31 octobre 2015
PERE UBU : We have the technology
Acquis chez Rough Trade à Londres vers 1989
Réf : UBU 112 -- Edité par Fontana en Angleterre en 1988
Support : 45 tours 30 cm
Titres : We have the technology -- The postman drove a caddy -/- We have the technology -- The B side
Autant que je sache, peu de monde s'attendait à ce que Pere Ubu sorte un nouveau disque en 1988, six ans après Song of the bailing man et alors que David Thomas multipliait les projets. Pour ma part, j'avais eu la chance de voir David Thomas and the Pedestrians sur scène à Reims et je m'étais même retrouvé à patienter dans la même pièce que lui un jour chez Rough Trade Records, mais je ne cherchais pas spécifiquement à me procurer le nouveau disque.
Mais un jour, j'arrive dans la boutique Rough Trade et je tombe, dans un bac à soldes maigrichon, sur ce maxi avec sa superbe pochette à 1 £. Pas question de laisser passer ça. Quelques temps plus tard, j'ai eu l'occasion de me procurer l'album dont il est extrait, The tenement year, et je n'ai pas regretté car c'est l'un de mes préférés du groupe.
Tous les exemplaires cette "Collectors edition" étaient censés être numérotés mais il n'y a aucune trace de chiffres dans le rectangle prévu à cet effet sur mon exemplaire et j'ai bien l'impression qu'il n'y en a jamais eu.
Il y a près de vingt ans, j'ai publié un article sur Pere Ubu intitulé We have the technology dans le fanzine Vivonzeureux!. Les paroles de la chanson y étaient reproduites, mais le sujet de l'article c'était l'actualité du groupe et son utilisation des nouvelles technologies, comme Internet et les CD-Plus, agrémentés de fichiers informatiques.
Ces paroles, je me garderai bien de les analyser et de leur trouver un sens univoque, mais fondamentalement, à chaque jour qui passe elles sont un peu plus d'actualité, avec cette façon de se moquer gentiment du "progrès" à tout crin : "Les penseurs et les poètes du passé, ils devaient plonger dans l'obscurité si aveuglément. Alors que nous nous tenons droits et libres (La lumière dorée du jour !). Reliés à nos machines, nos yeux rayonnent. La bizarrerie apparente des choses n'aura aucune importance. Nous avons la technologie, qui n'était pas disponible avant. Nous avons la technologie.".
Je ne m'y connais pas du tout en technique musicale, mais il y a dans cette chanson un travail très intéressant sur le rythme : on a l'impression par moments que le chant est décalé par rapport à la musique et il y a comme des enjambements très surprenants.
La version de l'album est la version indispensable de cette chanson. Il y a tout au long un son de synthé couinant qui me rappelle immanquablement les sucettes-sifflets à coulisse qu'on achetait chez le buraliste avec notre argent de poche. Il y a aussi une deuxième voix (aussi celle de David Thomas je pense), assez distanciée, qui se frotte et se confronte à la principale.
On retrouve cette version sur ce disque, mais seulement en face B. En 1988 comme aujourd'hui, il ne fallait pas que les choses soient apparemment trop bizarres et, pour la version de la face A et la vidéo, on a fait appel à Paul Stavely O'Duffy, qui a soigneusement mis sous le tapis tous les éléments surprenants. Son remix a cependant l'avantage de mettre en valeur la beauté et l'originalité pure de cette chanson, ainsi que les éléments plus "normaux" de l'instrumentation (les guitares, surtout), assez proche finalement des deux versions "en direct" diffusées depuis, celle enregistrée pour John Peel en 1989, et celle du concert du 7 décembre 1991 à Chicago, publiée sur l'album Apocalypse now. Il y a aussi au moins une autre version publiée de We have the technology, créditée à David Thomas and the Accordion Club, chroniquée ici en 2009.
Les deux titres supplémentaires proposés ici ont été enregistrés pendant les sessions de l'album spécifiquement pour être des faces B. L'un d'entre eux s'appelle d'ailleurs The B side, et il sonne comme un exercice amusant : on a l'impression que Pere Ubu
s'essaie à enregistrer un morceau funky, avec David Thomas qui donne des instructions chiffrées, suivant les règles d'un jeu que nous ne possédons pas.
