29 avril 2012

A BOY CALLED DORIS : Star crossed lovers


Acquis au Record and Tape Exchange de Notting Hill Gate à Londres le 18 avril 2012
Réf : CROSSED 001 -- Edité par Regal/EMI en Angleterre en 2007 -- This promotional CD has been released by EMI on the express condition that ownership and title remain vested in EMI which may require delivery up of this record at any time. It may not be sold, transferred, altered or copied (including burning or uploading to the internet) without the express prior written approval of EMI.
Support : CD 12 cm
Titres : Star crossed lovers -- Chom chom

Quand je rentre à la maison avec une pile d'une quarantaine ou une cinquantaine de CD (pour la plupart des disques promo avec un ou deux titres), je les écoute dès que possible tous au moins une fois. J'en éjecte quelques-uns, j'en garde un bon paquet, même si je sais bien qu'il y en a beaucoup que je ne réécouterai jamais une deuxième fois. Dans le lot de ces disques de groupes qui me sont souvent inconnus, ceux qui me font vraiment dresser l'oreille, m'interpellent et me réjouissent fort sont malheureusement très minoritaires, mais c'est ce qui est arrivé avec cette version CD promo du premier single d'A Boy Called Doris, commercialisé en 45 tours et en téléchargement par Regal, une filiale d'EMI.
Le nom du groupe, peut-être inspiré par A boy named Sue, la chanson de Shel Silverstein qui fut un tube pour Johnny Cash, n'est pas génial et n'est pas du tout bien lisible sur la pochette de CD en forme d'étiquette de 45 tours, mais j'ai déjà eu au moins une bonne surprise avec ces CD promo de Regal (I am John de Loney, Dear), alors je l'ai mis dans ma pile.
Star crossed lovers est une chanson lente, avec une petite mélodie au glockenspiel, un chant parlé, du violon. Pas mal du tout, mais Chom chom est bien mieux (je l'aurais mise en face A si on m'avait demandé mon avis) : encore du glockenspiel (apparemment une marque de fabrique du groupe) et du chant parlé, mais un rythme plus rapide, de la guitare électrique, plus de choeurs (qui font des "doo doo") et un refrain autour de "Keep it unreal".
J'avais pas mal pensé à Pulp à l'écoute de ces deux titres (et Chom chom est vraiment au niveau des meilleurs titres de Pulp) et la première photo que j'ai vue de Tony Bolton, le leader du groupe, a prouvé que je ne m'étais pas trompé : à l'époque de la sortie de ce single, il avait vraiment un look à la Jarvis Cocker.
Cette photo, je l'ai vue sur un article très détaillé de BBC Manchester qui raconte l'histoire de Star crossed lovers, depuis la composition du morceau un jour au boulot et l'enregistrement d'une démo la nuit suivante à la maison, en passant par la sortie limitée d'une première édition du disque chez Adelfi Records, un label lié à l'Université de Salford (!), jusqu'à la signature et la réédition du disque par la filiale d'une major.
Malheureusement pour Tony Bolton, le succès n'a pas dû être au rendez-vous pour ce premier single et Regal n'a pas sorti d'autre disque d'A Boy Called Doris. Le groupe, dans une autre formation a quand même sorti un album en 2010, I killed Doris. Doris a quand même survécu un temps au titre de cet album, puisque le groupe précisait en septembre 2011 sur sa page Facebook qu'il était toujours parmi nous, avant d'annoncer en janvier dernier qu'il nous avait quitté. Je ne serais quand même pas surpris si Tony Bolton faisait à nouveau parler de lui dans l'avenir.

Ces deux titres sont toujours en vente sur iTunes.

28 avril 2012

HOMER AND JETHRO : Wanted for murder


Acquis dans la boutique de la British Red Cross à Lewisham le 18 avril 2012
Réf : LSP-3673 -- Edité par RCA aux Etats-Unis en 1966
Support : 33 tours 30 cm
12 titres

