29 décembre 2024

SIMON & GARFUNKEL : Mrs Robinson


Acquis d'occasion en Angleterre vers les années 2000
Réf : EP 6400 -- Édité par CBS en Angleterre en 1968
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Mrs Robinson -- April come she will -/- Scarborough Fair / Canticle -- The sound of silence

J'ai lu récemment plusieurs articles sur Simon & Garfunkel et je me suis fait la réflexion qu'ils avaient créé un bon nombre d'excellentes chansons. Comme je fredonnais Mrs Robinson (il suffit d'y penser pour commencer à la fredonner), j'ai repensé à ce bel EP anglais, qui contient justement deux de leurs classiques.
Ce n'est pas avec ces chansons que j'ai connu le duo : dans les années 1970, ma tante et ma cousine avaient l'album Bridge over troubled water, que j'ai vu ensuite chez pas mal de copains, et c'est surtout la chanson-titre, Cecilia et El condor pasa qui représentaient le groupe pour moi.

Mrs Robinson
a été numéro 1 des ventes aux États-Unis et s'est très bien vendu en Angleterre aussi. Peu de temps auparavant, la bande originale du film The Graduate, qui contenait plusieurs chansons de S & G, avait également connu un très grand succès. Les deux disques sont sur le même label et ce qui est étonnant c'est qu'il n'y a sur la pochette et le disque du EP absolument aucune référence à The graduate, alors que le point commun entre ces quatre chansons c'est qu'on en trouve une version  dans la bande originale du film !
Pour ma part, ce qui m'a particulièrement intéressé c'est la gestation compliquée des deux plus grands succès de ce 45 tours.

Intéressons-nous d'abord à la chanson la plus ancienne ici, la magistrale The sound of silence (j'en avais touché deux mots ici en chroniquant une compilation de 1966). C'est après l'avoir jouée en audition  qu'il avaient signé chez Columbia. La version originale, avec un "s" à la fin de Sounds, figure sur leur premier album, Wednesday morning, 3 AM, produit par Tom Wilson et sorti en octobre 1964. L'album a fait un tel four que le duo s'est, de fait, séparé. Paul Simon est parti en Europe, où il s'est impliqué dans la scène folk anglaise. En août 1965, il a publié un album, The Paul Simon songbook, où l'on trouve une version solo de cette chanson, tout aussi acoustique,.
Ce que Paul Simon ne savait pas, c'est que, au cours des mois précédents, certaines stations de radio diffusaient The sounds of silence. C'est venu aux oreilles de Tom Wilson, qui  a pris sur lui de muscler la chanson pour lui donner un plus grand potentiel commercial. Le 15 juin 1965, à l'issue de l'une des sessions d'enregistrement de Like a rolling stone (ça ne s'invente pas...), il a demandé au guitariste et au batteur de rester et, avec deux autres musiciens, ils ont "électrifié" la version originale. Cette version "remixée" est sortie en single en septembre 1965 et elle a grimpé tout en haut des classements de vente, sans que Simon et Garfunkel aient été informés de ce ré-enregistrement ni de cette sortie !
Il n'empêche, c'est à cette version qu'ils doivent la suite de leur parcours en duo. Réunis en urgence, ils ont enregistré un album sorti en janvier 1966, Sounds of silence, où l'on retrouve la version du tube, dans le plus pur style folk-rock à la Byrds.

La genèse de la chanson Mrs Robinson est à peine moins compliquée.
En 1967, Paul Simon s'était engagé à écrire des titres pour la bande originale du film The graduate (Le lauréat). Le réalisateur a d'abord refusé deux propositions, avant de sélectionner une toute nouvelle composition pas encore terminée, à propos de Mrs Roosevelt et du joueur de baseball Joe DiMaggio. Il a simplement demandé que le nom soit changé pour coller avec celui du personnage du film, même si c'est le seul lien entre les deux. On trouve donc sur la bande originale du film deux ébauches de Mrs Robinson d'une minute dix chacune. Pour la première, outre la guitare acoustique, Simon & Garfunkel ne font que des "Dee dee dee" et des "Doo doo doo". Pour la deuxième, il y a un refrain chanté.
La bande originale du film a été un très grand succès. Simon & Garfunkel ont de leur côté complété et enregistré la version complète de Mrs Robinson, publiée également avec beaucoup de succès en avril 1968, en 45 tours et sur l'album Bookends.

L'histoire est un peu plus simple pour les deux autres chansons.
Paul Simon a écrit April come she will quand il vivait à Londres et il l'a publiée pour la première fois sur The Paul Simon songbook. Elle a été ré-enregistrée quelques mois plus tard pour l'album Sounds of silence. Je n'ai pas l'impression qu'on entend beaucoup Art Garfunkel sur cette version, qui est incluse dans la BO de The graduate, et aussi en face B du 45 tours Scarborough fair.

Cette dernière chanson est à l'origine d'une ballade traditionnelle anglaise. Pour leur version Scarborough fair / Canticle, parue en 1966 sur l'album Paisley, sage, rosemary and thyme, des paroles de la chanson de The Paul Simon songbook The side of a hill ont été intercalées. C'est en février 1968, à la suite du succès de The graduate, que la chanson est sortie en 45 tours.

Simon et Garfunkel se sont séparés en pleine gloire en 1970, après Bridge over troubled water. Ils se sont retrouvés plusieurs fois, notamment pour un immense concert à New York le 19 septembre 1981. On trouve des versions de quatre chansons de cet EP sur l'album qui le documente, The concert in Central Park.

Paul Simon et Art Garfunkel ont tous les deux été bien actifs en 2024 avec un nouvel album pour chacun, respectivement Seven psalms et Father and son, qui porte bien son titre (repris de Cat Stevens), puisqu'il est enregistré en duo avec le fiston Art Jr.


Simon & Garfunkel, The sound of silence, en direct à la télévision en 1965.


Simon & Garfunkel, The sound of silence, en direct au pied des remparts de Provins. Diffusé dans l'émission Music-hall de France le 2 juillet 1966.


Simon & Garfunkel, Mrs Robinson, à la télévision en 1968.


Simon & Garfunkel avec Andy Williams, Scarborough fair / Canticle, en direct à la télévision le 28 avril 1968.


Simon & Garfunkel, Scarborough fair, en direct à la télévision en 1968.


L'extrait du film The graduate où l'on entend April come she will de Simon & Garfunkel.

22 décembre 2024

THE ASSEMBLY : Never never


Acquis neuf probablement à Châlons-sur-Marne en 1983 ou 1984
Réf : 101848 -- Édité par Mute en France en 1983
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Never never -/- Stop / start

Vince Clarke était un vrai feu follet dans les premiers temps de son parcours musical : deux ans avec Depeche Mode (qui ont produit le premier album et trois singles, dont New life et Just can't get enough), puis moins de deux ans avec Yazoo, sachant qu'il aurait voulu arrêter après le premier album, qui a produit deux grands succès avec Only you et Don't go, mais là il s'est laissé convaincre d'en faire un deuxième.
Depuis 1985, Clarke est beaucoup plus stable et se consacre principalement au groupe Erasure, avec le chanteur Andy Bell. Mais en 1983, juste après la séparation de Yazoo, il s'était lancé dans The Assembly, en collaboration avec Eric C. Radcliffe.
Le nom de Radcliffe, les fans du label Mute le connaissent bien, puisque la plupart des premiers disques du label ont été fabriqués dans son Blackwing Studio, et il a enregistré, produit voire joué sur des disques de Fad Gadget, Silicon Teens, mais aussi Missing Scientists, Patrik Fitzgerald et Robert Rental.

