29 décembre 2019
RALFE BAND : Swords
Acquis chez Récup'R à Dizy le 21 décembre 2019
Réf : TAL-30 -- Édité par Talitres en France en 2007
Support : CD 12 cm
14 titres
Quand je suis arrivé à la ressourcerie, j'ai tout de suite vu qu'ils avaient mis en vente un nouveau lot de CD. Des disques neufs - encore sous cellophane - et en plusieurs exemplaires. Il s'est avéré qu'il s'agissait uniquement de disques publiés par le label bordelais Talitres. Comment ils sont arrivés là ? Mystère. Aucun disquaire dans le coin n'en aurait eu autant en stock et je ne pense pas qu'il y ait eu non plus de distributeur diffusant localement ces disques.
En tout cas, j'ai fait une sélection dans ce lot et je suis revenu à la maison avec quatre disques. J'ai été déçu par Taxi Taxi (trop mou) et Early Day Miners, groupe pourtant comparé à Low sur une étiquette apposée sur le disque. J'ai apprécié l'album Luxe de Stranded Horse, et surtout j'ai passé un excellent moment à l'écoute du disque que je vous présente aujourd'hui, Swords, le premier album de Ralfe Band.
J'ai écouté le disque "à l'aveugle", sans avoir ouvert le livret ni cherché d'informations en ligne, je ne savais donc pas si j'avais affaire à des anglais ou des américains. J'aurais plutôt penché pour des gens d'outre-Atlantique car, à l'écoute, je me suis dit que j'aurais bien classé ce disque dans un rayon Americana. Quelque chose de léger, pas particulièrement original, mais pour le coup réjouissant de bout en bout.
En fait, Ralfe Band est le projet d'Oly Ralfe, un anglais, qui crée seul quasiment toutes les chansons, et sur ce disque le groupe de base est un trio, avec Andrew Mitchell et John Greswell. Cette édition française de Swords est sortie deux ans après l'édition originale, bizarrement parue chez Skint, label plutôt réputé pour le Big Beat que pour de la pop-country-rock... Du coup, on a droit à deux titres bonus sur l'édition Talitres de 2007, deux faces B de singles. Très bien, c'est juste dommage pour un complétiste comme moi qu'il en manque une troisième, By a boiling sea, la face B de Fifteen hundred years.
Le disque démarre gentiment par une valse instrumentale et enchaîne avec une autre valse, Women of Japan, l'un des singles. Il y est question de trouver l'homme qui embrassait toutes les femmes du Japon (!?...), avec une sorte de cloche employée comme percussion, tout simplement mais à bon escient. Là, comme à d'autres moments (dont Arrow and bow), on pense de temps en temps à Will Oldham.
Quand on trouve toutes les chansons d'un disque bien ou très bien, on risque fort de se répéter, mais j'apprécie vraiment beaucoup aussi 1500 years, avec de la mandoline, de l'accordéon et même une ébauche de yodel, Broken teeth song, Crow, et Sword, une chanson lente, avec des chœurs bienvenus à la fin. Même Bruno mindhorn qui, pour moi, débute mal (très jazzy), finit très bien.
Visiblement, Oly aime bien décrire le type de ses chansons dans ses titres. Ainsi, on a droit à (encore) une valse, Albatross waltz, à un blues (l'excellent Parkbench blues, utilisé pour la musique d'une pub en 2011) et à une marche, March of the pams, dont le piano me fait penser à The big dig de Family Fodder, qui est une version d'une Gnossienne de Satie. Y aurait-il donc, là aussi, une référence à Satie ?
On retrouve le piano sur Siberia, l'instrumental qui clôt l'album original chez Skint de 2005.
La qualité ne faiblit pas sur les deux titres bonus, avec Run down the lane, qui m'a fait penser à du Tom Waits époque Raindogs en beaucoup moins barré, et Moths, un dernier instrumental, qui amène les choses calmement à leur terme.
Après Swords, Ralfe Band a sorti deuxième album, Attic thieves, bien reçu en 2008, puis la bande originale du film Bunny and the Bull et un autre album, Son be wise, en 2013.
On aurait pu penser le groupe fini pour de bon quand Oly Ralfe a sorti en 2018 un album solo, Notes from another sea mais, le mois dernier, Ralfe Band a annoncé son retour avec un nouveau titre, Sweating it out, et un concert est annoncé pour le 29 janvier. A suivre, donc.
Swords est toujours en vente en CD chez Talitres, au prix cadeau de 4 €.
Session acoustique en duo pour Le Cargo en 2008 (d'autres titres sont disponibles)
22 décembre 2019
MAZOUNI : Chérie Madame
Acquis par correspondance via Discogs en décembre 2019
Réf : HPC 86 -- Édité par Sawt El Arab en France en 1981
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Chérie Madame -/- Short
Un peu comme la compilation Antilles méchant bateau m'avait incité en début d'année à me faire offrir un 45 tours de Daniel Forestal, la rétrospective 1969-1983 de Mazouni parue au printemps dernier, que j'avais survolée à sa sortie et que j'ai écoutée plus tranquillement après l'avoir empruntée à la Médiathèque, m'a donné envie de me procurer un de ses disques pour vous en parler ici (et du coup j'ai aussi commandé le CD, excellent de bout en bout).
Ses chansons ont beau avoir été reprises par Rachid Taha, Zebda ou l'Orchestre National de Barbès, je ne connaissais pas du tout Mazouni avant la sortie de cette compilation. Né en 1940 à Blida en Algérie, il a commencé à enregistrer dans les années 1960. Il s'est établi en France en 1969, et c'est sur cette période que se concentre Un dandy en exil.
Comme je le disais, la compilation est excellente. Bien entendu, les orchestrations "arabisantes" dominent, avec une interprétation et une production de grande qualité, mais il y a des surprises, comme la guitare électrique de Daad dagui ou Je pense à celle qui, bien que datant de 1973, sonne quasiment yé-yé. Parmi les chansons qui m'emballent, il y a Écoute moi camarade, Je n'aime pas le jour, je n'aime pas la nuit et Adieu la France ("Adieu la France, bonjour l'Algérie, quand j't'ai quittée, combien j'ai pleuré. Finie souffrance, finie l'indifférence, bientôt je serai avec toi chérie").
Et aussi, on aurait pu faire un superbe EP rien qu'avec les cinq duos masculin-féminin qui ponctuent l'album.
Souvent, l'amour que ces duos dépeignent est tout sauf romantique. Même dans un titre comme Mon amour, il est gentil, la femme chante à un moment "Si jamais tu me trompes je vais te tuer". Sur cette chanson comme dans d'autres, dont Je suis seul, un procédé intéressant est utilisé : un chanteur chante en Arabe, l'autre répond en Français (ou vice-versa), mais les phrases en Arabe et en Français riment.
Dans l'ensemble, l'homme n'a pas la vie facile dans ces duos. Dans Si massoud (Je t'aime et je t'aimerai), il en vient à supplier "Respecte au moins les moustaches qui sont les miens". Dans L'amour maâk, il est confronté à une prostituée raciste :"Je ne monte pas avec quoi parce que tu es un arabe", "Vas-t-en espèce de bicot, c'que tu m'dis m'est bien égal", "Tu m'touches pas pauvre imbécile, je n'aime pas non plus les noirs"...
Ça tombe bien parce que le duo qui m'a carrément fait éclater de rire à la première écoute, c'est Chérie Madame et j'ai pu trouver un exemplaire de ce disque à un prix relativement correct. Certes, à ce prix-là la pochette est en piteux état et le disque bien râpé, mais il passe.