Depuis que j'ai découvert Homer et Jethro grâce à WFMU en 2008, notamment avec leur hilarante version de Baby it's cold outside enregistrée en 1949 avec June Carter, je cherche la bonne occasion de me procurer un de leurs disques. J'aimerais bien trouver leur 45 tours avec deux reprises des Beatles, I want to hold your hand et She loves you, à condition qu'il y ait la pochette avec Homer et Jethro portant une perruque à la Beatles. J'ai failli craquer plusieurs fois pour le CD Assault the rock'n'roll era, compilation de reprises de la sphère rock, dont les deux des Beatles, mais il est un peu cher.
Et puis, lors d'un court séjour à Londres la semaine dernière, j'ai fini par trouver dans une boutique de charité, à 1 £ pièce, trois albums qui ont dû appartenir à la même personne : un de Hank Snow, un de Brenda Lee, et, en parfait état, ce superbe 33 tours en import américain à la pochette cartonnée épaisse.
Homer et Jethro, des années 40 aux années 60, ont eu un très gros succès aux Etats-Unis avec leurs parodies de grands tubes et leurs propres chansons satiriques. Contrairement à Spike Jones, qui insérait des effets comiques dans sa musique, Homer et Jethro faisait plier leurs auditeurs surtout en détournant/modifiant les paroles des chansons (ils devaient aussi être très drôles sur scène). En plus, c'étaient d'excellents musiciens, Homer à la guitare électrique (il possédait la Fender Stratocaster numérotée 001) et Jethro à la mandoline, électrique aussi. Ils étaient aussi des musiciens de session reconnus, qui ont joué sur un grand nombre de disques country, souvent sous la houlette de Chet Atkins (qui a produit Wanted for murder), un de leurs proches (Chet était marié à la soeur de la femme de Jethro). En plus de leur recette à succès comique, Homer et Jethro ont aussi publié des disques de jazz instrumentaux. Il faut dire qu'ils étaient très productifs. Rien qu'en 1966, année de la sortie de ce disque, ils ont sorti quatre albums, et une compilation pour couronner le tout.
Sur cet album, on retrouve un assortiment de titres originaux et de reprises détournées. Outre la guitare et la mandoline d'Homer et Jethro, il y pas mal d'orgue sur cet album au son nickel, mais relativement peu de pedal steel.
Le morceau-titre, Recherchés pour meurtre, un de mes préférés du disque, écrit par leur pote Cy Coben, retrace la carrière du duo : "We're wanted for murder by the songwriting clan, we massacre their purty tunes, amputate their moons and Junes, sing their songs like crazy loons, we're wanted for murder by the songwriters of our land".
On peut penser qu'Homer et Jethro sont peu connus par chez nous car ça aide de comprendre les paroles pour les apprécier pleinement, comme avec I don't flirt anymore, une version du I don't hurt anymore de Hank Snow.
Outre ces deux-là, on trouve parmi mes titres préférés une reprise (non parodique ?) de Buck Owens, Tiger by the tail, une valse, Drop dead, little darlin', No hair Sam, une reprise presque jazzy de Mohair Sam, une chanson sur un gars enrhubé, I love you drops, et une autre sur mec bourré, Lying time.
Elle est loin l'époque où j'aurais fui Homer et Jethro en les prenant pour des ringards. Maintenant, j'espère juste tomber bientôt sur un autre de leurs disques...

On trouve pas mal de MP3 d'Homer et Jethro à télécharger gratuitement chez WFMU.

22 avril 2012

THE TEDDY BEARS : Oh, why


Acquis sur le vide-grenier de Tours sur Marne le 1er avril 2012
Réf : 27 705 -- Edité par Polydor en France en 1959
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Oh why -- You said goodbye -/- I don't need you anymore -- Don't go away

C'est l'autre très bonne pioche, avec le Troggs, de ma brocante à Tours-sur-Marne cette année. Pour ma part, musicalement, il n'y a pas photo, je préfère de loin les Troggs, mais ce disque est intéressant à plus d'un titre.
The Teddy Bears ont été fondés par Phil Spector pour sortir en 1958 son premier enregistrement, To know him is to love him. Une excellente chanson, devenue un classique, et un premier coup de maître puisque cette production indépendante a fini par atteindre la première place des charts aux Etats-Unis. C'est le seul groupe répertorié dont le producteur paranoïaque meurtrier a fait partie. Pour l'occasion, il avait recruté autour de lui à l'université Marshall Leib, avec qui il fait les choeurs, et Annette Kleinbard, qui tient le chant principal.
Le groupe a duré deux ans et n'a jamais réédité son succès initial. Ils ont notamment enregistré une version d'Unchained melody. En 1965, Spector s'en souviendra et rééditera l'opération avec The Righteous Brothers pour une face B de single qui, cette fois, deviendra un classique. Les Teddy Bears ont assez vite signé chez Imperial et là les choses se sont gâtées pour Phil Spector car ce nouveau label ne lui laissait pas autant les mains libres pour passer derrière la console d'enregistrement et empiler les voix. Ça s'entend sur ces quatre chansons pop proprettes, chantées par Annette avec quelques choeurs masculins, une guitare très légèrement twangy et des arrangements discrets. Le point de comparaison qui me parait le plus proche, c'est en France que j'irais le chercher, dans les premières productions de Françoise Hardy. C'est particulièrement vrai pour Don't go away. Je ne serais pas surpris d'apprendre que la jeune Françoise passait sur son Teppaz les disques des Teddy Bears. De ces disques, il y en a eu au moins deux publiés en France, mais je suis très surpris que ce 45 tours n'ait pas été réédité au début des années 1960 avec en gros la mention "Version originale anglaise" sur la pochette. Quelqu'un chez Polydor France ou chez Imperial aux Etats-Unis a dû rater le coche, car en effet Oh why, cette chanson assez anodine a eu une deuxième carrière, et quelle carrière !
Une fois traduite en allemand, Oh why est devenue Sag warum, interprétée par le luxembourgeois Camillo, et Sag warum a été un tube énorme presque partout en Europe au tout début des années 1960, sauf en Allemagne, apparemment.
Je ne suis pas un spécialiste du genre, le slow à emballer, mais je pense qu'avec son côté mélodramatique plus prononcé (un comble, face à Spector !) et la voix parlée et plus grave de Camillo, Sag warum avait de toute façon plus d'ingrédients pour réussir que Oh why.
Le parcours de Phil Spector est bien connu, mais il est à noter qu'Annette Kleinbard, devenue à un moment Carol Connors, a eu de son côté un parcours d'auteur-compositeur et d'interprète plus qu'honorable.

