05 avril 2025

PETER GABRIEL : Solsbury Hill


Acquis à la Bourse aux Disques de Radio Primitive à Reims le 23 mars 2025
Réf : SA 1295 -- Édité par Virgin en France en 1990 -- Échantillon promotionnel, vente interdite
Support : 45 tours 17 cm
Titre : Solsbury Hill

Comme beaucoup d'autres voisins ou copains de classe, Eric S. avait plusieurs albums de Genesis. Mais je crois que c'est lui qui avait aussi le premier Peter Gabriel et qui me l'a fait écouter. Et c'est comme ça que j'ai eu envie de l'acheter et cet album s'est retrouvé parmi les 17 premiers entrés dans ma collection, comme le documente une liste dactylographiée retrouvée dans mes archives.
C'est aussi l'un des premiers à en être sorti, quelques mois après l'établissement de la liste, en même temps qu'un Jethro Tull et un Emerson, Lake & Palmer, quand j'ai échangés à un autre voisin du lotissement contre des manuels scolaires de lycée.

En fait, il y a une chanson en particulier qui m'a fait m'intéresser à Peter Gabriel, c'est Solsbury Hill, qui m'a instantanément accroché et que j'apprécie toujours autant aujourd'hui.
A tel point que, l'an dernier, j'ai vérifié si cette chanson était bien sortie en single (oui) et regardé si je ne pouvais pas m'en procurer un exemplaire avec pochette à un prix correct (non).
Mais l'autre dimanche à la bourse aux disques organisée par Radio Primitive, j'ai eu de la chance. Parmi les quelques 45 tours désherbés de la discothèque primitive qu'il restait à vendre, il y avait ce promo mono-face envoyé par Virgin fin 1990.
Certes, ce n'est pas le 45 tours de 1977, et certes, la pochette de la compilation Shaking the tree : Sixteen golden greats dont il fait la promotion n'est pas géniale, même si la photo est de Robert Mapplethorpe, mais c'est bien un 45 tours avec Solsbury Hill, dans la version originale, ni remixée, ni réenregistrée et ça me satisfait pleinement.

La chanson s'ouvre en mode folk rock, à la guitare acoustique. Elle a un côté sautillant, peut-être renforcé par le fait qu'elle est, me dit-on (je n'y connais rien) principalement en rythme 7/8.
Le thème, décliné sur trois couplets dont la fin fait office de refrain, c'est une méditation nocturne lors d'une balade sur la colline du titre, avec des réflexions qui touchent à la grande décision que Peter Gabriel venait de prendre, de quitter Genesis en plein succès pour, pensait-il initialement, tourner complètement le dos au show business.
La composition s'étoffe petit à petit, d'abord avec les quatre notes accrocheuses ("ta ta ta-ta"), qui sont ce qu'on retient le plus facilement de la chanson. Je n'arrive pas à déterminer quel instrument les joue (synthé ? flûte ? J'ai toujours pensé que c'étaient des cordes d'orchestre, mais le London Symphony Orchestra n'est crédité que pour deux autres titres de l'album).
Puis arrivent des percussions, façon talking drums. Enfin, je l'avais oublié, il y a, pendant la dernière minute principalement instrumentale une bonne grosse guitare bien saturée. Comme l'acoustique du début, elle est jouée par Steve Hunter, que l'on avait déjà entendu sur des albums d'Alice Cooper  et sur Rock 'n' roll animal.

C'est vraiment une excellente chanson. J'ai cherché des comparaisons possibles et, avec le côté anglais et bucolique, j'ai surtout pensé à XTC, époque English settlement.
On trouve une version sur l'album Plays live de 1983 et il y en a eu pas mal d'autres depuis, dont des reprises, mais la version originale est parfaite pour moi et me suffit.


Peter Gabriel, Solsbury Hill, une vidéo réalisée après la sortie initiale du disque en 1977.


Peter Gabriel, Solsbury Hill, en public à Essen en Allemagne pour l'émission Rockpalast, le 15 septembre 1978. La prestation ce soir-là s'est conclue par une version de The lamb lies on Broadway.


Peter Gabriel, Solsbury Hill, en concert à Athènes en octobre 1987. Ambiance complètement années 1980.

29 mars 2025

AKLI D. : C.facile


Acquis par correspondance via Rakuten en mars 2025
Réf : [CA BECAUSE0068] -- Édité par Because en France en 2006
Support : CD 12 cm
Titres : C.facile (Audio) -- C.facile (Vidéo)

Quand j'ai trouvé il y a quelques semaines à la Recyclerie de Châlons l'album Ma yela d'Akli D., j'ai su tout de suite que cet album allait être intéressant, ne serait-ce qu'à cause de l'instrument bricolé à partir d'un bidon d'huile qu'Akli tient sur la pochette.
Le disque m'a bien plu en effet, et le titre qui m'a le plus accroché c'est C. facile. En cherchant un peu, j'ai vu qu'il existait un single pour ce titre. Je l'ai trouvé à prix modique, port compris, et je l'ai commandé.

C'est un très bel objet. Ce n'est pas mentionné, contrairement à l'habitude, mais c'est une édition hors commerce. La pochette est légèrement surdimensionnée, avec un livret cartonné pelliculé de 12 pages. C'est un disque à ranger à côté d'un autre CD promo illustré, le Punk ouvrier de Didier Wampas illustré par Lindingre.

J'avais noté la participation active de Manu Chao à ce projet, qui a réalisé et mixé le disque, joue de plusieurs instruments et fait des chœurs. C'est mentionné très discrètement dans les les crédits de l'album. Ce n'est évidemment pas un hasard si ce disque est sorti chez Because, qui publie aussi les disques de Manu
Pour le single, c'est différent. Quiconque a jamais vu une image liée au livre-CD Sibérie m'était contéee de Manu Chao et Wozniak y pensera en voyant ce CD. Ce sont les deux compères qui ont fait les illustrations, utilisées également pour la vidéo. Les crédits sont mentionnés plus clairement, et surtout Manu signe un texte/poème de présentation d'Akli D.. Les deux se sont rencontrés lors d'une soirée à Paris. Ils se sont liés d'amitié, ont eu l'occasion de jammer ensemble, avant de se lancer dans l'enregistrement de l'album.

Je me suis vite rendu compte que la version de C. facile sur ce single n'est pas la même que celle de l'album. Musicalement, aucune différence, mais la version originale est chantée principalement en kabyle, tandis que celle-ci, qui est aussi celle de la vidéo, est en français.
En fouillant un peu, j'ai vu qu'il existe une autre édition de l'album avec la version française en bonus, et encore une autre qui intègre la version française et met la kabyle en bonus.

Le thème de la chanson, c'est la condition de l'exilé, une situation vécue par Akli D., qui a quitté l'Algérie pour la France au début des années 1980 : "C. facile, C. pas facile, l'immigré n'est jamais trankil. C. facile, C. pas facile, le jour c'est la vie le soir c'est l'exil." (une traduction des paroles qui figure dans le livret de l'album).
Dans la version française, il y a aussi "Combien de cartes ? Combien de séjours ? Toutes les promesses, tous les détours. Combien de temps, pour l′intégration ?".
On pense dans l'esprit à Rachid Taha et Carte de Séjour, à qui Akli fait indirectement référence avec le très bien vu "Douce France, douces souffrances".
C'est une excellente chanson, sur un rythme enlevé, avec un thème vieux comme le monde et toujours d'une actualité brûlante.

Akli D. est toujours actif musicalement. Dans quelques jours, le 1er avril, il donnera un concert dans un festival en Libye.




Akli D., C. facile, en concert.


Akli D., C. facile, en direct depuis Carcassonne dans une émission présentée par Michel Drucker.


Akli D., C. facile, en répétition.