Il existe au moins quatre éditions de ce titre : celle-ci chez Sawt El Atlas, qu'on trouve aussi avec une pochette légèrement différente, une autre chez La Voix du Globe, avec la même pochette, sur laquelle a été ajouté un crédit pour la chanteuse Meriem Abed et qui, coup classique, donne comme auteur de la face A non pas Mazouni mais Si Ahmed Soulimane, le fondateur du label.
La dernière édition, chez Pariphone, avec une autre face B, semble plus ancienne. De toute façon, la date donnée pour Chérie Madame sur la compilation, 1981, me semble tardive par rapport aux photos de pochette, qui font vraiment très première moitié des années 1970.
Quelque part, Chérie Madame est un duo dans le style du Vous me quittez déjà de Melon Galia. Mais là où chez Melon Galia le ton est gentiment moqueur, ici c'est presque féroce.
Voici les répliques de Meriem Abed dans la chanson aux phrases chantées en Arabe. Une partie de ces phrases est traduit chez Born Bad, mais de toute façon on en devine aisément le sens au vu des réponses :
"Comment comment, je n'ai pas compris (...)
Tu n'as pas honte, ta saloperie (...)
Je n’ai pas besoin, non merci (...)
Tu ne sais pas bien danser (...)
Achète-moi une DS (...)
Dans mon cœur, il n’y a pas de place (...)
Tu es fauché et pas riche (...)
Si tu m’aimes, moi je m’en fiche (...)
Je t’en prie, laisse-moi tranquille (...)
Oh la la, quel imbécile !(...)
Oh, le pauvre, il se répète (...)
Mais je m’en fous pas mal, tu es bête (...)"
Et il manque le ton moqueur sur lequel certaines de ces phrases sont balancées. Quant à la musique, elle est entraînante, avec une flûte qui danse dans nos oreilles.
La face B, Short, ne figure pas dans la compilation Born Bad. Chantée en arabe par Mazouni seul, elle s'inscrit dans une série de chansons où il se penche sur les tenues vestimentaires, puisqu'il a aussi enregistré Zetti short et Mini jupe. On trouve Mini jupe sur la version numérique et le vinyl d'Un dandy en exil, mais pas sur le CD, par manque de place.
Il existe un autre 45 tours avec Short en face B. C'est à se demander si le 45 tours de 1981 ne serait pas une réédition avec deux titres déjà précédemment parus.
Mazouni vit actuellement en Algérie. Il a dû quitter la France au début des années 1990 après avoir publié une chanson soutenant Saddam Hussein au moment de la première guerre du Golfe.
Un dandy en exil Algérie-France 1969-1983 de Mazouni est en vente chez Born Bad.
Une autre édition de mon 45 tours avec une photo de pochette de la même session, mais différente.
15 décembre 2019
PHILADELPHIA INTERNATIONAL ALL STARS / MFSB : Let's clean up the ghetto
Acquis neuf à Châlons-sur-Marne en 1977
Réf : 5451 -- Édité par Philadelphia International en France en 1977
Support : 45 tours 17 cm
Titres : PHILADELPHIA INTERNATIONAL ALL STARS : Let's clean up the ghetto (Vocal) -/- MFSB : Let's clean up the ghetto (Instrumental)
J'ai publié plus de 1500 chroniques ici en 14 ans et je n'ai jamais chroniqué deux fois le même disque. Certes, je me suis souvent intéressé à des éditions différentes d'un même disque (avec notamment une série sur Power, corruption & lies), mais dans l'idée, je n'ai l'intention de chroniquer un disque qu'une seule fois, même si ça m'est déjà arrivé, des années plus tard, de relire une chronique et d'avoir envie de la modifier ou la compléter.
Ce qui m'est arrivé plusieurs fois aussi, c'est d'avoir l'idée de chroniquer un disque et de me rendre compte que j'ai déjà fait cette chronique. C'est assez logique, car quand un disque m'intéresse suffisamment pour que je passe du temps à le chroniquer, les raisons qui ont suscité cet intérêt peuvent rester valables des années plus tard. Mais ça confirme que, sur certains aspects, j'ai des trous de mémoire impressionnants.
En général, une rapide recherche sur le blog me confirme qu'un disque est déjà chroniqué ou non quand j'ai un doute, mais les choses ne sont jamais allées aussi loin qu'hier : j'ai passé sûrement deux bonnes heures entre vendredi et samedi à faire des recherches d'information et à préparer un billet pour le 45 tours Girlfriend is better de Talking heads. J'ai commencé à préparer le billet, à y intégrer les images et les vidéos... Ce n'est que quand j'ai entamé la rédaction et que j'ai voulu vérifier toutes mes chroniques étiquetées Talking Heads que je me suis rendu compte avec horreur que cette chronique était déjà en ligne depuis mai 2013 ! Je m'étais demandé pourquoi j'avais bien pu acheter isolément ce disque sur Ebay. La réponse était simple : c'était pour le chroniquer !
La seule chose rassurante dans cette histoire, c'est que quasiment tout ce que je comptais dire hier à propos de Speaking in tongues et Stop making sense, je l'avais déjà exprimé tel quel en 2013. Au moins, sur ce point, je suis consistant avec moi-même !
Comment je me suis retrouvé dans cette situation ? Tout a commencé mardi. Comme je passais quelques jours à Paris, l'ami Philippe D. m'a invité à une projection de Stop making sense, un événement organisé à l'occasion de la sortie en Blu-ray d'une énième version remasterisée de cet excellent film de concert de 1984 réalisé par Jonathan Demme.
Déjà, je croyais avoir revu le film assez récemment en DVD, mais je me trompais : j'ai juste écouté cette année une réédition CD de l'album que je venais d'acheter pas chère en Angleterre, qui a l'avantage par rapport au 33 tours 9 titres original de contenir les 16 titres qu'on entend dans le film.
En sortant de la salle, je me suis fait trois remarques :
1) Purée, la qualité des chansons de Talking Heads est quand même excellente;
2) J'ai vraiment sous-estimé Speaking in tongues à sa sortie. Certes, ce n'est pas un classique comme Remain in light, mais les six titres de l'album interprétés dans le film (le tournage s'est fait à la fin de la tournée Speaking in tongues, le groupe n'a plus jamais tourné ensuite) sont quand même très bonnes, avec une parenté marquée avec Tom Tom Club ;
3) le costume extra-large de David Byrne joue un rôle beaucoup moins important dans le film que dans mon souvenir. Il ne le porte que pendant une ou deux chansons avant d'enlever la veste et, non, il ne se "gonfle" pas pour devenir de plus en plus gros comme je croyais m'en souvenir !
Toujours en sortant, je me disais que j'espérais ne pas avoir déjà chroniqué mon double maxi-45 tours avec This must be the place et Slippery people car ça me permettrait de parler ici de Speaking in tongues.
J'ai vérifié, et je n'avais pas chroniqué ce double maxi, mais au bout du compte (c'est ce qui avait déjà dû se passer en 2013), j'ai préféré envisager de chroniquer Girlfriend is better, car c'est un 45 tours avec la version Stop making sense de cette chanson de Speaking in tongues.
Bon,la chose positive dans tout ça c'est que, en re-préparant ce billet déjà publié, j'ai eu l'idée d'une autre chronique pour ce week-end, celle du tube Let's clean up the ghetto.
Là encore, ça montre que je n'étais pas au meilleur de ma forme en cette fin de semaine. J'étais donc en train d'écouter des singles de Talking Heads en vue de ma chronique tout en m'affairant dans mon bureau. A un moment, je me remets à l'ordinateur après avoir lancé un disque et je dresse l'oreille. "Tiens, elle n'est pas mal cette intro, c'est quoi cette face B de Talking Heads ?", me suis-je dit. Oups, en quelques secondes, j'avais oublié que j'avais fini d'écouter les Talking heads et que je venais de lancer Let's clean up the ghetto. Mais l'enchaînement était parfait et confirme que, au-delà de Take me to the river, la soul-disco a été l'une de leurs influences.