The postman drove a caddy, avec John Kirkpatrick à l'accordéon, fait partie de ces chansons de Pere Ubu où David Thomas nous raconte une histoire avec un accompagnement musical fourni par le groupe. C'est plutôt réussi. Les paroles sont très drôles, à propos d'une lettre écrite par Albert Einstein détaillant une invention merveilleuse, perdue par la Poste pendant quarante ans avant d'être mise dans une boite aux lettre qui est bouffée par un cochon affolé... Je vous en passe, mais c'est très drôle et, comme le dit le refrain, : "D'une manière ou d'une autre, je savais qu'on allait au devant des emmerdes" !
La réédition de The tenement year de 2007 contient en bonus tous les titres du maxi, plus la version Peel de We have the technology, mais elle n'est déjà plus distribuée et il faut compter au moins 25 € pour se la procurer en CD.
29 octobre 2015
"TENNESSEE" ERNIE FORD : 16 tons
Acquis sur le vide-grenier de la F.C.P.E. à Ay le 28 juin 2015
Réf : EAP 1-693 -- Edité par Capitol en France en 1956
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Sixteen tons (Seize tonnes) -- River of no return (La rivière sans retour) -/- You don't have to be a baby to cry -- Give me your word
Il y a pile dix ans aujourd'hui, je publiais ma première chronique sur ce blog.
Quand j'ai eu cette idée de me lancer dans le récit de ma collection de disques, j'ai tout de suite su que j'avais de la matière pour tenir un bon bout de temps. C'était aussi un bon moyen de partager à nouveau une passion pour la musique, en complément de mon webzine, quelques années après avoir arrêté de produire des émissions de radio.
Initialement, je pensais surtout raconter des souvenirs et anecdotes à propos des disques que j'avais depuis longtemps, mais j'avais aussi noté que, depuis deux ou trois ans, j'avais pris l'habitude de rechercher des informations en ligne sur les disques que je venais d'acheter. Mais je les oubliais aussi vite et, quelques semaines ou mois plus tard, je me retrouvais à rechercher les mêmes informations ou à essayer désespérément de retrouver le nom mentionné sur un site que j'avais visité : le blog me sert aussi de béquille mémorielle.
Donc, c'est un peu une surprise pour moi, mais je pense que la majorité des plus de 1200 disques chroniqués est entrée dans ma collection dans les dix dernières années. Le blog influence d'ailleurs de plus en plus ma politique d'achat : je recherche encore plus qu'avant les éditions un peu particulières ou les disques avec un arrière-plan un peu original car c'est de ceux-là que j'ai envie de parler.
Dans cette optique, je reste très satisfait dix ans plus tard du choix que j'ai fait pour la toute première chronique. J'avais soigneusement évité de prendre un disque d'un de mes artistes ou genres fétiches : pas de Creation, de Jonathan Richman, de New wave ou de Lewis Furey. Non, j'ai pris un disque de country, un 45 tours EP sorti uniquement en France, avec une photo de pochette d'un photographe réputé, Jean-Pierre Leloir. Le chanteur, Tennessee "Ernie" Ford était plutôt ringard, mais il s'agissait du réenregistrement en 1965, dix ans après l'original, de son plus grand tube, 16 tons, dans une version plus "rock".
Eh bien, puisque qu'on fait un retour de dix ans en arrière, on va le faire aussi avec les enregistrements de "Tennessee" Ernie Ford, puisque j'ai sélectionné aujourd'hui cet enregistrement original de 16 tons, sorti initialement en 1956.
J'ai trouvé ce disque en juin dernier à Ay, comme l'African Jazz et le Blind Willie Dunn's Gin Bottle Four, et lui aussi a appartenu à un certain Ahr.
16 tons est éternellement associée à Ernie Ford. Je savais qu'il n'avait pas écrit cette chanson, mais j'avais oublié que c'est Merle Travis qui est crédité comme auteur, et j'ai découvert en préparant cette chronique que Travis l'avait même enregistrée, dès 1947, sur l'album Folk songs of the hills. Et, comme c'est souvent le cas avec la paternité des chansons folk, celle de 16 tons est disputée. George Davis l'aurait écrite dès les années 1930 sous le titre Nine-to-ten-tons. Il en a finalement enregistré une version en 1966.
La version de 1956 d'Ernie Ford, celle qui a été un tube énorme, a quand même quelque chose en plus que ces versions folk, dans l'orchestration et dans le claquement de doigts, une idée de Ford. Celle de 1965 reste peut-être ma préférée.
