27 février 2021

WILSON PICKETT : Don't knock my love


Acquis par correspondance via Discogs en février 2021
Réf : 650.228 L -- Édité par Atlantic en France en 1971
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Don't knock my love pt. 1 -/- Don't knock my love pt. 2

En 2020, j'ai acheté deux beaux gros lots de galettes, très différents l'un de l'autre : une grosse pile de 78 tours, à Douvres, le 2 mars, dont j'ai déjà abondamment parlé, et une cinquantaine de CD à 50 centimes le 11 août, au Happy Cash près de chez moi, dont je n'ai encore rien dit, mais ça ne veut pas dire pour autant que les albums concernés manquent d'intérêt.
Ce jour-là, en plus de l'habituel rayon CD de la boutique, qui diminue régulièrement de taille, comme partout ailleurs, il y avait dans une allée un grand bac de CD, neufs et emballés pour la plupart, avec pour certains une étiquette FNAC. Je me suis fait confirmer que le prix était bien de 50 centimes, tellement ça ma paraissait étonnant, sachant qu'à un mètre de là des disques sans intérêt étaient à 6 €, et j'ai commencé ma razzia : 6 disques de Leonard Cohen, 3 de Dominique A, 2 chacun de Captain Beefheart, Chuck Berry et les Small Faces, plus Memphis Slim, Clifton Chenier, Rufus Thomas, Toots and the Maytals, Tom Waits, Gainsbourg, The Kinks, The Beach Boys,... J'en ai pris un peu pour les copains et conservé une petite quarantaine pour moi.

Dans le lot, il y avait une belle réédition avec plein de bonus de deux albums de Wilson Pickett, In Philadelphia et Don't knock my love. Sur le coup, je n'en attendais pas grand chose, me disant que ces albums étaient un peu tardifs. En fait, ils ne le sont pas trop (1970 et 1971), et sont tous les deux d'excellente tenue. Le premier est enregistré avec Gamble et Huff, les rois du Philadelphia Sound, et contient notamment les tubes Get me back on time, engine number nine et Don't let the green grass fool you. Pour le second, Wilson Pickett était de retour aux Muscle Schoals Sound Studios en Alabama, avec Brad Shapiro et Dave Crawdford à la production. Les deux succès de l'album sont la chanson-titre et une reprise de Free, Fire and water, mais ce qui a le plus attiré mon attention, ce sont les versions instrumentales de Don't knock my love, particulièrement celle parue en face B du single. C'est ce qui m'a incité à me procurer cette édition française du 45 tours, qu'on peut trouver à un prix raisonnable, même si elle fête son demi-siècle cette année.

Don't knock my love est une bonne chanson très funky d'à peine plus de deux minutes, avec ce qu'il faut de cuivres, de chœurs, et même une dose de guitare saturée dans cette bonne sauce.
La chanson a fait l'objet en 1973 d'une reprise de haut vol par Diana Ross et Marvin Gaye, sur l'album tout simplement appelé Diana & Marvin, mais aussi en face A d'un single.

Comme souvent, la Part 2 de Don't knock my love est une version instrumentale. Ce qui est beaucoup plus rare avec ce titre, c'est  que la Part 2 est issue, comme Tony Rounce le souligne dans les notes de la pochette de la réédition, d'une prise complètement différente de la version chantée. Et en plus, il existe deux versions complètement différentes de cette Part 2 !
La version du 45 tours de la Part 2 dure 3'14. Elle est marquée, comme le dit Tony Rounce, par "une symphonie de sons complètement psychédélique", avec un "paysage sonore de cordes qui sonnent comme si elles s'étaient échappées de la bande originale de Psychose" et, je rajouterais, plein de guitare électrique. C'est ma version préférée, celle qui m'a vraiment accroché l'oreille.
La version album de la Part 2 dure 4'02. C'est un mixage complètement différent, avec une pléthore d'effets psychédéliques et d'instruments rajoutés, dont des thérémines et des harpes. Peut-être que Wilson Pickett n'était même pas présent au moment de cet enregistrement instrumental, dû principalement à Brad Shapiro, le compositeur et producteur, au co-producteur et clavier Dave Crawford et aux musiciens de Muscle Schoals et de Detroit qui participaient à la session.

J'ai un petit paquet de disques de Wilson Pickett à la maison, dont une bonne partie sont excellents, mais cette face B a été une vraie surprise et une vraie découverte.