Mais pourquoi est-ce que ce 45 tours des Philadephia International All Stars s'était retrouvé sur ma pile de disques à écouter ? Tout simplement parce que, deux jours plus tôt, chez Gilda à Paris, j'avais acheté le 45 tours TSOP de MFSB. Je pensais l'avoir déjà avec une autre pochette, mais non, je confondais avec Let's clean up the ghetto.
Je pense que l'exemplaire du disque que je chronique aujourd'hui est bien celui que, à l'époque de sa sortie, ma famille avait acheté. Je ne pense pas que mes parents s'y soient intéressés suffisamment pour décider de l'achat. Cela veut dire que, avec mon frère et ma sœur, on avait dû être accrochés à cette chanson au point de tanner les parents pour qu'ils achètent le disque, mais je ne me souviens pas comment il avait pu autant nous marquer. Certes, ce 45 tours a dû avoir beaucoup de succès et il passait beaucoup en radio, mais il y en avait plein d'autres cette année-là, de Rockcollection à Daddy cool, et je suis étonné que celui-ci fasse partie des quelques disques familiaux achetés cette année-là.
En tout cas, plus que le refrain, je sais ce qui a dû nous accrocher dans cette chanson : sa ligne de basse, six notes si je compte bien, énorme. Pas étonnant qu'elle ait été aussitôt reprise en reggae par Johnny Clarke ou qu'elle ait été samplée plusieurs fois.
Let's clean up the ghetto, c'est un projet de Philadelphia International Records, le label de Gamble et Huff. Il y a eu un album, avec des titres inédits des principales vedettes du label, qui sont réunies pour la chanson-titre de plus de huit minutes (divisée en deux faces sur le 45 tours), accompagnées par MFSB, le groupe maison qu'on entend sur la plupart des productions du label.
Quand on a acheté ce disque, je n'ai prêté aucune attention aux stars mentionnées au recto de la pochette (Lou Rawls, Billy Paul, Archie Bell, Teddy Pendergrass, O'Jays et Dee Dee Sharp Gamble), tout simplement parce que je ne connaissais aucun de ces noms.
Ce qui est rare dans ce type de chanson qui réunit plusieurs artistes pour une bonne cause, c'est qu'on n'a pas du tout l'impression à l'écoute d'avoir juste des gens qui se succèdent chacun leur tour au micro pour dire quelques lignes. Même si dans les faits c'est ce qu'il se passe, on arrive ici à quelque chose de parfaitement réussi et homogène.
En pleine période disco, la chanson est certes dansante, mais conserve des racines rhythm and blues fortement marquées. Côté paroles, on est dans le "socialement conscient", proche dans l'esprit de certaines chansons de Curtis Mayfield. Inspirées par la vision d'horreur de New York à l'époque d'une grande grève des éboueurs, elles appellent les habitants des ghettos à se prendre en main pour gérer leur quartier, sans compter sur les autorités. Fort logiquement, les bénéfices de ce projet sont allés au soutien d'actions communautaires dans les quartiers de Philadelphie.
Dans l'esprit, une chanson comme celle-ci annonce le rap. On n'est après tout en 1977 que cinq ans avant la publication de The message.
La face B du 45 tours est intéressante car il me semble qu'elle est différente de la deuxième partie, largement instrumentale, de la version album de la chanson.
Je n'aurai donc pas chroniqué un disque de plus de Talking Heads ce week-end, mais je suis bien content d'avoir eu l'occasion de danser en écoutant Let's clean up the ghetto !
08 décembre 2019
SHIVAREE : Breach
Acquis chez Gilda à Paris le 18 novembre 2019
Réf : 01143-2006-2 -- Édité par Zoë aux Etats-Unis en 2004
Support : CD 12 cm
5 titres
J'étais venu à Paris pour le boulot et je pensais avoir juste le temps en fin de journée de faire des emplettes chez Gilda et Parallèles. Sauf qu'en arrivant à 18h45 à la boutique, j'ai découvert que les horaires avaient changé et que la fermeture n'était plus à 20h mais à 19h. Je n'ai donc eu que quelques minutes pour regarder à toute vitesse les CD maxi ou en pochette cartonnée à prix bradé. J'en ai trouvé beaucoup moins que d'habitude, bien sûr, mais je suis quand même reparti avec une grosse poignée de disques, dont celui-ci de Shivaree.
On n'a beau voir que la chanteuse Ambrosia Parsley sur les pochettes, Shivaree était un trio américain, composé également du guitariste Duke McVinnie et du clavier Danny McGough, qui a notamment joué avec Ramsay Midwood et tourné avec Tom Waits (Quels noms ils ont tous, si c'est les vrais, pas besoin effectivement de se chercher un pseudo !).
Je connais bien sûr et j'apprécie leur tube Goodnight moon, et au fil du temps j'ai fini par acheter leur premier album I oughtta give you a shot in the head for making me live in this dump.
Je ne connaissais pas du tout ce maxi, mais il m'a suffi de retourner la pochette pour voir qu'il s'ouvrait par une reprise de The fat lady of Limbourg de Brian Eno pour le mettre aussitôt dans ma petite pile.
Il s'avère que Breach est sorti à l'automne 2004, en pleine campagne électorale américaine (celle qui aboutira à la réélection de George W. Bush), pour annoncer la sortie début 2005 du troisième album, Who's got trouble ?.
Pour des raisons contractuelles, le deuxième album n'était pas sorti aux États-Unis, mais la réputation du groupe avait connu un sursaut en 2004 avec l'inclusion de Goodnight moon sur la bande originale de Kill Bill : Vol. 2.
On trouve sur ce maxi cinq titres, avec d'abord deux extraits de l'album à venir, plus deux reprises et un titre original inédit par ailleurs.
Habituellement, c'est plutôt Peter Saville qui pille les autres, mais ici la barre colorée sur la pochette me fait fortement penser à celle qu'on trouvait en 2001 sur la pochette de Get ready de New Order.
J'imagine que le groupe a disposé d'un budget impressionnant pour l'enregistrement de son album. Rien que pour ce maxi, il y a trois producteurs extérieurs (plus Danny McGough) et six studios pour l'enregistrement et le mixage, tous à New York sauf Plus XXX à Paris, où l'album a été mixé. Ce séjour à Paris explique sûrement la collaboration avec Bertrand Burgalat, qui joue du piano électrique Rhodes sur l'album.
J'ai chroniqué ici il y a déjà bien longtemps Taking tiger mountain (by strategy), et j'ai inclus ce disque parmi les grands précurseurs du genre dans ma Discographie personnelle de la New Wave. Plus le temps passe et plus j'apprécie cet album, un disque uniformément excellent et mon préféré de Brian Eno. Malgré cela, son influence directe reste assez limitée en terme de reprises. De tête, je peux citer Third uncle par Bauhaus, le morceau-titre et Put a straw under baby par Pascal Comelade, Taking tiger mountain étant également repris par les inspirés The Pascals.
Shivaree fait donc à mon sens preuve d'un excellent goût en reprenant The fat lady of Limbourg. Leur version permet de redécouvrir la chanson avec une oreille neuve, d'apprécier la qualité de sa construction et ses différents éléments marquants, et de se pencher un peu plus sur les paroles bien délirantes, avec la grosse bonne femme du Limbourg qui demande un baiser bien collant comme récompense pour goûter des échantillons et un gros œuf de canard noir qui se révèle être en cire !