Le projet de The Assembly ressemblait fort à celui lancé peu de temps auparavant par les ex-Human League Martyn Ware et Ian Craig Marsh avec leur British Electric Foundation : écrire et produire la musique et faire appel à des chanteurs et musiciens différents pour chacun des disques.
Celui-ci est le premier, comme le confirme la pochette, avec le bas de la patte du "A" d'Assembly, qui se transforme en "1" gris, sur lequel est mentionné "Uno". Mais il n'y a jamais eu de "Dos" ni de "Due" : les questions de contrat/d'exclusivité/de rivalités ont rendu les choses difficiles et The Assembly s'est auto-dissoute fin 1984, sa chaîne de production n'ayant produit qu'un unique disque, cet excellent Never never.

J'étais à Londres quand ce single est sorti fin 1983. Ce fut est un assez grand succès (le disque est monté à la quatrième place du classement national des ventes) et, quand le jeudi et l'heure de Top of the Pops venaient, c'était l'une de mes chansons préférées parmi les tubes du moment, comme Karma chameleon de Culture Club, Come back and stay et Love of the common people de Paul Young, Uptown girl de Billy Joel ou Red red wine de UB40. Pourtant, j'ai attendu d'être de retour en France pour acheter ce disque, je ne sais pas trop pourquoi. En tout cas, ça me vaut d'avoir la mention "Original version" ajoutée sur la pochette, et pour le coup, Vogue semble avoir fait du zèle. En effet, ce genre de mention est généralement utilisé pour écarter la concurrence un peu parasite, ou à l'inverse de manière un peu déloyale pour piquer des parts de marché à l'éditeur d'un tube, mais là il n'y avait aucune raison de préciser que c'est la version originale, pour la simple et bonne raison qu'il n'y a pas eu de reprise ni d'adaptation française à l'époque; on note juste, bizarrement, deux versions différentes en suédois en 1984 !

Never never est une excellente chanson. Vince et Eric se chargent de la musique, à base de synthé, de boite à rythmes et de sampler (c'était les débuts du Fairlight), dans la veine électronique et mélodique initiée par Kraftwerk. Vince fait aussi des chœurs (en tout cas je crois que c'est lui) et ils ont fait appel à un musicien pour ajouter de la guitare, Clem Clempson, un gars qui avait de la bouteille, ancien de Colosseum et Humble Pie.
Les paroles sont grosso modo du blues (Je voudrais être avec toi mais je suis tout seul, l'amour c'est jamais pour moi, l'amour est une porte fermée et il n'y a pas de clé), mais en même temps les couplets semblent indiquer que le narrateur fait tout ce qu'il faut pour se retrouver dans cette situation : "I know just what to say, it's just a game I play" ou "I know my every line, it's just a waste of time".
Le coup de maître de The Assembly, c'est d'avoir fait appel pour chanter Never never à Feargal Sharkey, tout juste libéré de son poste de chanteur des Undertones. C'est vraiment un chanteur que j'apprécie énormément, avec une voix et un style de chant très particuliers.
Une version allongée est sortie en maxi et, pour une fois c'est une réussite : pas de percussions ou de son discothèque, juste une longue introduction de deux minutes qui permet de mieux apprécier tous les sons du disque.
C'est une pure coïncidence, mais j'ai dernièrement eu l'occasion d'écouter la version démo d'Enjoy the silence par son auteur Martin L. Gore (elle figure sur ma dernière compilation en date, Ma sélection n'est pas commerciale). Il y a une forme de cousinage entre ces chansons des deux ex-compères de Depeche Mode et je regrette de ne pas les avoir enchaînées.

La face B, Stop start, est un instrumental, plus rythmé, typique des compositions de Vince Clarke. Pas mal, mais il lui manque sûrement un Dave Gahan, une Alison Moyet, un Feargal Sharkey ou un Andy Bell pour passer à la dimension supérieure.

Après The Assembly, Feargal Sharkey s'est lancé dans une carrière solo et il a eu beaucoup de succès en Angleterre. En 1986, accompagné par Kevin Armstrong (ex-Local Heroes SW9), il interprétait Never never sur scène. Il est ensuite passé de l'autre côté de la barrière et a eu un parcours remarquable dans l'industrie musicale. En 2011, il a exceptionnellement rejoint Erasure sur scène pour refaire Never never (voir ci-dessous). Ces derniers temps, il est de nouveau dans l'actualité pour son militantisme en faveur de la qualité des eaux de rivière et notamment contre les rejets d'eaux usées.
Quant à Erasure, le groupe est toujours actif. Son dernier album en date, Day-glo, est sorti en 2022.




The Assembly, Never never, dans l'émission The tube en 1983. La musique est celle du disque, mais le chant de Feargal Sharkey semble en direct.


The Assembly, Never never, dans l'émission Formel Eins en 1983.


Erasure, Never never, avec Feargal Sharkey en invité au chant pour ce rappel, en concert à The Roundhouse à Londres le 14 mai 2011 dans le cadre du festival Mute at Short Circuit.

14 décembre 2024

MOMUS : Hippopotamomus


Acquis par correspondance via Discogs en novembre 2024
Réf : CRECD 097 -- Édité par Creation en Angleterre en 1991 -- Distribué par Intercord Record Service en Allemagne -- PR-Copy
Support : CD 12 cm
11 titres

Momus s'est lancé depuis septembre dans l'aventure Patreon, où il propose à des fans de le patronner : contre un abonnement payant, ceux-ci ont accès à des contenus rares ou inédits. Parmi ceux-ci, il y a deux sessions acoustiques en direct sur l'antenne de Radio Primitive à Reims en février 1988 : 3 chansons pour Rock comptines, l'émission que j'animais avec Phil Sex et Raoul Ketchup, et une pour Formules magiques.
Au cours de cette tournée française entamée en première partie de Biff Bang Pow !, Momus s'est aussi produit à la télévision, avec une chanson en direct pour Décibels enregistrée à Rennes et la participation à l'émission 3 Première de FR3 Champagne-Ardenne, où il avait mimé Sex for the disabled et où j'avais joué l'interprète pendant l'entretien qui avait précédé. Malheureusement, cette dernière émission reste pour l'heure confinée dans les archives de l'INA.

Suite à cette diffusion d'archives, je me suis replongé dans mes disques de Momus et j'ai décidé de compléter ma collection en commandant un exemplaire de son cinquième album.
Si je ne l'avais pas déjà, c'est parce que j'ai raté le coche à sa sortie. On l'avait reçu en nouveauté à la radio et je l'avais copié sur cassette, il n'y avait donc pas d'urgence. Sauf qu'après, il était trop tard : Michelin ayant menacé de porter plainte, Creation avait accepté pour limiter la casse financière de retirer du commerce tous les exemplaires de l'édition originale. L'album est ressorti ensuite avec une pochette modifiée, sans Bibendum, et un titre en moins, Michelin man.
Je m'étais toujours dit que, si j'achetais un jour ce disque, ce serait son édition originale et complète. L'exemplaire que j'ai trouvé à un prix tout à fait correct (à peine le prix d'un CD neuf à l'époque) est le pressage anglais, mais il a été diffusé en Allemagne par Intercord Record Service, qui a apposé un autocollant promo au recto, un code-barres au verso, et dans la boite il reste la copie du communiqué de presse allemand de l'époque.