21 avril 2012

LEWINUS MONE : The fine art of daydreaming


Offert par Al Turner par correspondance en mars 2012
Réf : MABE001 -- Edité par Mabel Revelations en Angleterre en 2001 -- Limited edition of 500
Support : CD 12 cm
20 titres

J'ai eu l'occasion de parler de Thin fine line, l'unique 45 tours du groupe anglais The Dolphins. Ce 45 tours de très bonne tenue d'un groupe complètement inconnu m'intriguait suffisamment pour que j'écrive fin 2010 au légendaire journaliste musical Fred Dellar, qui tient la rubrique Ask Fred dans Mojo, pour essayer d'en savoir plus.
Fred a donné sa langue au chat, mais il a publié ma question dans Mojo en février 2011 en lançant un appel à ses lecteurs. N'ayant eu aucune réponse à ma question dans les mois suivants cette publication, j'avais mis l'affaire de côté et je m'étais dit que ce disque resterait à jamais un mystère. Et puis, au début de cette année, j'ai finalement reçu un email d'Al Turner (le nom crédité pour la face A du 45 tours), qui me proposait de prendre contact avec lui pour parler des Dolphins (un de ses amis lui avait montré ma question dans Mojo). Ce qui fut fait, par email puis par téléphone.
Thin fine line est bel et bien le seul 45 tours (auto-)édité par The Dolphins. Le genre de sortie qui n'a pas eu de chance : le disque a bien été chroniqué dans le NME par Penny Reel mais le distributeur, qui avait reçu 500 exemplaires du disque, a fait faillite avant même qu'ils aient atteint les bacs des disquaires. Al n'a jamais su ce qu'il était advenu de ses disques. Le groupe a duré quelques temps, donnant quelques concerts, dont au moins un en première partie de Simple Minds.
Mes oreilles ne m'avaient pas trahi : le groupe qui a enregistré Thin fine line et les reprises de John Cale et Syd Barrett en face B n'était pas uniquement constitué d'amateurs tout juste sortis de leur garage. En effet, si Al n'était pas un musicien professionnel (il était plutôt disquaire), on compte au moins deux pointures parmi les musiciens du disque, John Veitch, fondateur du groupe Cafe Jacques et membre du groupe de Murray Head dans les années 1980 (il est mort en 1990), et John Bentley, à l'époque, et à nouveau maintenant, le bassiste de Squeeze. Le groupe est complété par Colin Hart à la guitare et Rob Todd à la batterie. De même, le Peter Bown mentionné dans les crédits est bien l'ingénieur du son qui a travaillé pendant des années pour EMI à Abbey Road. Il n'a pas produit le disque mais a remixé le produit des sessions d'enregistrement originales qui se sont déroulées au studio Archipelago à Pimlico.
Voilà désormais un peu de lumière faite sur un disque qui a désormais plus de trente ans.
S'il n'a pas fait une carrière professionnelle, Al Turner a continué à jouer de la musique pendant toutes ces années. Depuis 2000, il joue sous le nom de Lewinus Mone. Après quelques péripéties (Le premier exemplaire, pourtant protégé par une boite de CD en plastique très classique, m'est arrivé cassé car il avait visiblement été plié en deux ! Je n'avais jamais vu ça...), Al m'a offert un exemplaire de ce qui est je crois le seul disque sorti à ce jour par Lewinus Mone, The fine art of daydreaming.
Le titre d'ouverture, Astronomy by day, donne une bonne idée de l'album. C'est un instrumental, et le disque en compte un bon nombre, où se conjuguent les deux guitares d'Al Turner et Chazz Chessington, l'une acoustique qui fait la rythmique et l'autre électrique. Le résultat me rappelle un peu A trip to Tripville, l'album de Dr. Sean Berg et Ya Ya HD, ou les enregistrements solo de Mick Turner. Mais les points de référence d'Al Turner sont restés très stables après toutes ces années et tournent principalement autour du psychédélisme anglais. Remarquablement, on trouve à nouveau ici à la fois une reprise de John Cale (une version de Thoughtless kind, presque chuchotée à l'oreille) et une autre d'un titre écrit par Syd Barrett, le Jugband blues de Pink Floyd. Il y a une troisième et dernière reprise, une version de l'indicatif de Robin Hood, l'indicatif de la série télé anglaise Robin des Bois des années cinquante. C'est l'un de mes titres préférés du disque, mais tous les autres se trouvent parmi les originaux : Totally wessold et ses deux voix en choeur, le bluesy Thinkin about Johnson (à propos de Robert ?), le plus pop Fall asleep with you, avec bongos, basse, et trompette, le bien nommé Claret and Barrett, l'instrumental Mighty pretty country et Man in the desert.
Syd Barrett est bien une figure tutélaire pour Lewinus Mone : en plus d'une reprise et d'une référence dans un titre, on trouve même un de ses crobards sur le livret du CD (dessin non crédité, mais l'information est donnée ici).
Je ne sais pas si un nouveau disque est en préparation, mais Lewinus Mone enregistre toujours des titres récents sont en écoute sur Showcase Your Music.

On peut commander The fine art of daydreaming directement auprès de Lewinus Mone.