22 mars 2025

THE WAITRESSES : I know what boys like


Acquis au Prisunic de Châlons-sur-Marne vers 1981
Réf : 106 225 -- Édité par ZE / Celluloid en France en 1981
Support : 45 tours 17 cm
Titres : I know what boys like -/- No guilt

Il y a une étiquette à deux francs de chez Prisunic au dos de la pochette. Ce disque fait donc partie de la razzia que j'ai faite un jour dans ce grand magasin du centre-ville à Châlons, où j'avais acheté Trans Europe Express et un album des Stranglers à dix francs, et tout un lot de 45 tours à deux francs, dont plein de Two Tone, et aussi un Department S. Une journée à marquer d'une pierre blanche !

I know what boys like est une petite pépite new wave entêtante, sur une rythmique funky légère (Tom Tom Club n'est pas très loin).
A l'époque, même sans comprendre les paroles et sans avoir vu la vidéo, il me semble bien que j'avais saisi l'esprit très sarcastique de la chanson, avec la chanteuse/narratrice Patty Donahue qui se moque des mecs : "J'aime bien les asticoter, ils veulent me toucher, je ne les laisse jamais faire" avant, cruelle de balancer "C'est amusant de les frustrer". Au dernier couplet, elle fait mine de regretter "Cette fois je te laisserai faire tout ce que tu veux" et le dédain culmine avec son "Tu peux me faire confiance... crétin !".
Il y a d'autres chansons où les gars se font mener comme ça par le bout du nez, mais aujourd'hui je n'ai repensé qu'à Vous me quittez déjà de Melon Galia.

Le plus drôle dans tout ça, c'est peut-être que la chanson a été écrite par un gars, Chris Butler. Originaire d'Akron, il a notamment joué avec 15 60 75 The Numbers Band. En 1978, alors qu'il est membre de Tin Huey, il lance en parallèle le projet The Waitresses et sort un premier 45 tours.

En 1978, il enregistre dans l'appartement de Devo une première démo d'I know what boys like, dont le son d'ailleurs n'est pas très éloigné du Devo époque Hardcore. Dans une deuxième démo, on entend une guitare électrique et on note l'apparition des "Nyah nyah nyah nyah nyah" moqueurs. Patty Donahue a répondu à un appel de Chris Butler un midi dans un café, et la chanson a été enregistrée à Akron avec Ralph Carney de Tin Huey au saxophone.

Butler s'est ensuite installé à New York et a signé un contrat avec ZE Records pour sortir I know what boys like en single. Il fallait une face B et à ce moment-là The Waitresses n'était pas encore un groupe. Pour No guilt, influencée par la vague ska, Chris Butler a de nouveau fait appel à Patty et Ralph, ainsi qu'à des musiciens new yorkais, dont Don Christensen des Contortions et des Raybeats à la batterie.

Un groupe a ensuite été formé, de haute tenue, avec Billy Ficca, ancien batteur de Television, Tracy Wormworth, qui est bassiste des B-52's depuis une trentaine d'années, et le saxophoniste Mars Williams, qui a ensuite rejoint les Psychedelic Furs.
Les Waitresses ont signé chez Polydor, qui a réédité le 45  tours et sorti en 1982 un premier album, Wasn't tomorrow wonderful ?. On y retrouve les deux faces du 45 tours, dans la même version.
Si vous avez bien suivi tout ça, vous comprendrez que les musiciens qu'on voit sur la vidéo de 1982 n'ont pas tous participé à l'enregistrement de la chanson, réalisé avant la formation du groupe.

I know what boys like a eu son petit succès et reste actuellement bien réputée. Je l'apprécie toujours autant. L'autre chanson la plus connue du groupe, c'est Christmas wrapping, enregistrée pour la compilation A Christmas record de ZE. J'ai acheté l'album à sa sortie, mais je n'ai jamais particulièrement accroché à cette chanson.
Le groupe s'est séparé en 1983 après deux albums. Patty Donahue est morte à 40 ans en 1996. Chris Butler est toujours actif musicalement.




The Waitresses, I know what boys like, en direct dans l'émission anglaise The old grey whistle test, en avril 1982.


The Waitresses, un court extrait de I know what boys like dans le premier épisode de la série Square pegs, dont le groupe a également signé le générique.


The Waitresses, No guilt, en direct dans l'émission anglaise The old grey whistle test, en avril 1982.

15 mars 2025

COUNT BASIE & HIS ORCHESTRA : Green onions


Acquis chez Abi Boutique à Châlons en Champagne le 28 février 2025
Réf : 62.005 -- Édité par Coral en France en 1968
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Green onions -- Hang on Sloopy -/- Mercy, mercy, mercy -- Bright lights, big city

Abi Boutique à Châlons a un rayon disques, alors bien sûr j'y fait un tour quand j'ai l'occasion d'aller au centre-ville en semaine. C'est tout petit, mais les prix sont modiques et de temps en temps j'y trouve quelque chose d'intéressant, comme le White Hassle.

Le jazz, même si j'évolue un peu au fil des ans, ce n'est toujours pas ma tasse de thé. Je ne regarde pas les CD, j'achète très rarement un 33 tours, mais les 78 tours et les 45 tours, j'y suis attentif.
Celui-ci, quand j'ai vu écrit Count Basie, je l'ai sorti pour le regarder. Il a beau y avoir une photo de Jean-Pierre Leloir, la maquette de la pochette est vraiment très quelconque et ne fait pas envie. Mais quand j'ai découvert le titre principal, Green onions, le tube de Booker T. and the MGs, j'ai aussitôt décidé de le prendre. Et quand j'ai vu qu'il était enchaîné avec Hang on Sloopy, j'ai été encore plus surpris et ravi et je l'aurais presque pris en double s'il y en avait eu deux exemplaires !

Je ne connais absolument rien du parcours de Count Basie, mais j'ai quand même été très étonné qu'il ait mis au répertoire de son orchestre des titres aussi populaires de rhythm and blues et de rock.
En fait, dans les années 1960 au moins, il a enchaîné concerts dans toutes circonstances (tournées, Las Vegas, croisières), apparitions télé et multiples enregistrements, dont des interprétations de titres populaires. En 1963, par exemple, il a sorti This Time by Basie, sous-titré Hits of the 50's & 60's. En 1966, il y a aussi eu Basie meets Bond et Basie's Beatle bag.

En 1967, le Comte a publié pas moins de six albums, sur cinq labels différents (ça aide, la bonne pratique du jazz d'enregistrer rapidement, souvent dans les conditions de concert...!) :
Basie's beat est l'exception dans ce lot, comme le confirme Stanley Dance, dans l'introduction de ses notes de pochette de cet album : "On demande de temps à autre à Count Basie d'enregistrer certains disques à programme destinés à un autre public que celui du Jazz; mais heureusement, avec cet album, il nous offre la musique par laquelle il est devenu célèbre. Les compositions réunies ici ne cherchent pas à illustrer un thème commercial, mais servent surtout à mettre en valeur les talents individuels et les qualités d'ensemble de l'orchestre.".

Les quatre titres de mon EP français sont tirés de Basie's in the bag, enregistré du 15 au 17 août 1967. Ils ont également été publiés aux États-Unis sur quatre faces de deux 45 tours.

Green onions déçoit initialement. Sans les coups de guitare ni l'orgue, ces oignons perdent de leur saveur. Mais les cuivres façon musique de film sauvent l'affaire. C'est ici l'une des rares fois du disque où l'instrument de Count Basie, le piano, est mis en valeur. Cette version est écourtée d'une minute par rapport à celle de l'album.

Hang on Sloopy, c'est autre chose et c'est mon titre préféré du disque.
La rythmique latino est enlevée, et les percussions, les flûtes et les cuivres s'en donnent à cœur joie. Dans l'esprit, on est assez proche de la première version publiée, My girl Sloopy par les Vibrations. Rien à voir avec le numéro 1 des McCoys, mais je ne savais pas que cette version originale avait eu un certain succès.