Wilson Pickett, Don't knock my love, en direct dans l'émission Soul train diffusée le 25 mars 1972.

20 février 2021

TINA THORNER : Fête sans village


Acquis par correspondance via Bandcamp en février 2021
Réf : [sans] -- Édité par Les Mills France en 2021 -- n° 31/80
Support : CD 12 cm
9 titres

Je reçois quasi-quotidiennement l'annonce des albums francophones que La Souterraine met en avant sur son site. Au moins neuf fois sur dix, je ne vais même pas y écouter un extrait, par manque de temps principalement, les journées n'ayant après tout que 24 heures. Mais de temps en temps j'y ai fait de belles découvertes, notamment Philémon Cimon en 2019.
Pour cet album, outre que j'étais au calme avec un peu de temps devant moi, c'est la pochette colorée et le titre qui m'ont incité à cliquer sur le lien de La Souterraine. Et ce n'est qu'une fois arrivé que j'ai fait attention au nom de l'artiste, Tina Thorner, parfait amalgame de la musique de danse, celle de Tina turner, et de l'accordéon, dont Yvette Horner porta longtemps le flambeau. Le seul problème avec ce nom c'est qu'il existe une copilote de rallyes suédoises nommée Tina Thörner qui squatte - pour l'instant - les premiers résultats des moteurs de recherche sur internet !
Le titre de l'album résonne particulièrement en ce moment. Alors que nos villages sont sans carnaval ni fête foraine ni même salle des fêtes, Tina Thorner nous propose de faire la fête à distance avec elle, armée de son accordéon, de ses synthés et boites à rythmes, d'un ordinateur avec des vidéos colorées. Tour de manège est une parfaite introduction à l'album, qui nous fait entrer dans la danse au son du micro du forain. Ne manque qu'un appel à attraper le pompon !
Musicalement, le concept de ce projet de Fanny Alizon est clair : de la Musette Maison (House Musette diraient les anglais), ou si vous préférez du Techno Accordéon, avec l'accordéon en instrument solo principal, accompagné par une rythmique techno, parfois réduite au tempo de la grosse caisse.
La "dance" et le musette n'avaient pas été aussi parfaitement associés depuis le fameux Play Yvette, un titre 100% hip-pop optimiste que je finirai peut-être par chroniquer ici, ou, pour remonter encore plus loin, depuis la face 100% disco de l'album 100% musette / 100% disco d'André Verchuren (face qui, soit dit en passant, contient une reprise de l'hymne disco (?) Ça plane pour moi !).
Comme, en plus de la version numérique, on nous proposait une édition CD limitée, avec plein de surprises, il ne m'a pas fallu deux minutes pour décider de la commander, et elle est effectivement arrivée très vite, avec son carnet de chant pour accompagner Tina, une fiche de remerciements, des bons de réduction et autres cartes à collectionner, le tout emballé avec un ruban adhésif rose pétant.
La seule facilité du disque, c'est Le petit vin blanc du Lidl ("Ah le petit vin blanc, qu'on achète au Lidl,qui nous bourre la gueule, pour un prix très décent !"). L'autre reprise de l'album, Musette, est bien plus intéressante car elle réussit parfaitement l'adaptation au projet Tina Thorner d'une chanson de 2016, La Fête, par le groupe suisse plutôt hardcore Violence et Honnêteté.
Le commerce est un fil rouge tout au long de l'album, de la grande distribution traditionnelle, avec l'excellent Bal de promos, au business très 21e siècle, Je vends des like. Il en est aussi question dans Tour de France. Je pensais qu'il allait y avoir une référence à la fameuse caravane, à laquelle Yvette Horner a souvent participé, mais non, il s'agit des aimants-départements à collectionner et, là encore, les paroles ont une résonance particulière en ce moment : "Avant je partais en vacances, maintenant je mange des cordon-bleus. Je voyageais dans la France, plus besoin de bouger c'est mieux."
Avant le début de J'ai perdu les clés, Tina annonce : "Bon, on s'est bien amusé, on a bien rigolé mais... j'ai des choses sérieuses à vous dire", mais en fait la chanson "sérieuse" et de lutte sociale, et l'une des grandes réussites de l'album, c'est Pommes noisettes !
Si les fêtes patronales ne sont pas annulées cette année, j'espère que Tina Thorner pourra faire un grand tour de France pour faire à nouveau danser le pays, dans le respect des barrières Vauban. En attendant, vous pouvez toujours déguster ci-dessous sa prestation en direct sur YouTube à la fin du confinement au printemps dernier.








