12 octobre 2025

KING CURTIS & THE KINGPINS : The dock of the bay


Offert par Christophe S. à Épernay le 31 décembre 2021
Réf : ATCO 65 -- Édité par ATCO en France en 1968
Support : 45 tours 17 cm
Titres : The dock of the bay -/- This is soul

L'ami Christophe m'a fait cadeau ce jour-là d'une grosse trentaine de disques, avec plein de bonnes choses, d'Henry Cording à James Brown et de Cousin Joe à Bob Marley. Bizarrement, contrairement aux fois précédentes, je n'avais encore chroniqué aucun de ces disques.
Dans les semaines qui ont suivi, j'ai écouté puis rangé ce disque. Je l'ai ressorti récemment après que Philippe R. m'a interrogé pour savoir si je connaissais King Curtis.
La première fois que j'ai entendu parler de lui, dans les années 1980, il me semble que c'était associé à des compilations cheap qui mettaient excessivement en valeur la participation de Jimi Hendrix à certains de ses enregistrements.
Plus récemment, j'ai lu des articles sur lui dans Mojo ou Uncut, et j'ai été marqué par le récit de sa mort à 37 ans, poignardé par un gars qui lui bloquait le passage en bas de chez lui.
Ce que je n'avais pas mesuré, c'est en si peu d'années l'importance et la variété du parcours de ce saxophoniste de rhythm and blues, qui joue sur Yakety yak et plusieurs autres tubes des Coasters, et aussi sur mon EP de Bobby Lewis. Buddy Holly lui a offert le crédit d'auteur pour Reminiscing pour le remercier d'avoir pris l'avion exprès pour participer à la session. On l'entend aussi sur Games people play de Joe South. Il fait un solo sur sur la version de Respect d'Aretha Franklin, qu'il accompagne sur l'album Live at Fillmore West en 1971, peu de temps avant sa mort. La même année, il venait aussi de participer à l'enregistrement de deux chansons de l'album Imagine de John Lennon.

La pochette de ce 45 tours est assez simple. C'est la maquette générique des 45 tours de R & B diffusés par Barclay à l'époque, comme celui de Wilson Pickett, souvent illustrés par une photo de Jean-Pierre Leloir. Cette fois-ci, la photo est créditée à X, mais entre la qualité du cliché et le choix de la teinte couleur, c'est assez réussi.

Sur ce 45 tours, King Curtis est accompagné par les Kingpins. C'est le nom qu'il a donné à son groupe à compter de 1967. Parmi les membres principaux, il y avait Cornell Dupree à la guitare, Jerry Jemmott à la basse et Bernard Purdie à la batterie. Billy Preston les a rejoints plus tard.

Dock of the bay est le plus grand tube d'Otis Redding, malheureusement posthume. Étant de la génération new wave, c'est avec une reprise, par Thursdays en 1981, que j'ai connu cette chanson.
La version de Dock of the bay par King Curtis est instrumentale, et fidèle à l'originale, son des vagues et sifflement compris.
Je trouve que ce qui caractérise cette version, c'est qu'elle est pleine de retenue. Certes, le saxo mène la danse, accompagné par d'autres cuivres, mais le son est tout doux et la guitare est également très en valeur. Cette chanson a été incluse sur l'album Sweet soul de 1968.

En face B, This is soul est chanté/parlé par King Curtis. Ce qu'on note d'emblée, c'est qu'il a un défaut de prononciation marqué, un cheveu sur la langue, comme on dit.
La chanson donne une définition de la soul en musique. Elle est bien, mais n'est pas sur l'album, peut-être parce qu'elle sent un peu le réchauffé de sa propre recette du Memphis soul stew, un de ses plus grands tubes, en 1967.

Les trouvailles en broc ou autre ont tendance à se raréfier. C'est rassurant de savoir qu'il me reste des disques de cet acabit cachés dans mes boites...

05 octobre 2025

SLAUGHTER : She's so out of touch


Offert par Joe Foster à Londres en novembre 1986
Réf : CRE 035 T -- Édité par Creation en Angleterre en 1986
Support : 45 tours 30 cm
Titres : She's so out of touch -/- I know you rider -- The lonesome death of Thurston Moore

Il y a quelques semaines, l'ami Bertrand a émis l'opinion, volontairement provocatrice n'en doutons pas, que She's so out of touch est "une des plus grandes chansons du Velvet non enregistrée par le Velvet". Je me garderai bien de me prononcer, mais une chose est certaine : cette chanson n'existerait pas si on n'avait pas trouvé Sunday morning en ouverture du premier album du Velvet Underground.
Cette publication m'a donné envie de ressortir ce disque de Slaughter, alias Slaughter Joe, alias Joe Foster de Television Personalities et Missing Scientists et Creation Records entre autres, de son nom de naissance apparemment Joseph James Foster Ruiz.
Ce maxi me tient particulièrement à cœur parce que c'est l'un des quelques disques où mon nom est mentionné, cette fois-ci dans une longue liste au verso de la pochette.

Je crois que j'ai mis un certain temps à apprendre cette mention de mon nom. En effet, la copie du disque que j'ai ramené d'un séjour à Londres du 6 au 11 novembre 1986, avant la sortie commerciale du disque, est il me semble un "test pressing", daté du 16 octobre, c'est à dire l'un des quelques exemplaires produits pour tester la qualité d'un pressage avant de lancer la production. C'est à distinguer des "white labels", également pressés avant la diffusion commerciale d'un disque, qui sont des exemplaires promo pas encore habillés de leur rond central ou de leur pochette.
Sur le white label référencé sur Discogs, il y a quelques mots d'accompagnement : "Slaughter comes back from the dead, with what can only be described as a Xmas single !! Jingle bells......".
Que ce disque soit plus ou moins un disque de Noël, je n'y avais jamais fait attention. Mais c'est bien "Joyeux Noël" que Joe souhaite à tout plein de gens sur sa pochette, de la famille McGee à Mlle. Lindy Morrison, en passant par Jeffrey Lee Pierce et St. Julian. Dans le lot, j'ai l'honneur de me trouver coincé entre Wee Karen Trashcan, c'est à dire j'en suis à peu près certain Karen Parker, la voix féminine qu'on entend sur Just like honey, et Sky Saxon des Seeds !!
Je n'ai jamais fait l'acquisition du disque avec sa pochette.

C'est à l'automne 1986 qu'il y a eu le plus d'activité autour du personnage JC Brouchard, conseiller spirituel de Biff Bang Pow !. En septembre, j'avais participé aux sessions de l'album The girl who runs the beat hotel. C'est à ce moment je pense qu'Alan a dû lancer l'idée de sortir un single sous mon nom. Et, comme les choses allaient vite, je suis reparti de mon séjour suivant avec mes sacs pleins d'une quarantaine d'exemplaires de Someone stole my wheels, en 45 tours et maxi, en plus de mes achats et des cadeaux reçus, comme ce disque de Joe. Entre-temps, le 25 octobre, Biff Bang Pow ! était venu donner un concert à la M.J.C. Claudel de Reims, sans Joe mais avec Andrew et Christine de Revolving Paint Dream.

Il s'agit du deuxième et ultime single de Slaughter Joe. La photo et la pochette sont de l'ami Luke Hayes de Chromatone Design.
Sur ce disque, Joe est crédité au chant, à la guitare et aux bruits. Il est accompagné par Frank Sweeney  des June Brides (violon, basse, chant, arrangement de cordes), Alejandro "Alec" Palao des Sting-Rays (batterie, basse, guitare douze cordes) et Stuart James Murray (batterie), je suppose uniquement sur le titre live de la face B.