16 avril 2012

THE SOUND : Sense of purpose (What are we going to do)


Acquis chez New Rose à Paris le 24 septembre 1981
Réf : KOW 21T -- Edité par Korova en Angleterre en 1981
Support : 45 tours 30 cm
Titres : Sense of purpose (What are we going to do ?) -/- Point of no return -- Coldbeat

Dans le dernier numéro d'Abus Dangereux, il y a une page entière pour chanter les louanges des deux premiers albums de The Sound à l'occasion de leur toute récente réédition. Je n'ai trouvé aucune info à ce sujet sur le site du distributeur Differ-ant et je n'ai même pas été capable de localiser le site officiel du label qui s'est chargé de cette distribution, 1972 Records, mais les disques sont bel et bien à nouveau disponibles et c'est heureux car les précédentes rééditions par Renascent, sorties en 2001, étaient depuis longtemps épuisées et se vendaient à prix prohibitif.
Pour fêter ça, j'ai ressorti le seul single extrait du deuxième album, From the lion's mouth. Sense of purpose est sorti en éclaireur de l'album, un mois avant. Je me revois encore en train de sortir de chez New Rose et de manger ce disque des yeux, comme les lions s'apprêtent à le faire pour le martyr sur la pochette (mais ça, pour le savoir, il a fallu attendre de voir la pochette de l'album, celle du single n'est qu'un détail du tableau de Briton Riviere, Daniel dans la fosse aux lions). Or, je suis ne suis allé à Paris qu'une fois au moment de la sortie de ce disque, c'est pour ça que j'ai pu fixer précisément la date de mon achat : c'était pour voir The Clash avec The Beat en première partie dans le cadre de leur semaine de concerts au Théâtre Mogador.
La version de Sense of purpose est la même que celle de l'album, sauf qu'elle est amputée de sa première minute, une intro instrumentale, pour attaquer directement avec la pêche sur les radios. Dans sa chronique de l'album dans le NME le 31/10/1981, Andy Gill prend comme point de repères pour The Sound, The Comsat Angels, U2 et Joy Division, et on est bien dans cette veine épique avec Sense of purpose, plutôt côté U2 et Comsat angels. Le rapprochement serait moins évident avec Echo and the Bunnymen, même si on pourrait le tenter avec des titres comme Over the wall et A promise, et pourtant les deux groupes avaient en commun un label, Korova, et un producteur, Hugh Jones.
En tout cas, Sense of purpose est une réussite dans son style, mais ce titre n'apportera pas du tout de succès à The Sound. C'est U2, qui n'était pas encore à leur niveau en 1981, qui remportera la timbale en 1983 avec un titre un peu dans la même veine, New year's day.
Les deux titres de la face B sont des raretés, ce sont aussi deux grandes réussites.
Pour Point of no return, probablement un titre issu des sessions de l'album, on peut cette fois-ci évoquer, surtout pour le chant et les paroles, le souvenir et le désespoir de Joy Division. Le titre parait presque un peu court, le groupe l'aurait sûrement un peu plus travaillé s'ils avaient décidé de l'inclure sur From the lion's mouth.
Il n'y a aucune indication à ce sujet sur le disque, mais Coldbeat est tout sauf un nouveau titre : cet excellent morceau électrique, punky, plus proche du son de Jeopardy, date en fait d'avant le premier album du groupe. Il figurait en 1979 sur leur premier disque sous le nom de The Sound, l'EP Physical world, un disque que j'ai acheté vers 1983 et que j'ai été assez bête pour revendre.
Ces deux titres ne figuraient pas sur la réédition CD de From the lion's mouth en 2001 (il n'y avait en bonus que le single suivant, Hot house) et ils ne sont pas non plus sur la toute nouvelle réédition, qui ne comprend que les dix titres du 33 tours original. C'est peut-être pour respecter la volonté d'Adrian Borland, qui en son temps avait souhaité que ses albums soient réédités tels quels, mais c'est bien dommage quand même. Un CD bonus avec les diverses raretés d'époque (comme la version live de New dark age de la face B de Hot house) aurait peut-être permis de satisfaire tout le monde...

15 avril 2012

BARBARA : L'aigle noir


Acquis sur le vide-grenier de Bisseuil le 8 avril 2012
Réf : 6009-053 -- Edité par Philips en France en 1970
Support : 45 tours 17 cm
Titres : L'aigle noir -/- Quand ceux qui vont