Tina Thorner joue une bonne partie des titres de son album en direct sur YouTube le 9 mai 2020.

13 février 2021

SYNTHETIC CHA CHA BAND : Why can't we live together


Acquis chez Récup'R à Dizy le 8 janvier 2021
Réf : MT 4038 -- Édité par Motors en France en 1973
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Why can't we live together -/- Synthetic cha cha

Je l'ai déjà raconté à propos de The letter : Philippe R. a une petite marotte, celle de distribuer autour de lui quand il en trouve pour pas cher des exemplaires du tube des Box Tops ou de Why can't we live together de Timmy Thomas, parce qu'il les trouve excellents et qu'il prêche ainsi la bonne parole du rock and roll.
Pour Why can't we live together, dont il m'a offert le 45 tours sans pochette il y a quinze-vingt ans, il m'a souvent suggéré de le chroniquer ici. J'aurais pu le faire, surtout qu'entre temps je me suis procuré le disque original avec sa pochette, ainsi que sa réédition de 1979 chez Vogue, avec une version live musclée en face B. C'est un disque que j'aime bien, mais je n'ai pas grand chose à en dire. Sa grande qualité, c'est le minimalisme de son arrangement (l'enregistrement publié est à l'origine une démo), avec la boite à rythmes et l'orgue qui dominent. En le réécoutant aujourd'hui, je me dis que c 'est presque du proto-Young Marble Giants, avec un chanteur soul à la place d'Alison Statton.
Pas de chronique de Timmy Thomas, donc, mais celle-ci est évidemment tout spécialement dédiée à Philippe puisqu'il est question d'une version instrumentale de Why can't we live together.

Je reviens quand même assez souvent bredouille de mes visites régulières à la ressourcerie. Mais j'ai été gâté pour mon premier passage de l'année car j'en suis revenu avec une douzaine de 45 tours et huit CD, ce qui est rare en ces temps de disette sans brocantes ni bourse aux disques. Rien de génial mais quelques bonnes choses dans tout ça. En tout cas, pour les raisons exposées ci-avant, j'ai tout de suite su quand je l'ai vu que ce 45 tours aurait les honneurs du blog.

Le nom du groupe est déjà tout un poème. Associer le Synthétique et le Cha Cha Cha, ça évoque Señor Coconut avec presque trente ans d'avance !
Ce 45 tours est publié par Les Disques Motors de Francis Dreyfus, un label réputé pour avoir longtemps été celui de Jean-Michel Jarre. Comme je connais par ailleurs Synthetic man, la face B d'un 45 tours de Samuel Hobo, composée par Jarre et publiée la même année que ce disque, j'ai d'emblée pensé que j'avais affaire à l'un des coups discographiques dans lesquels Jarre a été impliqué, comme Zig Zag dance, une autre collaboration avec Hobo, également publiée par Motors et toujours en 1972.
Eh bien, je me trompais. Toutes les sources,dont Mémor'Hits, s'accordent pour dire que, derrière le pseudonyme de l'auteur de la face B, Lewis Hamster, on trouve Franz Auffray, le neveu d'Hugues, notamment réputé pour avoir produit en 1970 avec le guitariste Sam Choueka un album intitulé Original popcorn.

Tout le début de la version originale étant instrumental, cette reprise de Why can't we live together s'en approche d'assez près, même si le le synthé monophonique primitif risque de faire grincer les dents de Philippe. Mais c'est quand on arrive à la partie originellement chantée que ça va vraiment se gâter, car le synthé coin-couine allègrement ! C'est un calvaire presque comique pour les oreilles !
En face B, sans point de comparaison avec une chanson originale, le rythme de Cha Cha Cha et les synthés grave et aigu de Synthetic cha cha se marient mieux et l'ensemble est peut-être pas tout à fait funky mais en tout cas dansant. C'est ma face préférée du disque.

En tout cas, j'espère que Philippe ne pas regretter d'avoir vu un de ses souhaits se réaliser de cette façon !