Les titres enregistrés par Momus en appartement en 1991 devaient à l'origine constituer un double album, moitié chansons rigolotes, plutôt pour les fans, moitié chansons plus commerciales, un peu à la Pet Shop Boys, mais au bout du compte elles sont sorties en deux albums deux ans de suite, Hippopotamomus et Voyager.

Pour tout savoir sur cet album, je vous renvoie vers la longue analyse de John Harrison sur son blog Fifteen people (reprise en 2021 dans le livre Famous for fifteen people : The songs of Momus 1982-1995)
Une des figures marquantes du disque est Serge Gainsbourg : l'album lui est dédié (il était décédé quelques semaines plus tôt), le mot-valise du titre de l'album fait écho à L'hippopodame de Vu de l'extérieur (1973) et le motif de piano de Song in contravention rappelle La ballade de Johnny-Jane.
Pour ma part, j'apprécie beaucoup la tonalité générale du disque, effectivement synthétique et rigolote; on pourrait appeler ça du synthétoc.
Michelin man fait partie de mes chansons préférées, il aurait été dommage de s'en priver. Chez Michelin ils ne devaient pas s'attendre à ce qu'on assimile leur mascotte à une poupée gonflable d'autant plus dure et rigide qu'elle est bien gonflée ! Hippopotamomus est dans une veine similaire.
Pour Marquis of sadness, Momus se met en retrait pour jouer le rôle d'un écrivain en résidence dans une université. Les étudiantes, interprétées par Vicky Cassidy et Tammy Yoseloff au chant et aux chœurs, sont au premier plan, tandis que lui se réjouit de leur "bad but intimate poetry".

Même au complet avec Michelin man, c'est un album court. Pour la deuxième édition, Creation n'a pas remplacé le titre supprimé. Pourtant, il y avait de la matière, comme on l'a découvert quand le coffret Create 2 : Recreate sorti en 2018 : quatre inédits complètent Hippopotamomus, dont le surprenant car on y parle de rock and roll Life of an office worker et aussi The mechanical arm, dont le titre est peut-être inspiré par Le bras mécanique de Dutronc et Gainsbourg.

La morale de cet album, c'est peut-être que la grenouille Momus a voulu se faire aussi grosse qu'un hippopotame mais qu'elle s'est fait dégonfler par le bonhomme Michelin !

Momus n'en avait pas fini avec les affaires judiciaires. En 1998, son album The little red songbook contenait une chanson intitulée Walter Carlos, qui a fortement déplu à l'artiste Wendy Carlos. Les menaces de poursuite avec une demande de 22 millions de dollars de dommages et intérêts ont donné lieu à une transaction avant procès et l'album a été réédité sans cette chanson, mais il y a eu un coût de 30 000 $ pour le label. Pour le financer, Momus a fait appel à son public : 30 personnes ont versé 1000 $ chacune pour que Momus compose un portrait musical en leur honneur, publié en 1999 sur l'album Stars forever.

Momus reste très actif et très productif musicalement, avec au moins un album par an. Il y en a eu deux cette année, Yikes! et, il y a quelques semaines, Ballyhoo.


Pour son film sur Momus Man of letters (1994), Hannu Pottonen a réalisé en 1993 une vidéo pour Marquis of Sadness. A voir ci-dessus, intégralement et en mauvaise qualité, et ci-dessous dans la version du film, en extraits mais de meilleure qualité.




Un orchestre de bonshommes Michelin. Photo trouvée ici. Apparemment, l'orchestre jouait pour la première de l'émission Michelin hour radio show sur le réseau NBC, en 1928.
Voilà qui aurait fait une pochette parfaite pour le single Michelin man, si jamais il y en avait eu un.


06 décembre 2024

RAYMOND SANGARIA ET SON ENSEMBLE : Chansons créoles


Acquis chez Happy Cash à Dizy le 9 novembre 2024
Réf : E P 22 -- Édité par Discomad à Madagascar vers la fin des années 1950
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Caf' pas vilain manière -- Sans chemise, sans pantalon -/- Ma mère c'est ta belle-mère -- Si vous avez des cornes

Ce jour-là, quand je suis passé faire mon petit tour d'inspection chez Happy Cash quelques indices m'ont fait penser que des disques avaient été ajoutés au rayon depuis ma dernière visite. J'ai échantillonné quelques piles, qui contenaient presque exclusivement de la drouille, jusqu'à ce que je tombe sur ce bel EP de Chansons créoles. Là, c'était plus la même histoire. Bien obligé, j'ai passé en revue tous les 45 tours un par un, et j'ai bien fait puisque j'ai trouvé les Chansons malgaches n° 3 de Fidimala, ainsi que trois autres bricoles. Deux disques de l'Océan Indien, j'aurais préféré une douzaine mais c'est toujours bien mieux qu'aucun !

J'avais déjà un 45 tours de Raymond Sangaria (1936-2020), qui est né à Madagascar et qui a longtemps vécu à La Réunion et dans l'Hexagone.
La pochette, qui illustre au moins trois des chansons, est signée Gauvillé et Slita. Je ne sais pas qui des deux dessine et qui fait la maquette, mais ils ont fait plusieurs autres pochettes Discomad, par exemple pour le Trio Jokary et Odeam Rakoto.

Quand j'ai examiné le verso de la pochette, un titre en particulier a attiré mon attention, Sans chemise, sans pantalon. Si j'ai connue cette chanson avec le tube de Rika Zaraï en 1975, je sais depuis un moment qu'elle est associée à Gérard La Viny, qui l'a créée sur disque en 1958. Elle est donc plutôt associée aux Antilles qu'à Madagascar, où ce disque a été fabriqué et édité.
Je suis donc allé voir sur Discogs le 45 tours d'origine de La Viny, où la chanson est présentée comme du Folklore antillais et créditée à La Viny et André "Sylvio" Siobud. Après, il m'a fallu un petit moment pour m'en rendre compte, j'ai douté, vérifié et j'ai fini par me rendre à l'évidence : ce n'est pas seulement Sans chemise, sans pantalon que Raymond Sangaria reprend de La Viny, mais bel et bien les quatre titres de son EP !!
Je collectionne depuis un moment les reprises "parasites" de grands succès, comme celles chroniquées ici par Big Tears and the Crocodiles, The Hills, The Michels, Prince of Wales Star ou Yankee Horse, mais je crois bien que c'est la première fois que je tombe sur un disque complètement dupliqué par un autre artiste, en-dehors peut-être des recopies pas chères qui étaient vendues sur les marchés.

Il n'y a aucune mention de La Viny sur le disque. Raymond et son compère Roland Raelison ne se sont pas attribués la paternité des chansons, ils se créditent juste pour les arrangements, mais les quatre titres sont indiqués comme étant du "Folklore", ce qui a souvent été un moyen bien pratique dans l'histoire de l'industrie du disque pour effacer les auteurs d'une œuvre.
Mais Raymond Sangaria ne s'est pas quand même pas contenté de reprendre telles quelles les paroles originales. Il les a visiblement transposées du créole antillais au créole réunionnais. Par exemple, Neg' ni mauvais' manier' de La Viny devient ici Caf' pas vilain manière, cafre désignant à La Réunion une personne supposée d'origine africaine.

Pour cette chanson d'ouverture comme pour tout le disque, l'orchestration est assez dépouillée, avec des percussions légères, de la guitare, une clarinette...
Si vous avez des cornes ("Portez-les fièrement"...) est une pochade sur l'infidélité.

