29 février 2020

SUPER FURRY ANIMALS : If you don't want me to destroy you


Acquis par correspondance via Discogs en octobre 2015
Réf : CRESCD 243P -- Édité par Creation en Angleterre en 1996 -- Promo copy only
Support : CD 12 cm
Titres : If you don't want me to destroy you -- The man don't give a fuck -- (Nid) Hon yw'r gan sy'n myno I achub yr iaith

Tiens, je me demande bien pourquoi je n'ai pas pris la peine de chroniquer ce disque à temps pour l'inclure dans Vente interdite, le livre sur mes disques hors commerce. D'autant qu'il remplit une bonne partie de mes critères pour en faire un disque vraiment intéressant : il n'a pas d'équivalent exact dans le commerce et sa pochette est inédite.
J'ai acheté ce disque en même temps que le Bad cover version de Pulp, que je recherchais. Quand je décide d'acheter un disque comme ça en ligne, j'ai pris l'habitude de fouiner systématiquement dans les rayons virtuels du vendeur pour voir s'il n'y en a  pas d'autres à bon prix qui m'intéressent. Ça permet de les acheter en économisant sur le port.
C'est comme ça donc que je suis tombé sur ce CD promo de Super Furry Animals, qui m'intéressait surtout parce qu'il contient la chanson The man don't give a fuck, que j'essayais aussi de me procurer depuis un moment. Je ne possède pas le single où cette chanson est en face A, mais en fait c'est presque mieux puisque ce CD hors commerce est en fait le disque sur lequel cette chanson a été diffusée pour la toute première fois.
Mais reprenons au début. Creation a signé Super Furry Animals et a sorti leur premier album Fuzzy logic en 1996. Avec un comportement digne d'une major (mais de toute façon, à cette époque, la moitié des actions du label avait été vendue à Sony...), rien moins que quatre chansons de l'album ont été éditées en single (sans compter en amont un maxi uniquement promo pour Frisbee). Il y a d'abord eu Hometown unicorn, puis God! Show me magic et une version réenregistrée de Something for the weekend.
Pour le quatrième single, le choix s'est porté sur If you don't want me to destroy you. Le fait que la vidéo fasse référence à celle de Strawberry Fields Forever des Beatles est assez révélateur des influences du groupe. C'est une chanson au tempo moyen, pas mauvaise mais avec une refrain peu convaincant. Pour moi, ça ne décolle vraiment que dans la dernière minute, quand ça s'accélère un peu.
Au moment de sortir ce disque, le groupe avait écrit de nouvelles chansons, dont The man don't give a fuck qui leur plaisait beaucoup et qu'ils souhaitaient mettre en première face B du disque, comme c'est le cas ici sur le CD promo diffusé quelques semaines avant la sortie. Sauf que le refrain est construit sur un échantillon de Show biz kids, un titre de Steely Dan paru en 1973 sur leur album Countdown to ecstasy. Et, apparemment, Donald Fagen s'est fait tirer l'oreille pour autoriser l'utilisation de sa musique pour ce titre. Tant et si bien que le single If you don't want me to destroy you a fini par sortir avec une autre face B, Guacamole, et pour faire bonne mesure une pochette différente de celle du CD promo :


Le single 243 de Creation, dans sa version du commerce, avec une photo différente du blindé sonique, incluant les membres du groupe, et Guacamole en face B.

Le troisième titre du maxi est une (bonne) chanson en gallois, (Nid) Hon yw'r gan sy'n myno I achub yr iaith. Elle doit être pleine d'humour, puisque son titre se traduit plus ou moins par (Non) Cette chanson va sauver la langue ! Par la suite, elle a été incluse en bonus sur les rééditions de Mwng, l'album intégralement en gallois du groupe, sorti initialement en 2000.
Après la sortie d'If you don't want me to destroy you, les négociations ont continué avec Steely Dan, et les américains ont fini par accepter l'utilisation de l'échantillon sonore, moyennant quand même 95% des droits sur le titre ! Les gars de Super Furry Animals s'en foutaient car ils voulaient vraiment sortir cette chanson qu'ils trouvaient réussie et ils pensaient de toute façon que le titre avait zéro chance de passer en radio à cause de la présence du fameux juron. Mais les renards de Creation, toujours à l'affût d'une bonne provoc, ont persuadé le groupe que ça valait le coup de le sortir en face A de single, ce qui fut fait en décembre 1996, en édition limitée, avec une pochette très réussie, en insistant au niveau promo sur le fait que la chanson contenait au moins 50 fois le mot "Fuck". Et ça a fonctionné puisque le titre a est devenu culte et a fait beaucoup pour la réputation du groupe.