L'intérêt du vide-grenier de Bisseuil, c'est que c'est l'un des rares dans la saison où je peux me rendre à vélo (3 km à plat le long du canal, çà reste dans mes cordes). Cette année pour le Dimanche de Pâques, le temps était plutôt agréable et en conséquence les stands étaient plutôt nombreux. Malgré tout, je n'ai fait des achats qu'à trois stands, un très bel album de guitare hawaïenne acheté à M. Beatnik, qui a retrouvé quelques disques dans son garage, deux CD à un autre stand, et surtout une bonne pile de disques pas chers achetés à un couple qui avait un carton d'albums et un de 45 tours. J'ai dégoté notamment une portion d'album de Marcel Bianchi (le disque est grignoté sur le bord sur la largeur de deux titres) et un autre (complet) de musique hawaïenne par Harry Kaapuni, un de Léo Ferré et quelques 45 tours des années 1960-1970, dont celui-ci.
Contrairement à ce qu'on pourrait croire en jetant un rapide coup d'oeil à la pochette, il ne s'agit pas d'un duo entre Barbara et Marcel. Marcel, c'est simplement l'ancien propriétaire, visiblement, de tous les disques que j'ai achetés à ce stand et, comme moi à une époque, il a succombé au charme de l'étiqueteuse Dymo à ruban rouge et il a commis l'erreur d'en coller sur ses disques. Je peux attester que ces étiquettes sont indécollables, d'ailleurs, plusieurs des pochettes de disques de Marcel étaient abimées car on avait essayer de s'en débarrasser.
Je ne connais de Barbara que ses plus grands succès, Dis quand reviendras-tu ?, Au bois de Saint-Amand, Ma plus belle histoire d'amour, L'aigle noir surtout. D'autres de ses grands titres, comme Göttingen ou Nantes, ne sont que ça pour moi, des titres de chansons dont je suis incapable de citer l'air et les paroles. Et encore, les chansons que je dis connaître, c'est de très loin, surtout pour les avoir entendues à la radio. J'imagine que ces chansons que j'ai citées faisaient partie des sélections de Barbara pour Stop ou encore le dimanche matin sur RTL dans les années 1970.
En fait, j'ai vraiment découvert L'aigle noir, cette chanson que j'aime beaucoup, cette semaine en écoutant attentivement ce 45 tours que je venais d'acheter.
Le charme agit dès l'intro, avec la mélodie sur les premières paroles ("Un beau jour ou peut-être une nuit, Près d' un lac je m' étais endormie"), l'accompagnement au piano. Puis arrivent au fil de la chanson la batterie, la basse, la guitare électrique les choeurs. En écoutant ce son post-psyché/pré-progressif et en pensant à la date de sortie du disque, je me suis dit que cette chanson, arrangée par Michel Colombier, contient tous les ingrédients qui feront le succès l'année suivante de L'histoire de Melody Nelson. Ce rapprochement n'est sûrement pas complètement fortuit : Barbara et Gainsbourg (qui se sont parfois retrouvés à la même affiche, comme à Nancy en 1965) étaient sur le même label, Philips, Michel Colombier a beaucoup travaillé avec Gainsbourg sur cette période et, de son côté, juste avant d'enregistrer L'aigle noir, Barbara avait collaboré avec Jean-Claude Vannier pour l'album Madame.
Les interprétations des paroles de L'aigle noir fleurissent, souvent à sens unique et psychanalytiques. Je préfère m'attacher à leur mystère et à leur poésie. Déjà que, depuis plusieurs années, me trotte dans la tête une variante, implantée là par l'un des membres de L'Opération Kangourou (Le Dérailleur Fou je crois) : "Quand soudain semblant crever le ciel et venant de nulle part, Surgit un nègre noir" ! Ça n'a l'air de rien, mais c'est redoutablement polluant et contagieux. Je viens peut-être de vous transmettre le virus...


Barbara, L'aigle noir, en direct dans l'émission Top à Barbara le 9 mars 1974.

09 avril 2012

PSAPP : I want that


Acquis au Record & Tape Exchange de Notting Hill Gate le 18 novembre 2010
Réf : RUG317CDP -- Edité par Domino en Angleterre en 2009 -- For promotional use only / Not for sale / This promotional CD remains the property of Domino Recording Co Ltd and must be surrendered upon request
Support : CD 12 cm
Titre : I want that

Le 3 décembre dernier, Family Fodder a donné l'un de ses rares concerts au Week-end Festival de Cologne. Pour l'occasion, Alig et Darlini Singh-Kaul ont bénéficié du renfort d'un "batteur de comédie", Carim Clasmann, équipé d'une petite batterie et d'autres instruments, dont un kazoo, une flûte à piston et un marimba.
Carim Clasmann, ce nom ne me disait rien, mais quand j'ai appris qu'il formait avec Galia Durant le groupe Psapp, là une petite lumière s'est allumée. Ça m'a pris quelques minutes, le temps de farfouiller dans mes piles de disques en attente de classement, et j'ai retrouvé ce CD promo acheté lors de mon dernier passage à Londres. Comme c'est le cas quand je reviens à la maison avec des dizaines de disques, je l'avais écouté une fois rapidement et j'attendais une deuxième occasion de le faire avant de le ranger. Son concert avec Family Fodder me l'a donnée.
Si j'avais gardé ce disque, en tout cas, c'est que la chanson m'avait suffisamment plu à la première écoute. Et effectivement, I want that, un titre extrait de l'album The camel's back, est une chanson funky bricolo des plus agréables, ornée de cuivres, de choeurs et d'orgue. Le côté bricolo est sûrement en partie dû au fait ques Psapp est réputé pour utiliser notamment des jouets comme instruments.
Avant d'acheter ce disque (dans la cave à 10 pence de Record & Tape Exchange), je n'avais jamais entendu parler de Psapp. Pourtant, ce groupe a sorti trois albums tout au long des années 2000 (un quatrième serait en préparation). Carim Clasmann est par ailleurs ingénieur du son et producteur : il a travaillé entre autres avec Einstürzende Neubauten et Die Toten Hosen, et aussi dans le studio de Can. Si vous regardez Grey's anatomy, vous connaissez peut-être sans le savoir au moins un morceau de Psapp : c'est leur titre Cosy in the rocket qui sert de générique à la série.
Comme beaucoup de mes disques promo Domino, ce CD pourrait presque être considéré comme un disque virtuel : il n'a pas d'équivalent dans le commerce sous ce format, la seule façon d'acquérir ce deuxième single de l'album étant de l'acheter sous forme de fichier à télécharger...