J'ai été étonné de voir le nom de Joe Zawinul parmi les auteurs de Mercy, mercy, mercy, un titre que je ne connaissais pas. En fait, il s'agit d'une composition jazz de 1966 écrite pour et créée par Cannonball Adderley. L'ambiance est plutôt soul, avec à nouveau les cuivres qui dominent.

Pour le coup, je connaissais de réputation Bright lights, big city, le blues de Jimmy Reed, mais pas assez pour reconnaître la version par son créateur. Et j'avoue que, sans les paroles, j'ai du mal à faire le lien entre l'original et la version Count Basie, qui pour le coup sonne vraiment à mes oreilles comme une musique de film.

Ce disque est une belle trouvaille, comme j'aimerais en faire plus souvent. Quand on regarde la liste des titres de Basie's in the bag, on se dit qu'il y aurait de quoi faire un autre EP intéressant, avec par exemple Ain't too proud to beg, Knock on wood, Memphis, Tennessee et Reach out I'll be there. Mais j'ai vérifié, et il n'y a eu qu'un 45t français extrait de l'album. A défaut, j'aimerais bien trouver le Basie's Beatle bag !

09 mars 2025

MARTIN CIRCUS : Martin "Disco" Circus


Acquis à la Bourse BD Disques d’Épernay le 2 février 2025
Réf : LD. 8520 -- Édité par Vogue en France en 1978
Support : 33 tours 30 cm
5 titres

Depuis son lancement en 2006, le label Born Bad a pris une place importante dans le paysage musical français, à la fois pour son catalogue d'artistes contemporains (Bryan's Magic Tears, La Femme, Frustration, Star Feminine Band, Zombie Zombie, Forever Pavot, Gwendoline...) et pour son minutieux travail d'archéologie discographique. Parmi les rééditions qui m'ont marqué ces dernières années, il y a la découverte de Mazouni, les productions maison d'Henri Salvador, les compilations de musique antillaise Disque la rayé et Antilles méchant bateau, l'intégrale des Calamités, Voulez-vous cha-cha ? et Des jeunes gens modernes, les volumes de Pierre Vassiliu et Francis Bebey...

Chacune de ces rééditions permet une découverte ou une réhabilitation d'artistes inconnus ou méconnus. Avec la dernière parution Évolution française 1969-1985 de Martin Circus, le défi est vraiment dur à relever. En effet, très vite après ses débuts où ils étaient à la pointe d'une vague de "pop" made in France et en français, et au fil de multiples changements de formation, le groupe a basculé dans la variété.

Il se trouve que c'est l'un des premiers groupes que j'ai vus en concert. Par recoupement, j'ai déterminé que c'était le 4 juillet 1974, lors de l'étape du Tour de France à Châlons-sur-Marne. Un podium à l'affiche duquel il devait y avoir également Georgette Plana. On était déjà loin des élans rock progressif des débuts. Les 45 tours qu'on avait dans la discothèque familiale dans ces années-là, c'était L'accident heureux et Ma-ry-lène, et parmi leurs autres succès on trouve Drague party, Bye-bye cherry, Comme au bon vieux temps du rock 'n' roll, J'en perds mes baskets...
Évidemment, Évolution française évite soigneusement ces nanars pour aller piocher d'obscures faces B, des titres d'album méconnus ou des productions tardives, mais dans l'ensemble j'ai du mal à accrocher à la sélection, y compris les titres plus rock des débuts. De fait, les seuls extraits qui ont pour l'heure trouvé grâce à mes oreilles sont Mon premier hold-up, leur adaptation de Let's dance de Chris Montez, Bains-Douches, tiré de leur album "New Wave" De sang-froid (mais quand je l'avais chroniqué, j'avais préféré Tous des robots et le ska instrumental Banana baby) et aussi Disco circus, mais on va y revenir.

En effet, quelques jours après l'annonce de la sortie d'Évolution française se tenait la bourse BD Disques annuelle de l'association BD Bulles. Je n'y ai pas fait d'achats en grande quantité (aucun 45 tours, notamment), mais j'en suis revenu avec quatre 33t intéressants, un du groupe congolais Choc Stars, le premier Alberto Y Lost Trios Paranoias, une compilation de Jona Lewie dont je connaissais tous les titres, mais qui m'a amené à retravailler une vieille chronique et à la republier dans l'Arrière-Magasin. Et puis j'ai acheté à un monsieur qui avait un carton avec quelques disques bradés à 2 € cet album de 1978 de Martin Circus, en parfait état.
Il y a eu à cette époque un engouement pour les disques en couleur. Pathé Marconi en avait profité pour rééditer les Beatles et Vogue avait été très actif sur ce plan : cet album n'est pas rose comme le Plastic Bertrand ni orange comme mon 45t de fanfare disco belge, mais rouge comme mon maxi de Kiss !

Ce disque est particulier pour plusieurs aspects.
Tout d'abord, il s'agit de la musique originale du film Les bidasses en vadrouille. Initialement, j'ai pensé que Martin Circus s'était contenté de composer la musique, ou qu'ils faisaient une apparition dans un film des Charlots, mais ça ils l'avaient déjà fait en 1971 pour Les bidasses en folie, où l'on voyait aussi Triangle.
Non, là, les producteurs ont fait appel à eux pour être les vedettes du film, estimant apparemment que les Charlots étaient devenus ringards.
En tout cas, on ne peut pas écouter ce disque en faisant abstraction qu'il est intimement lié à ce film, que je vous propose maintenant de voir en intégralité (je ne l'ai pas fait moi-même, j'avoue !), un super-navet, Les bidasses en vadrouille :


Les bidasses en vadrouille, de Christian Caza (1978). Attention, film complet. Ne pas dépasser la dose prescrite.

Autre particularité de ce disque : il est court. Il faut dire que les productions du groupe se succédaient à un rythme soutenu. Là, il y a juste sept titres, dont deux jingles, Pouêtt et Pouêtt pouêtt, et seulement deux compositions différentes, l'instrumental d'ouverture Ite missa est et la chanson Pour m'en aller plus loin, déclinée en version Disco circus sur la face B pendant près d'un quart d'heure.

Enfin, on peut se demander qui joue vraiment le gros de la musique sur ce disque. Voilà ce qu'écrit Guido Minisky dans les notes de pochette d’Évolution française : "Dans l’ombre, depuis le début du groupe, un homme tire toutes les ficelles: le manager et directeur artistique Gérard Hugé. Il travaille à la fois pour le groupe et le label, ce qui n’est jamais une bonne nouvelle. La seule chose qui l’intéresse: que sortent des disques, peu importe qui joue dessus. Au milieu des années 70, il dépose le nom Martin Circus. Il a les pleins pouvoirs.".
Cela m'a incité à décortiquer les crédits de l'album. Il est précisé en lettres capitales qu'il a été "conçu et réalisé par Martin Circus". Et les quatre membres du groupe sont listés en premier, à pas mal de titres, dont le vocoder et les synthés Oberheim, Korg, et Prophet. Mais il y a un remerciement à "Gilles, Zizi et Charlie pour leur sympathie, leur bonne humeur et leur énergie", qui est sûrement largement mérité, puisque Gilles Tinayre se charge des arrangements, cordes et cuivres et de divers claviers. Quant à Serge Haouzi dit "Titi", il est à la batterie, aux percussions et aux syndrums et Charlie Cohen joue de la basse et des percussions. Tous les trois chantent, tandis que Joël "Flangerman" Fagerman s'est chargé de la programmation des synthétiseurs.
Je me demandais comment des musiciens de rock pouvaient d'un seul coup maîtriser toute l'électronique utilisée par le disco. Le plus probable est que ce ne sont pas les membres titulaires du groupe qui ont enregistré la majeure partie de la musique qu'on entend sur le disque.