Ma chanson préférée du lot, c'est Ma mère c'est ta belle mère. Je ne comprends que la partie des paroles qui est en français, dont "Tu te souviens l'année dernière, tu avais injurié ma mère. Cette année-ci, ma mère c'est ta belle-mère.". Ce n'est pas exactement le Scandale dans la famille, mais j'ai du mal à imaginer la situation qui a conduit à ce changement, à part peut-être si la mère du narrateur s'est remariée avec le père de celui à qui il s'adresse... (ou, comme on me le murmure, avec le sens le plus courant pour belle-mère, le narrateur peut tout simplement s'adresser à celle qui est devenue son épouse). Comme pour la version de Gérard La Viny, il y a une deuxième voix qui commente celle du chanteur.
Notons que les auteurs de cette chanson sont Gérard La Viny et Boris Vian, qui l'avait signé chez Fontana. Raymond Sangaria a repris plus tard sur un 45 tours également titré Chansons créoles la chanson Bon Dieu bon, également signée Vian-La Viny, mais cette fois-là les auteurs sont bien crédités. En 1982, c'est l'Olivier Franc Jazz Quintet qui a repris sur un album Caf' pas vilain manière.

Il n'y a pas d'album de Raymond Sangaria référencé sur Discogs, mais on trouve en ligne la mention d'un CD Best of qu'il avait édité et distribuait lui-même.


Le 45 tours de Gérard La Viny que Raymond Sangaria a dupliqué à la sauce réunionnaise.

30 novembre 2024

CHARLES DUMONT : Les Martin, Dupont...


Acquis au Repaire du Racoon à Épernay le 25 mai 2024
Réf : 121946 -- Édité par Musidisc en France en 1998 -- Copie promo
Support : 45 tours 30 cm
Titres : Les Martin, Dupont... (Groove mix) -/- Les Martin, Dupont... (Version originale)

Pauvre Charles Dumont. Il est mort le 18 novembre à 95 ans, et à l'unanimité, la presse dans son ensemble, du Monde à Libération, en passant par France Musique et même le Guardian, a choisi de résumer sa vie bien remplie à un seul fait : il est le compositeur de Non, je ne regrette rien.
Certes, c'est peut-être la seule de ses chansons qui est devenue un classique, et il n'a lui-même jamais regretté sa collaboration avec Piaf sur une trentaine de chansons, il en était même fier et reconnaissant, mais il n'y a pas à chercher loin dans un parcours discographique de plus d'un demi-siècle pour découvrir, par exemple, qu'il a composé la musique des deux derniers films de Jacques Tati, Trafic et Parade ou que, à l'époque où il a eu du succès comme interprète, il a reçu en 1973 le prix de l'Académie Charles-Cros pour son album Une femme.

Pour dire le vrai, je ne me suis absolument jamais intéressé à Charles Dumont avant d'acheter ce disque il y a six mois, alors que j'examinais les disques bradés à 50 centimes par le Repaire du Racoon, le jour où j'ai aussi acheté le Brenton Wood.
Deux choses m'ont fait m'arrêter sur ce maxi promo :
- L'incongruité de voir associer le nom de Charles Dumont à la mention "Groove mix". Un remix "dance" de Charles Dumont en plein dans les années 1990 ? J'étais assez curieux d'écouter ça.
- Le fait que le remix et les arrangements sont de Bernard Estardy, l'enregistrement s'étant fait dans son studio CBE.

C'est cette mention de Bernard Estardy qui m'a décidé à acheter ce disque. En effet, quelques semaines plus tôt, je venais de finir la lecture de Le géant : Itinéraire d'un génie du son, un livre écrit par sa fille Julie Estardy. Elle a pris des risques en choisissant de rassembler souvenirs et témoignages sur son père sous une forme romancée, mais le pari est réussi et j'ai pris grand plaisir à lire les aventures de ce père producteur et musicien (qui ajoutait souvent ses claviers magiques aux productions qu'il enregistrait), avec des anecdotes connues et d'autres que j'ai découvertes, comme la session de mai 1968 avec Lee Hazlewood.
Pour en savoir plus à ce sujet, je vous conseille l'entretien de Section 26 avec Julie Estardy, parties 1 et 2.

La version originale de Les Martin, Dupont..., ici en face B, est parue initialement sur l'album Pour une femme. Rien qu'avec les titres d'album, on voit bien que la femme était un sujet d'intérêt majeur. Les Dupont aussi (peut-être parce que, à une lettre près, Charles en était un), puisque sur son album de 1964 on trouve une chanson intitulée Les Dupont, dont les paroles sont de Michel Vaucaire. Pour Les Martin, Dupont..., c'est une auteur avec qui il a également très souvent collaboré qui les signent, Sophie Makhno.

Le travail de remixage de Bernard Estardy pour Les Martin, Dupont... (Groove mix) est assez discret. Il se traduit principalement par l'ajout d'une ligne de basse, un peu "groovy", bien sûr. La chanson elle-même n'est pas désagréable, si on fait l'impasse sur le solo de saxo final. La thématique est simple : les français moyens sont pris pour des cons, mais il y a une morale façon fable de La Fontaine : "c'est un plaisir supérieur à tout d'être pris pour un con par un plus con que vous".
Le principal problème avec cette chanson c'est que, une trentaine d'années plus tôt, Serge Gainsbourg avait déjà traité en chanson le thème du con en parlé-chanté, de manière autrement percutante et incisive. Pour ma part, j'aurais au moins fait un requiem pour un Dumont, et je ne le regrette pas !

A écouter :
CHARLES DUMONT : Les Martin, Dupont... (Groove mix)

23 novembre 2024

LES GRANDS BALLETS D'AFRIQUE NOIRE : Voix et rythmes d'Afrique Noire 2


Acquis sur la braderie-brocante d'Ay le 27 octobre 2024
Réf : RK 2 -- Édité par Air Afrique en France probablement dans les années 1970
Support : 33 tours 13 cm
Titres : Kakilambé -/- Cha cha cha boy

Quelques mètres après avoir acheté le bon petit paquet de 45 tours qui contenait le Typical Combo, j'ai trouvé à un autre stand un 78 tours et un 45 tours, pas géniaux mais suffisamment intéressants pour que j'investisse. Je n'ai pas marchandé mais j'ai d'emblée proposé d'ajouter sans supplément de prix ce tout petit disque souple glissé dans une pochette en papier, ce que la vendeuse a accepté bien volontiers.

Je me doutais bien que ce disque publicitaire serait le plus intéressant du lot. Il fait partie d'une série de trois diffusés par la compagnie Air Afrique à ses potentiels clients français pour les inciter à découvrir l'exotique continent africain. Cette compagnie a été créée en 1961 par onze états africains afin d’opérer en commun leurs liaisons aériennes extérieures.

L'artiste crédité pour ce disque est Les Grands Ballets d'Afrique Noire, "une troupe de danse, théâtre et musique, valorisant le patrimoine guinéen en explorant les différentes composantes culturelles du pays". Elle a été fondée par Ahmed Tidjani Cissé (1941-2015), écrivain, poète, dramaturge, comédien, metteur en scène et chorégraphe, excusez du peu et ce n'est pas tout puisque, militant de longue date, exilé politique en France pendant 25 ans, il a été à la fin de sa vie ministre de la Culture et du Patrimoine Historique de Guinée.
Au moment de l'enregistrement de ce disque, les directeurs artistiques des Ballets étaient Jean-Luc Bangoura et Doura Mané.
Il n'y a que deux albums répertoriés chez Discogs pour cette formation.