The camel's back est toujours en vente chez Domino, où on peut écouter I want that.

08 avril 2012

LES TROGGS : I can't control myself


Acquis sur le vide-grenier de Tours sur Marne le 1er avril 2012
Réf : 4690.981 ME -- Edité par Fontana en France en 1966
Support : 45 tours 17 cm
Titres : I can't control myself -- When I'm with you -/- Hi hi Hazel -- Gonna make you

Autant la semaine précédente à Saint-Martin d'Ablois la température était largement printanière, autant ça caillait de bon matin dimanche dernier à Tours-sur-Marne. Je tremblais de froid et j'avais les doigts gourds en fouinant. J'avais déjà fait quelques emplettes de 45 tours quand je suis arrivé à ce stand où il y avait sur la table principalement des capsules de Champagne, mais aussi deux boites à chaussures de 45 tours et deux caisses d'albums.
Une des boites de 45 tours contenait visiblement des disques "collectors", sous pochette plastique, avec des étiquettes de prix à l'avenant, de 6 à 18 € (pour un bel EP des Beatles). Mais certains de ces disques n'avaient pas d'étiquette. Le propriétaire du stand étant parti pisser/chiner/boire un café ou un verre de Champagne pour se réchauffer (vous pouvez rayer les mentions inutiles), son fils d'une vingtaine d'années était bien embêté car il ne connaissait pas tous les prix des disques et des capsules. Il m'a cependant indiqué qu'il pensait que ces disques étaient à 2 €. Muni de cette information, j'ai fait mon marché et j'ai sélectionné trois disques : un superbe EP de Fats Domino (malheureusement, si le disque à l'intérieur est bien de lui et sur le même label, je n'avais pas remarqué que les titres ne correspondaient pas à ceux de la pochette), un autre, carrément, des Teddy Bears (on aura l'occasion d'en reparler) et celui-ci des Troggs qui, comme les Beatles et d'autres sur leurs pressages français, on droit à l'article "Les" sur la pochette plutôt que "The".
Le père n'étant toujours pas revenu (peut-être qu'il n'y avait pas de mention inutile et qu'il était parti faire les trois), le fils est resté sur sa première idée et m'a même proposé de me faire les trois disques à 5 €. C'est un peu plus cher que ce que je paie habituellement sur un vide-grenier, mais c'est donné pour des disques de cette qualité en bon état ! Je pense que le père les aurait sûrement vendus un peu pus cher, mais je n'ai ni marchandé ni même mis la pression sur son pauvre fils abandonné en plein coup de bourre sur le stand.
I can't control myself est le troisième tube des Troggs. Les deux premiers, enregistrés en trois-quarts d'heure en février 1966, sont Wild thing et With a girl like you. L'album est arrivé en juillet, intitulé From nowhere en Angleterre et Wild thing presque presque partout ailleurs, mais dès septembre le groupe sortait ce nouveau titre, I can't control myself, qui n'était pas sur l'album, et qui ne sera pas non plus sur le suivant, Trogglodynamite, en février 1967.
I can't control myself est un classique du rock et la preuve c'est que j'ai déjà eu l'occasion d'en chroniquer ici trois versions différentes par Enric Casasses et Pascal Comelade, Paul Roland et Big Maybelle, ce qui place cette chanson au niveau de Satisfaction ou The model. Et sans lister toutes les reprises, on signalera qu'Howard Devoto a chanté I can't control myself avec les Buzzcocks (et peut-être bien aussi avec Magazine sur scène). Pour Comelade, la performance d'I can't control myself est depuis plusieurs années un grand moment lors de ses concerts, avec ou sans la participation de Casasses mais presque toujours avec un solo de ballon de baudruche de Pep Pascual.
Il y a eu dans Mojo l'an dernier un très bon article sur les Troggs. On y apprend notamment que les Troggs avaient été repérés par Larry Page parce qu'on lui avait dit qu'ils jouaient You really got me mieux que les Kinks (et Page était co-manager des Kinks...), mais autant les Kinks avaient un côté dandy, autant les Troggs ont toujours revendiqué être un groupe de prolos. Ils racontent dans Mojo comment, le jour où Wild thing est entré dans les charts, ils ont tous plaqué leur boulot, sans se concerter. Mais musicalement, sur leurs titres rock, les Troggs sont bien dans la lignée des Kinks brutaux de You really got me/All day and all of the night. Wild thing, écrit par Chip Taylor, capturait bien ça et on n'est pas surpris qu'ils aient repris Louie Louie sur leur premier album.
Du "Oh noooooooo !" en ouverture au "Waaaraaarrgghhh !" final, I can't control myself est exactement dans cette lignée : du rock brutal, primaire, animal presque. "Quand tu es près de moi, je ne me contrôle pas"... Toujours dans Mojo, Reg Presley explique que la chanson lui a été inspirée par la vue d'une spectatrice d'un concert, face à lui, qui avait un jean rouge coupé tellement bas qu'on lui voyait les poils pubiens. Il n'était, il le dit lui-même, qu'un maçon brut de décoffrage, et dans la voiture au retour, il avait déjà les paroles. Il n'a parlé que de hanches visibles ("Her slacks are low and her hips are showing"), mais la testostérone est suffisamment présente dans la chanson pour que celle-ci ait été plus ou moins censurée par-ci par-là. Sur le même thème, les gentils garçons d'XTC ont fait quelque chose de beaucoup plus civilisé en 1979 avec When you're near me I have difficulty.
La face B du 45 tours anglais, Gonna make you, co-écrite par Larry Page, est encore plus primaire, si c'est possible (pas de "Ba ba ba ba ba ba ba ba ba" comme sur la face A), mais elle parle exactement de la même chose : "You turn me on when I'm with you". De la batterie à la guitare, on est tellement sur le territoire de Bo Diddley que c'en est presque du plagiat. Au moins, sur leur deuxième album, à titre de compensation peut-être, les Troggs feront carrément une reprise de Bo, Mona.
Pour compléter le EP, le label français a choisi deux titres de From nowhere, qui sont représentatifs de la face pop des chansons des Troggs. When I'm with you est une perle pré-psychédélique, qui traite encore toujours du même thème, l'effet d'une fille sur Reg Presley, mais les réactions sont ici plus sophistiquées ("I see the flowers before their time", "I'm hearing bells before they ring") : on rejoint le terrain de jeu d'XTC... Hi hi Hazel est de la même veine, pop et presque bucolique. On sent fortement l'influence de Donovan.
On concluera ce billet avec une pensée pour Reg Presley, le maçon chanteur et amateur d'OVNIs des Troggs. Il avait déjà eu une attaque en 2010 et, après avoir appris qu'il était très gravement malade, il a annoncé au début de cette année qu'il arrêtait définitivement les Troggs.