En France, c'est Armand Mestral qui a enregistré la version la plus connue, avec cette particularité fascinante : sur les pochettes il a la même horrible petite moustache fine qu'Ernie Ford. Il a la voix aussi grave, mais un style bien plus opératique. Et surtout, dans les paroles, presque plus rien sur le quasi-esclavage, en tout cas l'exploitation économique, subie par les mineurs. Le vers essentiel, "Je dois mon âme au magasin de la compagnie minière" a été complètement occulté dans la traduction.
J'ai ce disque d'Armand Mestral, mais je me le garde pour l'instant. Qui sait ? Je manquerai peut-être d'idée de chronique dans dix ans...
25 octobre 2015
PULP : Bad cover version
Acquis par correspondance via Discogs en octobre 2015
Réf : CID 794/582 900-2 -- Edité par Island en Europe en 2002
Support : CD 12 cm
Titres : Bad cover version -- Yesterday -- Forever in my dreams
Je crois que je n'ai jamais eu autant de mal à acheter un disque par correspondance. J'ai carrément dû m'y reprendre à quatre fois !
Ça s'explique par le fait que, quand ce single est sorti en 2002, a) les labels sortaient encore des singles et b) ils pratiquaient encore le multi-formatage, c'est à dire qu'un single donné sortait en trois, quatre ou cinq éditions différentes afin de gonfler les ventes. On avait connu les 45 tours simples et maxis, les double-45 tours, les cassettes, les CD en un, deux ou trois exemplaires, avec ou sans remixes ou versions live. Arrivés en 2002, une nouvelle hérésie avait fait son apparition, le DVD single, autrement dit un disque avec la vidéo du titre principal incompatible avec la plupart des chaînes stéréo !
Et, quelques années plus tard, quelqu'un a dû s'emmêler les pinceaux au moment de mettre en vente ce single en vente, tant et si bien que, les trois premières fois où j'ai commandé ce disque, chez Amazon ou Ebay, j'ai reçu des grosses boites qui mettent en vente ces disques d'occasion non pas ce CD single mais le DVD !
Certes, ces boites ne rechignent pas à rembourser rubis sur l'ongle quand elles se sont plantées, sans demander le retour de l'article envoyé par erreur, mais j'avais décidé que je voulais ce disque et finalement, c'est par l'intermédiaire d'un vendeur moins industriel sur Discogs que j'ai pu le commander, pour un peu plus cher, en m'assurant au préalable que je recevrais le bon disque.
Pourquoi je voulais ce disque ? Parce que je ne crache pas systématiquement sur le marketing et, quand je l'ai découverte, j'ai apprécié la campagne mise en place pour accompagner la sortie de ce titre extrait de We love life, l'album de Pulp de 2001. Ce single se trouve être le tout dernier disque sorti par le groupe avant sa séparation.
Au départ, il y a la chanson, Bad cover version, dans laquelle Jarvis Cocker dissèque les nouvelles amours d'une ex, qui ne peut que le regretter : "Car chaque contact te rappelle à quel point ça aurait pu être doux, et à chaque fois qu'il t'embrasse ça laisse le goût amer de la saccharine. Une mauvais reprise de l'amour ne vaut pas l'original.".
La première anecdote, et on ne saura jamais si elle est vraie, concerne la fin des paroles : "Chante ta chanson sur toutes les tristes imitations tellement à côté de la plaque : C'est comme un Tom et Jerry tardif quand ils parlaient tous les deux (...) comme les Stones dans les années 80 (...) comme la deuxième face de 'Til the band comes in."
'Til the band comes in, je ne le savais pas, mais c'est un album de Scott Walker de 1970, avec des titres originaux sur la face A et des reprises en face B, et parait-il que Jarvis ne savait pas quand il a écrit ses paroles que cette chanson serait produite par... Scott Walker lui-même ! Il était évidemment gêné au moment de l'enregistrer, mais pas Walker, qui ne doit pas être loin d'avoir le même avis sur ce disque, mais qui surtout ne se préoccupe pas de ses enregistrements de cette époque.
Il y a la pochette ensuite, et c'est pour ça que je voulais absolument cette édition du single, car les autres ont des pochettes différentes. Un seul coup d'oeil, et on comprend que cette pochette fait référence à l'album de 1972 The rise and fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars de David Bowie. Il est précisé dans les notes que le gamin sur la photo est Mark Webber, guitariste de Pulp et ancien secrétaire de leur fan club. Je pensais que Peter Saville et ses associés, crédités pour la pochette, avaient inséré numériquement la photo du gamin sur un fond similaire à la pochette de Bowie, mais c'est encore mieux que ça, comme on peut le lire chez ST33 : avant d'être fan de Pulp, Webber était fan de Bowie et, au tout début des années 1980, il a persuadé son père de trouver l'endroit exact où la photo de pochette de Bowie avait été prise pour s'y faire prendre en photo. Une pas très bonne version de la pochette, mais le groupe a eu une très bonne idée en décidant d'utiliser cette photo pour son propre disque.