Le single 249 de Creation, avec The man don't give a fuck en face A et une excellente photo de pochette, à classer à côté de celle de Kung Fu par un autre groupe gallois, Ash.




Super Furry Animals, If you don't want me to destroy you, en direct dans l'émission Later with Jools Holland, le 1er juin 1996.

23 février 2020

PASCAL COMELADE : Les mémoires d'un ventriloque


Acquis par correspondance via Bandcamp en février 2020
Réf : staubgold 153 / cougouyou 12 -- Édité par Staubgold / Cougouyou Music en France en 2020 -- n° 440/500
Support : 2 x 33 tours 25 cm + 16 x MP3
16 titres

A l'automne 2019, je me suis presque étonné : à part une réédition, je n'avais rien ajouté en 2019 à la discographie stéréeauphonique post-diluvienne de Pascal Comelade que je tente tant bien que mal de tenir à jour, ce qui n'est pas simple car le bougre est un spécialiste des éditions limitées les plus tarabiscotées.
En fait, au moment même où je me posais cette question, il venait de sortir un tout nouvel album, Deviationist muzak, enregistré entre 2017 et 2019, mais comme c'est le label espagnol Discmedi qui l'a publié, quasiment personne ne s'en est fait l'écho par chez nous et il a fallu que l'ami Papy Bam de Bam Balam en parle pour que j'apprenne son existence. Je me suis procuré le CD 15 titres, et ce n'est que plus tard que j'ai appris que le double 33 tours compte 8 titres en plus, ce qui n'est pas cool pour ceux qui, comme moi, apprécient le CD, seul format actuel qui est à la fois physique et numérique.
Et depuis le début de 2020, c'est presque une avalanche, avec trois publications importantes :
  • Lo-rap-muth, un 45 tours EP qui se contente de reprendre le titre d'un morceau de Deviationist muzak sans l'inclure, mais qui s'ouvre avec un autre morceau de l'album, Roll over Fuzmanchu, et contient trois autres titres rares ou inédits. Le disque est dédié au batteur Didier Banon (ex-OTH et pilier du Bel Canto Orquestra), qui est mort l'an dernier à 60 ans.
  •  Le livre Le rien illustré, qui reproduit 150 oeuvres graphiques de Pascal Comelade (pas seulement inspirées de pochettes de 45 tours, comme celles qu'on trouvait dans l'Avis aux inventeurs d'épaves) et qui contient le CD Sub-versions de salon vol. 2, qui regroupe 25 reprises.
  • Et entre les deux était sorti le disque qui nous intéresse aujourd'hui, chez les labels perpignanais associés Staubgold et Cougouyou Music, un double 33 tours 25 cm, compilation de collaborations chantées de Pascal Comelade.
Cette compilation est vraiment bienvenue car, trop souvent, on a tendance à associer Pascal Comelade uniquement à la musique instrumentale. Pourtant, sans même parler de Fall of Saigon, dès les débuts ses productions ont contenu des pistes avec voix. Le titre le plus ancien ici, une reprise de We dit it again de Soft Machine avec Sissi, date du EP Ready-made de 1981.
Simplement, il ne faut pas compter sur Pascal Comelade pour enregistrer sa voix, alors il fait appel à des amis et des proches, de Catalogne au Nord et au Sud des Pyrénées, et au fil du temps de plus loin aussi, plus au Nord en France ou en Italie, en Allemagne, au Royaume-Uni.
Dans le coffret Rocanrolorama de 2016, la section chantée s'intitulait Les mémoires du chanteur masqué. Cette fois, je trouve
le titre Les mémoires d'un ventriloque encore mieux choisi, puisqu'il exprime bien le fait que Pascal Comelade se sert d'autres personnes pour mettre de la voix dans ses disques. Mais après tout, puisqu'il fait chanter tous ces gens en restant lui-même muet, le disque aurait aussi pu s'appeler Les confessions d'un maître-chanteur aphone ! (J'y ai pensé avant de me rendre compte que, en 1995, Pascal a déjà inclus une Chanson triste pour ventriloque aphone sur son album El cabaret galactic).
La seule chanson proposée ici en deux versions est (Brand new) Cadillac de Vince Taylor, et les deux m'évoquent des souvenirs.