Je me demandais si Les Troggs avaient eu l'occasion de jouer en France à l'époque. C'est arrivé au moins une fois, en 1967 au Festival International de Pop Music au Palais des Sports de Paris. Avec l'ordinateur et une connexion qui vont bien (ce qui n'est pas mon cas), on peut voir sur le site de l'INA un extrait de 15 minutes de l'émission Bouton Rouge du 8 juin 1967, qui se conclut par une version de I can't control myself.




05 avril 2012

FAROUK SALAMA : Sena


Acquis chez Emmaüs à Tours-sur-Marne le 24 mars 2012
Réf : 31-72106 -- Edité par Nefertiti en Egypte probablement dans les années 1950
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Sena -/- Noura

J'étais surexcité après avoir trouvé le 45 tours Congo rhythm et je n'espérais pas vraiment trouver d'autres disques intéressants ce jour-là. Mais quand même, regardé un peu plus attentivement les reste des piles de disques, au cas où...Et bingo ! J'ai d'abord trouvé, Tahiti meets Manahiki, un superbe album de 1963 sur Tahiti Records avec une face par Eddie Lund and his Tahitians, puis mes yeux ont été attirés par la pochette colorée de ce 45 tours. Je l'ai retournée et j'ai découvert des motifs géométriques également colorés avec une découpe laissant apparaître la très belle étiquette du label Nefertiti. Le tout étant en très bon état, je l'ai empoché, sans savoir vraiment trop ni de qui ni de quoi il s'agissait, étant donné que je ne lis pas l'arabe.
En tout cas, au vu de la pochette, je n'ai pas été surpris de découvrir à l'écoute de la musique orientale instrumentale avec, comme instrument principal au début de la face A notamment, de l'accordéon (j'avais remarqué la discrète photo de l'accordéoniste en haut à gauche du recto du disque). Mais l'accordéon est loin d'être le seul instrument en vue sur cet enregistrement, marqué par des percussions claires et puissantes et des accélérations de tempo impressionnantes.
Au début de la face B, une voix féminine prononce deux fois le mot "Noura". Le rythme est moins endiablé mais j'aime aussi beaucoup ce deuxième titre.
Il fallait que j'en sache plus. Avec l'aide de Mouna pour la transcription, que je remercie au passage, j'ai pu déchiffrer les informations figurant sur la pochette et le disque. Avec un nom de label comme Nefertiti, j'avais bien pensé qu'il s'agissait d'une production égyptienne, ça a été confirmé. J'ai appris ensuite que le nom de l'artiste est Farouk Salama et que les deux faces sont intitulées respectivement Sena et Noura, deux prénoms féminins.
Il s'avère que Farouk Salama est un accordéoniste très réputé. Il a notamment longtemps accompagné Oum Kalsoum (comme ici sur scène en 1971). Il a dû publier de nombreux disques, cassettes ou CD. Je n'en ai pas trouvé beaucoup de traces en ligne mais on constatera sans surprise que, dans un style différent mais comme sur ce 45 tours, c'est la danseuse qui est mise en avant sur la pochette de The loveliest oriental dances, un disque de Farouk Salama et Hani-Mahnah qui doit dater des années 1960 ou 1970.
Et la très bonne nouvelle c'est que, une bonne cinquantaine d'années après la sortie de Sena, Farouk Salama est toujours en activité. On peut le voir par exemple accompagner Nour Marwani en direct sur un plateau de télévision dans une vidéo récemment mise en ligne.
Le Congo, l'Egypte, Tahiti... Il semble que les bons disques du monde entier avaient rendez-vous chez Emmaüs à Tours-sur-Marne ce jour-là !