Autre bonne idée pour le CD 2, que je n'ai pas acheté : il comprend en face B, deux, on le suppose "mauvaises", reprises de chansons de Pulp, Disco 2000 par Nick Cave et Sorted ? par Roisin Murphy. Eels avait aussi été contacté mais n'a pas pu enregistrer sa reprise dans les temps.
Pour promouvoir le single, une vidéo a été réalisée, bien sûr. C'est celle qu'on trouve sur le DVD. Là encore, la bonne idée, car la chanson s'y prête très bien, ça a été de traiter la vidéo sur le même mode que les singles de charité à grand spectacle, comme Do they know it's Christmas ? de Band Aid. Sauf qu'on est dans la mauvaise copie, alors les stars sont toutes des sosies de vedette, y compris un Jarvis forcément pas très réussi, et Jarvis lui-même qui apparaît sous les traits de Brian May, le guitariste de Queen.
Apparemment, de nombreux titres ont été enregistrées en prévision de l'album We love life, dont beaucoup sont restés inédits. On en trouve deux ici, tout à fait corrects, surtout Yesterday. Ils ont été enregistrés quelques mois plus tôt et sont produits par Chris Thomas.
Je me retrouve avec trois DVD de Pulp sur les bras. Un seul me suffit, alors j'offre les deux autres (sans la boite plastique) aux deux personnes qui donneront en commentaire de cette chronique un exemple de reprise particulièrement mauvaise.
Les reprises que j'ai diffusées en tant que Pol Dodu ou JC Brouchard sont hors-concours, ainsi que Je survivrai par Régine, parce que c'est trop facile !
Pulp mime sur la version studio de Bad cover version, dans l'émission Top of the Pops le 26 avril 2002.
24 octobre 2015
CHUCK BERRY : Teenage wedding
Consulté la première fois sur YouTube le 18 octobre 2015
Réf : [sans] -- Diffusé par Soundcheck24 sur YouTube en 2014
Support : 1 fichier FLV
Titre : Teenage wedding (You never can tell) (C'est la vie)
Nous sommes le 24 mars 1972 à Brême en Allemagne. Chuck Berry est sur le plateau de l'émission de télé Beat-Club et s'apprête à jouer dans les conditions du direct. Pour l'occasion, il est accompagné par le groupe Rockin' Horse (Jimmy Campbell à la guitare acoustique et Billy Kinsley à la basse, deux ex-Merseybeats, ainsi que Mike Snow au piano et Dave Harrison à la batterie).
Quelques semaines plus tôt, le 3 février, Berry était à Coventry en Angleterre, pour un concert avec d'autres musiciens, enregistré par sa maison de disques. Quelques jours plus tard, à Londres, cinq titres ont été mis en boîte en cinq heures, pause déjeuner comprise. Le tout, sous la forme d'une face studio et d'une face concert, donnera en octobre 1972 l'album The London Chuck Berry sessions, précédé en juillet par le single My ding-a-ling, le plus grand et sûrement le plus inattendu succès commercial de Chuck Berry.
Mais pour l'heure, Chuck est sur scène, quelques secondes avant l'enregistrement. Il annonce le titre du morceau à venir, Teenage wedding. Il s'agit en fait de You never can tell, un titre qui, comme No particular place to go, Nadine, Tulane et Promised land, a été écrit pendant son séjour en prison en 1962-1963. Enregistré en janvier 1964, peu de temps après sa sortie, il a été édité en 45 tours. On le connaît aussi sous le titre C'est la vie, une expression française qui figure dans les paroles. C'est ce titre qu'Emmylou Harris a retenu en 1977 pour sa reprise.
Le groupe répète. C'est à dire que Chuck donne quelques instructions, à ses jeunes musiciens comme aux techniciens. Une voix annonce "We're rolling" et, quelques secondes plus tard, ça démarre. Tranquillement et de façon très sympathique d'abord, avec cette histoire d'un jeune couple qui vient de se marier à La Nouvelle Orléans, ce qui explique les bouts de paroles en français comme "Pierre", "Monsieur", "Madame", "Mademoiselle",...