Le 23 mai 1982, lors du Festival des Musiques de Traverses de Reims, Fall of Saigon, avec Pascal Comelade, a ouvert l'après-midi de manière impromptue (le programme indiquait qu'ils feraient une animation dans le hall), avant de laisser la place à Lol Coxhill, qui était l'invité d'honneur permanent du festival, comme Léo Malet l'était à la même époque et dans le même lieu pour le Festival International du Roman et du Film Policier. J'ai noté dans un carnet que le concert incluait des "délires avec un trompettiste (solo de tibia)", mais le seul souvenir vif que j'ai conservé, c'est celui d'un gars, qui devait être Jac Berrocal, arpentant la grande scène de la Maison de la Culture en frappant (avec le tibia ?) sur une pelle ramasse-poussières en métal ! Mais je ne crois pas que Pascal et Jac se soient produits ensemble ce jour-là. Pour ce qui est deVince Taylor, Berrocal  en connaît un rayon puisqu'ils ont collaboré sur Rock 'n' roll station en 1976 sur l'album Parallèles.
L'autre version de Cadillac est différente à la fois dans le style vocal et dans l'arrangement musical. Elle est enregistrée avec un autre trompettiste, Roy Paci. Je l'avais vu en concert avec Pascal Comelade le 2 février 2004 à Nantes, ce qui m'avait inspiré  le texte Pascal Comelade et le trompettiste en postface de mon livre Tu m'as trompette mon amour.
Pour ce qui est de Ma gueule, la  reprise de Johnny H. avec Miossec publiée à l'origine sur la compilation Comme un seul homme, j'ai surtout un regret, celui d'être reparti directement après les prestations séparées de Pascal et Christophe à Troyes dans le cadre du festival Nuits de Champagne le 29 novembre 1997. Il faut dire que je travaillais le lendemain et qu'il y avait de la route. Je ne me souviens même plus si, pour l'un ou l'autre des deux concerts, ils se sont retrouvés sur scène pour jouer Ma gueule, qu'ils avaient enregistrée en septembre. Ce qui est sûr, par contre, suivant plusieurs témoignages, c'est que les deux se sont retrouvés ensuite dans un bar de la ville, et qu'ils y ont joué jusque tard dans la nuit.
Je n'en suis pas certain, mais j'ai l'impression qu'on trouve ici trois titres précédemment inédits : Cares d'arguiles avec Pau Riba, Ja som la foca, une reprise d'I am the walrus avec Enric Casasses (je pense que Pascal est beaucoup plus Stones que Beatles, je me demande même si ce n'est pas la première fois qu'il enregistre un de leurs titres. De même, c'est rare de le voir reprendre du Leonard Cohen, comme ici pour Suzanne avec Albert Pla) et l'excellent original Larme secrète, co-écrit avec Marc Hurtado. C'est un nom qui m'a aussitôt fait penser à Alan Vega, et effectivement, les deux ont sorti ensemble l'album Sniper en 2010. Ce que je ne savais pas, c'est que Marc Hurtado est français et qu'il a été membre du groupe Etant Donnés.
Parmi les autres grands moments du disque, je citerais un original, Green eyes avec P.J. Harvey, et des reprises, comme The sad skinhead, version du titre de l'album Faust IV avec Jean-Hervé Péron de Faust, We dit it again, Satisfaccio avec Sergi Lopez, extrait de Compassió pel dimoni, et September song avec Robert Wyatt. Là, l'émotion va crescendo. La première partie de la chanson est déjà parfaite, puis d'un seul coup, Wyatt ajoute une deuxième voix, plus grave, et quand on se dit que la chanson va doucement se terminer, il nous sort sa trompette ! Superbe.
Un autre grand moment d'émotion, c'est En maison, enregistré avec Alex Barbier, qui lui aussi est mort en 2019. C'est un extrait du mini-album Alex Barbier chante..., qui témoigne des petits récitals de chansons réalistes donnés par les deux compères pendant dix ans à l'occasion du festival de bande dessinée de Fillols. Le CD original de 2006, tiré à 350 exemplaires dont 100 hors-commerce, est épuisé depuis longtemps, mais Vert-Pituitte l'a réédité l'an dernier, sous la forme d'un 45 tours 25 cm, en édition limitée également, mais pas encore épuisée à ce jour.



