ouverts ce mardi-là, surtout à Canterbury, ville habituée à accueillir des touristes.
Alors, même si plusieurs boutiques de charité étaient fermées, j'ai pu faire quelques emplettes, notamment chez ce disquaire, Indoor Market, qui avait plusieurs bacs de 45 tours à 50 pence et même des albums à 1 £, que je n'ai pas pris le temps de tous regarder.
J'aurai sûrement l'occasion d'y revenir, mais Soft Cell, pour moi, c'est et ça restera avant tout le maxi Tainted love avec l'enchaînement avec Where did our love go qui faisait fureur dans les boums et Persuasion en face B. Je suis même allé jusqu'à acheter le maxi The soul inside pour la reprise, forcément décevante, de Born to lose en face B et j'ai récupéré quelques trucs ici ou là en passant depuis, mais en regardant leur discographie, je me rends compte qu'il n'y a que deux titres que j'en retiens vraiment en plus de Tainted love, les deux singles qui l'ont suivi, Bedsitter et Say hello, wave goodbye.
Ce dernier, je ne l'ai toujours pas. Bedsitter, je l'avais déjà sur le premier album, mais un jour de disette comme ça, en bon état et avec une face B inédite, j'ai fini par franchir le pas et l'acheter.
Jon Savage, dans un article sur Bedsitter pour le Guardian, évoque Sparks à propos de Soft Cell. Dans leur génération new wave, la formule duo avec un instrumentiste effacé et un chanteur exubérant me ferait plutôt penser à Suicide, même si musicalement les deux groupes n'ont rien à voir, Soft Cell étant plutôt à rapprocher de leurs collègues de promotion anglais Depeche Mode. Je ferais quand même aussi un parallèle avec les Associates, à la base aussi un duo avec un musicien ténébreux et un chanteur diva plutôt camp.
Bedsitter raconte l'histoire d'un gars qui s'ennuie seul dans sa chambre en sous-location un dimanche après être sorti la veille. Pour rester en Angleterre, mais en passant de Leeds, la ville d'origine de Soft Cell, à Manchester, on pourrait dire que cette chanson, très dans le ton sombre du début des années 80, anticipe un cocktail improbable du New Order dansant, pour le côté étudiant qui s'éclate en boite, et du Smiths s'auto-apitoyant, pour le côté "Oh, comme je suis malheureux maintenant" du même le lendemain ("Waiting for a visitor, though non one knows I'm here (...) I'm waiting for something, I'm only passing time").
A la manière d'un This is the day de The The, ce n'est pas vraiment gai et ça se regarde le nombril, mais trente ans après ça me plait toujours.
Dans le style, Facility girl, que je ne connaissais pas du tout et qui fait le portrait d'une secrétaire, n'est pas mal du tout non plus.


Deux 45 tours à 50 pence. Pas si mal...


La vidéo de Bedsitter, le premier clip réalisé par Tim Pope. Il en raconte l'histoire sur son site.

02 janvier 2011

LONNIE DONEGAN AND HIS SKIFFLE GROUP : Times are getting hard boys


Acquis chez Age Concern à Douvres le 29 décembre 2010
Réf : 7N.15158 -- Edité par Pye en Angleterre en 1958
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Times are getting hard boys -/- Lonesome traveller

Dans la même boutique que celle où j'avais trouvé un bon paquet de 45 tours new wave l'an dernier, dont le Siouxsie and the Banshees, il y avait cette fois-ci beaucoup moins de disques des années 80 mais pas mal de disques du début des années 60, à commencer par Shakin' all over de Johnny Kidd and the Pirates (!), voire même de la fin des années 50 comme ce single de Lonnie Donegan.
Lonnie Donegan est surtout connu pour avoir popularisé le skiffle en Angleterre, mais ce qui le définit le mieux, c'est peut-être le titre de son premier album américain, An Englishman sings American folk songs. Ici, il reprend deux titres traditionnels dont les paroles ont été fixées et popularisées par Lee Hays, membre notamment des Weavers avec Pete Seeger.
Le joyau sur ce disque, c'est Times are getting hard boys. En ce début d'année, je n'ai nulle intention de formuler des voeux, mais ce titre pourrait bien résumer l'atmosphère ambiante. Avec quatre millions d'inscrits à Pôle Emploi et le double de pauvres, un ministre de la police condamné par deux fois mais toujours en poste, un président qui s'intéresse avant tout à la circulation des avions, probablement parce qu'il vient de s'en faire offrir un tout neuf rien que pour lui, l'ambiance n'est pas gaie et les temps sont difficiles, comme disait Ferré. Certes, pas plus difficiles et sûrement moins qu'à d'autres époques, mais le baromètre ne semble pas indiquer joie de vivre et gaité...
Le seul reproche qu'on pourrait faire à Lonnie Donegan pour sa version de cette chanson, c'est justement d''en avoir ôté une bonne partie du contenu politique et de la faire pencher vers la pop en en faisant avant tout une chanson d'amour.
S'il a conservé le refrain de Lee Hays, "Times are getting hard, boys, money's getting scarce. If things don't get no better, boys, gonna leave this place", les références aux difficultés du paysan (mauvaise récolte, refus de crédit bancaire : les temps ne changent pas...) et à sa volonté d'émigrer en Californie où l'herbe serait plus verte (rêve et utopie, en plus maintenant Schwarzenegger est gouverneur !) ont disparu pour laisser place au seul regret de ne pas avoir assez d'argent pour offrir des bijoux à sa belle en plus de son amour éternel.
Mais quand la pointe de lecture touche le sillon, c'est de l'émotion pure qui sort des haut-parleurs. Donegan chante d'une voix douce et siffle, il y a une guitare acoustique délicate et des ponctuations de basse et le tout est très fort et très prenant. Un grand moment.
Toutes les discographies indiquent que le (petit) tube de ce disque (n° 28 en Angleterre) est Lonesome traveller. Il n'y a pas d'indication explicite de face sur l'étiquette mais les numéros de matrice se finissant en A et B indiquent pourtant que Times are getting hard boys était censé être le titre principal. On comprend cependant bien pourquoi c'est Lonesome traveller qui est le plus passé en radio : c'est un titre agréable, plus quelconque, mais rapide et tout à fait dans le style skiffle.
Ces deux chansons figuraient en 1958 sur le deuxième album anglais, tout simplement intitulé Lonnie. Elles sont aussi sur de multiples compilations, et comme ces enregistrements on maintenant plus de cinquante ans il en existe de vraiment pas chères. Pour ma part, je viens de me commander le coffret 5 CD
The Lonnie Donegan collection, sorti chez Spectrum Audio en 2010. Plus de cent titres, même s'il n'y en a que quelques-uns du calibre de Times are getting hard boys, voilà qui me promet de bons moments en 2011 et qui devrait m'aider à garder le moral...