La performance devient exceptionnelle et jubilatoire à partir du deuxième couplet, quand Chuck fait une première remarque sur les paroles en regardant son bassiste ("Elle ne savait pas cuisiner", pour expliquer que le "coolerator" était plein à craquer de plats préparés et de soda au gingembre). Le bassiste éclate de rire, Chuck est bien content de son coup, puis il joue un long solo de guitare tout en finesse et en retenue ("real cool", comme il disait en répétition).
Au moment où il est question du son de la chaîne hi-fi jouée à fond, Chuck en fait une imitation à la guitare, avant de faire un deuxième commentaire sur le fait que le tempo de la musique baissait le soir ("Pour diverses raisons").
Au cours du solo de guitare qui suit, avec Chuck se met à sautiller sur place de joie et d'excitation.
On voit qu'il a un temps d'attente avant le couplet suivant. C'est sûrement parce qu'il était en train de penser à modifier les paroles : la "souped-up jitney" des paroles originales (une vieille guimbarde au moteur gonflé) devient une Mercedes qui fait plus couleur locale.
Comme sur la version studio, il y a un solo de piano. Le musicien est encouragé par Chuck qui se penche sur le piano ouvert et félicite le musicien d'un "Beautiful" bien sonore.
La chanson se termine avec Chuck qui s'amuse en produisant des choses très musicales tout en tenant sa guitare à l'envers, avant visiblement d'exprimer sa satisfaction avec l'expression, mystérieuse pour moi, "Mama Zita".
Au total, près de sept minutes de bonheur musical avec Chuck Berry, qui viennent contredire la réputation bien tenace qu'il avait, comme quoi la seule chose qui l'intéressait était d'être payé en espèces pour ses prestations et que les musiciens qu'on lui fournissait sachent jouer ses plus grands tubes. Cette réputation est basée sur des faits, bien sûr, mais il faudrait aussi préciser que, même encore à cette époque, il avait du plaisir à jouer et à donner une bonne performance. Sans compter son immense talent de musicien, chanteur et parolier...
Je ne suis pas tombé tout seul sur cette vidéo. En fait, elle a suffisamment plu à Howe Gelb pour lui inspirer dimanche dernier un sermon publié sur sa page Facebook :
happy happy Sunday. ... this is beyond lovely. and it also stands as the most accurate sonic illustration of what...
Posté par Howe Gelb sur dimanche 18 octobre 2015
Dans son texte, Howe fait le parallèle avec Giant Sand : "C'est l'illustration sonique la plus précise de tout ce que Giant Sand a jamais essayé de faire dans un bon jour (sauf la garde-robe)". Et il explique qu'ils perdent souvent une partie de leur public en concert en faisant vivre leurs chansons de cette façon et en les présentant de façon unique. Ce n'est bien sûr possible que si on refuse de faire d'un concert la répétition fidèle de soir en soir d'une liste pré-établie. A ce moment, un échange est possible avec le public et alors le musicien "joue" sur scène, il ne travaille pas.
C'est vrai pour Howe, Chuck et tous ceux, à commencer par Jonathan Richman, qui ne décident ce qu'ils vont jouer qu'au tout dernier moment, sur scène.
Deux autres versions de la vidéo de Brême :
Thèmes :
1970s,
2010s,
chuck berry,
howe gelb,
vidéo
18 octobre 2015
ST THOMAS : A long long time EP
Offert par correspondance par Philippe D. vers 2006
Réf : 20222-2 -- Edité par City Slang/Labels Germany en Allemagne en 2003 -- For promotional use only
Support : CD 12 cm
5 titres
Cela fait maintenant huit ans que Thomas Hansen, alias St Thomas, est mort. Comme pour Vic Chesnutt ou Mark Linkous de Sparklehorse, il est au niveau public dans une sorte de purgatoire. On trouve encore les disques sortis de son vivant, mais presque plus rien ne s'écrit sur lui et les rééditions ou sorties d'inédits ne sont pas encore à l'ordre du jour, comme c'est déjà le cas pour Elliott Smith.
Si je me souviens bien, c'est peu de temps après la parution de ma chronique du premier album de St Thomas, Mysterious walks, que Philippe m'a envoyé ce disque en cadeau. C'était déjà lui qui m'avait offert l'album.
Cet EP à la très belle pochette a été commercialisé uniquement en Norvège, début 2003, au moment où St Thomas était au faîte de sa popularité dans son pays. L'album Hey harmony, qui a suivi ce disque de quelques semaines, est entré directement à la deuxième place des ventes nationales.
Mon exemplaire est une édition promo sous pochette carton éditée par son label allemand. Je n'ai pas trouvé de trace d'une édition équivalente commercialisée.