Pascal Comelade a essaimé plein d'autres "chansons pop" au fil des années. Il y a largement de quoi faire un deuxième tome de ces mémoires d'un ventriloque. Sans chercher à être complet, il manque ici des collaborations avec l'ami Général Alcazar, bien sûr, mais aussi Gérard Jacquet, Cathy Claret, Les Limiñanas, et encore Arno, Camille, Dani, Ricardo Solfa, Lluis Llach, Ivette Nadal, Raph Dumas et Lou, Miquel Gil, Vinicio Capossela,...

15 février 2020

THE THE : Uncertain smile


Acquis par correspondance via Discogs en février 2020
Réf : 0-29878 -- Édité par Sire / Some Bizarre aux États-Unis en 1982
Support : 45 tours 30 cm
Titres : Uncertain smile -/- Three orange kisses from Kazan -- Waitin' for the upturn

Récemment, quelqu'un a fait tourner la vidéo d'un passage de Matt Johnson dans une émission de télé anglaise en 1983. On l'y voit chanter Uncertain smile par-dessus une bande musicale. Je n'avais jamais vu ces images, ça m'a plu et ça m'a donné l'occasion de me replonger dans mes disques de The The.
J'ai fait le point notamment sur l'imparable trilogie de singles que The The a publiée en 1982-1983 : Uncertain smile, Perfect et This is the day. A l'époque de leur sortie, je n'ai acheté aucun de ces disques, d'abord parce que je n'ai pas eu l'occasion de les voir en rayon et ensuite parce que je n'avais pas d'argent à investir dans ces disques, sachant que je me suis assez vite procuré la cassette européenne de Soul mining, qui contient ces trois titres.
Sauf que seul This is the day est vraiment extrait de Soul mining. Perfect a souvent été ajouté en bonus de l'album, sur la cassette, donc, sur l'édition originale en 33 tours en Amérique du Nord et aux antipodes, puis sur les versions CD pendant les années 1980-1990, mais il s'agissait d'une deuxième version, différente de celle du single.
Quant à Uncertain smile, la version sur l'album est aussi une deuxième version, très bien, dont la seconde partie est marquée par un solo de piano impressionnant de Jools Holland.
Ces dernières années, j'avais réussi à me procurer les singles de Perfect et This is the day, mais il me manquait justement Uncertain smile. Je me suis mis en quête et j'ai été bien content de trouver un exemplaire de l'édition américaine du maxi mise en vente à un prix raisonnable par un vendeur français.
Pour moi, ce single Uncertain smile est le premier grand disque de The The. Avant ça, il y avait eu un morceau d'eux sur la compilation Some Bizarre album, que j'avais achetée à sa sortie. Pas mal, mais sans plus. Plus tard, j'avais emprunté et copié l'album de 1981 Burning blue soul paru à l'origine sous le nom de Matt Johnson. J'y avais entendu quelques trucs qui m'avaient plu, mais là encore rien à voir avec l'emballement causé par Soul mining.
Il y a eu aussi deux 45 tours parus en 1980 et 1981, Controversial subject et Cold spell ahead, que je ne connaissais pas. Ce n'est que cette semaine en préparant ma chronique que j'ai appris que Cold spell ahead est en fait une proto-version d'Uncertain smile ! Les deux premières minutes sont vraiment une version primitive et synthétique d'Uncertain smile, après ça part dans une autre direction et c'est moins intéressant.
L'ami Philippe Dumez, dans une chronique (lui aussi) de la cassette de Soul mining, pointe bien l'un des attraits des chansons de Matt Johnson pour les lycéens et étudiants en pleine phase de crise existentielle : la lisibilité de ses paroles, qui claquent et qui portent, presque comme des slogans parfois. "C'est le jour où ta vie va sûrement changer, C'est le jour où tout va se mettre en place" (This is the day) ou "Comment est-ce que quelqu'un pourrait me connaître quand je ne me connais pas moi-même" (Giant).