Je considère She's so out of touch comme une grande réussite. La chanson me reste en tête après chaque écoute. Bien sur, il faut arriver à faire abstraction que l'atmosphère générale de la chanson (le xylophone, le violon notamment) est dérivé de Sunday morning.

Comme je ne connaissais pas cette chanson, Joe m'a expliqué en m'offrant le disque que I know you rider est un "traditionnel". Il me semble que l'inspiration pour la version de ce maxi est plutôt l'interprétation par les Byrds. Certes, la version studio des Byrds n'a été publiée officiellement qu'en 1987, mais je pense que des versions pirates circulaient chez les fans comme Joe.

The lonesome death of Thurston Moore, une chanson au titre percutant est enregistrée en concert à Hambourg. On retrouve le style bruyant du premier single I'll follow you down et des productions de Joe comme Upside down.

En 1987, accompagné du Modern Folk Quintet, Joe a publié sur son label Kaleidoscope Sound l'album All around my hobby horse's head. On y retrouve des nouvelles versions de I know you rider et The lonesome death of Thurston Moore.
C'est le dernier disque d'enregistrements originaux de Slaughter Joe. L'album The pied piper of feedback chez Creation en 1990 est en fait une sélection de titres précédemment parus. La compilation Zé do caixão de 2003 regroupe, comme le sous-titre l'indique, l'ensemble de ses enregistrements.
Ces dernières décennies, Joe a poursuivi son défrichage de l'histoire de la musique en rééditant des perles sur ses labels Rev-Ola et Poppydisc.


Joe Foster à Londres en novembre 1986, près des locaux de Rough Trade sur Collier Street, dans le quartier de King's Cross. Photo : JC Brouchard.

28 septembre 2025

BEBEY : Je suis venu chercher du travail


Acquis chez My Little Sound Shop à Reims le 20 septembre 2025
Réf : 121.329 -- Édité par Riviera en France en 1970
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Je suis venu chercher du travail -/- I came to you

Cela fait bien longtemps que je ne fréquente plus les disquaires, ou ce qu'il en reste près de chez moi. Je n'achète quasiment plus de nouveautés et celles que je cherche ne sont pas dans les rayons, encore moins en CD, qui est le format qui m'intéresse. Je préfère les commander directement au groupe ou au label. Les curiosités, bizarreries et surprises qui m'intéressent, je les trouve plutôt dans les ressourceries ou Emmaüs ou sur les vide-greniers.
Mais je passais dans le coin et on m'avait dit du bien de la boutique My Little Sound Shop à Reims, alors, j'y suis passé. Le lieu est effectivement sympathique et on y est très bien accueilli. Évidemment, et logiquement, les prix ne sont pas ceux d'une ressourcerie, mais j'en suis reparti avec deux disques, celui-ci et un autre 45 tours en cadeau, dont on aura l'occasion de reparler, pour grosso modo le prix d'un demi-paquet de cigarettes.

Pourquoi ce disque ? Parce qu'il s'agit de Francis Bebey, que la pochette est réussie et en parfait état, et aussi et surtout, parce que j'ai carrément été ému quand j'ai écouté pour la première fois il y a quelques mois la chanson Je suis venu chercher du travail.

J'ai découvert Francis Bebey (1929-2001) grâce à des CD de la Médiathèque d’Épernay, avant que sa superbe collection ne soit dilapidée. Il y a d'abord eu la compilation L'Afrique enchantée : Entrez dans le bois sacré, avec la chanson-histoire drôle Cousin Assini, puis la rétrospective African electronic music 1975-1982 de Born Bad, avec notamment les chansons La condition masculine et Agatha.
J'ai donc d'abord connu et apprécié Francis Bebey comme auteur de chansons pleines d'humour, mais il a eu un parcours très riche, comme
journaliste, écrivain (lauréat du Grand Prix littéraire de l'Afrique Noire en 1968 pour son roman Le Fils d’Agatha Moundio) ou directeur du département Musique de l'UNESCO.
Le disque qui m'a fait découvrir Je suis venu chercher du travail, c'est la compilation CD de 2005 Original masters vol. 1, achetée l'an dernier. En préparant ma chronique, j'ai été surpris de constater que c'est la seule fois où cette chanson a été rééditée. Quant à I came to you, de ce que je vois, elle n'a jamais été rééditée, et aucune des deux faces du 45 tours n'est écoutable en ligne

Je serais bien incapable de donner une définition d'une pochette de disque réussie, mais je sais quand j'en vois une, et celle-ci en est un très bel exemple. Pas de photo de l'artiste, pas d'illustration directe du thème, mais cette vue d'une rue pavée assez pourrie d'un village ou une petite ville est pourtant parfaitement dans le ton.
Cette photo est due à Alain Marouani, qui travaillait beaucoup pour la galaxie de labels Barclay. Il est crédité sur Discogs sur une centaine de parutions rien que pour l'année 1970, dont des disques de Vigon et Zanini et la très belle pochette de Blue Memphis de Memphis Slim. Mais il n'était pas que photographe, il était proche d'Eddie Barclay, au point d'être présenté comme son "bras droit".

Ce 45 tours de 1970 se situe encore dans les débuts de sa longue discographie de Francis Bebey. C'est son seul disque publié sur la filiale de Barclay Riviera. Il a été enregistré sous la direction musicale de Bernard Estardy. Après avoir lu Le géant : Itinéraire d'un génie du son, je pense qu'il est probable que l'orgue est tenu par Estardy lui-même. Il y a eu des moyens pour cette session, avec des cordes et des ponctuations de cuivres.

Comme le titre l'annonce, Je suis venu chercher du travail donne la parole à un travailleur émigré. Les choses sont dites simplement et rappellent ce qui devrait être une évidence : l'exil, quelques soient ses raisons, est un arrachement et un drame. Et même pendant les Trente Glorieuses, à une époque où la France suscitait l'immigration de travail, l'accueil fait à ces travailleurs n'étaient pas à la hauteur. D'une voix qui tremble, Francis Bebey rend compte de la situation. C'est poignant quand il en vient à justifier de la faim et de la tenue du narrateur par un "Je suis seulement pauvre".
Il n'y a pas tant de chansons qui donnent le point de vue de celui qui se trouve du mauvais côté du manche. Il ne m'est venu qu'un exemple évident, la Chanson pour l'Auvergnat de Georges Brassens.
Cette chanson reste évidemment d'actualité, et le moins qu'on puisse dire c'est que, dans le demi-siècle écoulé depuis sa parution, la tendance n'a pas été à proposer un meilleur accueil aux émigrés, boucs émissaires tout trouvés contre qui nous multiplions les lois.
Si on cherchait à se mettre à la place des autres plutôt qu'à protéger la sienne, à tendre la main plutôt qu'ériger des barrières, la situation pourrait être toute autre.

Les paroles de cette chanson sont régulièrement qualifiées de poème. Elles ont été publiés en livre au moins deux fois, en 1987 dans le manuel scolaire Mon livre unique de français : CM2 et en 1988 dans Anthologie africaine II : Poésie, des textes réunis par Jacques Chevrier, où le texte est situé dans le chapitre L'exil du dehors.
Dans les textes qu'on trouve en ligne, il y a deux vers absents de la version chantée : "J’ai parcouru de longs jours de voyage pour venir jusqu’ici, ne m’a-t-on pas assuré d’un accueil qui vaudrait bien cette peine ?".