Le disque s'ouvre avec le titre principal, A long long time, une chanson très réussie, assez typique du style que St Thomas a développé pendant sa courte mais prolifique carrière, avec six albums publiés entre 2000 et 2006.
Comme on a retrouvé ce titre en ouverture de Hey harmony, on sait, après avoir réussi à déchiffrer les notes minuscules et manuscrites du livret du CD de l'album, que la chanson a dû être écrite dans son appartement à Berlin et produite par Mark Nevers à Nashville, avec notamment d'autres musiciens de la galaxie Lambchop.
Les quatre autres titres ne sont disponibles que sur ce disque. Ils font partie des vingt-sept du CD-R démo Hey, harmony, dédié à Kurt Wagner et tiré à une trentaine d'exemplaires, envoyé notamment à Mark Nevers et aux musiciens de Nashville en préparation de l'enregistrement de l'album.
En l'absence de crédits, difficile de savoir s'il s'agit des versions démos ou de titres inédits des sessions de l'album, mais en tout cas ce sont mieux que de simples ébauches.
Sugarmilk coffee ("In a Berliner Café", initialement), avec ses choeurs en "Pa pa pa la pa, pa la da da" et la mention de "London" m'évoque la gaieté du Smashing time des Television Personalities.
Ride a un groove marqué qui sonne très années 1970, ce qui n'est pas courant il me semble chez St Thomas. Il y a aussi une guitare électrique assez proéminente et de l'orgue. Celle-ci, je parierais bien qu'elle est enregistrée à Nashville.
Pour Something happened, c'est clairement à Calexico qu'on pense, pour le rythme et le son de guitare.
America est le seul titre lent du disque, avec des grillons et un accompagnement folky au banjo ou à la mandoline. Le son plus dépouillé fait ressortir son accent anglais assez particulier. Les paroles débutent par "So you left for America, the place I've never been". Clairement, ça allait vite changer...
17 octobre 2015
JONATHAN FIRE EATER : These little monkeys
Acquis par correspondance via Discogs en octobre 2015
Réf : BLUFF 059CD -- Edité par Deceptive en Angleterre en 1998
Support : CD 12 cm
Titres : These little monkeys -- Tomorrow's news tonight -- The city never sleeps
Je ne sais plus ce qui m'en a donné l'idée, mais l'autre jour je suis allé vérifier si j'avais tous les titres de Jonathan Fire Eater. Loin de là, en fait, il me manque tout leur premier album, qui parait-il a un son pourri, et leur premier single, The public hanging of a movie star, tous les deux de 1995.
Il me manquait aussi ce single, extrait de leur album Wolf songs for lambs, mais j'en ai trouvé un exemplaire pas cher alors j'ai comblé ce manque. J'ai déjà chroniqué il y a bien longtemps le premier single extrait de cet album, When the curtain calls for you.
Sous une pochette très quelconque, on trouve ici trois excellents titres.
These little monkeys est plutôt bien choisi pour être tiré de l'album. Tout en tension, c'est un titre bien représentatif du style de ce groupe garage torturé qu'était Jonathan Fire Eater.
Au son, il parait clair que Tomorrow's news tonight est un titre issu des sessions de l'album. Il n'a pas été retenu, même s'il n'aurait pas déparé, avec son petit côté The Fall dans le chant. Notons tout de même que, même si musicalement ça n'a rien à voir, on entend l'expression "Tomorrow's new tonight" dans les paroles d'Impatient talent show, le dernier titre de Wolf songs for lambs.
Le dernier titre est une reprise. Après Harry Nilsson sur l'autre single, ils s'attaquent ici à une composition de Lee Hazlewood, ce qui donne une idée de la musique qu'ils aimaient. Sous son titre complet The city never sleeps at night était la face B de These boots are made for walking de Nancy Sinatra. Leur version est bonne, on y entend bien l'orgue Farfisa, et aussi les maracas du batteur, celles qui expliquent peut-être le dessin de pochette.
Le seul titre de gloire de Jonathan Fire Eater ces dernières années a été d'avoir engendré The Walkmen. Mais ce groupe est désormais séparé. On trouve encore, pour pas cher du tout, Wolf songs for lambs, un des grands disques des années 1990, mais peut-être que, les vingt ans de cet album approchant à grands pas, quelqu'un prendra l'initiative de le rééditer, en lui adjoignant les quelques titres de single et le mini-album Tremble under boom lights.