C'est en contradiction avec le titre, mais l'instrumental Ite missa est ouvre l'album. Comme l'ensemble du disque, c'est du disco bien réalisé, avec basse pneumatique, séquenceur, synthé et, malheureusement pour moi, envolées de cordes.

Ensuite, Pour m'en aller plus loin est le seul titre chanté. Là au moins on est sûr de la participation des membres du groupe. Mais qui dit chant dit paroles et là c'est quelque chose. Elles sont signées Évelyne Courtois, qui a enregistré dans les années 1960 sous le nom de Pussy Cat, qui a écrit plein d'autres textes pou Martin Circus et qui, c'est comme ça que le lien a dû se faire, fut l'épouse de Gérard Hugé.
Pour vous donner un échantillon, ça commence par "Je crache sur la tombe du temps qui fait de nous des morts-vivants" avant d'autres maximes telles que "Aucun oiseau ne peut chanter s'il n'a pas choisi d'être prisonnier" avant de finir mystérieusement par "Peut-être que dans un an ou deux je serai des larmes au bout des yeux"...!

Disco circus reprend là où se terminait la chanson, avec des chœurs qui font "Plus loin", et poursuit effectivement bien au-delà avec des
"Ah ah ah ah ah" et surtout de l'instrumental à base de séquenceur (mon "instrument" préféré du genre), de claquements de mains électroniques, plus la basse, les synthés, les cordes, voire même peut-être une guitare au son trafiqué. Si on rentre dans le rythme c'est prenant et au bout d'un quart d'heure les danseurs devaient être essoufflés sur les pistes.

Cet album a eu droit à une édition américaine chez Prelude, sans les jingles, il ne restait donc que trois titres, avec une adaptation en anglais de Pour m'en aller plus loin, transformé en Before it gets dark.
François Kevorkian, français installé aux États-Unis, est devenu un grand nom du remix dans les années 1980, grâce notamment à son travail pour Kraftwerk ou Depeche Mode. En 1978, il en était encore à ses débuts, mais il était déjà directeur artistique de Prelude. De façon assez surprenante, alors que les maxis de disco cherchaient à durer le plus longtemps possible, il a concocté pour la sortie en single de Disco circus une version réduite de moitié. C'est celle-ci qu'on retrouve sur Évolution française. On est loin des Bidasses en vadrouille, mais, quitte à céder à la fièvre du disco, le mieux est peut-être d'y y aller à fond, avec la version complète de l'album en vinyl rouge, avec les pantalons patte d'eph et les tenues satinées !

A voir :
Martin Circus mime Pour m'en aller plus loin dans une émission d'Antenne 2.



La pochette de l'édition américaine de l'album. Ils souffrent, les pseudo-gars de Kiss...!

02 mars 2025

ZERO : Am I your new toy


Acquis par correspondance via Discogs en mai 2014
Réf : SRS 4673 -- Édité par Silence en Suède en 1981
Support : 33 tours 30 cm
9 titres

Quand j'ai chroniqué son 45 tours I wanna be a machine, j'ai annoncé à la fin qu'il serait sûrement à nouveau question de Robert Broberg ici car je venais de commander plusieurs de ses albums. Bon, c'était il y a presque onze ans... Le temps passe vraiment vite, mais il n'est pas trop tard pour bien faire.
Je ne le savais pas, mais entre-temps, guère plus d'un an après ma chronique, Robert Broberg est mort en juillet 2015, à 75 ans.

Il a connu le succès dans les années 1960 sous le nom de Robban. En 1972, il a rompu avec sa carrière et a quitté la Suède pour s'installer aux États-Unis. C'est apparemment à ce moment-là qu'il a rejeté son nom de vedette Robban et opté pour le pseudonyme Zero. Mais il n'a sorti des disques sous ce nom, trois albums et deux singles, qu'entre 1979 et 1981 (cependant, Tolv sånger på Amerikanska, sorti en 1978 sous le nom de Robert Broberg, est listé au dos d'une des pochettes comme un album précédent de Zero).

Pour faire la transition, le premier album, Motsättningar - Circle O Zero on uma N.E., est crédité Robert Broberg presenterar Zero. Il a été
enregistré en direct en 1979, en partie en tournée et en partie en studio. C'est celui qui me plaît le moins.
En 1980, Robert Broberg a tourné un spectacle intitulé Circus Zero.
Le deuxième album, Kvinna eller man, enregistré à l'automne 1980 et sorti en février 1981, est un peu dans la même veine que le premier, mais des titres comme le single Tom top! font un peu la transition avec Am I your new toy, enregistré en août-septembre et sorti en octobre 1981.

Ce troisième et ultime album est mon préféré de Zero et je le considère comme le véritable successeur de Tolv sånger på Amerikanska. Leurs points communs sont des paroles entièrement en anglais, contrairement aux deux premiers Zero, et des thématiques de chansons sur la technologie, les machines, la modernité. Les deux disques ont aussi une photo de face de Robert en pochette.
La grande différence entre les deux albums, c'est que Tolv sånger på Amerikanska était un album enregistré en groupe et largement acoustique, tandis  que Am I your new toy est littéralement un album solo de Broberg (aucun autre musicien n'est mentionné) et qu'il est plutôt synthétique. Il se crédite aux voix et aux effets vocaux parce qu'il y a effectivement plein d'effets tout au long du disque, des bruitages, des accélérations, des ralentissements... A ce titre, on peut considérer que c'est l'album new wave de Robert Broberg.

L'album est compact et d'excellente tenue de bout en bout.
Il s'ouvre avec une excellente séquence, Johnny Surprise, dans la veine des Nits époque Tent, You make it happen (1 + 2) et Am I your new toy, avec une rythmique faite d'effets vocaux et un tout petit bout de solo façon Snakefinger.
Il y a une petite baisse de régime avec To climb the ladder of hope, mais la première face se termine sur un ton guilleret avec Jump & dance & hope & hope, avec un chant qui, comme ça arrive régulièrement avec Broberg, me rappelle Alig de Family Fodder.

Ça n'a rien à voir avec leur obscurité Let's go, mais le Let go! de Zero m'a fait penser au Devo synthétique de Freedom of choice et des albums suivants.
La rythmique de base de Your clothes talk est un bruitage qui ressemble au son d'une balle de ping pong sur une table. Ça fonctionne bien ! Lucky me ! a une rythmique vaguement reggae, comme I wanna be a machine, mais aussi un air plutôt country, avec encore des bruitages. C'est léger et excellent.
L'album se clôt avec sa chanson la plus longue, Robot out in universe. C'est un robot qui se prétend humain, qui indique croire en Dieu et qui implore qu'on ne le traite pas comme une machine. Je ne suis pas sûr que ça reste longtemps de la science fiction.

D'autres albums de Robert Broberg ont été réédités en CD, mais pas celui-ci et c'est bien dommage. On trouve le vinyl d'occasion pour pas cher, mais c'est les frais de port qui sont désormais prohibitifs.

21 février 2025

JUNIOR KELLY : Go down Satan


Acquis à la Bourse aux disques de Tours-sur-Marne le 9 février 2025
Réf : [sans] -- Édité par Font Page en Jamaïque en 2000
Support : 45 tours 17 cm
Titres : JUNIOR KELLY : Go down Satan -/- FRONT PAGE GROUP : Rhythm

Dans l'année, il y a très peu de bourses aux disques dans le secteur d’Épernay, mais il se trouve que ce mois-ci il y en a eu deux à une semaine d'écart : la désormais traditionnelle bourse BD-Disques de BD-Bulles le 2 à Épernay, et la première organisée par l'association Familles Rurales à Tours-sur-Marne le 9.