La face A, Kakilambé, associe chants et percussions (Je ne suis pas certain que la version en ligne est exactement la même que celle du disque souple, mais au moins c'est très proche). C'est très bien, mais sans surprise.

Au vu titre, je fondais plus d'espoirs sur la face B, Cha cha cha boy, "Improvisation sur un air de cha cha cha. Musique de danse.". Parmi les instruments traditionnels fabriqués par les musiciens eux-mêmes, il y a le kirin en fer et le bougarabou.
Ma source est un disque souple d'une cinquantaine d'années, qui a tendance à sauter sur ma platine. J'ai fait de mon mieux pour supprimer les rayures de mon enregistrement, mais il en reste, surtout vers la fin. Elles n'empêchent pas d'apprécier ce morceau enlevé qui met de bonne humeur, quelque part entre Jonathan Richman jouant La bamba en acoustique et Pascal Comelade dansant le cha cha cha plutôt que la sardane.

Une superbe trouvaille, donc, sur un petit disque qui ne payait pas de mine. Je n'ai pas trouvé trace ce titre sur une autre publication.

A écouter :
Les Grands Ballets d'Afrique Noire : Cha cha cha boy


15 novembre 2024

CROWBAR : Bad manors (Crowbar's golden hits, volume 1)


Acquis chez Happy Cash à Dizy le 5 octobre 2024
Réf : PAS 6007 -- Édité par Paramount aux États-Unis en 1971
Support : 33 tours 30 cm
14 titres

Je passe régulièrement dans ce magasin Cash situé à quelques pas de ma ressourcerie locale. La plupart du temps pour rien, car les arrivages de lots de disques sont assez rares, même si, au fil des années, j'y ai trouvé une cinquantaine de CD neufs à 50 centimes, une des compilations reggae Tighten up et assez récemment un petit lot de 45 tours parmi lesquels il y avait le T.H.X. et le Fortunel.
Au bout du compte, depuis six mois que le rayon disques de la ressourcerie s'est presque entièrement tari, c'est au Cash que j'ai fait le plus d'affaires. Le mois dernier encore, j'y ai pris trois 45 tours, de Carl Douglas et George McCrae (pas leur tubes), ainsi qu'une réédition de Leader of the pack, avec une face B différente de mon original anglais. Alors que j'attendais à la caisse pour les payer, j'ai repéré une grosse pile de 33 tours posés sur le comptoir. Évidemment, j'ai beuqué les tranches des pochettes et j'ai noté qu'il y avait un bon paquet de daube, mais aussi des choses assez alléchantes comme un Chambers Brothers ou un Groundhogs.
J'ai donc demandé au vendeur quand les disques seraient mis en vente, en espérant qu'il me propose d'y jeter un œil de suite, mais il m'a répondu qu'ils seraient en rayon normalement dans l'après-midi.
J'ai fait preuve d'une assez remarquable force de caractère en n'y retournant pas le jour même, principalement parce que je craignais de faire le déplacement pour rien, mais le lendemain matin j'étais sur place dans l'heure qui a suivi l'ouverture.
Je croyais que le délai pour la mise en rayon se justifiait par l'évaluation et l'étiquetage individuel des disques, mais le vendeur aurait aussi bien pu me laisser les regarder immédiatement car il les a mis en rayon tels quels, mélangés dans les différents bacs.
Le prix des albums dans ce Cash varie entre 1 et 30 €, je ne savais donc pas trop à quoi m'attendre, mais au bout du compte la bonne nouvelle c'est que tous les disques étaient encore là et que, comme ils n'étaient pas étiquetés, ils étaient tous au prix de base, récemment abaissé à... 30 centimes !
Autant vous dire que j'ai pris mon temps pour examiner les disques un par un (il devait y en avoir peut-être 200) et rafler tous ceux qui présentaient le moindre intérêt, pour moi ou un pote. Je suis reparti avec plus de trente albums, dont trois Ventures, un Albert King, un Kris Kristofferson, un Steve Hillage, un Shadows, un Edgar Broughton Band...

Quasiment tous les disques que j'ai achetés sont tamponnés : ils viennent de la collection d'une même famille de la région. Ils datent pour la plupart des années 1970, répartis à peu près équitablement entre pressages français et américains, dont plusieurs ont un coin coupé, dans des genres qui couvrent le blues, le folk, la country, le rock et tout ce qui mélange un peu tout ça. Il y a des noms que je connaissais, et des choses à peu près inconnues pour moi, comme Earl Hooker, The Youngbloods, Heads Hands and Feet et Artful Dodger.
Rétrospectivement, je suis impressionné par le fait que les goûts de cette famille étaient aussi pointus. Pour une bonne partie, je pense que ces disques n'étaient pas disponibles chez les disquaires de la région, il fallait soit aller à Paris, soit les importer ou voyager pour les acheter. Et il y a une chose dont je suis sûr : tous ces disques que j'ai achetés ne constituent qu'une infime partie de la collection initiale, peut-être un "reste" vendu pour pas cher à Cash. Des gens qui avaient ces albums d'artistes inconnus ou quasi-inconnus chez nous avaient forcément plein d'autres disques. Je pense que les Stones, les Led Zeppelin, les Who, les Creedence etc. qu'ils avaient n'ont pas été perdus pour tout le monde.

Quand j'ai mis le disque sur la platine, je ne connaissais absolument rien de Crowbar.
L'album s'ouvre avec un instrumental bluesy, le premier de quatre Frenchman's filler (Bouche-trou du français, je dirais) qu'on trouve en début et en fin de chaque face. On enchaîne ensuite avec Too true Mama, un titre bien gras, assez rhythm and blues, avec des chœurs et des cuivres. J'étais assez convaincu à la fin de cette chanson pour me dire que j'allais chroniquer le disque et je me suis renseigné sur le groupe.

Il s'avère que Crowbar est un groupe fondé au Canada en 1970. Les gars avaient déjà un certain pédigrée car ils avaient pour la plupart précédemment accompagné Ronnie Hawkins sous le nom de And Many Others (leur seule trace discographique avec lui serait le single de 1968 Mary Jane). On n'est donc pas surpris d'entendre leur cocktail de rock, de boogie et de blues.
Le titre de l'album, Bad manors, est un jeu de mots sur "mauvaises manières" et sur le nom de la propriété où le groupe s'était installé en communauté, à Ancaster dans l'Ontario. Le sous-titre est trompeur : avec cette mention de "golden hits, volume 1", j'ai cru qu'il s'agissait d'une compilation, mais c'est bel et bien le deuxième album du groupe; le premier aussi en quelque sorte car Official music en 1970 créditait en premier le chanteur King Biscuit Boy, qui a quitté le groupe peu de temps après.
Et je ne dois pas être le seul par ici à ne jamais avoir entendu parler de Crowbar : un seul de leurs albums est sorti en France, un live de 1972.

La face A se poursuit sur un rythme d'enfer : une version survitaminée de Let the four winds blow de Fats Domino et trois autres reprises à la suite : House of blue lights, un boogie-woogie à double vitesse, Train keep rollin' et Baby let's play house, avec King Biscuit Boy en invité au yodel. La face se termine en beauté avec Oh what a feeling, le plus grand succès du groupe, presque un classique au Canada. Là, ça démarre carrément funky. Ça surprend, mais l'explication est simple : la chanson prend racine dans un medley de titres de James Brown que certains membres du groupe jouait sur scène dans une formation pre-Crowbar.