11 octobre 2015
AIDAN MOFFAT & THE BEST-OFS : How to get to Heaven from Scotland
Acquis par correspondance via Amazon en octobre 2015
Réf : CHEM113CD -- Edité par Chemikal Underground en Ecosse en 2009
Support : CD 12 cm
12 titres + 3 vidéos
C'est à grâce à un article de JC The Vinyl Villain que j'ai découvert au printemps dernier la chanson Big blonde d'Aidan Moffat (ex-Arab Strap) et son groupe The Best-Ofs, qui comprend (Comprenait ? Il n'y a pas eu de disque depuis) notamment un membre des Delgados et un de Mogwai.
Les deux versions me plaisent énormément et je n'arrive pas à en préférer l'une à l'autre. Celle de l'album est pop-folk tandis que celle enregistrée en direct pour une émission de radio est plus lente et plus dépouillée, sûrement enregistrée en duo.
Ce qui compte dans les deux, c'est l'air qui reste en tête et le chant et les paroles de Moffat. Là, il est assis dans une voiture quand une grande blonde accroche son regard. Il lui faut une fraction de seconde pour se rendre compte que c'est une de ses ex, et une de plus pour être frappé par une absence d'attraction et se sentir brièvement gêné par le souvenir de ses sentiments passés.
La chanson m'a suffisamment plu des derniers mois pour me donner envie d'acheter le disque correspondant.
J'aurais bien aimé me procurer les deux versions, mais je ne suis pas sûr que la session radio ait été indiqué sur disque. Il y a bien la version de luxe de l'album, avec deux vinyls et deux CD, qui contient une deuxième version de Big blonde, mais je n'étais pas prêt à investir plus de 50 euros port compris dans ce très bel objet, présenté comme une boite de jeux MB car le titre de l'album ("Comment aller au Ciel depuis l'Ecosse") et l'illustration du livret font référence au jeu de société des Serpents et des Echelles.
Je me suis donc contenté de l'album basique, emballé dans une très belle pochette cartonnée, et je n'ai pas été déçu. Certes, Big blonde reste ma chanson préférée, mais l'album en entier est d'une excellente tenue, composé intégralement de chansons d'amour, considéré à travers la vision particulière du romantisme de Moffat, et chantées sur le ton de confidence qu'on lui connaît. Pour l'heure, les autres titres qui m'ont le plus marqué sont That's just love, The last kiss et Living with you now, qui à elles trois résument très bien l'album. Il y a aussi la Berceuse pour un enfant à naître ("Parfois j'aimerais être avec toi là-dedans, mais tu sais bien qu'il n'y a pas beaucoup de place, alors entre-temps si tu as besoin de moi, tu n'as qu'à frapper sur la paroi du ventre").
A ce jour, les deux versions de Big Blonde sont toujours disponibles en téléchargement chez The Vinyl Villain.
Aidan Moffat, Plastic mistletoe. Vidéo figurant sur le CD. Le titre est sur le 5 songs EP de l'édition limitée de l'album.
10 octobre 2015
HOWARD DEVOTO : Rainy season
Acquis au Record and Tape Exchange de Notting Hill Gate à Londres vers 1983
Réf : VS 598-12-- Edité par Virgin en Angleterre en 1983
Support : 45 tours 30 cm
Titres : Rainy season -/- Rainforest (Variation N16)
La carrière discographique sous son propre nom de Howard Devoto, ex-Buzzcocks et Magazine, aura été des plus ramassées : un seul album, Jerky versions of the dream, dont deux singles ont été extraits, celui-ci et Cold imagination, le tout sorti en 1983.
Rainy season est le tout premier disque à être sorti, et ça me parait un choix tout à fait logique : c'est l'une des meilleures chansons d'un album qui s'est révélé globalement décevant, elle est entraînante, avec un refrain qui fonctionne bien et des gimmicks musicaux accrocheurs. Pour tout dire elle est suffisamment intéressante pour se hisser, peut-être pas au niveau du meilleur Magazine, mais sans problème à celui du dernier album du groupe avant sa séparation, Magic, murder and the weather.
La face B, Rainforest (Variation N16), est une version instrumentale de la chanson principale.
J'aime beaucoup, donc mais, si je me suis précipité sur l'album à sa sortie, j'ai attendu pour acheter ce maxi 45 tours de tomber sur un exemplaire pas cher du tout au Record and Tape Exchange qui était presque ma résidence secondaire pendant l'année 1983-1984.