La chanson suivante, I close my eyes, est aussi extraite de l'album et c'est un original de Shivaree. Elle aurait bien pu sortir en titre principal de single : c'est pour elle qu'une vidéo a été réalisée et elle a aussi circulé en disque promo. On voit bien la parenté avec Goodnight moon et c'en est un digne successeur, sauf que là le succès n'a pas été particulièrement au rendez-vous.
Le titre suivant est une reprise de Fear is a man's best friend de John Cale. la version originale de l'album Fear est sortie en 1974, comme Taking tiger mountain, et les deux albums ont comme musiciens en commun Eno et Phil Manzanera. La voix un peu paresseuse d'Ambrosia Parsley fonctionne très bien par ailleurs, mais là, sa façon de chanter le refrain sans conviction ni passion dessert complètement cette version. C'est pourtant une chanson importante pour le groupe : ils l'avaient déjà reprise une première fois en 2000, en face B de John, 2/14.
Le titre suivant est encore une reprise, d'un titre que je connaissais pas bien, Strange boat des Waterboys, sorti à l'origine sur l'album Fisherman's blues. Cette version est un duo avec Ed Harcourt qui fonctionne bien. Il y a un petit côté Bruce Springsteen dans les deux versions, je trouve.
Le dernier titre, 657 bed b, est également un duo, cette fois avec Scott Bondy de Verbena. C'est une réussite qui sonne comme un classique de la country, sauf que c'est une composition originale.
Shivaree est un groupe qui semble avoir aimé les reprises. Avant de se séparer, le groupe a sorti un quatrième album, Tainted love : Mating calls and fight songs, uniquement composé de reprises (mais on n'y trouvait pas la trace de la chanson de Gloria Jones !).
30 novembre 2019
LES HARICOTS ROUGES : Tu as calé le moteur
Acquis à la Broc' Livres-BD-CD-DVD du 111 à Châlons-en-Champagne le 24 novembre 2019
Réf : MS 59 -- Édité par Milan en France en 1980
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Tu as calé le moteur -/- Caravan
Jamais je n'aurais imaginé être aussi content de trouver un disque des Haricots Rouges ! Ce n'est pas que je ne les aime pas (j'ai même un de leurs EP des années 1960), mais c'est juste que je les associe surtout à une adaptation à la sauce française du gumbo du jazz Nouvelle-Orléans, un style de musique que je me suis mis à apprécier au fil du temps (la preuve là ou là par exemple), mais je n'en suis pas à en rechercher avidement toutes ses expressions discographiques.
Comme je devais passer par Châlons ce jour-là, je me suis arrêté à cette petite bourse organisée avenue de Paris. Une petite douzaine de stands, dont un seul m'a vraiment intéressé : on y trouvait des 45 tours, 33 tours, 78 tours et CD à prix modique.
Il n'y avait pas des quantités astronomiques de disques, mais j'ai fait vite quand même, et parfois dans ces cas-là mes doigts vont plus vite que mes yeux quand je fais défiler des disques. Là, le temps que vienne à mon cerveau le fait que j'avais repéré le nom "Les Haricots Rouges", j'étais déjà trois ou quatre disques plus loin.
Je m'étonne encore d'avoir pris la peine de revenir en arrière pour examiner ce disque. Ce qui m'a décidé est très ténu, simplement le fait que ce n'est pas très courant de tomber sur un 45 tours deux titres de ce groupe. Mais je n'ai pas regretté ma décision quand j'ai vu indiqué au recto le titre Tu as calé le moteur. J'ai tout de suite retourné la pochette et j'ai eu la confirmation immédiate que la chanson est créditée à Henri Debs et que j'avais donc bien affaire à une reprise de Tu as calé le moteur par Henri Debs et son Combo International, chanté par Serge Christophe et Claude Tranchot, un 45 tours sorti en 1971, que j'ai découvert cet été quand on s'est éclaté dessus avec Philippe R. à Nantes. J'en avais parlé ici, et j'ai inclus ce titre dans mon excellente compilation Parfois c'est compliqué, toujours disponible à l'écoute en ligne pour votre plus grand plaisir.
Certes, en quelques clics je pourrais aller sur Discogs et m'offrir le disque original ci-dessus pour une trentaine d'euros port compris, mais c'est presque trop facile et je n'en tirerais pas grand plaisir, sachant que j'ai déjà pu écouter et télécharger ce morceau.
Non, je suis très content, pour 50 centimes essence non comprise, d'avoir appris qu'il existait cette reprise de Tu as calé le moteur par Les Haricots Rouges.
Si on m'avait posé la question, j'aurais dit que la musique des Haricots Rouges était intégralement instrumentale. C'était vrai à leurs tous débuts en 1963 mais, dès 1965, avec Maman n''veut pas, ils ont inclus des titres chantés à leur répertoire. Et déjà à cette époque, ils ne limitaient pas au jazz Nouvelle-Orléans, puisqu'on trouve sur le même EP une version de Le barbu sans barbe d'Adamo, qui enregistrait comme eux chez Pathé Marconi.
La reprise de Tu as calé le moteur est donc chantée. Heureusement, car les paroles gentiment à double sens (pas besoin d'avoir l'esprit mal placé pour le saisir...) sont essentielles. L'arrangement qui en est donné, avec beaucoup de percussions et de cuivres, sonne à mes oreilles plus Samba/Brésil qu'Antilles ou Nouvelle-Orléans. Au bout du compte, on est dans un territoire commun à Zanini et Henri Salvador.
Caravan, de Duke Ellington, doit être l'un des thèmes les plus populaires du jazz. Il y en a des centaines de reprises et, sans l'avoir cherché, j'en ai déjà plusieurs versions sur disque, par des artistes très différents. La version des Haricots Rouges n'est pas mal du tout, surtout pour moi dans ses parties les plus orientalisantes.
Ces deux titres sont extraits de l'album Les Haricots Rouges, enregistré à Genève et sorti en 1980. On y trouve des versions de Freight train, Hé là-bas, Love me tender, ou Shake, rattle and roll, ainsi qu'un original au titre intrigant, Tu peux pas étrangler ta femme.
La pochette de l'album présente six dessins illustrant des chansons, dus à Boss, alias Michel Quéraud, l'un des membres du groupe. Pour la pochette du 45 tours, c'est le dessin illustrant Caravan qui a été préféré à celui de Tu as calé le moteur.
Une formation des Haricots Rouges existe et tourne encore. Le dernier album, French melodies, est sorti en 2013 chez Frémeaux & Associés. Actuellement, il y a un membre fondateur dans la formation, Pierre Jean (piano). Si j'en crois les infos trouvées chez Fleurs de Vinyl, il n'y avait aussi qu'un membre fondateur au moment de l'enregistrement de l'album de 1980, mais c'était Gérard Tarquin (clarinette).
Bon, maintenant, il ne me reste plus qu'à mettre la main sur le 45 tours d'Henri Debs...
23 novembre 2019
RUSS HENDERSON AND HIS CARIBBEAN BOYS : Caribbean carnival
Acquis chez Demelza Bookshop à Hythe le 15 octobre 2019
Réf : ALL 817 -- Édité par Allegro en Angleterre en 1966
Support : 33 tours 30 cm
10 titres
Depuis 2014, j'ai eu quatre fois l'occasion de visiter cette boutique Demelza, et à chaque fois j'y ai fait de bonnes affaires. La première fois, j'avais trouvé un paquet de 45 tours et pas moins de quatre 33 tours Greatest Hits d'artistes Motown à 1 £, d'époque et brillants comme s'ils étaient neufs.