Pour Uncertain smile, on est plutôt dans le registre de la chanson d'amour humide. Je trouve le deuxième couplet très réussi :
"A howling wind blows the litter as the rain flows
And streetlamps pour orange colored shapes through your windows
A broken soul stares from a pair of watering eyes
Uncertain emotions force an uncertain smile"
Je n'ai pas cherché du tout à acheter ce single en petit 45 tours. En effet, c'est rare (il y a le Close to me de The Cure par exemple), mais la version maxi d'Uncertain smile, tout comme celle de Perfect qui suivra juste après, est très longue (10 minutes) mais très réussie et indispensable. Matt Johnson joue de tous les instruments, sauf la flûte et le saxophone, qui sont assurés par le musicien de session Crispin Cioe.
L'enregistrement du disque s'est fait à New York avec à la production Mike Thorne, qui avait déjà travaillé avec Wire et aussi avec Soft Cell / Some Bizarre pour la reprise de Tainted love.
Stevo, le fondateur de Some Bizarre et manager de The The, avait fait payer cette session par London Records, avec la promesse de la signature d'un contrat à venir. Au retour, il a préféré négocier avec d'autres labels. The The a finalement signé chez Epic, qui a sorti ses disques en Angleterre dès le single suivant. Pour les États-Unis, peut-être qu'un deal initial a été respecté, mais en tout cas c'est le seul disque de The The qui a été sorti par Sire. Epic n'est entré dans la danse que pour le disque suivant, Perfect, également produit par Mike Thorne. Il devait enchaîner sur l'album, mais a renoncé suite à ces bisbilles avec London.
Les deux titres en face B du maxi font partie du projet The pornography of despair de Matt Johnson. Un album initialement prévu pour sortir entre Burning blue soul et Soul mining. Il s'y est attaqué plusieurs fois mais n'a jamais vraiment bouclé ce projet. Par contre, plusieurs chansons ont été essaimées au fil du temps sur des faces B de single, et aussi (encore et toujours) dans les bonus de la cassette de Soul mining. Comme pour Smile ou d'autres albums perdus, certains ont tenté d'en proposer une possible version, mais rien ne dit qu'une version complètement enregistrée existe et seul Matt Johnson doit savoir ce qu'elle pourrait bien contenir. 
Three orange kisses from Kazan semble bien nous emmener dans la capitale du Tatarstan en Russie, en tout cas, le tout début sonne assez oriental. L'instrumentation est très dense, la voix trafiquée. Le tout sonne comme de l'enregistrement maison, mais c'est quand même très intéressant. J'aime un peu moins Waitin' for the upturn, mais c'est quand même aussi une face B d'une très bonne tenue.
Une biographie de Matt Johnson a été publiée en 2018. En 2019, The The a même tourné pour fêter les 40 ans depuis sa formation. Pour l'heure, aucun autre projet n'est annoncé sur le site du groupe.


Matt Johnson chante sur la bande musicale de la version single d'Uncertain smile, dans l'émission Oxford Road Show, en 1983.


The The en duo mime sur la version album d'Uncertain smile, celle avec Jools Holland au piano, dans l'émission TopPop, le 10 octobre 1983.

02 février 2020

THE EAGLES LUPOPO : Nyama kilo moja 4.00


Acquis sur le vide-grenier de Magenta le 13 octobre 2019
Réf : 2C 006-81.152 M -- Édité par Pathé Marconi en France en 1972
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Nyama kilo moja 4.00 -/- Common man ?