En face B, I came to you est une version anglaise de Je suis venu chercher du travail. Mais ce n'est pas juste la piste vocale qui a été changée, c'est une autre prise, avec des différences dans les arrangements : pas de guitare en introduction, plus de percussions et d'orgue... Le chant est également différent, plus parlé. Du coup, l'atmosphère de l'ensemble se rapproche des grands "slows" de l'époque.

Francis Bebey est loin d'être tombé dans l'oubli depuis sa mort il y a presque un quart de siècle, au contraire, mais ce disque est la preuve qu'il y a encore du travail pour faire découvrir toutes les facettes de son œuvre.

A écouter :
Francis Bebey : Je suis venu chercher du travail
Francis Bebey : I came to you



Le poème Je suis venu chercher du travail dans Mon livre unique de français : CM2 : 6e année des écoles primaires du Cameroun d'Alvine Ekotto Ebolo (Clé/EDICEF, 1987).

21 septembre 2025

DC BASEHEAD : Do you wanna fuck (or what ?)


Peut-être offert par Radio Primitive à Reims en 1993
Réf : 74321136942 -- Édité par Imago en France en 1992 -- Disque hors commerce -- Tirage limité à 4500 ex. -- N° 000450
Support : CD 12 cm
5 titres

DC Basehead, un projet mené par Michael Ivey, fait partie de ces groupes qui ont fait les beaux jours de la hip-pop optimiste dans les années 1990 : des bases hip hop, l'utilisation d'instruments de musique plutôt que de samples, un chant/rap paresseux, comme s'il était trop infusé par la marijuana... J'ai eu l'occasion de les passer dans mon émission Vivonzeureux! sur Radio Primitive dès le premier album Play with toys en 1992, tout comme des artistes dans une veine similaire, de Cypress Hill à Bobby Sichran, en passant par Day One et Fun Lovin' Criminals.

Je ne sais plus comment je me suis procuré ce disque hors commerce, mais je me doute bien de la raison d'être de son édition. Le logo FNAC indique qu'il était le support d'une opération promotionnelle comme la chaîne en proposait souvent à l'époque : ce CD était sûrement proposé en cadeau bonus aux acheteurs du deuxième album du groupe, Not in Kansas anymore.
L'ours à lunettes fumeur qui se remonte le paquet est le logo du groupe. Les cinq titres proposés ici sont un bon résumé de leurs débuts. Deux sont inédits par ailleurs en Europe, un n'a jamais été publié ailleurs qu'ici.

A une époque où de nombreux titres de presse s'auto-censuraient et n'imprimaient pas lisiblement le mot "Fuck", intituler une chanson Do you wanna fuck (or what ?) et la sortir en single était un peu suicidaire, même si bien sûr il y a eu des arrangements, dans l'orthographe du titre en "F***k" par exemple, ou dans la vidéo, où on n'entend aucun gros mot.
Les deux premières pistes ici sont des faces B du maxi commercialisé aux États-Unis. Le Kickin' that booty rerecording de Do you wanna fuck est remixé par Michael Ivey et Citizen Cope qui, avant de se lancer sous son nom, était membre de DC Basehead. Cette version pas trop récurée (il reste quelques "Fuck") me plaît plus que celle de l'album. Réduite à deux minutes, elle est suivie sur la même piste par l'instrumental.

Hair est un titre de Play with toys. Ce Smack to the head remix, dû aux deux mêmes compères, est lui aussi raccourci, mais aucune des deux versions ne m'accroche vraiment, même si le remix a l'avantage d'avoir un peu de son de guitare électrique.

Les deux titres suivants étaient des faces B de 2000 BC, le single extrait du premier album. Je ne dis pas ça seulement parce qu'il y a un son d'ambiance de concert au début et à la fin, mais la version 2001 BC proposée ici a un son plus "live", avec la batterie et la basse plus en avant et un solo de guitare plutôt que de scratches.

Je ne trouve pas Can it be ? non plus en ligne, mais c'est un titre de bonne tenue qui a dû rater de peu sa place sur l'album.

La curiosité et l'inédit complet du disque, c'est le dernier titre, Love me two times, visiblement en rappel du concert du groupe aux Transmusicales de Rennes en 1992. Une reprise des Doors diffusée par France Inter, dans l'émission de Lenoir j'imagine. Je ne sais pas si c'est juste dû à la qualité de la chanson d'origine, notamment l'accroche du riff, mais, entre guitare et scratches, c'est réjouissant, et surtout le rythme s'emballe un peu par rapport aux titres précédents. Bon, le solo de guitare lourdingue, on aurait peut-être pu s'en passer !
J'aurais l'occasion de revenir sur le sujet dans quelques semaines, mais j'étais présent à Rennes aux Trans le soir de leur concert, le 4 décembre 1992, mais je ne pense pas avoir assisté à la performance de DC Basehead. En tout cas, je n'en ai aucun souvenir !

Le troisième album de DC Basehead, de 1996, s'appelle Faith. Le suivant, deux ans plus tard, a pour titre In the name of Jesus... On voit que les centres d'intérêt de Michael Ivey avaient changé ! En parallèle, il a également sorti un album de B.Y.O.B. (Bastard Youth of Basehead).
Le groupe s'est séparé et reformé plusieurs fois, sous son nom original, ou en tant que Basehead 2.0 ou tout simplement Basehead. Parmi leurs productions tardives, il y a une curiosité, Jesus de la Croix Morand, une reprise de Le col de la Croix Morand de Jean-Louis Murat enregistrée pour Fantastico, une compilation publicitaire de la marque Hugo Boss.

A écouter :
DC BASEHEAD : Do you wanna fuck (or what ?) (Kickin' that booty rerecording)



DC Basehead aux Transmusicales de Rennes en 1992. Photo : Louis Bilien.



14 septembre 2025

JULIETTE GRÉCO AVEC ANDRÉ GRASSI ET SON ORCHESTRE : Je suis comme je suis


Acquis au Foyer Aubois à La Chapelle Saint Luc le 11 juin 2025
Réf : P 77007 S -- Édité par Philips aux Pays-Bas vers 1951
Support : 78 tours 17 cm
Titres : Je suis comme je suis -/- A la belle étoile

C'est dans cette ressourcerie de l'agglomération troyenne que j'ai acheté l'un de mes plus gros lots de disques de l'année (pour l'instant, je reste optimiste...!). Une grosse quinzaine de disques, avec un CD, deux 78 tours, des 45 tours, et ce disque qui est une anomalie : un microsillon, le même type de produit que ce qu'on appelle les 45 tours et les 33 tours, de 17 cm de diamètre (comme les 45 tours les plus courants), mais qui s'écoute à la vitesse de 78 tours, comme les disques en gomme laque que les microsillons allaient supplanter.
Je n'avais jusque-là qu'un seul microsillon 78 tours dans ma collection, une édition volontairement rétro du Bueno de Joe King Carrasco (1980, la chanson qui a été reprise par Elli). Dans le même esprit rétro, j'ai repéré, de 1977, un maxi de Robert Gordon et Link Wray, avec une face en 45 tours et l'autre en 78 tours.

