03 septembre 2023

THE BEE GEES : To love somebody


Acquis chez Damien R. à Avenay Val d'Or le 11 juillet 2023
Réf : 27 811 -- Édité par Polydor en France en 1967
Support : 45 tours 17 cm
Titres : To love somebody -- Spicks and specks -/- Turn of this century -- Close another door

J'avais 14 ans quand le film La fièvre du samedi soir est sorti en 1977, alors pour moi les Bee Gees c'est d'abord des tubes comme Stayin' alive, Night fever, How deep is your love, You should be dancing, que toute la famille connaissait et sur lesquels on dansait lors des fêtes familiales.
Mais très vite, dès que j'ai commencé à affirmer mes goûts musicaux, j'ai rejeté les frères Gibb, leur brushing et leur disco. Pourtant, grâce aux rééditions pas chères de leurs premiers albums qu'on voyait chez les disquaires, j'ai assez vite été conscient de l'importance de leur parcours dans les années 1960. J'ai connu et apprécié des titres comme Massachusetts, I started a joke, New York mining disaster 1941, mais je n'ai jamais creusé la question au-delà de l'achat de quelques 45 tours sixties trouvés pas chers, qui ont souvent leur pochette en papier fin en mauvais état.

J'ai complété la liste en me rendant chez l'ami Damien, qui avait décidé de se débarrasser d'une bonne partie de sa collection de 45 tours. L'an passé, je lui avais notamment acheté le Yankee Horse et un Souchon. Cette fois, je suis reparti avec un bon paquet de belles pièces, dont les deux premiers EP français des Bee Gees. C'est le deuxième que j'ai sélectionné aujourd'hui.

Pour me faciliter les choses, je vais commencer par Spicks and specks, le deuxième titre du disque, mais le premier à être publié en 45 tours, en Australie, en septembre 1966. C'est une très belle chanson, que j'ai d'abord connue par sa reprise par Status Quo en face B en 1968.
Depuis les quelques notes graves de piano en introduction, jusqu'au rythme de marche marqué à la guitare et à la batterie, l'arrangement est relativement sobre et réussi.
Les Bee Gees sont anglais. Ils avaient émigré en Australie avec leurs parents en 1958. Frustrés par leur manque de succès après deux albums et plusieurs singles en Australie, ils ont pris le bateau en janvier 1967 pour aller faire carrière en Angleterre. C'est en chemin qu'ils ont appris que, au bout du compte, Spicks and specks s'était bien vendu et avait été désigné "Single de l'année" par un hit-parade national.
Trop tard pour faire demi-tour. Une nouvelle carrière les attendait et Spicks and specks a été publié en Europe en février 1967. Rétrospectivement, ce n'était peut-être pas plus mal pour les frères Gibb : s'ils étaient restés en Australie, ils y auraient sûrement eu un très grand succès, mais n'auraient peut-être pas eu la même carrière internationale.

Après New York mining disaster 1941 en avril, les Bee Gees ont sorti To love somebody en juin 1967. Ce titre a eu plus de succès aux États-Unis qu'en Angleterre.
Au fil du temps, on a appris des anecdotes intéressantes sur la genèse de cette chanson. D'abord, je n'aurais pas fait le lien moi-même, mais elle pourrait être une grande ballade rhythm and blues. Et pour cause, à l'initiative du nouveau manager anglais des Bee Gees Robert Stigwood, elle aurait été composée à l'origine pour être proposée à Otis Redding (Ils avaient au moins en commun leur label américain, Atlantic). Finalement, ils ont gardé la chanson pour eux, et Otis n'a même pas eu le temps d'en enregistrer éventuellement sa propre version, vu qu'il est mort six mois plus tard.
Tout aussi surprenant, son auteur Barry Gibb a expliqué à Mojo en 2001 que la personne qui lui avait inspiré cette chanson c'était Robert Stigwood lui-même, qui lui avait demandé d'écrire une chanson pour lui.
Et quelle chanson ! Même si c'est de la pop trop orchestrée à mon goût, on est accroché dès les premières paroles ("There's a light, a certain kind of light"). Il y a juste un peu de maladresse dans le refrain, puisque le narrateur amoureux est présomptueux et se permet de parler à la place de l'autre ("Tu ne sais pas ce que c'est d'aimer quelqu'un comme je t'aime"). N'empêche, ce n'est pas trop surprenant que cette chanson soit devenue un classique pour les cérémonies de mariage.

Comme ça m'est souvent arrivé avec des titres des années 1960, j'ai d'abord connu cette chanson par des reprises, Gallon Drunk d'abord en 1996, et surtout Nina Simone, qui avait sorti sa version en single en 1968 et l'a incluse dans l'album du même titre. Sa reprise a eu plus de succès en Angleterre que l'originale et elle en a donné de grandes interprétations sur scène. Elle s'est littéralement appropriée cette chanson.
Aux dernières nouvelles, 223 reprises de To love somebody étaient recensées, dont beaucoup ces dernières années à l'occasion de télé-crochets. Il y le choix, depuis la première chronologiquement, par Lulu, à la version R&B (James Carr à défaut d'Otis), en passant par des interprétations soul (The Mirettes), gospel (The Sweet Inspirations) ou reggae (Busty Brown produit par Lee Perry).

Sur la face B, Turn of the century est le titre d'ouverture de l'album 1st, sorti en juillet 1967 (leur premier album international, mais le troisième en fait; on y trouve aussi To love somebody). C'est un bon exemple de pop psyché orchestrale.
Dans une veine similaire, le dernier titre du 45 tours, Close another door, est aussi le dernier titre de 1st, mais avant ça c'était la face B du single anglais To love somebody.

Si vous voulez vous plonger dans l'univers des Bee Gees et que vous lisez l'anglais, je vous conseille, même sans l'avoir lu, le livre tout récent de Bob Stanley de Saint Etienne, Bee Gees : Children of the world.







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