Farouk Salama : Sena


Farouk Salama : Noura


01 avril 2012

BILLY STRANGE ET SA GUITARE A 12 CORDES : Anthologie du folklore américain


Acquis sur le vide-grenier de Saint-Martin d'Ablois le 25 mars 2012
Réf : LD.622-30 -- Edité par GNP / Vogue en France en 1963 ou 1964
Support : 33 tours 30 cm
12 titres

Après mes trouvailles inespérées la veille à Emmaüs, je n'espérais pas faire aussi bien à Saint-Martin d'Ablois, mais bon, c'est traditionnellement par chez nous la première brocante de printemps en village, la météo était idéale, et puis le fouineur n'est jamais rassasié...!
J'ai quand même bien cru que j'allais revenir bredouille, puis j'ai trouvé trois-quatre 45 tours intéressants vers la fin de mon tour et, en repartant, je me suis arrêté à un stand qui était occupé à mon premier passage (par deux gars qui, soit dit en passant, à mon arrivée sur le vide-grenier étaient en train d'acheter Big hits (High tide and green grass) des Stones et un album de Crazy Horse chez Reprise, sans Neil Young).
Il y avait là deux piles d'une vingtaine de 33 tours posés à plat sur la table, ce qui n'est pratique, que j'ai vaguement passées en revue car le lot contenait visiblement et surtout de la variété et de la musique de danse de la pire espèce.
Mes yeux se sont quand même arrêtés à un moment sur les mots "folklore américain" et "guitare 12 cordes". J'ai sorti le disque et vu le nom de Billy Strange, un gars que j'ai instantanément associé à Lee Hazlewood. Au vu de la liste de titres et après avoir vérifié que le disque était en bon état, je l'ai empoché pour 1 €.
C'est à mon retour à la maison que j'ai appris que Billy Strange (c'est son vrai nom) est décédé il y a quelques semaines seulement, à 81 ans. Ce décès a encore eu peu de répercussions dans la presse en Europe (Uncut a fait une brève, Mojo n'a pas encore eu le temps d'en parler, et je ne parle pas de la presse française). Billy Strange était quand même pourtant un pilier de la musique populaire avec une discographie longue comme le bras, un guitariste de studio qui, des années 1950 aux années 2000, a accompagné des gens du calibre de Tennessee Ernie Ford (dès les années 1950, mais Strange joue également sur la version '65 de 16 tons, le tout premier disque chroniqué dans Blogonzeureux!), Elvis Presley, Ricky Nelson, les Everly Brothers et également nombre de titres importants des Beach Boys, de Surfin' USA à Sloop John B (à lire, les commentaires de Billy Strange sur les sessions de Pet sounds) !!!
Pour le lien avec Lee Hazlewood, je ne me trompais pas car Billy Strange a pris en charge l'arrangement de tous les disques de Nancy Sinatra produits par Hazlewood.
Cet album "folk" fait partie des disques peu connus mais assez nombreux que Billy Strange a sortis sous son nom, notamment chez GNP dans les années 1960. De façon assez surprenante pour un disque instrumental de guitariste mettant en vedette la douze cordes, sorti en 1963 sous le titre original de 12 string guitar, la guitare n'est pas excessivement en avant. C'est sûrement en partie dû au fait qu'il ne s'agit pas d'un enregistrement solo mais bel et bien d'une collaboration entre cinq musiciens : comme le précisent les notes de pochette "Les arrangements furent improvisés au studio par les musiciens".
Et quels musiciens, puisque Strange est ici accompagné par Hal Blaine, le batteur membre comme lui du Wrecking Crew, le guitariste Erwan "Bud" Coleman, mort dès 1967 mais qui a eu le temps de se faire remarquer avec Herb Alpert et son Tijuana Brass, le banjoïste bluegrass Don Parmley et le bassiste Bert Dodson, qui a joué des années trente à cinquante avec les Cass County Boys !
Le répertoire proposé est sans surprise, mais les interprétations sont excellentes, très dynamiques. Le folk-rock n'est pas encore né, mais il n'est pas loin. J'aime particulièrement la version de Cotton fields, un des trois titres en commun avec le répertoire de Trini Lopez (un bon point de comparaison pour l'énergie. Strange a aussi enregistré par ailleurs avec Lopez, bien sûr). Les deux autres sont Green green et If I had a hammer. Ce Si j'avais un marteau est proposé ici dans une
version détendue et avec l'excellent Walk right in / Marche tout droit, ça nous fait deux titres du catalogue de Claude François.
Il y a aussi deux très bonnes versions de chansons popularisées par la Carter Family, Wildwood flower et Wabash Cannonball, une reprise d'un titre plus contemporain, le Blowin' in the wind de Dylan, une épique Battle of New Orleans, une version d'un titre co-signé par Hazlewood (A stranger in your town des Shacklefords) et, justement, une (très bonne) version de 16 tons.
Je n'espérais pas me réjouir autant à l'écoute de ce disque, une trouvaille bien plus intéressante que je ne le pensais au moment de le payer. Ne me reste plus qu'à espérer tomber sur d'autres disques de Billy Strange, notamment l'EP avec pochette qui contient deux titres tirés de cet album et deux du suivant, Mr. Guitar, ou les disques, 45 tours ou 33, où Strange reprend notamment des thèmes des films de James Bond.

Cet album a été été réédité en CD en 1995 couplé sur un seul disque avec l'album Railroad man de 1968, toujours disponible.