Je connaissais de longue date la mention "Minigroove" sur des disques Philips, généralement suivie de "45" ou "33 1/3". C'est ainsi que Philips désignait les microsillons fabriqués dans ses usines. Mais au départ, fin 1951, ce sont des "Minigroove 78" que le label sortait. Et là, pas question de nostalgie, au contraire, on était en pleine innovation et en phase de transition technologique : le microsillon était en plein développement, il allait vite supplanter la gomme laque et chacun des labels a tenté de lancer son produit.

Philips a donc promu ses Minigroove 78 :



La pochette d'un disque publicitaire pour les disques Philips Minigroove 78 édité en Belgique.


Un article extrait du n° 906 du 13 octobre 1951 de la revue Haut-Parleur (p. 695).
A la page précédente, on trouve un graphisme publicitaire largement utilisé dans la première moitié des années 1980 par Reims Radio FM pour sa promotion.


J'ai au moins appris une chose avec l'article ci-dessus, c'est pourquoi les 30 cm ont un gros "rond central", parce que la vitesse diminue de façon sensible quand on s'approche du centre.
Malheureusement pour Philips, ses microsillons 78 tours n'ont pas eu beaucoup de succès. C'est le microsillon 45 tours lancé par RCA en 1949 qui est vite devenu un standard. La production de ces 78 tours s'est arrêtée début 1953.

Et les disques de ce catalogue n'ont pas dû être beaucoup diffusés : je n'ai trouvé en ligne aucune mention de ce disque de Juliette Gréco.
Mon exemplaire a vu du pays en trois-quarts de siècle : fabriqué en Hollande, probablement à destination du marché français, il s'est retrouvé en vente chez Robert E. Duick à Dakar, avant que je tombe dessus à Troyes !

Mon premier souvenir de Prévert remonte au printemps 1977. Notre prof de français de troisième nous avait annoncé sa mort (survenue le 11 avril) et avait sûrement profité de l'occasion pour nous faire étudier un de ses poèmes.
Souvenir plus gai, un soir de stage de BAFA, en 1980 ou 1981. On s'est retrouvé à quelques-uns à lire à voix haute un poème de Paroles pris au hasard. J'étais tombé sur Je suis comme je suis, et on a été pris de fou rire quand je suis arrivé à "Je suis faite comme ça".
Par la suite, j'ai récupéré à peu près tous les recueils de Prévert parus au Livre de Poche, et je me suis intéressé à ses collages.
Je viens d'apprendre qu'il y avait un rapport entre Paroles et Reims : en effet, les premiers à avoir rassemblé et diffusé (artisanalement) une collection de poèmes de Prévert sont des élèves d'une classe de philosophie d'Emmanuel Peillet.

Paroles a été publié en 1946 au Point du Jour. En 1946 et 1947, deux recueils de 46 chansons ont été publiés par les éditions Enoch, des poèmes de Paroles mis en musique par Joseph Kosma, dont Je suis comme je suis. Les interprètes de ces chansons sont nombreux. La première à avoir publié Je suis comme je suis sur disque serait Germaine Montero, en 1948, sous le titre Et puis après.
Juliette Gréco a enregistré les deux chansons de ce disque le 4 avril 1951, lors de sa première session pour Philips. Dans l'édition en 78 tours "normal", Je suis comme je suis était en face B. J'ai tendance à préférer la version accompagnée au piano de Montero à la version avec arrangement d'orchestre de Gréco.

La chanson A la belle étoile, également de Prévert et Kosma, a été créée par Fiorelle en 1936 dans le film Le crime de Monsieur Lange de Jean Renoir. Prévert a remanié ce poème pour son recueil Histoires, paru également en 1946. Là encore, je n'accroche pas vraiment à la version de Juliette Gréco. Non pas qu'elle soit mauvaise, mais ce n'est pas un style de chanson que j'apprécie particulièrement. Même sa version de Coin de rue de Trenet, enregistrée un peu plus tard, me laisse plutôt indifférent.
En tout cas, la description d'un Paris miséreux d'A la belle étoile est suffisamment à l'os pour la chanson ait été interdite de diffusion à la radio française, comme l'explique le livret de la compilation Frémeaux La muse de Saint-Germain 1950-1957.
Notons qu'en 1966, les frères Pierre et Jacques Prévert ont signé pour la télévision un film intitulé A la belle étoile, adapté de la nouvelle The cop and the anthem d'O' Henry. A part le titre en commun, je crois que le flm n'a rien à voir avec la chanson.

Même si la musique gravée ne m'emballe pas, je suis content d'avoir trouvé cet objet discographique hybride. Il vient s'ajouter aux autres bizarreries de ma collection, comme le disque en bois, les 90 tours, ou le 78 tours "picture disc" de Noël.


Juliette Gréco, Je suis comme je suis, accompagnée au piano par Henri Patterson, dans l'émission Télé-Paris du 6 août 1954.

06 septembre 2025

MADNESS : Baggy trousers


Acquis d'occasion dans la Marne au 21ème siècle
Réf : 640 203 -- Édité par Stiff en France en 1980
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Baggy trousers -/- The business

Il s'est passé moins d'un an entre la sortie des deux premiers albums de Madness, suffisamment de temps pour que mon attitude vis-à-vis du groupe change du tout au tout. Quand One step beyond est paru, on était en pleine folie ska. J'ai gagné l'album lors d'un concours Feedback, on dansait sur le morceau-titre à toutes les fêtes..., mais j'avais déjà une préférence pour les Specials. L'année suivante, j'avais largement de quoi m'occuper avec mes chouchous de la new wave, d'Elvis Costello à XTC, en passant par Devo, The Cure et Magazine. Alors, quand Absolutely est sorti, je ne m'y suis pas du tout intéressé, et je crois qu'aucun de mes copains ne l'a acheté non plus. Il faut dire aussi que j'avais été rebuté par une courte chronique dans Best ou Rock & Folk, qui expliquait que la chanson parlait de pantalons bouffants, ce qui n'est pas vraiment le cas, mais ça ou les "pork pie hats", ça ne m'intéressait pas ou plus du tout. 

Quarante-cinq ans plus tard, alors que je l'ai acheté entre-temps, je trouve qu'Absolutely, comme la plupart des albums de Madness, est un disque très inégal, mais les deux premiers singles qui en ont été extraits, Baggy trousers et Embarrassment, sont parmi les meilleures chansons du groupe, de vrais classiques de la pop anglaise.
C'est après avoir vu sur Arte le documentaire Madness : Prince du ska, roi de la pop (disponible en ligne jusqu'au 22 septembre 2025) que j'ai eu envie de ressortir ce 45 tours.

La pochette est une illustration par Humphrey Ocean, un ami du groupe. Il a joué avec Ian Dury comme bassiste de Kilburn & the High Roads de 1970 à 1973 et a sorti sur un single chez Stiff en 1978. En tant que graphiste et peintre, il a signé des pochettes pour 10cc et Wings/Paul Mc Cartney et son parcours l'a mené notamment à la National Portrait Gallery et à la Royal Academy.
Son dessin est fait d'après une photo qu'on retrouve au recto de la pochette d'Absolutely. Je ne sais pas trop pourquoi, mais il a remplacé la nom de la station de métro Chalk Farm par Cairo East. Peut-être une référence au titre du premier album Night boat to Cairo ?