La face B continue dans la même veine, avec plus d'originaux, comme Murder in the first degree ou Mountain fire, avec son accompagnement de glou-glous. L'album se conclut joyeusement et religieusement avec Prince of peace, où Crowbar est notamment accompagné par la chorale de la bibliothèque publique de Terryberry. A la fin du disque, même dans son salon, on a l'impression de sentir la bière, le tabac et la sueur !

Au total, c'est un très bon disque dans son genre, que j'apprécie, même si je ne vais pas me mettre à écouter du boogie-blues à longueur de journées. C'est en tout cas une découverte bien représentative de ce beau lot de disques. Un lot comme j'aimerais en trouver plus souvent...!

Crowbar s'est séparé en 1975, mais s'est reformé dès 1977. Une version du groupe tournait encore en 2019.


Un reportage d'époque sur Crowbar à Bad Manors.






09 novembre 2024

TYPICAL COMBO : Pas couri


Acquis sur la braderie-brocante d'Ay le 27 octobre 2024
Réf : J.D. 116 -- Édité par Duli Disc en France en 1973
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Pas couri -/- Nous typical

Le temps était ensoleillé et très doux. On est arrivé sur place à presque 11h. A une heure aussi tardive, autant dire qu'il s'agissait avant tout de prendre l'air et que toute trouvaille serait un bonus inespéré. Et pourtant, c'est au final la brocante d'où j'ai ramené le plus de disques cette année : une douzaine, dont trois 78 tours, achetés sur quatre stands différents.

Au stand où j'ai fait mes meilleurs affaires, j'ai failli ne pas me baisser pour fouiller : j'ai repéré un carton de 45 tours de la taille d'une demi-boite à chaussures par terre, et je me suis dit qu'ils avaient l'air bien pourris. Je me trompais ! Ils n'étaient pas en si mauvais état que ça, et surtout il y en avait plusieurs d'intéressants. J'avais à peine commencé à les regarder que j'ai trouvé un disque d'une chanteuse africaine, Bella Bellow. J'ai demandé le prix au vendeur et il m'a donné une bonne réponse, 50 centimes ! J'ai repris ma quête et j'ai fini avec un éventail assez complet de mes goûts actuels : un James Brown années 60 que je n'avais pas; un Bee Gees de la même époque que j'ai cru ne pas avoir; un superbe EP live de 1964 de Jerry Lee Lewis avec deux reprises de Chuck Berry, malheureusement sans sa pochette; un quatre titres de Ricet-Barrier que je n'avais jamais vu; et enfin ce 45 tours de Typical Combo en parfait état.

Typical Combo, c'est un groupe dont Philippe R. me parle depuis des années, m'encourageant à écouter et chroniquer leur succès, l'excellent Makchiner. Je crois bien même que c'est même lui qui m'a offert mon exemplaire de ce disque. J'en ai quelques autres d'eux et de leur chanteur Georges Plonquitte, l'auteur notamment de la chanson Rosalie, bien connue de toute une génération grâce à Carlos et les pubs pour la boisson Oasis.
Je n'ai pas associé de lien à Typical Combo dans le paragraphe ci-dessus car figurez-vous que, même si ce groupe guadeloupéen fondé à la fin des années 1960 a eu un grand succès, notamment dans les années 1970, et une histoire compliquée sur des décennies avec divers schismes et factions, eh bien je n'ai trouvé nulle part en ligne une biographie ou une discographie sérieuse du groupe, même pas un embryon de page Wikipedia. Ce qu'on trouve, ce sont des éléments d'information liés aux annonces de décès de membres du groupe, comme le fondateur Harry Simonnet et Daniel Dimbas. C'est une nouvelle preuve du manque de considération générale que nous avons pour nos artistes antillais. Un groupe équivalent en métropole aurait des biographies détaillées, voire des sites qui lui seraient dédiés.

A la place, voici les lignes qu'Henri Debs a écrites à leur sujet dans son livre de 2011 Mémoires et vérités :
"Fondé par Harry Simonnet il y a environ 43 ans, cet orchestre a connu un vif succès à partir de 1970. Après un bal joué à la Mutualité de Pointe-à-Pitre, ils emballèrent le public. Les musiciens étaient : Harry et Christian Simonnet (sax) et Georges Simonnet (piano), Georges Plonquitte (chant), Philogène Astasie, Edgard Mahomet (trompette), Billy Avinel (batterie), Serge Yéyé (congas), Fred "Kapyo" Josué (percussions). Les années suivantes, ils enregistrèrent deux tubes dont "Makchiner" pour mon compte et "Bobiné" pour Jacky Dulice.
Au cours des années, l'orchestre se transforma. Georges Plonquitte quitta Typical pour monter son G.P. Orchestra, Daniel Dimbas prit la relève comme guitariste-chanteur ainsi que Jacques Rosmade au chant. Le nombre de bals joués par cet orchestre était très important. Après une trentaine d'années, les musiciens de la première génération quittèrent Simonnet. Ce fut la grande guerre, avec procès et bien d'autres problèmes. Typical Combo devint Typical Abidos, ce qui obligea Harry à faire appel à de nouveaux musiciens. Typical Abidos a fait fureur et à tous ses bals, les salles étaient combles. La bagarre s'installa entre Philogène Astasie et Yves Abidos. Astasie monta un nouveau groupe avec le nom Le Grand Typical.
Qui gagnera ce combat ? L'avenir nous le dira. Mais en attendant, bravo à Harry d'avoir fondé le premier Typical, et de l'avoir dirigé avec brio.
Aujourd'hui, le Grand Typical de Philogène Astasie semble l'emporter. Cela va-t-il durer ?
"

Ce 45 tours date de la première période du groupe, bien avant les guerres intestines. Je pense que la formation en photo sur la pochette doit être proche de celle créditée sur leur album de 1974.

Selon un commentaire sur YouTube, ce disque aurait été enregistré à la discothèque La Plantation à Blanchet Gourbeyre, en Guadeloupe, en 1973. Les deux faces sont signées Plonquitte.

Pas couri est indiqué sur la rondelle comme étant dans le style cadence. Il y a un côté cubain très marqué dans le refrain, renforcé par ce qui sonne à mes oreilles comme des mots espagnols. La chanson décolle vraiment à partir de 2'30, avec une partie instrumentale et le chant "Faut pas courir, faut rester là".

Très bien, mais à première écoute j'ai préféré la face B, Nous Typical, pour son énergie. Là, il s'agit d'un campa direct sur un tempo rapide. On est proche du Désordre musical des Maxel's (le Typical Combo a aussi mis son propre Désordre musical), avec les cuivres et les autres instruments qui se répondent, et c'est sûr que ça devait bien chauffer dans les bals animés par le groupe.

On peut donc faire de bonnes affaires même en plein midi sur un vide-grenier, et ces trouvailles m'ont presque redonné le goût de les fréquenter. Mais, à quelques exceptions près, il va falloir maintenant attendre le printemps prochain.

03 novembre 2024

PIXIES : Velouria


Acquis neuf probablement à Reims en 1990
Réf : 30364 -- Édité par 4AD en France en 1990
Support : CD 12 cm
Titres : Velouria -- Make believe -- I've been waiting for you -- The thing

Je ne sais plus à quelle occasion c'était, mais j'ai récemment réécouté Velouria et je me suis dit que c'était quand même excellent. Un revirement pour moi car, j'ai beau avoir acheté fidèlement tous les disques des Pixies à partir de Surfer Rosa et jusqu'à leur séparation après Trompe le monde, j'ai toujours considéré que Monkey gone to heaven et Velouria étaient toutes les deux un ton en dessous de Gigantic ou Here comes your man et d'autres chansons de leurs albums pas sorties en single. Je pense aujourd'hui que j'avais tort, et ce single, avec ses quatre titres en 10'30, est un disque de haute tenue.

