22 février 2013

COLETTE MAGNY : Melocoton


Acquis d'occasion dans la Marne en 2011
Réf : 3616 -- Edité par CBS en France vers 1969
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Melocoton -/- Co-opération

Mickey Baker est mort le 27 novembre 2012. La nouvelle a eu si peu d'écho quee sur le coup elle n'est pas du tout apparue sur le radar de mes multiples sources d'information. Il a fallu, à l'ancienne, que j'ouvre un bon mois plus tard un numéro de Rock & Folk pour découvrir, sur une pleine page, un hommage au bonhomme sincère, complet et informatif. Dans Mojo et Uncut, Baker n'a eu droit qu'au service minimum du paragraphe à la rubrique nécrologique. Pourtant, du guitariste de session pionnier du rock (il joue notamment sur Shake, rattle and roll de Big Joe Turner) au vétéran du blues et du jazz ami de Memphis Slim, en passant par le duo Mickey & Sylvia et son tube Love is strange et surtout, en France, son rôle essentiel d'auteur-compositeur, producteur et chef d'orchestre pour la variété et le rock dans les années soixante, on peut dire qu'il y avait matière à marquer le parcours d'un musicien imposant, même s'il était moins célèbre que certains de ses contemporains.
Récemment, lors d'un concert à Reims, Dick Annegarn pointait que, bien qu'il vive en France depuis des décennies et contribue à la culture française en ayant choisi de créer dans cette langue, il continue à être considéré comme un étranger pas assez bon pour voter. C'est un peu pareil pour Mickey Baker, établi en France pendant plus de cinquante ans, qui n'a sûrement pas eu droit aux breloques du ministère de la culture attribuées à la chaîne aux acteurs hollywoodiens et dont la nouvelle du décès à réussi à être manquée par un quotidien comme Libération, jusqu'à ce que le vétéran Bayon s'aperçoive de la bévue et lui consacre un court article dans l'édition du 4 février.
Kevin Ayers, un autre illustre musicien étranger résidant dans le sud-ouest de la France, est mort cette semaine. Là, on en a un peu plus parlé, même si, comme souvent dans ces occasions, c'est rarement pour sortir autre chose que des banalités (mais l'un des premiers articles parus, celui de Mojo, est très bien).
En tout cas, le petit article de Libé sur Mickey Baker a eu au moins un mérite, c'est de m'apprendre que Mickey Baker joue sur la chanson Melocoton de Colette Magny, dont j'avais acheté le 45 tours il y a quelques temps, et qui faisait partie de ma liste mentale des disques susceptibles d'être chroniqués ici.
Bon, je précise d'emblée que, sans connaître ses chansons, j'ai toujours fui les disques de Colette Magny. Pour moi, c'était une caricature de chanteuse militante, une sorte de pasionara communiste. C'est tout ce que je croyais en savoir et je n'avais aucune envie de chercher à en savoir plus. Comme pour une autre Colette (Renard), il a fallu toute la persuasion de Philippe R. pour que je change d'avis, lui qui m'a plusieurs fois dit "Oui, Colette Magny, certes, mais écoute Melocoton, son tube, c'est très bien". Et il n'avait pas tort, le bougre.
Melocoton est sorti à l'origine en 1963, en face B du premier disque de Colette Magny, un EP dont le titre principal était une reprise de Basin Street blues. Les deux autres titres étaient une autre reprise d'un standard, Nobody knows you when you're down and out et un autre original, Co-opération.
Si je ne savais pas que la guitare sur ce disque est tenue par Mickey Baker (ce qui est clairement indiqué au verso de la pochette), c'est tout simplement parce que le disque que j'ai acheté, ce n'est pas l'EP original, mais une réédition en 45 tours 2 titres sortie après octobre 1968, qui conserve, mais en noir et blanc, la photo de pochette originale de Jean-Marie Périer, mais qui zappe tous les crédits au dos pour faire la promotion d'autres parutions CBS. Outre Baker, il y a du beau monde qui joue sur ce disque, dont le batteur Christian Garros et les contrebassistes Pierre Michelot et Michel Gaudry.
Vu le contexte, et contrairement à ce que le titre pourrait laisser penser, Melocoton n'est pas un blues du sud (ou alors du sud de Paris), pas un mélo coton ou l'histoire d'un gars qui file un mauvais coton. Non, c'est 1'40 de dialogue entre deux gosses, Melocoton et Boule d'Or, une fenêtre de poésie qui m'a un peu rappelé l'ambiance du roman La vie devant soi d'Emile Ajar. Au moment de la mort de Colette Magny en 1997, L'Humanité a cité cette chanson comme un exemple de l'obsession de l'antiracisme de Colette Magny. Soit je n'ai rien compris aux paroles, soit je n'ai pas tous les éléments pour les analyser, mais en tout cas je ne vois pas ce que le racisme a à voir là-dedans. En tout cas, depuis que je connais cette chanson, je ne peux plus voir une boite de conserve de pêches au sirop sans penser à Colette Magny (en espagnol, pêche se dit melocoton). Melocoton a mené Colette Magny du Petit Conservatoire de Mireille jusqu'à la scène de L'Olympia, mais elle a très vite choisi de ne pas jouer le jeu du vedettariat des variétés françaises.
En face B, le texte de Co-opération semble plus annoncer ses futures chansons militantes. Accompagnée par la guitare acoustique de Mickey Baker, elle commence par citer les auteurs qui l'ont inspirée (Sartre, Suarez, Carlyle, Alain) avant de balancer des trucs comme "Le problème n'est pas celui du citoyen mais celui de l'homme. Lorsque l'humanité sera enfin sage, nous passerons de la compétition dans l'individualisme à l'individualité dans la coopération."...
Bon, et comme il n'y a pas de raison d'être moins éclectique que Mickey Baker, après Colette, on chroniquera peut-être un jour ici une autre de ses productions, pour Chantal (Goya) cette fois.




3 commentaires:

Anonyme a dit…

Il faut dire qu'avec le PCF la musique a toujours été ramenée à la ligne politique. Ils ont jamais écouté les paroles, c'est à peu près certain! L'ami J-P M. se souvient peut être d'un set survitaminé de la dame aux Crme. Une sacré femme qu'à pas hésité à expérimenter du free jazz à la chanson pour enfant! Pour faire le lien avec kevin A je tombe sur ce blog "planet gong" qui parle bien de colette même si il en rajoute un peu sur le côté artiste maudit (elle ne l'était pas et n'a jamais revendiqué la notoriété)
http://www.planetgong.fr/article-22419536.html

Anonyme a dit…

oh il faut lire "survitaminé de la dame aux Cordeliers"
Désolé ph

Pol Dodu a dit…

J'avais repéré l'article sur Planet Gong et prévu de faire un lien dessus, mais finalement il est passé à l'as. Tu as vite rattrapé le coup...