Baggy trousers a encore des accents ska, mais c'est assez léger. Ce qui m'accroche le plus musicalement dans la chanson, c'est la transition entre les couplets et le début du refrain avec son "Oh what fun we had". Le "Baggy trousers" en ad lib à la fin reste bien en tête après la fin de la chanson et c'est presque un deuxième refrain.
Le groupe a souvent raconté ses souvenirs à propos de cette chanson, notamment à Seven ragged men pour les quarante ans en 2020.
Thématiquement, l'idée était de faire une chanson à la Ian Dury, et aussi de répondre en quelque sorte à Pink Floyd et son Another brick in the wall, qui racontait l'enfer des écoles privées anglaises à internat, avec des souvenirs de scolarité dans une école publique "comprehensive" (l'équivalent du collège unique). Pour l'auteur des paroles, le chanteur Suggs, ça donne "Tout ce que j'ai appris à l'école, c'est à plier les règles et non pas les briser".

Avec tout ce que le groupe sortait, Madness réussissait quand même à caser des faces B inédites sur ses singles. Bon, il faut pas trop en demander non plus : The business est un titre sans paroles, composé par Mike Barson, le clavier du groupe. Dans la lignée de leur version de Swan lake ou de Night boat to Cairo, il est de bonne tenue.

La chronologie de l'année 1980 de Madness donne le vertige tellement c'est frénétique. La tournée européenne qui a suivi la sortie d'Absolutely est même passée par la Maison des Sports à Reims le 24 octobre 1980, avec The Lambrettas en première partie. Je n'y étais pas, mais avec les copains on dansait encore sur One step beyond à la toute fin de l'année :


"Oh what fun we had". On s'amusait bien à faire le 'train' de One step beyond à la salle des fêtes de Moncetz pour le réveillon du 31 décembre 1980.
Merci à Isabelle, Éric et Patrick pour la photo.


En 2011, Madness a enregistré une nouvelle version de Baggy trousers. Pas pour une bonne raison, malheureusement, c'était pour une pub pour la bière 1664 de Kronenbourg (la chanson avait déjà servi pour une pub Colgate dans les années 1980). Pour l'occasion, Baggy trousers a été ralentie et rebaptisée Le grand pantalon. Malheureusement, les paroles n'ont pas été traduites, on a un juste un rythme de valse et de l'accordéon pour le côté franchouillard.

Il y a eu diverses séparations et reformations du groupe depuis 1980. Madness sera en tournée en Angleterre en cet automne 2025, avec Squeeze en première partie.




Madness, Baggy trousers, en concert à Amsterdam le 18 octobre 1980. Diffusé dans l'émission Countdown.


Madness, Embarrasment, Baggy trousers et Madness, en concert au festival Pinkpop le 8 juin 1981.


Madness mime Baggy trousers dans l'émission Top of the Pops en 1980.


Madness, Le grand pantalon, en 2011.

30 août 2025

NIKKO : Songs for free-DOM


Acquis chez Récup'R à Dizy le 24 mai 2024 
Réf : Dan's A 061 -- Édité par Conquering Lion Music / Tour Des Miracles en France en 1994
Support : CD 12 cm
7 titres

A la ressourcerie, ce CD inconnu m'a suffisamment intrigué pour que j'ouvre la boite et découvre au dos du livret une liste de pointures du reggae ayant participé à l'enregistrement. Pour les seuls noms que je connaissais, il y a Earl "Chinna" Smith, Congo "Ashanti" Roy, Sticky Thompson, Ras Michael, Stranger Cole. Pas mal pour ce qui est visiblement une production indépendante.

Il s'agit du premier album de Nicolas Coralie, alias Nikko, né à Cayenne en Guyane, qui connaissait déjà bien le studio Leggo à Kingston puisqu'il y avait déjà enregistré l'année précédente avec son groupe Universal Youth et Ras Bendjih l'album The teachings of his imperial majesty.

Le titre de l'album est en anglais, mais il contient une référence spécifiquement française. En effet, pour "Freedom", il y a un tiret entre "Free" et "DOM",  qui est bien orthographié en majuscules sur la tranche du CD. Il est donc question de chansons qui libèrent un Département d'Outre-Mer, ce qui était le statut administratif de la Guyane dans la période qui a précédé la création en 2016 de la Collectivité Territoriale de Guyane.

La première chanson, This song, a aussi un titre en anglais, ce que je commençais à déplorer à l'écoute, avant de me rendre compte que je ne comprenais pas la majeure partie des paroles du refrain inaugural, qui sont en créole. Mais, avec le couplet qui a suivi, en grande partie en français, j'ai compris que cette chanson est un hymne au créole : "Sur notre continent y a anglais, portugais, espagnol, mais ici chaque communauté a pour symbole d'unité le créole. On écrit le créole on veut le mettre à l'école, mais c'est la langue de la rue, des dialogues sans protocole.". Un sujet, et des langues, qui sont souvent représentés ici.

Les trois chansons suivantes présentent un éventail de genres liés au reggae : le ragga dancehall pour Bon ké sa ("Spéciale dédicace à tous les hypocrites, tous les parasites"), le lovers rock avec Jeune fille et le ska pour la chanson suivante. Cette dernière, je l'ai écoutée sans vérifier son titre sur la pochette et je me suis tout de suite dit que c'est en quelque sorte une réécriture de Guns of Brixton de The Clash ("It's when they kick off your front door, then you know that they are coming, the Babylon with their pistol in their fingers, with the gun in their arm."). Musicalement, les deux chansons sont différentes, mais j'ai découvert ensuite, sans trop de surprise, que celle de Nikko, qui me plaît bien aussi, s'intitule Guns. Nikko a abordé cette thématique au moins une autre fois par la suite avec Posé to gun.

La chanson suivante, c'est le premier succès de Nikko, Guyana nice. On la trouvait déjà sur l'album d'Universal Youth et Ras Bendjih. Elle a été remixée pour l'occasion. C'est un ragga sur la situation de la Guyane qui, je suppose, reste d'actualité trente ans plus tard : "Sur toutes les télés dans toutes les radios, tout le monde dit que la Guyaner est le pays le plus beau (...) Tout le monde est d'accord pour dire qu'on n'est pas des zéros. Mais en Guyane vaut mieux être subordonné de l'Etat, mais en Guyane on n'aime pas tellement les rastas. (...) En Guyane t'es un français mais en France t'es un négro. Cayenne ne doit pas devenir un futur Soweto".

L'album se conclut avec des versions instrumentales de This song (Dub mix song) et Jeune fille (Dread locks dub).

Depuis ce premier album, Nikko poursuit avec succès son parcours musical. Il a notamment joué en métropole, aux Antilles, au Brésil... En 2022, il a donné à Cayenne avec le groupe Authentic Voice un concert pour fêter ses trente ans de carrière. Il s'ouvre avec Guyana nice et il interprète également This song.




Un documentaire à propose de Guyana nice est disponible ici.


Nikko, Jeune fille, en direct dans l'émission Tan'o show sur Premiere TV.

22 août 2025

FRÉDÉRIC BOTTON : Attention à la grosse boule qui descend l'escalier


Offert par Fabienne M. à Mareuil sur Ay en février 2025
Réf : EP 6364 -- Édité par CBS en France en 1967
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Attention à la grosse boule qui descend l'escalier -- Ma grand tante Olga -/- T'es mon poisson chat -- Les allumettes

En début d'année, j'ai vu passer l'extrait télé en couleur de la Radio Télévision Suisse réalisé pour Attention à la grosse boule qui descend l'escalier (à voir ci-dessous).
J'ai trouvé ça bien délirant, j'ai vérifié s'il y avait un disque correspondant, j'en ai trouvé un exemplaire disponible à prix correct et je me le suis fait offrir...!
Au bout du compte, ce 45 tours n'est peut-être pas renversant musicalement, mais il est intéressant et c'est un bel objet discographique.