Plus tôt cette année, c'est plutôt des CD que j'avais trouvés, mais là j'ai à nouveau trouvé quelques vinyls, un peu plus chers mais toujours à un prix très correct, avec deux albums de Bobby Bare, un album et quatre 45 tours sans pochette illustrée des années 1970 de Johnny Cash, et cet album de Russ Henderson, qui vient compléter une bonne série de trouvailles de disques antillais cette année.
Allegro, qui a édité cet album, est une filiale de Pickwick International, un label spécialisé dans le disque "pas cher". Je ne sais pas lequel a réédité l'autre, mais il y a une autre édition de ce disque sur un label du même genre, Embassy, avec un autre titre, West Indian nights, crédité à "Russ Henderson et un groupe des meilleurs artistes antillais de Londres" :
Dans la même veine que ce nom d'artiste, les notes de pochette de mon édition sont aussi candides que maladroites, et en disent beaucoup sur la raison d'être de ce disque :
"Avec la population toujours croissante d'antillais en Grande-Bretagne et la demande pour la musique qu'ils préfèrent, on a fait appel à Russ Henderson, qui vient de Port-d'Espagne à La Trinité, pour faire cet album.
Russ, qui est depuis de nombreuses années un musicien actif à Londres, n'a eu aucune difficulté à réunir les meilleurs artistes de son pays, avec le bon feeling et le rythme nécessaire pour produire un enregistrement authentique."
La promesse sur la pochette de "rythmes magiques du calypso, du blue beat et de steel band" confirme cette volonté de faire dans l'attrape-tout de la musique antillaise.
J'avais en fait déjà un des titres de cet album, le tout dernier, West Indian drums, sur la compilation London is the place for me 2 d'Honest Jon's (2005) et ce titre a aussi été repris en 2013 sur la compilation Mirror to the soul de Soul Jazz. Cet instrumental qui associe les deux spécialités d'Henderson, le jazz et le steel band, est pourtant loin d'être un de mes titres préférés de l'album.
Non, mes titres préférés sont les deux chantés par un certain Ray Blair, choisis, ce n'est pas un hasard, pour ouvrir chacune des faces : le ska Sammy dead Oh ! (reprise d'un titre de 1964 de Byron Lee and the Dragonaires) et, plus surprenant, la version de Walking the dog de Rufus Thomas.
Les cinq autres titres chantés le sont par Vernon Neptune. Comme pour Ray Blair, je trouve peu de mentions le concernant, sinon qu'il a chanté deux chansons du film Terminus en 1961. Il y a deux titres assez convenus, Marianne et Jamaica farewell, mais Coconut woman et Stone cold dead in de market sont deux calypsos bien enlevés. Le chant sur la version de Yellow bird (alias Choucoune) est moins prenant que celui d'Emy de Pradines ou Martha Jean Claude, mais la mélodie reste imparable.
Des deux titres de steel band proposés, je n'aime pas trop la version de Peanut vendor, mais j'ai bien apprécié celle de Non ho l'eta' per amarti.
Russ Henderson n'est pas très connu du grand public et a publié peu de disques sous son nom, mais il a joué un rôle important pour la musique antillaise à Londres. Mort en 2015 à 91 ans, il était avec Sterling Betancourt, qu'on entend aussi sur ce disque, l'un des onze musiciens du Trinidad All Steel Percussion Orchestra, qui a fait sensation en faisant découvrir le steel band en Grande Bretagne en 1951. Resté sur place, il a fait ensuite une double carrière, comme pianiste de jazz (son premier instrument) et musicien de steel band. Outre de multiples sessions, il a joué en résidence pendant des décennies au Coleherne et au 606 Club à Londres.
Il est également réputé (et décoré) pour avoir été l'un des fondateurs du Notting Hill Carnival. Invité à animer une fête de rue avec son groupe en 1965, le steel pan avait fini par peser lourd sur ses épaules et ils se sont mis à défiler dans le quartier. Les gens les ont suivis, et les années suivantes les foules ont grossi, jusqu'à arriver à la folie de dizaines de milliers de personnes qu'on connaît maintenant. L'émergence de cette fête est sûrement l'une des raisons qui a poussé Allegro à publier ce Carribean carnival.
Et pour les fans de The Jam, signalons pour finir qu'on entend Russ Henderson sur The planner's dream goes wrong de l'album The gift.
Les deux faces de l'album sont en écoute sur YouTube :
17 novembre 2019
SAINT ETIENNE : Nothing can stop us / Speedwell
Acquis peut-être à Paris peut-être chez Danceteria sûrement le 8 juin 1991, sinon chez A la Clé de Sol à Reims en juin 1991
Réf : HVN9 CD -- Édité par Heavenly en Angleterre en 1991
Support : CD 12 cm
Titres : Nothing can stop us -- Speedwell -- Nothing can stop us (instrumental)
Dans mon agenda de 1991, j'ai noté que j'étais à Paris le 8 juin pour une réunion Férarock, et dans les conducteurs de mon émission Vivonzeureux! (en attendant la mort...), je vois que j'ai commencé à passer ce single de Saint Etienne le 10 juin. De là à penser que j'ai ramené ce single de ma virée parisienne, il n'y a pas loin. Sauf que, quand on allait comme ça à Paris, on avait rarement le temps de faire les boutiques, alors peut-être que, plus prosaïquement, je l'ai acheté dès sa sortie chez A la Clé de Sol.
Toujours est-il que, après m'être fait offert en avant-première le premier disque du groupe, Only love can break your heart, j'ai acheté neufs tous les disques de Saint Etienne jusque Hobart paving / Who do you think you are, et je les ai souvent passés à la radio : à l'automne 1991, j'ai passé des extraits du premier album Foxbase Alpha quasiment toutes les semaines pendant deux mois.
Je me suis récemment procuré l'édition "deluxe" double CD de Foxbase Alpha, ainsi que le livre Higher than the sun : The story of Screamadelica, Foxbase Alpha, Bandwagonesque and Loveless de Tim Worthington, c'est ce qui m'a donné l'envie de ressortir ce disque, qui a toujours été l'un de mes préférés de Saint Etienne, y compris pour sa pochette très sobre, qui prolonge la référence française du nom du groupe en reproduisant la maquette des paquets de cigarette Celtique.
Nothing can stop us est le troisième disque sorti par Saint Etienne, mais c'est aussi une grande première, à deux titres : c'est la toute première chanson composée par les deux fondateurs Pete Wiggs et Bob Stanley, et c'est la première apparition au chant de Sarah Cracknell. Au départ, elle qui ne devait être qu'une chanteuse invitée, comme auparavant Moira Lambert et Donna Savage, mais la collaboration a tellement bien fonctionné que, très vite, le groupe est passé d'un duo à un trio.
J'ai toujours apprécié le fait que, à l'origine, Wiggs et Stanley sont des passionnés de musique bourrés de bonnes idées, mais pas des musiciens. A leurs débuts, ils se sont beaucoup appuyés sur leur ingénieur du son Ian Catt et leurs amis musiciens pour réaliser leurs idées, et petit à petit ils se sont mis à composer.
La première fois, c'était donc avec Nothing can stop us, après avoir entendu sur la route du studio I can't wait until I see my baby's face, une chanson de Dusty Springfield parue en 1967 sur l'album Where am I going. Ils ont pensé que c'était une bonne idée de sample, et ont construit leur titre à partir de cette base (j'ai toujours su que cette chanson sonnait très sixties, sans savoir à l'époque d'où venait l'échantillon). Un peu comme Eye know de De La Soul parait-il, la chanson est construite principalement comme un refrain instrumental. Elle fonctionne bien toute seule, comme le prouve l'instrumental qu'on trouve ici en troisième titre, mais elle convient aussi parfaitement à la voix de Sarah Cracknell. J'apprécie particulièrement l'envolée instrumentale (avec des flûtes je crois) à chaque fois après que Sarah chante "Nothing can stop us now".