07 février 2021

TALKING HEADS : Once in a lifetime


Acquis par correspondance via Ebay en février 2021
Réf : 2 C 008-64199 -- Édité par Sire en France en 1980
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Once in a lifetime -/- Listening wind

J'ai dû commencer à écouter Talking Heads début 1979. Le frère d'un copain m'a prêté son exemplaire de '77, j'ai été emballé, et ensuite j'ai acheté le 45 tours Psycho killer et l'album. Après, j'ai acheté le troisième album Fear of music en solde quelques temps après sa sortie, puis un peu plus tard le deuxième album More songs about buildings and food, d'occasion (l'un des premiers disques que j'ai acheté d'occasion, avec le Secondhand daylight de Magazine), sûrement en 1980-1981.
Pour une raison ou pour une autre, j'ai été déçu sur le moment par ces albums suivants. Ce n'est qu'avec Remain in light, le premier disque du groupe que j'ai acheté neuf au moment de sa sortie, que j'ai retrouvé un album de Talking Heads qui m'a enthousiasmé. Sauf que le groupe avait tellement évolué en trois ans que c'était difficile à croire que ces deux disques avaient été produits par les mêmes personnes. 77 et Remain in light demeurent mes deux disques préférés de Talking Heads, et je suis bien en peine d'en préférer l'un à l'autre, même si le premier conserve toujours l'avantage de la découverte et de la fraîcheur (le troisième dans ma liste est Little creatures, qui s'inscrit de façon plus évidente dans la lignée de 77).

Avec Crosseyed and painless, Houses in motion et Born under punches (The heat goes on), Once in a lifetime est l'une des grandes réussites de l'album. C'est le premier titre qui en a été extrait en 45 tours. Une ligne de basse courte mais énorme, des rythmes et percussions enchevêtrés, des nappes de synthé et une multitude de trouvailles vocales, en partie inspirées par les prédicateurs évangélistes, Once in a lifetime, ce n'est plus  simplement de la New Wave, ce n'est pas de la musique africaine même si ça s'en inspire en partie, c'est quelque chose d'entièrement nouveau, un mélange entraînant et unique.
La chanson est déjà parfaite en elle-même. Portée par la toute nouvelle chaîne MTV puis dans les années suivantes par les robinets à clips bien de chez nous, sa vidéo, avec la chorégraphie si particulière de David Byrne, a multiplié l'impact de la chanson et a contribué à en faire un classique certifié. Même Kermit la Grenouille en a fait une parodie !
Deux versions en public de Once in a lifetime ont été publiées en disque, l'une de 1981 sur la réédition CD de The name of this band is Talking Heads, l'autre de 1983 sur la bande originale de Stop making sense, que j'ai chroniquée ici en 2013.
Vous trouverez ci-dessous deux versions filmées de la tournée Remain in light de 1980, l'une en noir et blanc à Passaic et l'autre en couleurs lors de l'ultime de la tournée à Dortmund. Cette dernière est ma préférée des quatre versions en public (je trouve la version studio de toute façon supérieure), mais Tina Weymouth, privée de sa basse, a l'air contrarié.

La pochette de ce 45 tours ne reprend pas tout à fait celle de l'album. C'est en fait l'illustration de la pochette intérieure qui a été choisie, que je préfère à celle du recto. Le 45 tours anglais a lui eu droit à une pochette complètement originale, ce qui est un plus (même si je trouve cette pochette assez moche), mais la face B, elle aussi extraite de l'album, est Seen and not seen, l'un des titres que j'aime le moins sur Remain in light.
Pour cette édition française, la maison de disques a eu le bon goût de sélectionner Listening wind pour la face B. Pour le coup, c'est l'une des chansons de l'album que j'ai le plus écoutées, ne serait-ce que parce que je l'avais sélectionnée pour l'une de mes premières compilations cassette.
Plus lente, et peut-être encore plus marquée par la musique africaine, c'est franchement encore une grande réussite. Les paroles figuraient dans un insert glissé dans l'album, mais je n'y avais pas trop porté attention à l'époque. Il y est visiblement question d'un homme qui prépare des attentats contre une occupation américaine.
En 2010, sur son album de reprises Scratch my back, Peter Gabriel a fait une reprise pleine de cordes de Listening wind. En 2018, Angelique Kidjo n'a pas fait dans le détail puisque qu'elle a repris Remain in light dans son intégralité !




Talking Heads, Once in a lifetime en concert au Capitol Theatre de Passaic, le 4 novembre 1980.


Talking Heads, Once in a lifetime en concert à Dortmund pour l'émission RockPop in Concert, le 20 décembre 1980.