Je n'ai pas fait d'emplettes géniales (je reviendrai prochainement sur une "perle" trouvée à Épernay), mais j'ai quand même acheté quelques disques sur deux stands à Tours. D'abord un 45 tours du Sri Lanka Police Reserve Hewisi Band, à la pochette et au nom prometteurs, mais malheureusement la musique, comme le titre l'annonçait, consiste simplement en percussions traditionnelles. A l'autre stand, j'ai trouvé deux albums en assez piteux état mais à 1 €, et surtout il y avait une boite de 45 tours à 50 centimes. Assez vite, j'ai repéré ce qui était visiblement un 45 tours jamaïcain. Puis un autre. Au bout du compte, il y en avait une dizaine, certains sans même une pochette neutre en papier blanc, mais je les ai tous pris, par peur de rater quelque chose d'intéressant, et surtout parce que je ne tombe plus souvent sur des lots de disques.

Je m'étais déjà fait la remarque : les machines servant à imprimer les étiquettes de rond central à Kingston n'ont pas dû être changées depuis les années 1960. De prime abord, les étiquettes de mes 45 tours paraissent anciennes, floues et de mauvaise qualité, alors que ces disques sont parus au début des années 2000. Il n'y a parfois que la mention d'un email ou d'un site web qui signale que ce n'est pas une sortie une trentaine d'années plus tôt.
Et il y a besoin d'en imprimer des étiquettes, tant la production de reggae est délirante. J'ai été surpris de voir que Junior Kelly, dont je n'avais jamais entendu parler, a sorti plus de 200 45 tours selon Discogs ! Et encore, c'est un petit joueur : rien que parmi mes achats du jour, Galaxy P en a aussi plus de 200, Anthony Red Rose plus de 300 et le record est pour Capleton à 878, dont 3 qui figurent dans le lot que j'ai acheté.

Ce 45 tours est le premier que j'ai écouté de la pile et au bout du compte c'est mon préféré du lot.
L'immense productivité du reggae jamaïcain est facilitée par une pratique bien ancrée : l'utilisation de riddims, c'est à dire la séquence de base d'une chanson, pour en créer de nouvelles. Une pratique à la base notamment du style dancehall.
Par exemple, le plus grand succès de Junior Kelly, Love so nice, utilise le riddim de Stir it up de Bob Marley.

Autant de nombreux enregistrements ragga, dont plusieurs dans mon lot, incorporent des sons électroniques, autant Junior Kelly fait partie de ceux qui sont plutôt restés fidèles au son roots du reggae.
Go down Satan est une chanson bien entraînante. Je ne comprends pas les paroles, mais j'imagine que la thématique est cousine de celle du Chase the devil de Max Romeo. Il s'était déjà intéressé plus au moins à ce sujet en 1996 avec Go to Hell, un titre surprenant car c'est une valse !

Le riddim utilisé pour Go down Satan, c'est Please be true par Alexander Henry, un titre paru en 1969 chez Studio One, dont les enregistrements sont la source d'un grand nombre de riddims. Je ne connaissais ni la chanson ni son interprète, mais on recense 77 enregistrements utilisant ce riddim !
Si on compare l'instrumental du disque original, Please be true version par Sound Dimension, et celui en face B de mon 45 tours, Rhythm par Front Page Group, on se rend compte que Junior Kelly est resté proche dans l'esprit du son original.
Je n'ai pas passé en revue toutes les différentes versions de riddim, dont plusieurs ont été publiées par Studio One, qui fort logiquement ne s'est pas privé de "piller" ses propres productions. Pour montrer l'évolution au fil des années, on peut juste écouter West gone black par Jah Jesco et sa version en face B, qui l'adapte au son de 1975.

Ce disque encapsule donc à lui tout seul un bon bout de l'histoire du reggae. Il n'y a pas d'autre bourse aux disques qui se profile à l'horizon près de chez moi mais, avec le printemps qui s'annonce dans quelques semaines, j'aurai peut-être l'occasion de faire bientôt de nouvelles trouvailles en vide-grenier.

A écouter :
Front Page Group : Rhythm


15 février 2025

VIGON : Popcorn popcorn


Acquis d'occasion dans la Marne probablement dans les années 2000
Réf : 640 005 -- Édité par Egg en France en 1970
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Popcorn popcorn -/- Frozen steak "popcorn"

J'ai déjà parlé ici de la vague Popcorn initiée par James Brown. C'était à l'occasion de la chronique du Dance the popcorn de Vic Upshaw. J'ai aussi déjà chroniqué un disque de Franz Auffray, un neveu d'Hugues, sous le pseudonyme du Synthetic Cha Cha Band. J'y mentionnais qu'il avait produit avec Sam Choueka (le Sam du tube Alors ça va) tout un album consacré à cette danse, le désormais très recherché Original popcorn). Cet album est sorti sur Egg, un label de Barclay créé en 1969 par Franz Auffray. Sur ce même label, au même moment ou bien juste après, est sorti ce 45 tours crédité à Vigon, où l'on trouve des versions de deux des compositions de l'album.

Intéressons-nous d'abord à l'album, qui je pense est venu d'abord.
Il y a très peu de crédits. La production est de Franz Auffray, la moitié des titres est co-signé par Sam Choueka. Le groupe Cruciferius, également signé chez Egg, aurait participé à l'enregistrement, ce qui veut dire qu'on entend Bernard Paganoti (futur membre de Magma) et François Bréant (futur pilier du groupe de Lavilliers, entre autres) sur cet album recherché pour ses "breaks" par de nombreux échantillonneurs. Il se dit que l'album aurait été enregistré en une nuit, pourquoi pas, et qu'on y entendrait aussi Vigon au chant. Ça, j'en doute, je pense qu'il y a confusion avec le 45 tours.

On a trouvé bon d'ajouter sur la pochette du 45 tours la mention  "Version originale" pour Popcorn popcorn de Vigon. C'est souvent louche, voire mensonger. Je pense que la version album de Popcorn popcorn est la première (Le titre d'ouverture, Popcorn Popcorn hey hey hey eat some popcorn every day n'est pas en ligne, je ne sais donc pas si c'est exactement la même composition).
La bande instrumentale et les chœurs sont identiques sur les deux versions, même si le mixage est différent. La version du 45 tours s'interrompt après 3'50, celle de l'album continue encore trois minutes. Et surtout, le chant est différent.
Sur l'album, le chanteur se fait remarquer par un rire maléfique et de grands cris d'horreur. Vigon, lui, ça s'entend, a une voix de chanteur de rhythm and blues. Je peux me tromper sur toute la ligne, mais si je devais parier, je dirais que c'est Sam Choueka qui chante sur l'album.
Dans les deux cas, c'est plein d'énergie, avec notamment une batterie très sèche, et c'est excellent.

La face B du 45 tours, Frozen steak popcorn, est un instrumental strictement dans la même veine. Là encore, à part un retour au début après dix secondes, l'enregistrement est le même que l'une des pistes de l'album. Sauf que, sur l'album, Salted popcorn est chanté, par le même chanteur que pour Popcorn popcorn. Ce qui tend à confirmer qu'il ne s'agit pas de Vigon, car je suppose que si le label avait disposé de deux titres chantés par Vigon, il les aurait mis tous les deux sur le 45 tours.

Concernant Vigon, une affiche de concert partagée par des fans de musique rémois me fait rêver depuis quelques temps :



J'avais six ans à l'époque le 13 avril 1969, ça ne risquait pas, mais j'aurais bien aimé assister à ce super festival de Rythm' and Blues, dans un village du vignoble à une quinzaine de kilomètres de là où j'habite aujourd'hui. Et quelle organisation de la part de Jean-Pierre et René, avec la navette en car gratuite depuis Reims. Et le groupe local Le Soul Set, soutenu par la Boutique Randall, "fer de lance de la mode"...!