La pochette s'ouvre, mais pas comme récemment avec le Guy Cornély en tournant le recto vers la gauche. Là, on l'ouvre vers le haut, et c'est là qu'on se rend compte que ce recto est moins haut que la pochette dans son ensemble et que la mention "Frédéric Botton" est en fait imprimée sur la pochette intérieure. Une fois ce rebord soulevé, on découvre l'artiste entouré d'allumettes. Avec le Luna, c'est le deuxième disque chroniqué ici avec une pochette qui est à la fois d'allumettes que de disque.
Il est précisé au dos qu'on a affaire à une "pochette spéciale modèle exclusif CBS disques" (Je n'ai pas trouvé d'autres pochettes utilisant ce modèle exclusif, si vous en avez, ça m'intéresse).

La voix opératique dès le début d'Attention à la grosse boule qui descend l'escalier m'a tout de suite fait penser à Pourquoi un pyjama ? de Régine. Les deux disques ont des points en commun : d'abord Alain Goraguer, qui est à la direction d'orchestre dans les deux cas (décidément, c'était un musicien qui aimait les facéties et la loufoquerie, rappelez-vous dans ces années-là son Orgogoriental); et surtout, le pyjama est suivi sur le disque par La grande Zoa, l'un des plus grands succès de Régine, une chanson écrite par Frédéric Botton.
C'est le premier disque que j'ai avec Botton comme interprète, mais il est surtout réputé comme auteur-compositeur et, rien que dans ma discothèque et outre La grande Zoa, je trouve l'EP Sans astérique de Dani, deux chansons sur l'album A nu d'Alice Sapritch et C'est à qui tout ça par Henri Salvador.

C'est vrai que, à l'écoute, on a l'impression que Frédéric Botton a quelques limites en tant que chanteur, mais sa Grosse boule est vraiment divertissante. A la fin, on apprend que "ces boules qui roulent ce sont des carrés masqués", et là ça renvoie directement à un disque auquel j'avais déjà pensé, à cause de la pochette ouvrante et de la présence d'un autre grand chef d'orchestre français, Michel Colombier : le fameux disque carré Ode au rémois de Daniel Laloux.
Et sinon, je n'ai jamais écouté l'émission, mais je ne suis pas surpris d'apprendre que cette chanson était l'un des génériques de La grosse boule d'Ariel Wizman et Edouard Baer sur Radio Nova.

J'ai l'impression que le truc de Frédéric Botton, c'était de prendre des rythmes de danse à l'ancienne genre charleston ou tango, qui mine de rien étaient assez populaires dans les années 1960, et de leur associer des paroles rigolotes. C'est réussi avec Ma grand tante Olga, où il est question de polka piquée et avec T'es mon poisson chat, avec arrangement orchestral léger et chœurs.

Pour Les allumettes, les violons m'ont rappelé Les sucettes de France Gall. Vérification faite, ce  n'est pas complètement étonnant : c'est aussi Alain Goraguer qui a orchestré le disque de France Gall.

Les quatre chansons de ce 45 tours ont été incluses en 1968 sur le premier album de Frédéric Botton, qui est mort en 2008 à 71 ans.




Frédéric Botton, Attention à la grosse boule qui descend l'escalier, extrait de l'émission Gallantly, diffusée par la Radio Télévision Suisse le 20 avril 1968. L'émission complète, avec France Gall en vedette et aussi un jeune Henri Dès, est visible ici.


Frédéric Botton, Ma grand' tante Olga, le 3 décembre 1966 dans l'émission Bienvenue à Jean-Pierre Chabrol proposée par Guy Béart.



15 août 2025

BRIAN WILSON : Love and mercy


Acquis par correspondance via Discogs en août 2025
Réf : W7814CD / 921 032-2 -- Édité par Sire en Allemagne en 1988
Support : CD 7,5 cm
Titres : Love and mercy (LP version) -- One for the boys (LP version) -- He couldn't get his poor old body to move

Après la mort de Brian Wilson en juin dernier, j'ai notamment repensé à sa chanson Love and mercy, en me disant que c'est peut-être le tout dernier classique qu'il a composé.
C'est une chanson toute simple, aux paroles en trois très courts couplets de deux vers (très grossièrement sur la violence, la souffrance et la solitude dans le monde) et un refrain tout aussi court qui est une ode à l'amour et à la pitié.
Cette chanson a peu fait parler d'elle à sa sortie en 1988, mais elle a pris de l'importance par la suite. Elle a notamment donné son titre au film biographique sur Brian Wilson de Bill Pohlad, sorti en 2015.

J'ai fait des recherches, et j'ai retrouvé à quelle occasion j'ai fait la connaissance de Love and mercy. C'était en 2002, sur un CD compilation du magazine Uncut (un très bon cru, ce CD). La version qu'on y trouve est tirée du Live at the Roxy Theatre de 2000.
Comme toutes les versions parues après la version originale, elle est assez dépouillée et très belle. Brian Wilson avait pris l'habitude de terminer ses concerts avec cette chanson.

Cette première version, elle ouvrait l'album solo sans titre de 1988. Un album à la genèse des plus complexes. Certes, le fer de lance des Beach Boys relançait sa carrière après des années de maladie, mais il était sous la coupe de son médecin/gourou Eugene Landy.
Le générique de l'album est long comme deux bras (on y trouve l'excellent Andy Paley), Landy est abusivement crédité comme co-auteur de certaines chansons (cela sera rectifié lors des rééditions) et le son est assez typiquement années 1980.
Cela donne donc une version album de Love and mercy avec un arrangement assez quelconque, avec synthé et batterie à l'avenant, même s'il y a des voix à la Garçons de Plage.

Love and mercy est le second single qui a été extrait de l'album. Mon exemplaire est une édition mini-CD, un bel objet avec une pochette cartonnée ouvrante à la taille du CD (il existe une édition en boite plastique avec un adaptateur).
Autant la pochette de l'album est elle aussi assez quelconque, autant je trouve celle du single très réussie. Elle est due à Katsuhiko Hibino, un artiste japonais au profil très intéressant, qui est également président d'université et directeur de musée. Étant donné que le nom de l'artiste et le titre sont parfaitement intégrés à l’œuvre, je dirais que celle-ci a dû être réalisée spécifiquement pour la publication du disque.

Dans une réédition de l'album, on trouve en bonus un commentaire de Brian sur Love and mercy. Je n'ai pas tout saisi, mais il enchaîne sur une courte version en solo au piano de la chanson, qui est bien meilleure que la version album et qui peut être considérée comme une matrice pour les autres versions publiées, notamment la deuxième version studio sur l'album suivant I just wasn't made for these times (1995), la version acoustique en face B du single Walking down the path of life (2005) et la version instrumentale au piano sur l'un de ses ultimes albums (At my piano, 2021), sans compter les versions en public. 