Ce single est en fait une double face A, qui couple Nothing can stop us avec Speedwell, un titre plus dans la veine un peu indie dance pour laquelle le groupe commençait à être réputé. C'est d'ailleurs Speedwell qui sera choisi comme titre principal pour l'édition américaine. Dans les notes de pochette de Foxbase Alpha deluxe, Ian Catt remarque que Speedwell, c'est Pete Wiggs qui fait du Moby huit ans avant la sortie de l'album Play, en posant une voix d'un vieux titre gospel sur du piano façon italo-house. C'est vrai, mais pour le coup c'est moins accrocheur que les tubes de Moby et, même si au bout de plusieurs minutes je finis par être pris par le rythme, c'est un titre que j'ai très rarement envie d'écouter.
Ce single a eu un certain succès à sa sortie. En 1994, Pete Wiggs, Bob Stanley et Ian Catt ont tenté d'en faire un tube global en en produisant une reprise pour Kylie Minogue. Au bout du compte, cette version n'est sortie qu'en face B de Confide in me. Elle n'est pas mauvaise du tout, mais elle reste très proche, et sûrement même trop proche, de la version originale largement diffusée trois ans plus tôt, ce qui explique sûrement pourquoi elle n'a pas eu une diffusion plus large.
En 2019, Saint Etienne continue son bonhomme de chemin. La semaine dernière encore, ils étaient en concert à la Philharmonie de Paris, en première partie d’Étienne Daho. Ce qui a donné à out ce beau monde l'occasion de raviver pou un soir leur projet commun St Etienne Daho.
Une des versions remixées de Nothing can stop us. La chanson y perd tout son charme.
10 novembre 2019
THE FALL : Why are people grudgeful ?
Acquis par correspondance via Discogs en octobre 2019
Réf : CDS PERM 9-- Édité par Permanent en Angleterre en 1993
Support : CD 12 cm
Titres : Why are people grudgeful ? -- Glam-racket - The re-mixer - Lost in music
"Pourquoi les gens sont-ils rancuniers ?", c'est le titre générique de ce maxi de The Fall et on se dit que Mark E. Smith était bien placé pour répondre à cette question, lui qui semble avoir passé sa vie plein de colère à en vouloir au monde entier, à commencer par les membres de son groupe et les journalistes. En y regardant bien, il semble que ce soit l'industrie du spectacle à laquelle il se frottait alors depuis déjà une quinzaine d'années qui est plus précisément la cible de sa bile sur ce disque.
Ce single est sorti en avril 1993. Les trois précédents albums avaient été publiés par Fontana, une filiale du gros conglomérat Phonogram. Mais, comme souvent dans ces boites, un changement de direction avait tout gelé et de nombreux contrats d'artistes allaient être rendus. La rumeur indiquait que The Fall ferait partie de ceux qui échapperaient à la purge, mais ça signifiait des mois d'attente et d'incertitude, des réunions à n'en plus finir. Smith a préféré tout simplement claquer la porte, enregistrer à ses frais l'album suivant, The infotainment scan, et signer sur un nouveau label, Permanent, fondé par l'un des ex-managers du groupe, un indépendant bénéficiant d'un contrat de distribution avec la major BMG.
Le premier fruit de ce contrat, c'est donc ce maxi qui, selon un coup marketing assez difficile à saisir, est sorti en édition limitée et n'a été commercialisé que pendant une semaine. L'album est sorti trois semaines plus tard.
Pour moi, le titre essentiel du disque, c'est le dernier, Lost in music. D'un son synthétique digne d'un film de science-fiction émerge une voix féminine, qui débite sur un ton neutre, en français :
"L'argent est sur la table
Pris au piège
Inutile de regarder en arrière
Perdu dans la musique
Crétin, va te faire foutre !"
Ces paroles sont répétées à plusieurs moments dans la chanson, mais très vite, Mark E. Smith intervient. Lui aussi en français, en tout cas autant qu'il peut, sachant qu'il ne supportait guère non plus ni la France ni les français. Il n'essaie pas de prononcer argent et se contente d'énoncer "Le money il sur la table" avant de continuer en anglais.
J'avais bien noté que, musicalement, surtout sur le refrain, on était quasiment sur un territoire disco ce qui, venant de The Fall, est surprenant, même à une époque où leur son s'était professionnalisé et doté de synthés et autres séquenceurs.
Il m'a fallu bien deux ans après avoir découvert ce titre pour apprendre qu'il s'agit en fait d'une reprise.
La version originale par Sister Slegde, a été écrit et produit par Chic en 1979. Smith a remis les paroles à sa sauce, mais en a gardé l'esprit général, quelqu'un qui plaque tout, à commencer par son boulot, pour se lancer dans la musique : "Avez-vous déjà vu quelqu'un perdre tout. C'est la tête qui part d'abord. La responsabilité pour moi c'est une tragédie, je trouverais un boulot une autre fois.". Le refrain a aussi été conservé, plus ou moins, mais sinon la "reprise" est du pur Fall, tandis que l'original, même si c'est du Chic et même si ça a été un gros succès, est à peu près inécoutable pour moi.
Pour le titre principal, Why are people grudgeful ?, Mark E. Smith fait à nouveau preuve de l'étendue et de la versatilité de sa culture musicale et nous donne des pistes sur la façon dont il trouvait l'inspiration pour ses paroles. Là, il s'est basé sur deux chansons, People funny boy, l'un des premiers succès de Lee Perry en 1968, qui lui donnait l'occasion de s'en prendre à son ancien producteur, Joe Gibbs, et la réponse publiée presque aussitôt sur le même rythme par Sir Gibbs, People grudgeful. Sans rythme reggae, mais avec une basse énorme quand même, Smith arrange les paroles originales à sa sauce pour en faire une diatribe, peut-être adressée à l'un des anciens membre du groupe ("When you were down and out I always helped you out, and when you go out you just chat and shop"). C'est excellent.
Pour The re-mixer, c'est l'un de ses propres titres que Smith retravaille. L'original s'appelait The mixer et était sorti deux ans plus tôt sur l'album Shift-work. Là, ce n'est pas un remix (trop évident), mais une nouvelle version, plus techno, avec des paroles revues. Difficile de savoir qui est le mixeur en question (les exégètes penchent pour l'ingénieur du son de l'album), mais on peut penser que, dans un coin de son esprit, Smith avait en tête les DJ vedettes de l'époque, dont les remixes étaient devenus un passage obligé pour les titres sortis en single.
Le quatrième et dernier titre de cet excellent et très consistant maxi, c'est Glam-racket (Boucan glam), et c'est exactement ça qu'on entend : un riff bien crade à la Slade, un rythme à la Gary Glitter,... C'est apparent le riff trouvé par le groupe qui a inspiré Smith pour les paroles. Comme ces paroles mentionnent "suede", certains y ont vu une attaque contre le groupe vedette de la Brit pop, mais ce n'est apparemment pas le cas, pour une fois, Smith ayant expliqué qu'il faisait référence à la matière, le suède (le daim).
Sur le 33 tours original The infotainment scan, on retrouve Lost in music et Glam-racket. Sur le CD original, il y a deux titres en plus, dont Why are people grudgeful ?. Comme souvent chez The Fall, les versions album sont (légèrement) retravaillées et donc (légèrement) différentes de celles du maxi.
Si vous voulez vous procurer les quatre titres de ce disque, je vous conseille d'opter pour la réédition en double CD de The infotainment scan (2006), qui contient l'album, le maxi, des sessions radio et même des mixages inédits.