Vigon, c'est un nom que je connaissais depuis longtemps, réputé chez les collectionneurs de disques. C'est notamment pour ça que j'ai acheté ce 45 tours. Mais il n'était pas nationalement célèbre, en tout cas pas avant sa participation en 2012 au télé-crochet The voice. A la suite de quoi, en trio avec Erick Bamy et Jay, il a eu un grand succès en 2013 avec l'album Les Soul Men. J'ai essayé d'écouter leur version de Les moulins de mon coeur de Michel Legrand, mais ce n'est vraiment pas ma tasse de thé.

09 février 2025

IVOIR' COMPIL VOLUME 3


Acquis chez Récup'R à Dizy le 17 janvier 2025
Réf : IVO CD 003 -- Édité par Ivoir' en France en 1998
Support : CD 12 cm
14 titres

Ça s'est passé un peu comme avec Daouda : On allume la télé restée réglée sur Melody d'Afrique et on tombe au milieu d'une émission compilant des passages télé d'un chanteur. C'était très bien, mais le nom de l'artiste n'a pas été rappelé à la fin. Il a donc fallu que j'enquête pour le trouver.
La page Facebook de la chaîne n'est pas mise à jour depuis quelques temps, mais comme cette chaîne a tendance à multi-diffuser les mêmes programmes, j'y ai très vite trouvé la trace d'un précédent passage de cette émission et j'ai appris que la gars que je venais de voir était Ernesto Djédjé.
Le nom m'était a priori inconnu, mais j'ai été intrigué de noter que j'avais précédemment visité sa page sur Discogs. En fait, pile une semaine plus tôt, j'avais acheté une poignée de CD à la ressourcerie (un événement ces temps-ci : c'est la seule fois depuis le début de l'année qu'il y a eu un arrivage), parmi lesquels cette compilation de musique ivoirienne. Je ne l'avais même pas encore écoutée, mais j'avais creusé un peu les infos sur Discogs. A cette occasion, je m'étais rendu compte que, contrairement à ce que je pensais, on ne trouvait pas sur le CD uniquement des titres de la fin des années 1990, mais aussi quelques autres "vieilleries" des années 1970 et 1980, dont le succès Ziboté sur lequel je venais de m'éclater en faisant des chœurs phonétiquement pour accompagner Ernesto à la télé, sans me douter un seul instant que ce titre venait précisément d'intégrer ma discothèque !

Mon CD est le troisième volume d'une série d'au moins dix Ivoir' compil. Le choix des titres est explicité dans le livret par Raymond Akishi : "Ivoir Compil contribue non seulement au lancement des artistes et des nouveaux talents, mais accorde une place aux titres ivoiriens qui, tubes à une certaine période, n'ont pas profité de l'avènement du disque laser.". Au dos du livret, Henri Kattié, qui est à l'origine du projet, se met paradoxalement en lumière avec une grande photo couleur et une auto-citation : "Le succès d'un artiste dépend du savoir faire des travailleurs de l'ombre".

Dans l'ensemble, j'ai une préférence pour les "anciens" de la compilation, à commencer donc par l'excellent Ziboté, de 1977. Ernesto Déjdjé est mort à 35 ans en 1983, d'empoisonnement, dans des circonstances non élucidées. Il était notamment connu comme "Le Roi du ziglibithy".
J'aime aussi beaucoup les contributions de deux empereurs,
Okoi Seta Athanase, l'empereur du Kete rock, avec Atto è kokoin manh, également de 1977, et Digbo Daloh, l'empereur d'Aloukou, avec Bahizrehikou et ses percussions avec tambours et bouteille.
Les sons de synthé sont un peu envahissants et surtout superflus, mais Exode rural de Djinns Music est une belle ballade. Elle est tirée de leur unique album, que j'ai également dans mes étagères.

D'une manière générale, les chansons récentes au moment de la sortie du disque en 1998 sont celles qui réussissent le mieux l'amalgame entre sons "modernes" (synthé, boite à rythmes) et instruments plus traditionnels (percussions, guitares, cuivres).
La palme pour moi revient à Marc Lenoir & Aboutou Roots avec Hip hop youssoumba, qui démarre justement comme une chanson traditionnelle, avec peut-être une rythmique un peu synthétique, jusqu'à ce qu'Aboutou Roots intervienne  avec son rap tranquille en français, qui célèbre même la valeur travail dans sa première intervention.
Parmi mes autres titres préférés, il y a la séquence Abidjan dja d'Antoinette Konan, avec sa rythmique façon séquenceur, l'ambiance reggae de Deni d'Hamed Farras et Awhona gnou de Luckson Padaud, et aussi Mlen ginnie d'Ade Liz, une chanson de 1985.

Ce disque ne payait pas de mine avec sa pochette façon couverture de magazine, et en d'autres temps je l'aurais peut-être ignoré. Mais en cette période de disette, je ne regrette pas du tout les 50 centimes que j'ai investis. Il m'aurait fallu beaucoup plus pour me procurer les vinyls des titres les plus intéressants.

La compilation est intégralement en écoute sur YouTube.


Ernesto Déjdjé, Ziboté. C'est l'extrait que j'ai vu sur Melody d'Afrique.


Ernesto Déjdjé, Ziboté, au sommet CEAO à Yamoussoukro, en 1982.


Wedji Ped de Djinn's Music, Exode rural, en 1979.



01 février 2025

THE RUTS : Jah war


Acquis neuf en solde probablement chez A La Clé de Sol à Châlons-sur-Marne ou à Reims au début des années 1980
Réf : 2141 248 -- Édité par Virgin en France en 1979
Support : 45 tours 30 cm
Titres : Jah war -/- S.U.S.

Parmi ses multiples rééditions, Cherry Red vient de sortir Roots rock rebels, un coffret triple-CD sous-titré Quand le punk a rencontré le reggae 1975-1982. Parmi les 54 titres, il y en a une bonne partie que je connais et apprécie, dont beaucoup sont dans mes étagères.
Le livret est préfacé par Don Letts, l'homme incontournable sur la question. Il a notamment publié deux volumes de compilations Dread meets punk rockers uptown en 2001 et 2015, co-réalisé le documentaire Two sevens clash : Dread meets punk rockers en 2017. Mais surtout, en tant que DJ au Roxy à la grande époque du punk et proche de The Clash, il a probablement été un élément déclencheur du rapprochement entre punk et reggae, qui se concrétise notamment en 1977 par la reprise de Police and thieves par The Clash sur leur premier album, le single Punky reggae party de Bob Marley & the Wailers produit par Lee Perry, puis la rencontre entre Clash et Lee Perry pour l'assez décevant 45 tours Complete control.
Après ça, ce fut une explosion, entre reprises (Johnny was des Wailers par Stiff Little Fingers) et originaux imbibés de reggae, dont Watching the detectives de Costello, pour aboutir fin 1979-début 1980 à ce qu'on a appelé le "reggae blanc", et aussi à la vague ska 2-Tone.
Les punks de The Ruts notamment ont eu des liens particuliers avec le reggae. Actifs au sein de Rock Against Racism et proches de Misty In Roots, ils ont sorti leur premier single sur le label du groupe People Unite.

J'ai dû découvrir les Ruts et entendre pour la première fois Jah war le 3 janvier 1980, lors de la diffusion de leur prestation au Théâtre de l'Empire pour Chorus. Le groupe venait alors de sortir son premier album, The crack, qui n'aura jamais de successeur puisque, six mois plus tard, le chanteur Malcolm Owen était mort (l'héroïne, c'est dangereux...). A l'époque, j'ai acheté d'occasion Grin and bear it,la compilation "posthume" du groupe, et aussi ce maxi, soldé à 15 francs.