1990, ça correspond au moment où je suis passé au CD (j'ai dû acheter mon premier lecteur courant 1989). Jusque-là, j'avais tous les disques du groupe en vinyl. Je ne regrette pas ce changement, sauf pour la taille des pochettes (là, l'illustration a même été tournée d'un quart de tour pour gagner un peu en échelle). Par contre, je regrette par principe d'avoir revendu mes 33 tours de Come on pilgrim et Surfer rosa quand, vers cette époque, je les ai rachetés en doublon en CD.

Dès la guitare rythmique bien crade en intro (celle de Black Francis je suppose), avant que la rythmique solide arrive et que la guitare solo toujours aussi remarquable de Joey Santiago se lance, Velouria a un gros son, mais sur un tempo pas très rapide. Avec deux particularités remarquables, le thérémine du musicien de session invité Robert F. Brunner et le travail impressionnant que fait Kim Deal tout au long en deuxième voix.
La rime vocalement accentuée de "velouria" avec "adore ya" me fait toujours penser à celle un peu tirée par les cheveux de "Cleopatra" avec "at-ra" dans Abdul & Cleopatra. Le point de référence qu'apparemment personne n'a saisi, c'est Victoria des Kinks. Rien d'évident pour moi à l'écoute en-dehors bien sûr du "-ria", mais Frank Black lui-même s'en est étonné dans un entretien pour Q en 1990 : "Velouria : c'était Ma Victoria, pas mal, mais la chanson des Kinks... Je ne sais pas, ça doit être une bonne chanson pour que je m'en sois sorti". Il a confirmé son intérêt pour les Kinks en reprenant This is where I belong pour une face B en 1994.
Une version de Velouria a été enregistrée le 11 juin 1990 en session pour John Peel. Visiblement, Black Francis l'interprète seul à la guitare électrique.
Vu qu'il est question dans la chanson de velours ("Velouria", "Velveteen"), j'ai toujours eu naturellement tendance à associer Velouria avec la face B instrumentale du single suivant, Velvety. Mais les deux n'ont rien à voir : Velvety est une chanson que Black a écrite vers ses 15 ans et qu'il a fini par chanter en 2002 sur l'album Devil's workshop.

Make believe est un petit rock classique à la Pixies. C'est aussi une pochade chantée par le batteur David Lovering, qui fait référence à sa fanscination pour la chanteuse Debbie Gibson, dont la carrière fulgurante et assez fugace aux États-Unis a inspiré au moins une autre chanson, Debbie Gibson is pregnant with my two headed love child de feu Mojo Nixon et Skid Roper.

I've been waiting for you est une reprise, d'une chanson du premier album de Neil Young. Elle est pas mal, mais elle pâlit à côté de la version de Winterlong que le groupe avait publiée l'année précédente sur la compilation hommage The bridge : A tribute to Neil Young.

L'autre grand moment du disque avec Velouria, c'est The thing. C'est le titre que j'ai le plus écouté et diffusé depuis sa parution. C'est en fait la deuxième partie de la chanson The happening sur Bossa nova, mais elle est présentée ici dans un autre arrangement et en tant qu'entité indépendante. Elle raconte le trajet en voiture d'un gars qui se rend à Las Vegas, où l'atterrissage d'extras-terrestres a été annoncé dans l'émission de radio The Billy Goodman happening.
Le chant est "parlé" et la musique joue comme en boucle. Et, si mes oreilles ne me trompent pas, fait exceptionnel pour ce groupe, c'est un piano qui donne une partie du rythme ! Le tout est pour moi assez hypnotique.

Ce disque a beau avoir largement plus de trente ans, il tombe en pleine actualité : les Pixies viennent de sortir un nouvel album, The night the zombies came, tandis que Kim Deal s'apprête à sortir ce mois-ci un premier album sous son nom, Nobody loves you more.

Et sinon, je changerai peut-être d'avis d'ici quelques décennies, mais je trouve toujours Dig for fire et Alec Eiffel un ou deux crans en-dessous dans la discographie single des Pixies.




Pixies, Velouria, en direct en studio en 1990.


Pixies, Velouria, en concert à la Brixton Academy à Londres le 26 juin 1991.


Pixies, The happening, en concert à la Brixton Academy à Londres le 26 juin 1991.

26 octobre 2024

JOHNNY CASH AND THE TENNESSEE THREE : One piece at a time


Acquis chez Demelza Bookshop à Hythe le 15 octobre 2019
Réf : S CBS 4287 -- Édité par CBS en Angleterre en 1976
Support : 45 tours 17 cm
Titres : One piece at a time -/- Go on blues

L'autre jour, j'ai vu passer un article relatant l'arrestation de cinq personnes pour avoir volé des voitures dans les usines Stellantis pendant plusieurs années.
Ma réaction immédiate a été de me demander s'ils étaient inspirés de la chanson One piece at a time de Johnny Cash, qui raconte comment un ouvrier de General Motors aidé de ses potes s'est fabriqué une Cadillac maison en piquant des pièces à l'usine sur plus de vingt ans.
Ma deuxième réaction a été de me demander si cette excellente chanson rigolote (étonnant qu'Henri Salvador ne l'ait pas reprise) était sortie en single. La réponse est oui, puisque ce fut même l'ultime tube de Cash aux États-Unis, numéro 1 dans les classements country notamment. Et le plus drôle c'est qu'en faisant cette vérification j'ai découvert que j'avais le pressage anglais de ce 45 tours dans ma collection !
J'ai parfois ce genre de bonne surprise, tellement ma mémoire me joue des tours ! Là, il s'agit d'un disque acheté le même jour que l'album de Russ Henderson, dans un lot de quatre 45 tours de Cash en pochette générique (les autres sont Smokey factory blues, A thing called love et l'excellent 25 minutes to go).
Je me souvenais de cet achat, même si j'avais oublié le détail des titres. Je sais même pourquoi, avant de l'oublier, j'ai rangé ce disque sans le chroniquer en 2019 : c'est parce que je me suis déjà penché en 2005 sur les chansons drôles de Johnny Cash, par l'intermédiaire de la compilation Crazy country, sur laquelle on trouve notamment One piece at a time. J'avais voulu éviter une redite, mais la chronique originale remonte à 19 ans maintenant, et en plus c'était au tout début du blog, où je faisais beaucoup de chroniques très courtes, sans supplément audio ou vidéo. Là j'ai décidé de ressortir mon 45 tours, surtout que je suis tombé, caché dans des vidéos de versions live de la chanson, sur un petit film d'époque  accéléré façon film muet, où l'on voit Johnny et June Carter faire les cons dans une Cadillac.