J'ai ressorti ce disque car je viens de finir le livre de Benjamin Fogel Le Renoncement de Howard Devoto paru chez Le Mot et le Reste.
J'ai dû voir passer fugacement l'annonce de la sortie de ce livre en début d'année, mais il a fallu une chronique de la Musique à Papa le mois dernier pour me le remettre en mémoire et me décider à l'acheter. Il faut dire que je dois être le client parfait pour ce livre, sachant que je m'intéresse à Devoto depuis Real life en 1978 et que, au fil du temps, j'ai dû acheter presque tous ses disques (sauf le premier album de Luxuria), plus la revue Silence de Bazooka, son recueil de paroles et la biographie de Magazine par Helen Chase, publiée aux Presses de l'Université de Northumbria (!).
Ce livre est présenté comme une biographie romancée, ce qui me faisait un peu peur, mais dès l'avant-propos il est bien précisé que le livre s'appuie essentiellement sur des faits réels et n'a recours à la fiction que pour combler les vides et donner une continuité narrative. On n'est donc pas dans la biographie à l'américaine, avec des appels de notes toutes les deux lignes. Au contraire, on a un livre très bien écrit, qui se lit très facilement, tout en étant détaillé et juste sur les faits. Et Benjamin Fogel a d'autant plus de mérite qu'il est né en 1981, l'année même de la séparation initiale de Magazine, et a dû d'autant plus travailler pour se documenter sur le parcours de Devoto.
Avant le renoncement (provisoire) à la musique, il est plusieurs fois question de la pulsion négative de Devoto, celle qui le conduit à quitter les Buzzcocks très vite, début 1977. Un autre événement, que je connaissais moins, est celui du passage de Magazine à Top of the Pops pour y interpréter son premier single, Shot by both sides. Passage saboté par Devoto, qui aurait refusé de faire semblant de chanter.
Comme c'est possible de nos jours, j'ai recherché en ligne l'extrait de cette émission. On le trouve, grâce aux rediffusions télé de ces dernières années, mais il s'avère que, si Howard Devoto est effectivement quasiment immobile et très mauvais en play-back, ce n'est quand même pas au point de ne pas ouvrir la bouche au moment où on entend le chant.
En tout cas, c'était presque inespéré de voir paraître en français une biographie de Devoto et je ne peux que la conseiller à tous ceux qui voudraient découvrir le personnage, à condition quand même qu'ils aient commencé par écouter Real life.
Benjamin Fogel était l'invité de Vincent Théval dans Label Pop sur France Culture le 3 février dernier.
04 octobre 2015
LOW : What part of me
Consulté la première fois sur SoundCloud le 5 septembre 2015
Réf : [sans] -- Edité par Sub Pop aux Etats-Unis en 2015
Support : 1 fichier MP3
Titre : What part of me
Ones and sixes, le onzième album album de Low, est sorti en septembre. On avait la possibilité de l'écouter en ligne quelques temps avant sortie, chez Les Inrockuptibles par exemple.
J'ai profité de cette offre et ce que j'ai entendu m'a beaucoup plu. Depuis presque une dizaine d'années, Low a pas mal cherché à faire évoluer sa palette sonore, en y incorporant plus d'électricité ou d'électronique. Le son de ce nouvel album se nourrit bien sûr de toutes ces expériences, mais on y retrouve surtout tout ce qui a fait la réputation du groupe à son sommet, avec le EP Christmas ou l'album Trust : les ambiances éthérées, les voix de Mimi Parker et Alan Sparhawk, seules ou encore mieux ensemble,...
A la première écoute, j'ai particulièrement accroché à What part of me. Parce que cette chanson contient justement tous les ingrédients qui m'ont fait aimer Low à cette époque. Parce que son refrain tout simple ("What part of me don't you know ? What part of me don't you own ?") reste en tête pendant des heures après chaque écoute. Et aussi parce que, des percussions rudimentaires à la guitare rythmique et à la basse, tout plein d'éléments m'ont fait penser que What part of me, c'est un peu comme du Young Marble Giants joué et chanté par Low. Et je me doute bien que ce n'est pas facile de faire une chanson aussi simple et belle qu'une chanson de Young Marble Giants, mais Low a prouvé depuis longtemps qu'il en était capable.
La tournée européenne de Low débute cette semaine. Des concerts sont prévus à Tourcoing, Bruxelles et Paris les 30 et 31 octobre et le 2 novembre.
Low, What part of me, en direct sur la radio américaine The Current, le 18 septembre 2015. La chanson garde tout sa magie, même jouée en direct.
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