Jah war est le quatrième single de The Ruts, l'une de leurs grandes réussites avec le très clashien Babylon's burning. Il est tiré de l'album et est sorti à l'automne 1979.
La chanson rend compte d'une journée très particulière, celle du 23 avril 1979 à Southall, une banlieue de l'ouest de Londres. A l'initiative entre autres de l'Anti-Nazi League, une grosse manifestation a été organisée contre la tenue à l'hôtel de ville d'un meeting du National Front. La répression brutale de la manifestation a fait un mort, Blair Peach (Reggae fi peach de Linton Kwesi Johnson) lui est dédiée). Le siège de People Unite, qui se situait dans le quartier et qui servait ce jour-là de poste de premiers secours, a été investi et ravagé par la police. Le matériel technique de Misty In Roots a été détruit, de nombreux occupants ont été blessés, dont leur manager Clarence Baker, cité dans la chanson, qui est resté cinq mois dans le coma.
La chanson déroule son rythme sur près de sept minutes, dans une excellente ambiance reggae avec chœurs et cuivres, qui passe légèrement au dub dans la deuxième partie.

En Angleterre, ce single n'est sorti qu'en petit 45 tours. Jah war a été réduite de moitié pour l'occasion. Sur la face B, on trouve une bonne chanson punky inédite par ailleurs, I ain't sofisticated.
Polydor, qui distribuait Virgin en France à l'époque, en a fait voir des vertes et des pas mûres aux fans de New Wave, à commencer par les pochettes de Go 2 et de This is pop d'XTC.
Pour l'édition française en petit 45 tours de Jah war, pas de problème, Polydor a reproduit fidèlement le 7" anglais. Mais visiblement ils souhaitaient particulièrement soutenir les Ruts et ils ont décidé de sortir une version maxi-45 tours de ce single (c'est le seul pays au monde à l'avoir fait). Très bien.
Pour la face A, pas besoin de concocter une quelconque version "spécial club", la version de l'album pour remplacer la version raccourcie s'imposait.
Pour la face B, ces cons-là, au lieu de tout simplement d'ajouter un titre bonus à I ain't sofisticated, il y avait largement la place, ils ont choisi de la remplacer par S.U.S. Ce qui fait qu'on se retrouve avec deux titres de l'album et aucune rareté !

S.U.S.
fait référence à la loi SUS, une loi anti-vagabondage de 1824 facilitant les interpellations et les fouilles pour simple suspicion de délit, que la police utilisait bien sûr à la fin des années 1970 pour harceler particulièrement les noirs et les asiatiques.
Pour le coup, c'est une bonne idée thématiquement d'associer S.U.S. et Jah war. Et il y a un autre lien avec LKJ, puisque sa terrible Sonny's lettah est sous-titrée Poème anti-Sus.

Après la mort de leur chanteur, les membres de The Ruts ont eu un parcours tout à fait honorable sous le nom de Ruts DC. Ils ont même enregistré et tourné avec Valérie Lagrange en 1981 !


The Ruts en concert au Théâtre de l'Empire à Paris pour l'émission Chorus diffusée le 3 janvier 1980. Le premier titre est Jah war.


The Ruts en direct dans l'émission de la télévision belge Follies en janvier 1980. Le premier titre est Jah war.

26 janvier 2025

KATERINE & HELENA : Euro 04


Acquis par correspondance via Discogs en janvier 2025
Réf : [sans] -- Édité par Les Inrockuptibles / So Foot en France en 2004 -- CD encarté avec le hors série n° 16 des Inrockuptibles en partenariat avec So Foot. Interdit à la vente.
Support : CD 12 cm
Titres : Euro 04 -- Calmos

Depuis que j'ai craqué sur Comme Jeannie Longo et Chérie (que je n'ose appeler), deux des chansons de son premier album, je m'intéresse de loin mais avec plaisir aux aventures de Katerine.
Musicalement, il ne reste jamais en place, mais il y a des constantes dans son parcours : ses chansons sont légères, accrocheuses et drôles. Avec au fil des années des perles comme Je vous emmerde ou Louxor, j'adore. Il faut un talent très particulier pour écrire une (bonne) chanson à partir du numéro d'identification d'un poulet !
J'ai commencé à acheter des disques d'Helena, la petite sœur de Lio, avant même que Katerine commence à en sortir, puisque,peu de temps après sa sortie en 1988, j'avais trouvé en solde le maxi de son premier single, Lunettes noires.

Mais je n'avais jamais entendu parler de ce single du couple Katerine et Helena avant que l'ami Renaud Sachet, d'Arrière Magasin, ne le chronique pour Section 26 le 4 juin dernier. Il faut dire qu'il n'a été distribué qu'avec un numéro spécial foot des Inrockuptibles. Or, ça fait bien longtemps que je ne m'intéresse plus au sport spectacle. Mais ça ne m'empêche pas d'apprécier de bonnes chansons inspirées par le foot, comme Évoluer en 3ème division de Miossec ou Eat my goal de Collapsed Lung (mais pas World in motion de New Order !).

Avant d'aller plus loin, je vous conseille de lire la chronique de Renaud, très détaillée, avec plein d'infos que je ne connaissais pas et que je ne vais pas reprendre ici.
Après l'avoir lue moi-même, j'ai écouté Euro 04 et ça m'a suffisamment plu pour que je mette ce titre cet été sur ma compilation L'oreiller brutal. Et récemment j'ai sauté sur l'occasion quand je l'ai vu pas cher chez un vendeur Discogs à qui j'allais acheter d'autres disques.

Renaud a eu du nez en publiant sa chronique pour les vingt ans du disque, juste avant l'Euro 2024 en Allemagne. En effet, à ce moment-là, peu de monde savait que Katerine allait faire une performance de sa chanson Nu lors de la cérémonie d'ouverture des JO 26 juillet 2024 et on ne pouvait pas se douter qu'il serait désormais irrémédiablement associé au sport. Deux jours après la chronique de Section 26, quand Radio France se demandait si le relativement décevant nouveau single Sous mon bob serait le tube de l'été, il n'était pas directement associé à l'olympique été.

Ces deux chansons ont été enregistrées spécialement pour un CD diffusé avec un magazine, mais il ne s'agit pas de démos ou d'enregistrements vite faits. Ça s'est passé au studio Ferber à Paris, avec Renaud Letang à la réalisation et Gonzales aux arrangements. C'est exactement la même équipe que pour l'album Robots après tout qui est sorti en octobre 2005. Il s'agissait peut-être des premières sessions de l'album ou de leurs prémices.

Les deux titres ont un son son électro/dansant léger.
Euro 04 met en scène un dialogue dans un couple où l'un interroge l'autre. On est un peu dans la veine de l'indépassable C'est normal d'Areski et Brigitte Fontaine, sauf que là il n'est pas question des causes et des conséquences d'un incendie mais des nom prénom et nationalité de joueurs de foot. C'est léger, mais ça va au-delà d'un simple sketch parce que je continue à l'apprécier même avec des écoutes répétées. Une vidéo a même été réalisée pour ce titre.
 
Pour Calmos, carrément techno, le sujet est un grand classique, les commentaires de match surexcités. Renaud Letang devait être dans son élément puisqu'il a travaillé en 1990 sur le single Il suffit d'un ou deux excités crédité aux Footbrothers !
Dans le style, il y avait une chanson, à moins que ce ne soit juste un enregistrement, qu'on programmait souvent sur Radio Primitive vers la fin des années 1980, le commentaire hilarant d'un match en Afrique. Impossible de remettre la main dessus car je n'ai jamais eu le disque, s'il y en a un, donc aucune référence. Si ça dit quelque chose à quelqu'un, merci de partager.
Les deux n'ont rien à voir mais, la semaine de la mort de Bertrand Blier, ce titre ne peut qu'évoquer son film Calmos de 1976, que je n'ai encore jamais vu.