Mon homonyme JC The Vinyl Villain a chroniqué ce maxi au moment même où je l'achetais. Chez lui, on peut télélcharger les quatre titres, ainsi que ceux de Lee Perry et Joe Gibbs.
The Fall, Lost in music et Why are people grudgeful ? dans l'émission The Beat, en 1993.
The Fall, The mixer, en direct dans une émission de télévision.
01 novembre 2019
THE CURE : The Peel sessions
Acquis chez New Rose à Paris en 1992
Réf : SFPS 050 -- Édité par Strange Fruit en Angleterre en 1988
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Killing an Arab -- 10:15 Saturday night -/- Fire in Cairo -- Boys don't cry
En cette année 2019, The Cure a choisi de célébrer son 40e anniversaire. Un choix de date qui se tient, même s'il ne correspond pas à la date de création du groupe, ni tout à fait, si on chipote, à celle de la sortie de son premier disque, puisqu'à l'origine Killing an Arab est sorti chez Small Wonder fin décembre 1978. Mais le disque a fait le plus gros de sa "carrière" en 1979 (il a vite été réédité chez Fiction) et, au cours de cette même année, le groupe aura sorti l'album Three imaginary boys et les singles Boys don't cry et Jumping someone else's train. Excusez du peu !
Pour fêter ça, The Cure a fait une tournée cet été et vient de sortir 40 live, un coffret CD-DVD de concerts rétrospectifs. Il parait que les concerts étaient très bien; c'est sûrement vrai, mais je ne ressens aucune envie de prendre le temps d'aller en écouter/voir des extraits. De même que je ne trépigne pas à l'annonce de la sortie quasi-imminente d'un nouvel album studio, le premier depuis 2011. Pourtant, j'ai eu l'occasion d'acheter au fil du temps les trois albums parus ces vingt dernières années et ils n'ont rien d'infamant (j'ai même vraiment apprécié Bloodflowers). Mais, quitte à ressasser mon intérêt jamais démenti pour la musique de ce groupe, je préfère ressortir mes disques d'époque et les réécouter.
Parmi ceux-ci, il y a ce maxi de la collection Peel sessions de Strange Fruit. Je ne sais plus quel jour précisément c'était, mais je me souviens précisément des circonstances de mon achat: c'était lors de ma toute dernière visite dans le magasin New Rose. J'y étais allé comme d'habitude à l'occasion d'une journée passée à Paris, et j'étais tombé sur un magasin presque vide de clients, et surtout presque vide tout court car il allait prochainement fermer définitivement ses portes. J'avais acheté quelques disques soldés ce jour-là, dont celui-ci.
Cette session a été enregistrée le 4 décembre 1978 et diffusée pour la première fois le 11. J'imagine le choc que ça a dû être pour les fidèles auditeurs de Peel de découvrir ce soir-là ces quatre chansons d'un groupe inconnu n'ayant alors sorti aucun disque (je pense que c'était la première grande diffusion publique à l'échelle nationale pour le groupe).
Et quelles quatre chansons ! Killing an Arab est un classique parmi les classiques. 10:15 Saturday night, à la fois la face B du 45 tours et le titre d'ouverture, est un titre complètement original. C'est ce qui continue de m'impressionner avec les meilleurs groupes New Wave (Young Marble Giants, Wire,...) : même en cherchant bien, je suis parfois incapable de citer des gens qui ont pu influencer leurs meilleures compositions.
Le titre qui suit, Fire in Cairo, est pour le coup une chanson d'une facture plus traditionnelle mais, dans ce style c'est l'une des grandes réussites du premier album, avec Accuracy et la chanson Three imaginary boys.
Boys don't cry est la seule des quatre chansons qui me parait un peu différente de la version disque, un peu plus lente notamment. Mais ça s'explique sûrement par le fait que la version studio n'était pas encore enregistrée, contrairement à celle des trois autres.
Il faut se pincer pour se souvenir que le groupe qui produit tout ça est un trio des plus classiques, avec juste une guitare, une basse, la batterie et le chant. Et on sait que l'enregistrement des sessions Peel se faisait en quelques heures... Selon All Music, le bassiste Michael Dempsey estime que ces versions plus énergiques et un peu plus brutes sont les meilleures et présentent le son définitif du Cure des débuts.
Même si bien sûr je n'étais pas à l'écoute quand ces titres ont été diffusés en décembre 1978, je suis capable de l'imaginer, ce choc que les auditeurs ont ressenti. Tout simplement parce que, un an plus tard, en décembre 1979, j'ai vécu une expérience similaire en découvrant The Cure un dimanche midi à la télévision dans l'émission Chorus d'Antoine de Caunes. Je ne m'en suis toujours par remis.
Après cette première session, Peel a continué à soutenir The Cure : le groupe a enregistré une session par an de 1979 à 1982, et encore une sixième en 1985.
Les quatre titres de la Peel session de 1978, avec le commentaire de John Peel lors de leur diffusion (ou rediffusion pour certains des titres).
The Cure, en concert pour l'émission Chorus le 8 décembre 1979 (début à 1'15), en quatuor : A forest (et pas At night), Three imaginary boys et Killing an Arab.
28 octobre 2019
ARLT : Soleil enculé
Acquis par correspondance chez Objet Disque en octobre 2019
Réf : D028 / MM024 -- Édité par Objet Disque / Murailles Music en France en 2019
Support : CD 12 cm
9 titres
L'ami Rémy (Les Frères Nubuck, Rémy Chante, Chevalrex) sort ses propres disques chez Vietnam depuis le deuxième album de Chevalrex, mais il reste parallèlement très actif avec son propre label, Objet Disque, lancé après la fin de l'aventure Nubuck et l'arrêt de Sorry But Home Recording.
Outre Le Bâtiment, déjà évoqué ici, il publie sur un rythme soutenu des disques dans une palette essentiellement et éclectiquement francophone. Rien que cette année, on a eu droit à des rééditions de Perio, des nouveaux albums de Jérôme Minière et Fabio Viscogliosi et deux singles d'Adrien Legrand.
Et puis nous arrive ce quatrième album de Arlt (sans compter leur collaboration avec Thomas Bonvallet), le premier chez Objet Disque, mais il y avait déjà eu deux albums du guitariste Mocke (Arlt, donc, mais aussi Chevalrex, Holden, The Zeppelin record de Dogbowl et plein d'autres) et, en 2016, le CD-Livre Patate de vivre par Arlt & les Artistes d'Enfance.
Ma rencontre avec Arlt remonte au 7 juillet 2012 et ce fut un moment magique. Je m'étais rendu pour la première fois au Ptit Faystival, dans les Ardennes belges, attiré par la présence à l'affiche de Patrik Fitzgerald (j'y suis retourné en 2018 pour voir The Monochrome Set), et j'ai été instantanément happé par l'ambiance particulière de cet événement, avant même la cuisson de la spécialité collective les canadas aux rousses et les prestations de musiciens locaux, quand, dès le début, Arlt s'est produit dans le chapiteau, en duo (Mocke était absent) avec Sing Sing à la guitare et au chant et Éloïse Decazes au chant et aux instruments percussifs bizarres (dont un marteau, je crois me souvenir). J'ai beaucoup apprécié ce concert mais, par la suite, je n'ai pas été autant enthousiasmé par les deux albums que j'ai écoutés, sûrement parce que je l'ai fait trop rapidement.
Par contre, j'ai très vite été conquis par ce nouveau disque, un album compact (9 titres en 30 minutes tout pile), enregistré à Thiers, à quatre (avec Clément Vercelletto en plus de ceux déjà cités) plus quelques invités.