Décidément, la brocante de Magenta a vraiment perdu une grande partie de son charme depuis qu'elle se tient au stade plutôt qu'au centre-ville. Il doit aussi y avoir moins de stands, et cette année j'ai bien cru que j'allais en repartir bredouille. Mais à la fin de mon tour j'ai fini par trouver deux 45 tours à 1 € pièce, un disque sympathique mais sans plus du Groupe Creolita, et ce 45 tours de The Eagles Lupopo. Un an plus tôt à un jour près, j'avais acheté à quelques mètres de là un autre 45 tours africain publié par le même label, celui de l'Orchestre Négro-Succès.
Comme souvent, la maison de disques française a tendance à maltraiter ses artistes d'Afrique. Pour la pochette, on ne s'embête pas : à part les titres, c'est strictement la même que celle d'un autre 45 tours sorti quasi en même temps avec la référence catalogue juste avant. Espérons juste que c'est bien une photo du bon groupe, ce qui n'est absolument pas garanti ! Et c'est toujours mieux que le label African avec ses photos interchangeables de bijoux, de coquillages ou de noirs folkloriques.
Plus embêtant, il y a visiblement un problème avec le titre principal : quand j'ai lu "Nyama kilo moja 4.00", je me suis dit "Non, c'est pas possible, ils n'ont pas fait cette connerie !". J'ai alors cherché à le traduire et j'ai appris que, en Swahili, "Nyama kilo moja" signifie "Un kilo de viande". J'ai espéré alors que le "4.00" était le prix d'un kilo de barbaque, mais il faut bien se rendre à l'évidence : la chanson dure pile quatre minutes et, dans toutes les éditions qu'on trouve, elle s'intitule simplement Nyama kilo moja, parfois suivie de sa durée, orthographiée 4.00. Un imbécile chez Pathé n'a juste pas été capable de faire la différence entre le titre de sa chanson et sa durée !
Je ne connaissais pas du tout The Eagles Lupopo. C'est un groupe formé au début des années 1970 par Gabriel Omolo, Nashil Pichen, Peter Tsotsi et Daudi Kabaka, quatre membres de The Equator Sound Band, groupe important des années 1960, associé au studio Equator Sound de Nairobi au Kenya et au label Equator.
Le nom du nouvel ochestre a souvent varié : on les retrouve aussi en tant que The African Eagles, The T.B. Eagles ou The Eagles Band.
Daudi Kabaka en particulier a un parcours intéressant. Dans les années 1960, il a popularisé le "twist africain", dérivé du Benga (regardez pour vous faire une idée ces excellents Tanganyka twist et Mlofa mmoja). Fait rare, un de ses titres de 1966, Helule helule, a été repris en 1968 par le groupe anglais The Tremeloes, qui en a fait un de ses succès en le sortant en 45 tours. Parmi les nombreuses autres versions, il y a celle en français d'Henri Salvador, sous le titre Héloulé en face A de 45 tours en 1968.
La face B n'étant pas la même, je ne suis pas sûr que la publication originale de ce 45 tours en Afrique est celle créditée à Daudi Kakaba & The Eagles sur leur propre label, African Eagles Recording Limited. En tout cas, cette face A a été incluse en ouverture de la compilation Golden Eagles, créditée à African Eagles. L'album était distribué par EMI, c'est sans doute par là que la connexion s'est faite pour une édition française chez Pathé.
Je ne suis pas sûr que Nyama kilo moja s'inscrit dans le style Twist de Daudi Kabaka, mais en tout cas c'est une excellente chanson sur un tempo moyen. J'ai l'impression qu'il y a très peu ou pas de percussions. L'accompagnement principal, avec guitare rythmique, basse et orgue est mixé assez en arrière. Ce sont donc les voix et la guitare électrique qui se retrouvent au premier plan, et l'ensemble est superbe, avec notamment un jeu de guitare très particulier.
En 1976, Daudi Kabaka & the T.B. Eagles ont enregistré un album intitulé Helule helule (édité en France par Playa Sound en tant que Volume 3 de leur collection Kenyafrica !). On y trouve une autre version de Nyama kilo moja, avec des percussions qu'on entend clairement cette fois, et aussi des cuivres, absents de la première version. Le jeu de guitare de Daudi Kabaka reste parfaitement identifiable.
Dans une veine très similaire, la face B Common man ? est également très bien.
Comme souvent avec mes 45 tours africains, j'ai bien l'impression que les deux faces de mon 45 tours n'ont jamais été rééditées en CD.
En tout cas, je veux bien trouver un 45 tours de ce calibre tous les ans à Magenta !

A écouter : The Eagles Lupopo : Nyama kilo moja 4.00.