L'auteur de la chanson est Wayne Kemp. Un nom qui ne me disait rien, mais il a eu un certain succès comme interprète et il est l'auteur de chansons comme Next in line, ou I'm the only hell my Mama ever raised de Johnny Paycheck.
One piece at a time est une chanson entraînante, parfaite pour Johnny Cash, dans un style rock-country dépouillé qui a fait son succès. Les  couplets sont chantés-parlés, le refrain est accrocheur, et surtout les paroles sont drôles.
L'idée de base est de sortir des pièces de voiture de l'usine, dans sa besace ou dans le camping-car d'un de ses potes, une par une chaque jour, quitte à ce que ça lui prenne jusqu'à la retraite pour avoir de quoi se construire une voiture complète.
Sauf qu'au moment de la monter, il se rend compte que les pièces des différents millésimes ne sont pas compatibles et ça donne au bout du compte une Cadillac "Psychobilly" des années 1949 à 1970 (ce serait là l'origine du nom du genre musical), qui est la risée de la ville et qui épuise le service des mines car le certificat d'immatriculation pèse 60 livres. Ca... c'est de la bagnole, comme disait Georgius !

Six mois avant le 45 tours, toujours en Angleterre, je m'étais procuré l'album One piece at a time. Un bon cru, pour lequel Cash a choisi de crédité son groupe The Tennessee Three (mais je n'ai pas trouvé le nom des musiciens sur la pochette...!). La raison est peut-être à trouver dans la production assez dépouillée, sans arrangement de cordes.
La face B du 45 tours, Go on blues, écrite par Cash, est l'une des bonnes chansons de l'album, avec aussi Sold out of flagpoles. On est dans la lignée de son classique I walk the line.
Cash en a enregistré une nouvelle version avec Rick Rubin pendant les sessions d'American recordings. La version a été écartée de l'album mais elle est sortie en face B du single Delia's gone.

Je vous laisse apprécier le talent d'acteurs de Johnny et June dans les vidéos ci-dessous et je retourne fouiller dans mes disques pour y chercher d'autres pépites oubliées.


Johnny Cash avec des fans qui lui ont offert une Cadillac façon One piece at a time.


Johnny Cash, One piece at at time, en concert à Las Vegas en 1979, avec inséré le petit film comique avec June Carter.


Johnny Cash, One piece at at time, en concert, avec également inséré le petit film comique avec June Carter.

18 octobre 2024

FORTUNEL : Au balèti de mon quartier


Acquis chez Happy Cash à Dizy le 13 septembre 2024
Réf : N° 114 -- Édité par Astroson en France en 1960
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Au balèti de mon quartier (Au bal) -/- La polka des fadas

J'ai trouvé ce disque le même jour que le T.H.X.. Initialement, j'allais le laisser sans même le regarder : il n'y a qu'une pochette générique, en mauvais état, chiffonnée, avec un coin en moins là où l'humidité qui l'a tachée l'a le plus atteinte.
Mais même une pochette générique ça peut être intéressant. Là, ce  qui a retenu mon attention c'est l'ensemble rond central/pochette, avec le logo spatial et le slogan Le disque Astroson "Séduit par le son".
Après, j'ai regardé le disque, et j'ai vu le mot "balèti" sur la face A, avant de le retourner pour découvrir que la face B s'intitule La polka des fadas. L'affaire était faite sans plus barguigner ! D'autant que, pour moi qui suis largement du nord de la Loire et qui ai très peu de culture provençale, j'ai vu là une double évocation de Massilia Sound System, avec son Commando fada et l'album promo de leur label Ragga balèti (l'article de Wikipedia pour Balèti précise même qu'ils ont contribué au retour en vogue de ce terme).

Il n'y pas beaucoup d'informations en ligne à propos d'Astroson. Vingt disques sont répertoriés à ce jour sur Discogs. Celui-ci n'y est pas, mais il y en a un que j'ai par ailleurs, un EP de rock and roll de Sammy Frank qui contient une adaptation en français de Baby I don't care d'Elvis Presley.
Astroson était visiblement l'une de ces maisons de disques touche à tout de la fin des années cinquante et du début des années soixante. Ils fonctionnaient par collection. Le Sammy Frank est dans la collection Princes de la chanson. Il y avait aussi une collection Internationale, une Collection de la Constellation, une Collection des Troubadours, mais ma préférée c'est la collection Vedettes et Camping qui a accueilli le Mademoiselle Rock and Roll d'André Fandrex !

Avant de me procurer les albums Opérette et Opérette volume 2 de Moussu T e lei Jovents (Un groupe qui comprend plusieurs ex-Massilia; je vous conseille pour découvrir C'est marseillais), qui contiennent des reprises de chansons des années 1930 et 1940, je ne connaissais rien du tout de l'opérette marseillaise. Mon 45 tours est plus tardif (la Bibliothèque Nationale de France, qui a numérisé son exemplaire, indique que le dépôt légal date de 1960), mais ce disque est strictement dans la même veine.

Je pensais trouver sur un site rétro ou local une biographie de Fortunel, le chanteur de ce disque. Eh bien, rien, nada ! Aucun disque de lui sur Discogs, et rien ailleurs.
On trouve un peu plus d'infos sur les autres personnes mentionnées sur les étiquettes : Gaston Jean, le chef d'orchestre, est crédité sur un bon paquet de disques. La Houppa et Christian Dupriez, qui co-signent la face A avec lui, ont aussi une fiche Discogs. Mais rien sur Gina Lore, la parolière de la face B.

On est tout de suite dans l'ambiance avec Au balèti de mon quartier, dont les premières paroles sont "A Marseille et à Toulon". La chanson est sans surprise vue la thématique, mais c'est une réussite des plus agréables.

La vraie perle du disque, c'est comme je l'espérais La polka des fadas. Ça commence assez sagement, mais le chanteur s'échauffe  au fil des couplets au fur et à mesure que la folie gagne. On se retrouve quand même avec une belle-mère qui gigote dans son peignoir. La danse est contagieuse !

J'ai essayé de transcrire une bonne partie des paroles :

Sur la Canebière avec Tétin, l'autre jour nous faisions la causette
Lorsque d'un hôtel sortit soudain un jeune couple en maillot de bain
Aussitôt ils firent sensation dans cette tenue bien trop simplette
En dansant avec passion, ils ont fredonné cette chanson
C'est la polka des fadas, des fadas, des fadas
Cette danse est une vraie merveille que l'on a composée à Marseille
C'est la polka des fadas, des fadas, des fadas
... qu'on se réveille ... d'oublier tous ses tracas
Et patati et patata, vive l'amour et la musique
Et patati et patata, vive la polka des fadas
Ma belle-mère l'autre matin en se levant pour faire sa toilette
Est allée dans la salle de bain en bousculant tout sur son chemin
Quand elle est sortie fallait la voir, les deux yeux lui sortaient de la tête
Tout en gigotant dans son peignoir, elle a fredonné sans s'émouvoir
C'est la polka des fadas, des fadas, des fadas
Qui m'a redonné mon caractère, le regard câlin et la peau claire
C'est la polka des fadas, des fadas, des fadas
Qui a fait de votre belle-mère une poupée qui ... dans ses bras
Et patati et patata, vive l'amour et la musique
Et patati et patata, vive la polka des fadas
Pétalude le grand guérisseur ne fait plus de passes magnétiques
Pour vous faire passer vos douleurs, il emploie un truc qui est meilleur
A tous ses malades jeunes et vieux, il leur fait entendre une musique
Aussitôt ils se sentent bien mieux et en sautillant chantent joyeux
C'est la polka des fadas, des fadas, des fadas
Grâce à elle plus de sciatique, de torticolis et de colique
C'est la polka des fadas, des fadas, des fadas
C'est bien mieux que la bombe atomique pour vous guérir sans faire de dégâts
Et patati et patata, vive l'amour et la musique
Et patati et patata, vive la polka des fadas
...


Et voilà comment à partir d'un disque en sale état on se retrouve à danser comme un fada !