S'il y avait un championnat du monde des titres d'album percutants, Soleil enculé remporterait très probablement une médaille. Mais, au-delà de ce titre, ce qui compte c'est qu'on a une suite de chansons originales et enthousiasmantes.
A l'écoute du premier titre, Frère et sœur, je me suis dit à un moment qu'on pourrait appeler cette musique du folk progressif, avant de me corriger et d'opter plutôt, en bon rémois, pour du folk de traverses. Les deux voix mêlées d'Eloïse et Sing Sing m'ont fugacement évoqué Areski et Brigitte Fontaine. Une impression renforcée par la maquette du dos du CD et du livret qui, ça ne peut pas être un hasard, m'a rappelé la pochette de L'incendie (cela, sans compter que Arlt et Brigitte Fontaine seront à la même affiche d'un concert prévu le 13 décembre prochain à Laval).
Les commencements poursuit dans la même veine avec, comme pour tout l'album, une particularité pour les paroles (et les chansons), qui ne sont pas construites sur le mode couplet/refrain/couplet...
L'instant même, sur une sorte de riff répétitif quasi-post punk, pose une grave question: "Combien de temps dure l'instant même ?". Un mathématicien pourrait répondre que ça tend en limite vers zéro, mais pour ma part j'aurais envie de relancer le débat par en demandant ce qui sépare un instant d'un autre.
Pour La violence est rose, c'est le premier album de Katerine, Les mariages chinois, celui avec Chérie (Que je n'ose appeler) et Comme Jeannie Longo, qui est ressorti des tréfonds de mon esprit.
Et l'album se poursuit ainsi avec une angine, le ciel qui est tarte et des fleurs. Pour trouver des références plus proches dans le temps, on peut aussi se reporter à Porta S. et ses Enfants de la rosée, découverts en début d'année.
A chaque fois la partie musicale qui ouvre Quand le soir tombe, et qu'on entend encore plus tard dans le morceau, me fait irrésistiblement penser à l'ami Dorian Feller et à son Brodé Tango.
Arrive enfin, pour finir l'album, le morceau titre. C'est là qu'on découvre que "Soleil enculé" est une insulte adressée par un enfant à notre astre solaire et à son "gros crépuscule". C'est le titre le plus long de l'album, le seul de plus de cinq minutes, et le groupe se lâche un peu dans la partie finale, avec, on dirait bien, une guitare qui cite Desafinado.
Soleil enculé est d'ores et déjà l'un de mes nouveaux disques préférés de cette année. J'espère maintenant avoir prochainement l'occasion de revoir Arlt en concert.
Soleil enculé est en vente chez Objet Disque. La date de parution officielle est le 15 novembre, mais les pré-commandes sont déjà servies, la preuve puisque j'ai reçu mon exemplaire.
20 octobre 2019
BOBBY JOHNSON AND THE ATOMS : A whiter shade of pale
Acquis sur le vide-grenier de Val de Vesle le 15 septembre 2019
Réf : 460.226 ME -- Édité par Fontana en France en 1967
Support : 45 tours 17 cm
Titres : A whiter shade of pale -- Another man -/- Do it again a little bit slower -- Tramp
A Val de Vesle, juste après avoir acheté des 78 tours, je suis tombé sur des dames qui vendaient des disques aux pochettes en assez piteux état. Ce qui est étonnant à ce moment avancé de la matinée (plus de 11h), c'est qu'elles n'avaient pas encore fixé le prix de leurs 45 tours. Finalement, elles ont opté pour "la moitié du prix des 33 tours", soit 25 centimes. Je leur ai pris six disques, dont un Marcel Bianchi que je n'avais pas, un Myriam Makeba et un Arthur Smith. Il s'agissait au moins en partie de leurs propres disques, puisqu'une des dames s'est souvenue en voyant les disques qu'elle avait eu une bonne note en cours de dessin après avoir la peint la pochette de Guitar boogie !
Ce n'est pas particulièrement pour son titre principal que j'ai pris ce disque. C'est une énième version de A whiter shade of pale. Pourtant, parmi les grandes scies des années soixante, celle-scie est une de celles que j'apprécie toujours (même si j'ai un peu de mal avec les paroles), au point que j'ai déjà chroniqué ici la version originale de Procol Harum ("La seule, la vraie") et une autre reprise opportuniste, celle de Pro Cromagnum (Sapiens), qui vaut surtout pour sa face B, Neurotic saga.
Non, si j'ai choisi ce disque, c'est surtout à cause de la photo de pochette, pleine de promesse de rhythm and blues, une promesse qui m'a semblé confirmée par la présence en face B d'un titre comme Tramp.
Un article de décembre 2002 paru dans le n° 169 de Soul Bag nous raconte l'histoire de Bobby Johnson and the Atoms, groupe composé de musiciens originaires des Antilles. Leur histoire est celle de centaines de groupes de cette époque, qui produisaient une musique de qualité, même si elle n'était pas particulièrement originale, qui ont tourné pendant des années dans le circuit des clubs mais qui n'ont pas eu de grande carrière discographique. En fait, les quatre titres de cet EP sont quasiment les seuls publiés par le groupe. Au départ, il y a eu un 45 tours en Angleterre avec Do it again a little slower et Tramp. Puis, quand il a fallu trouver de quoi remplir un EP pour une publication en France, les deux autres titres ont été enregistrés en catastrophe.
J'ai trouvé ces informations sur le site français dédié à Otis Redding car, le 3 février 2007 à Valbonne, Bobby Johnson, accompagné par le CIV Soul Band, a donné un concert en hommage à Otis Redding, 40 ans après sa mort.
Difficile de réinventer la roue avec A whiter shade of pale. Cette version reste un bon slow, bien chanté. L'intérêt principal de cette interprétation vient du fait que l'orgue est remplacé par un cuivre (une trompette, je pense).
Le titre suivant, Another man, est une reprise d'un titre Blue Beat de 1964 paru sur le même label Ember. L'original était par Sonny and the Daffodils. C'est agréable et enlevé, la rythmique Ska/Blue Beat est encore un peu présente, mais cette version est très courte, au point qu'on a l'impression que l'enregistrement a été écourté pour que les deux morceaux tiennent sur une face de 45 tours.
En face B, contrairement à ce qu'affirme Bobby Johnson dans l'article de Soul Bag, Do it again a little bit slower n'est pas un original mais la reprise d'un single du printemps 1967 de Jon & Robin & the In Crowd. La chanson est écrite par Wayne Thompson qui, sous le nom de Wayne Carson, est notamment l'auteur de The letter. Cette version reste très pop, mais The Atoms lui donnent une coloration rhythm and blues que l'original n'avait pas.
Pour Tramp, je suppose que, pour vous comme pour moi, c'est une chanson que vous connaissez dans sa version en duo de 1967 par Otis Redding et Carla Thomas. Mais je ne savais pas que cet enregistrement était une reprise, sortie malheureusement pour Bobby Johnson and the Atoms au même moment que la leur. L'original, de fin 1966, est de Lowell Fulsom et ce titre a connu un certain succès. Il n'y a pas le supplément d'humour du duo, mais j'associais Lowell Fulsom strictement au blues et je ne l'aurais pas imaginé créant un titre de cette trempe, quasiment assez funk pour être au répertoire de James Brown. La reprise de Bobby Johnson fait tout à fait honneur à l'original, avec une basse assez puissante. Sur l'album The Mike Quinn Show live at The Flamingo, il existe une autre version de cette reprise, censée être enregistrée en public au Flamingo Club. J'ai bien l'impression que, comme souvent à cette époque, il s'agit de l'enregistrement studio trafiqué avec des sons d'ambiance.
Ce n'est plus souvent que je tombe en brocante sur des obscurités des années soixante. Celle-ci est d'autant plus bienvenue.
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