Les deux chansons de ce single n'ont jamais été reprises sur un autre disque. On peut penser qu'on les retrouvera en bonus le jour où il y aura une réédition de Robots après tout.





Mon album Le monde prodigieux des étoiles du football 1970-1971, avec la page du FC Nantes, du temps où je m'intéressais au foot.

18 janvier 2025

EGRÉGIE : Le Mont des Oliviers


Acquis chez Emmaüs à Reims le 10 janvier 2025
Réf : INT 80217 -- Édité par Pop Music en France en 1969
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Le Mont des Oliviers -/- Glorification

Saison et raréfaction générale obligeant, je n'ai pas beaucoup l'occasion ces jours-ci de farfouiller dans des lots de disques. Alors la semaine dernière chez Emmaüs à Reims, où le prix de 50 centimes était correct et permettait la prise de risque, je me suis un peu lâché. Pas tellement en nombre (j'ai pris une dizaine de 45 tours et un 78 tours), mais en contrôle qualité : j'ai acheté certains disques que j'aurais peut-être à peine regardés en temps normal.

C'est notamment le cas de celui-ci, avec sa pochette est en mauvais état. Le papier est en partie arraché au recto, du coup le nom du groupe et le titre sont en partie manquants et la façade de Notre-Dame de Paris, qui en a vu d'autres depuis, a aussi souffert. Et deux des côtés de la pochette ont été réparés au scotch, il y a bien un demi-siècle je suppose tant il a jauni depuis.
Mais le disque lui-même est en bon état, et ce qui m'a décidé à le prendre c'est le rond central : je ne connaissais pas du tout le label Pop Music, mais le nom est intéressant, surtout en prenant le compte qu'on était à la fin des années 1960, où "la pop" désignait plus spécifiquement par chez nous le rock du moment, post-psychédélique, marqué par les hippies, en pleine évolution avant d'exploser dans de multiples genres dans les années 1970.
Il s'avère que ce label, distribué par Vogue, a été actif de 1969 à 1971. Il a notamment publié les premiers disques de Martin Circus, mais aussi Maajun ou Présence. Je me demande si ce n'est pas Gérard Hugé qui en était le directeur artistique.

Ceci est le seul disque publié par Egrégie. Il n'y a aucune donnée sur les membres de cette formation, en-dehors des crédits de composition pour les deux faces, soit quatre noms : André Raulin, Jean Schmitt, Emmanuel Booz et Ph. Achaley.
En latin, Egrégie signifie spécial, remarquable. Le début du petit texte au verso y fait référence : "Je m'appelle Egrégie, je me demande bien pourquoi, je n'ai rien de particulier". On comprend que c'est un enfant, mais ça n'a pas beaucoup de sens, particulièrement la fin, "Mes parents m'ont promis pour bientôt un petit FRÈRE...". En tout cas, je n'ai pas trouvé le rapport, si jamais il y en a un, entre ce texte et la musique qu'on trouve sur le disque.

A part un peu de chœurs, Le Mont des Oliviers est un instrumental. Batterie, basse, guitare, on est dans un son complètement de son époque. Il y a un peu de flûte aussi, mais c'est l'orgue qui me semble l'instrument principal sur ce titre, mon préféré des deux.
Glorification est dans la même veine, avec encore l'orgue au début, mais la flûte et la guitare sont plutôt en avant cette fois-ci. Il y a plusieurs mouvements, ce qui renforce l'aspect musique de film.
Je ne sais pas si Egrégie était un groupe ou simplement un projet ponctuel, mais en tout cas tout semble s'être limité à la sortie de ce 45 tours. Les compositions, elles, ont bien vécu ensuite.

Ça a commencé très vite, puisqu'Emmanuel Booz a signé en solo chez Barclay. Son premier disque pour le label, quelques mois après la sortie de celui d'Egrégie est... une nouvelle version de Le Mont des Oliviers !
Cette fois, la direction musicale est assurée par Hervé Roy. Cette version instrumentale est plus lente, ce qui renforce le côté musique d'église et nous rapproche d'un slow "normal". On pourrait dire qu'on est dans une veine Aphrodite's Child.
Mais ça c'est la face B, puisque la face A est une version chantée de Le Mont des Oliviers. Et là, tout ce que je peux dire c'est que je regrette que la composition ne soit pas restée instrumentale. Une mention au verso de la pochette explicite le propos : "Pour mieux rêver l'amour que j'ai de l'univers j'ai fondu l'harmonie de mon âme avec les écrits de la Bible". Dans sa biographie sur son site, Emmanuel Booz explique que la chanson fait partie d'un "projet délirant et décalé basé sur l’Ancien Testament, où il fera même des apparitions télévisuelles en djellaba, entouré de moutons". Pour rester dans la même zone géographique et la même période chronologique, je préfère gravir le Golgotha de Manset.

Je pensais avoir fait le tour de la question, puis j'ai trouvé, chez Riviera, une étiquette de Barclay, toujours en 1969, la trace d'une troisième version de Le Mont des Oliviers ! Le 45 tours s'intitule
Musique sacrée avec la Christmas Choral, sous la direction de Bernard Gérard avec Pierre Dutour à la trompette. Après ça, on n'est pas surpris d'apprendre, toujours de la plume d'Emmanuel Booz, que cette composition a été jouée aux grandes orgues de la Cathédrale de Bourges, aux côtés des œuvres de Bach.
Ça c'était la face B du disque. En face A, on retrouve un titre qu'on connaît bien, Glorification, que j'ai eu du mal à reconnaître, mais ce qu'il y a de bien c'est qu'il y a de la fuzz en plus de la trompette !

C'est tout ? Eh bien non. En 1970, chez Véga, sur un album de reprises à pas cher par un groupe anonyme dénommé The Combo's Men Show. On trouve deux nouvelles versions de Le Mont des Oliviers et Glorification. Sauf que cette fois-ci elles ont héritées de paroles anglaises par Boris Bergman pour la première et, je suppose, Dave Cooper et Bernie pour la seconde et elles sont devenues Son of man et Master of love. Je ne les ai pas trouvées en ligne.

Si vous pensiez que c'était fini, vous aviez tort ! En 1975, Juan Bau a sorti un 45 tours, avec en face B El Mont del Olivar. Je vous laisse deviner le titre original de cette chanson adaptée en valencien.

En partant d'un disque inconnu, on arrive si je compte bien à cinq versions de la face A et trois de la face B, c'est pas mal !
Et ce n'est encore pas tout...

En effet, en rentrant chez moi au retour d'Emmaüs, je me suis rendu compte que j'avais déjà visité la page Discogs d'Emmanuel Booz. Je l'avais déjà oublié, mais c'était à peine une semaine plus tôt.
Et tout est venu du premier album de Renaud, qu'on vient de m'offrir et que j'ai écouté. En examinant les crédits, j'ai vu que les arrangements et la prise de son sont crédités à Scarabée Blanc. J'ai cherché à savoir qui se cachait derrière cet intitulé. Je n'ai pas trouvé, mais en parcourant Discogs, j'ai atterri sur un 45 tours de Booz, puis sur sa discographie, où j'ai découvert qu'il avait publié en 1969 chez Barclay, juste après Le Mont des Oliviers, un 45 tours et un 33 tours intitulés Au restaurant d'Alice. Eh oui, vous avez raison, il s'agit bien d'une version française d'Alice's restaurant d'Arlo Guthrie, enregistrée à Londres en présence de l'américain, rencontré par l'entremise de Boris Bergman, qui a traduit les paroles. Si vous voulez en savoir plus, il y a un extrait de la chanson ici et on peut télécharger l'album .