One for the boys est un autre titre de l'album. C'est drôle car les crédits officiels donnés par le label sur YouTube indiquent que ce serait de fait un duo avec Andy Paley, où les deux joueraient plein d'instruments et chanteraient. Dans les faits, j'entends un titre complètement a cappella, sans paroles...! Le message n'est pas évident à décoder, mais il est plus que probable que les Boys à qui ce titre est dédié sont les Beach Boys.

Le dernier titre, He couldn't get his poor old body to move, est un inédit des sessions de l'album. Il est co-signé et co-produit par Lindsey Buckingham de Fleetwood Mac. On est en plein dans la recréation d'une chanson pop à la Beach Boys, avec un son actualisé. Dans ce style particulier, ce n'est pas mal et ça aurait très bien pu concurrencer Kokomo, le tube des Beach Boys à la même époque.

Cette chronique est dédiée à l'ami Charlie Dontsurf, qui a vu en quelques semaines disparaître les principales forces créatives des sites qu'il anime, beachboys.fr et ubudance.com. Avec aussi bien sûr une pensée pour Brian Wilson, David Thomas (grand fan des Beach Boys), et Andy Paley, qui lui est mort quelques mois plus tôt, en novembre 2024.




Brian Wilson, Love and mercy, en concert en 1989. Extrait de l'émission The Beach Boys - Endless Summer TV show.
Brian a l'air particulièrement en forme.
C'est la seule des versions live avec un arrangement pop-rock. Je l'aime bien et la préfère de loin à la version de l'album.
Il y a couplet en plus par rapport au disque : "I was praying to a God who just doesn't seem to hear. Oh, the blessings we need the most are what we all fear.".



Brian Wilson, Love and mercy, en concert au Radio City Hall de New York le 29 mars 2001 à l'occasion de An all-star tribute to Brian Wilson.


Brian Wilson, Love and mercy, en concert au Royal Festival Hall de Londres le 30 janvier 2002. Inclus dans la bande originale du film Love & Mercy – The life, love and genius of Brian Wilson.
Cette série de concerts a donné le CD/DVD Brian Wilson presents Pet sounds live. Andy Paley figure dans le groupe.




10 août 2025

EDDY MITCHELL : Chacun pour soi



Acquis d'occasion dans la Marne probablement entre 2000 et 2011
Acquis chez Damien R. à Avenay Val d'Or le 29 avril 2024
Réf : 71185 -- Édité par Barclay en France en 1967
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Chacun pour soi -- Au-delà de mes rêves -/- Alice -- Mes promesses

Après avoir acheté un exemplaire de ce disque à Damien l'an dernier, j'ai découvert en le rangeant que j'en avais déjà un autre. Pour une fois, j'ai une bonne excuse pour ce doublon : les deux rectos de pochette sont complètement différents, même s'ils ont pour point commun d'avoir une photo de Jean-Pierre Leloir.
Difficile de savoir quelle pochette a remplacé l'autre (le verso et le disque lui-même sont identiques pour les deux éditions), mais il me semblerait logique chronologiquement que la première soit celle avec la photo de groupe. Lettrage au goût du jour de 1967, photo orangée mais sombre, titres des chansons peu visibles. Franchement, ce n'est pas une réussite.
Par contraste, la photo d'Eddy Mitchell devant l'avion de la TWA, et le reste de la maquette "claquent" bien et la pochette remplit parfaitement son rôle, qui est d'attirer le client et de faire vendre le disque, tout en donnant bien le contexte, puisque la photo montre Eddy à l'atterrissage aux États-Unis, là où ont été enregistrés les quatre titres de cet EP.

J'ai connu Eddy Mitchell quelques années plus tard, dans les années 1970. Il faisait partie des gens qu'on voyait régulièrement dans les émissions de variétés du samedi, et il avait des tubes : Pas de boogie woogie, C'est la vie, mon chéri, Sur la route de Memphis... On avait même à la maison le 45 tours C'est un rocker / Bye bye Johnny B. Goode, c'est à dire deux adaptations de Chuck Berry. C'est sans doute celui-ci que j'aurais chroniqué en premier si j'avais conservé l'exemplaire familial, ou si j'en avais racheté un depuis.
Cela fait un moment que je picore ici ou là certains des EP de Monsieur Eddy, mais j'y fait plus attention depuis que j'ai été accroché par la reprise de sa Société anonyme par les Ready-Mades.

Ce qui est certain, c'est qu'Eddy Mitchell est un grand fan de musique. Je pense que, s'il s'est lancé en 1964 pour Barclay dans la collection Eddy Mitchell présente les rois du rock, c'est plus pour faire partager sa passion que par intérêt commercial.
Pour sa carrière solo, il s'est rendu à Londres dès 1963 pour enregistrer le London All Star, un conglomérat de pointures de studio, de Big Jim Sullivan à Vic Flick, en passant par Arthur Greenslade et Jimmy Page.

Mais en 1967, en pleine vogue rhythm and blues, Londres ne suffisait plus à Eddy. Il a choisi de s'envoler aux Etats-Unis pour y enregistrer, d'où le libellé générique au verso de la pochette qui annonce Rn' B U.S.A.
Les résultats de cette session ont été publiés sur la face B d'un album intitulé De Londres à Memphis, mais ce titre est un peu trompeur car, si c'est probablement à Memphis, la ville de Stax, qu'Eddy a atterri, il a enregistré à plus de deux cents kilomètres de là, à Muscle Shoals en Alabama. Pas à FAME, mais dans un autre des grands studios de la ville, Quinvy, qui juste avant ça s'appelait Norala (à lire : Quin Ivy and his Norala and Quinvy studios par Pete Nichols, notamment la partie 3, qui couvre la session d'Eddy, et la 4, où il est question de la session de Dick Rivers au même endroit quelques mois plus tard).

C'est la règle pour le jazz, mais très rare pour les variétés, surtout pour un 45 tours : le recto de la pochette nous donne en détails les participants aux sessions d'enregistrement du 26 au 28 mai 1967 dont on trouve ici quatre extraits. Comme il est précisé, ils ont pris part à des enregistrements des grands noms du R 'n' B, et rien qu'en parcourant la liste je reconnais plusieurs noms de ces grands musiciens de session : Roger Hawkins, David Hood, Eddie Hinton, Spooner Oldham, Wayne Jackson...

Eddy Mitchell et son équipe ont fait preuve d'une grande assurance pour l'occasion : ils auraient pu se contenter d'adapter des titres américains, il y en a pléthore, mais non, on trouve sur ce disque quatre originaux, signés Eddy/Claude Moine pour les paroles et Pierre Papadiamandis pour la musique.
Des originaux, mais répondant tous aux critères d'un morceau rhythm and blues typique. Le résultat est très solide, même s'il n'est pas renversant.

J'aime beaucoup en tout cas Chacun pour soi, avec des paroles un peu dures où il question de fermer la porte à une ex qui retente sa chance ("C'est à ton tour de pleurer, à moi de jouer. Oh ! Que tu m'aimes encore ou pas, ça ne m'intéresse pas, de ma vie je t'ai rayée"). Les chœurs, les cuivres, les ponctuations d'orgue sur le refrain sont très réussis.

Alice est une belle ballade, très réussie, qui respecte tous les canons du genre. Je crois que c'est la plus connue des chansons du disque, qui est longtemps restée au répertoire d'Eddy.

Avec Mes promesses et Au-delà de mes rêves, on a un autre titre rapide et un lent. Les ingrédients sont là, mais la sauce a un peu de mal à prendre.
C'est quand même au bout du compte un projet intéressant, avec deux pochettes pour le prix de deux.

