26 juillet 2015
TROUPE LÉLÉ : L'autonomie
Acquis sur le vide-grenier de Saint Remy en Bouzemont le 19 juillet 2015
Réf : EDI 106 -- Edité par Ediroi en France vers 1977
Support : 45 tours 17 cm
Titres : L'autonomie -- Ti Paul -/- Citron galet
Parmi les cinquante disques achetés dimanche dernier, il y en a quelques-uns de Madagascar, comme le Freddy Ranarison, beaucoup de ségas de La Réunion, comme le Jean-Claude Thévenin, et trois de Maloya qui font partie des au moins neuf disques édités par Ediroi (Editions Réunion Océan Indien) à partir de la deuxième moitié des années 1970.
En plus de celui-ci, le premier que j'ai écouté et mon préféré, j'ai aussi ceux de la Troupe Fondbac et de la Troupe du Foyer du Coeur-Saignant, mais aucun des deux de la Troupe La Résistance du Sud, dont l'un est le premier enregistrement publié par Danyel Waro.
Le Maloya, j'avais déjà dû voir passer le terme, mais je ne connaissais pas du tout ce style musical et je ne pense pas que je l'aurais associé à La Réunion. Voici comment Stéphane Davet le présente dans Le Monde du 20 décembre 1999 : "A la Réunion, c'est le maloya qui aura été le meilleur véhicule de la contestation. Danse de transe, chant incantatoire, le maloya s'est enraciné dans la culture des esclaves et des Nègres "marrons", ces fugitifs réfugiés dans les hauteurs volcaniques de l'ex-île Bourbon. Après l'abolition de l'esclavage, en 1848, leurs descendants maintiendront ces traditions. En 1946, la départementalisation de la Réunion va conforter cette marginalisation. Jugé obscurantiste et symbole d'un passé encombrant, le maloya sera officieusement prohibé. Dans les années 70, le Parti communiste réunionnais (PCR) en fait la musique du petit peuple, l'instrument d'une identité enfin revendiquée. On tire de grandes figures (Lo Rwa Kaf, Firmin Viry, Granmoun Lélé) de la semi- clandestinité. Une jeune génération (Danyèl Waro, Ziskakan, Ti Fock) y verra aussi le meilleur moyen d'exprimer sa révolte."
Le Parti Communiste Réunionnais a lui-même édité au moins deux albums de Maloya a cette époque. Avec les disques d'Ediroi, ce sont je crois les premiers témoins discographiques de cette musique, dont l'audience va encore rester très limitée pendant une longue période.
Ce disque de 1977 est le tout premier enregistrement de la Troupe Lélé, un ensemble avant tout familial formé autour de Julien Philéas dit Lélé. Pour qu'il entame une carrière internationale sous le nom de Granmoun Lélé, il faudra attendre son passage au festival Musiques métisses d'Angoulême en 1993, là où a été enregistré son premier album, Namouniman.
Voici ce qu'écrivait Patrick Labesse à propos de son parcours dans le Carnet du Monde suite à son décès le 14 novembre 2004 : "C'était, avec Lo Rwa Kaf (mort le 26 juillet) et Firmin Viry, l'un des pionniers du maloya, l'emblème musical de la Réunion, à la fois chant et danse accompagnés de percussions, introduit, dit-on, par les esclaves amenés sur l'île à partir du XVIIIe siècle, une musique à la fibre rebelle, longtemps interdite par les autorités, miroir d'une bouillonnante culture créole. A Saint-Benoît, où il a toujours résidé, Julien Philéas, surnommé Granmoun (grand-père) Lélé, né d'un père cafre (descendant des esclaves venus de Madagascar et du continent africain) et d'une mère « batar-malgache » (métissée malgache), il commence à chanter, avec pour modèle son oncle chanteur de maloya, Arsène Madia, à partir de 18 ans, dans les « servis kabaré », des cérémonies rituelles d'origine malgache au cours desquelles les ancêtres sont honorés. Il travaille dans l'usine à canne, où est employé son père. Il y restera jusqu'à la retraite. En 1977, il crée son groupe, un collectif familial réunissant autour de lui sa femme, ses filles et ses fils."
Le Maloya de la Troupe Lélé est une musique rustique, presque autant que celle de Ti Frère, le patriarche du séga de l'Île Maurice, à base de percussions principalement, avec un chant en forme d'appels et réponses entre un soliste et un chœur. Ce qui est très surprenant avec ces trois titres c'est qu'ils sont très proches l'un de l'autre, surtout les deux premiers, tant du point de vue du rythme que de la mélodie du chant.
Le chanteur principal de L'autonomie est un enfant, Willy, pour limiter les risques de représailles en raison de son contenu militant.
Je suis très content d'avoir pu me procurer ce disque, à la fois un enregistrement que j'apprécie beaucoup et un document important dans l'histoire de la musique réunionnaise.
La famille Lélé continue de se produire sous le nom de Groove Lélé. Les trois titres de ce disque ont été inclus cette année à la fin dans son album Sapik Maloya, dont la pochette s'inspire de celle de ce 45 tours. Juste avant, on y entend Lotonomie, une nouvelle version de L'autonomie enregistrée près de quarante ans plus tard par son chanteur original, Willy Philéas.
Une biographie, Granmoun Lélé : La voix des ancêtres a été publiée en 2014 pour marquer le dixième anniversaire de son décès.
Une exposition autour de Granmoun Lélé est présentée à la médiathèque Jean Bernard des Avirons jusqu'au 13 août.
Troupe Lélé : L'autonomie.
Troupe Lélé : Ti Paul.
Troupe Lélé : Citron galet.
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