Amigos, le dernier album en date d'Eddy Mitchell, est sorti en 2024. A 83 ans, il a dû annuler pour raisons de santé sa tournée prévue cet été.


Eddy Mitchell, Chacun pour soi, en direct à la fin de l'émission Télé dimanche le 12 novembre 1967.


Eddy Mitchell, Chacun pour soi, en direct dans l'émission Hip hip show le 8 septembre 1967.
Au-delà du fil pris dans le pied de micro, il y a visiblement un problème au début au moment du titre écourté Je ne me retourne pas, mais je ne comprends pas le mot prononcé par Eddy après "Tout de suite", ni le sens des "Merci", "Y en a un". Je crois qu'il y fait encore référence tout à la fin ("Y a trois merci").
Le public de toutes ces émissions de télé est amorphe, quand il ne passe pas son temps à entrer et sortir...!



Eddy Mitchell, Chacun pour soi, en direct à la télévision.


Eddy Mitchell, Chacun pour soi, mimé à la télévision le 4 septembre 1969.


Eddy Mitchell, Alice, en direct à la télévision.


Eddy Mitchell, Alice, mimé à la télévision.


Eddy Mitchell, Alice, mimé à la télévision, visiblement dans les années 1970.


Eddy Mitchell, Alice, en direct à la télévision, accompagné par l'Orchestre d'Ivan Jullien, le 29 janvier 1977. Muscle Shoals est bien loin !


Eddy Mitchell, Mes promesses, mimé à la télévision.

04 août 2025

THE ELEVENTH HOUR : Voulez-vous coucher avec moi ce soir


Acquis sur le vide-grenier de Oiry le 6 avril 2025
Réf : SG 518 -- Édité par Disc'AZ en France en 1974
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Voulez-vous coucher avec moi ce soir (Lady Marmalade) -/- He did ya good '(But I'll do that better)

J'ai trouvé ce disque le même jour que la cassette de Fawzi Al-Ayedi, juste avant la fin de mon tour sur la broc de Oiry.
J'ai misé un euro sur ce disque tout simplement parce que j'ai été très surpris d'apprendre que, potentiellement, le grand tube Lady Marmalade de Labelle est une reprise.
Il y a pas mal de classiques qui, on finit souvent par l'apprendre, ne sont pas originaux. J'ai en tête par exemple I love rock and roll, Bette Davis eyes ou Love will keep us together. Un gars, Bob Leszczak, a même publié trois livres sur le sujet Who did it first ?.

Je dis "potentiellement" car l'expérience m'a appris qu'il faut être très méfiant vis-à-vis des allégations figurant sur les pochettes de disques. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elles ne sont pas plus fiables que des paroles d'évangile, et souvent encore moins !
Si on s'en tient simplement aux mentions "Version originale", on a déjà exploré ici de beaux cas d'école, Mamy blue en étant un exemple particulièrement gratiné. Il y aussi la "version originale chantée" d'un instrumental, la "version originale anglaise" d'un tube originellement en anglais mais, subtilité, interprété par un groupe hollandais ! Il y a encore la "seule version originale" d'Al Capone et la "very original" ! On a même connu la "version originale" qui est en fait une nouvelle version par l'interprète originale...

Bon, il se trouve que, pour une fois, l'allégation est correcte : ce groupe The Eleventh Hour est bien le premier à avoir enregistré et publié Lady Marmalade.
La chanson a été co-écrite par Bob Crewe, qu'on connaît notamment pour Silhouettes et les tubes qu'il a écrits pour Frankie Valli et les Four Seasons (dont Walk like a man), et un certain Kenny Nolan, qui était entre autres le chanteur d'un groupe de requins de studio, The Eleventh Hour.
Apparemment, la version originale de Lady Marmalade par The Eleventh Hour était considérée par ses auteurs comme une sorte de démo. Elle a quand même été incluse en juin 1974 sur le premier album du groupe, qui a un titre de compilation, The Eleventh Hour's greatest hits 1974 AD.

Avant d'écrire la chanson, Crewe avait séjourné à La Nouvelle Orléans. Très vite, il l'a fait écouter à Allen Toussaint, qui a décidé de l'enregistrer avec le groupe Labelle. Leur version est sortie en septembre 1974 sur l'album Nightbirds et en novembre en 45 tours.
C'est cette version que tout le monde connaît. C'est celle-là dont, à douze ans, je me faisais un plaisir de chanter à tue-tête le refrain "Voulez-vous coucher avec moi ce soir ?", comme je le faisais un peu plus tôt avec "les putains" d'On ira tous au paradis de Polnareff. Je ne le savais pas, mais il est question aussi de prostitution avec Lady Marmalade, qui est le récit d'une passe à La Nouvelle Orléans, qui fait "rugir la bête sauvage" à l'intérieur d'un pékin moyen, qui se repasse le film de cette nuit mémorable par la suite, une fois revenu dans sa grise vie quotidienne. Au passage, on peut se permettre de sourire de l'affirmation de la chanteuse Patti Labelle qui a expliqué qu'elle ne connaissait pas le sens du refrain en français qu'elle a chanté. C'est possible, mais elle parle anglais et tout le reste de la chanson, écrit dans cette langue, laisse très bien comprendre de quoi il est question.
 
Et que vaut la version de The Eleventh Hour par rapport à celle de Labelle ? Eh bien, c'est beaucoup moins bien ! Elle est plus lente, et surtout assez bancale, pas groovie ni funkie pour un sou, même si tous les ingrédients sont là. Le chant est lui aussi très guindé. On a droit à un solo de saxo, et après la chanson semble presque s'arrêter, alors qu'il reste encore une minute à courir.
Ce n'est sûrement pas un hasard si cette version n'est pas sortie en 45 tours aux États-Unis. D'après ce que je vois dans Discogs, il n'y a qu'en France et au Brésil qu'un single a été publié, sûrement pour récupérer un peu de miettes du succès de Labelle.
Devant ce succès, The Eleventh Hour a remis le couvert et publié en 1975 une deuxième version de Lady Marmalade sur l'album Hollywood hot. Elle est plus rapide, un peu plus disco, dure une minute de plus. Elle passe un peu mieux, inspirée par la version Labelle, mais c'est pas encore ça, et la partie instrumentale dans la deuxième moitié, avec encore du saxo, est difficile à supporter.

La face B, He did ya good (But I'll do that better) est aussi extraite du premier album. Musicalement, on est dans la même veine et ça reste pataud. Et je crois que je préfère ne pas essayer de comprendre toutes les paroles ("I got a muscle Mama", "You'll get your satisfaction guaranteed")...!

Après l'aventure Eleventh Hour, Kenny Nolan s'est lancé dans une carrière solo. Et figurez-vous qu'il a eu un grand succès en 1976, avec la chanson I like dreamin' qui a été un tube aux États-Unis. Mais l'avion et le vedettariat c'était visiblement pas son truc et par la suite il s'est concentré sur l'écriture de chansons. 

Il y a plusieurs groupes nommés The Eleventh Hour, mais j'ai été surpris de voir, sur la page Bandcamp où l'on trouve les deux albums du groupe qui nous intéresse aujourd'hui, que deux concerts sont annoncés en Angleterre pour août-septembre. Je me demande bien quelle est la formation du groupe (Kenny Nolan n'en fait certainement pas partie).