18 janvier 2025
EGRÉGIE : Le Mont des Oliviers
Acquis chez Emmaüs à Reims le 10 janvier 2025
Réf : INT 80217 -- Édité par Pop Music en France en 1969
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Le Mont des Oliviers -/- Glorification
Saison et raréfaction générale obligeant, je n'ai pas beaucoup l'occasion ces jours-ci de farfouiller dans des lots de disques. Alors la semaine dernière chez Emmaüs à Reims, où le prix de 50 centimes était correct et permettait la prise de risque, je me suis un peu lâché. Pas tellement en nombre (j'ai pris une dizaine de 45 tours et un 78 tours), mais en contrôle qualité : j'ai acheté certains disques que j'aurais peut-être à peine regardés en temps normal.
C'est notamment le cas de celui-ci, avec sa pochette est en mauvais état. Le papier est en partie arraché au recto, du coup le nom du groupe et le titre sont en partie manquants et la façade de Notre-Dame de Paris, qui en a vu d'autres depuis, a aussi souffert. Et deux des côtés de la pochette ont été réparés au scotch, il y a bien un demi-siècle je suppose tant il a jauni depuis.
Mais le disque lui-même est en bon état, et ce qui m'a décidé à le prendre c'est le rond central : je ne connaissais pas du tout le label Pop Music, mais le nom est intéressant, surtout en prenant le compte qu'on était à la fin des années 1960, où "la pop" désignait plus spécifiquement par chez nous le rock du moment, post-psychédélique, marqué par les hippies, en pleine évolution avant d'exploser dans de multiples genres dans les années 1970.
Il s'avère que ce label, distribué par Vogue, a été actif de 1969 à 1971. Il a notamment publié les premiers disques de Martin Circus, mais aussi Maajun ou Présence. Je me demande si ce n'est pas Gérard Hugé qui en était le directeur artistique.
Ceci est le seul disque publié par Egrégie. Il n'y a aucune donnée sur les membres de cette formation, en-dehors des crédits de composition pour les deux faces, soit quatre noms : André Raulin, Jean Schmitt, Emmanuel Booz et Ph. Achaley.
En latin, Egrégie signifie spécial, remarquable. Le début du petit texte au verso y fait référence : "Je m'appelle Egrégie, je me demande bien pourquoi, je n'ai rien de particulier". On comprend que c'est un enfant, mais ça n'a pas beaucoup de sens, particulièrement la fin, "Mes parents m'ont promis pour bientôt un petit FRÈRE...". En tout cas, je n'ai pas trouvé le rapport, si jamais il y en a un, entre ce texte et la musique qu'on trouve sur le disque.
A part un peu de chœurs, Le Mont des Oliviers est un instrumental. Batterie, basse, guitare, on est dans un son complètement de son époque. Il y a un peu de flûte aussi, mais c'est l'orgue qui me semble l'instrument principal sur ce titre, mon préféré des deux.
Glorification est dans la même veine, avec encore l'orgue au début, mais la flûte et la guitare sont plutôt en avant cette fois-ci. Il y a plusieurs mouvements, ce qui renforce l'aspect musique de film.
Je ne sais pas si Egrégie était un groupe ou simplement un projet ponctuel, mais en tout cas tout semble s'être limité à la sortie de ce 45 tours. Les compositions, elles, ont bien vécu ensuite.
Ça a commencé très vite, puisqu'Emmanuel Booz a signé en solo chez Barclay. Son premier disque pour le label, quelques mois après la sortie de celui d'Egrégie est... une nouvelle version de Le Mont des Oliviers !
Cette fois, la direction musicale est assurée par Hervé Roy. Cette version instrumentale est plus lente, ce qui renforce le côté musique d'église et nous rapproche d'un slow "normal". On pourrait dire qu'on est dans une veine Aphrodite's Child.
Mais ça c'est la face B, puisque la face A est une version chantée de Le Mont des Oliviers. Et là, tout ce que je peux dire c'est que je regrette que la composition ne soit pas restée instrumentale. Une mention au verso de la pochette explicite le propos : "Pour mieux rêver l'amour que j'ai de l'univers j'ai fondu l'harmonie de mon âme avec les écrits de la Bible". Dans sa biographie sur son site, Emmanuel Booz explique que la chanson fait partie d'un "projet délirant et décalé basé sur l’Ancien Testament, où il fera même des apparitions télévisuelles en djellaba, entouré de moutons". Pour rester dans la même zone géographique et la même période chronologique, je préfère gravir le Golgotha de Manset.
Je pensais avoir fait le tour de la question, puis j'ai trouvé, chez Riviera, une étiquette de Barclay, toujours en 1969, la trace d'une troisième version de Le Mont des Oliviers ! Le 45 tours s'intitule
Musique sacrée avec la Christmas Choral, sous la direction de Bernard Gérard avec Pierre Dutour à la trompette. Après ça, on n'est pas surpris d'apprendre, toujours de la plume d'Emmanuel Booz, que cette composition a été jouée aux grandes orgues de la Cathédrale de Bourges, aux côtés des œuvres de Bach.
Ça c'était la face B du disque. En face A, on retrouve un titre qu'on connaît bien, Glorification, que j'ai eu du mal à reconnaître, mais ce qu'il y a de bien c'est qu'il y a de la fuzz en plus de la trompette !
C'est tout ? Eh bien non. En 1970, chez Véga, sur un album de reprises à pas cher par un groupe anonyme dénommé The Combo's Men Show. On trouve deux nouvelles versions de Le Mont des Oliviers et Glorification. Sauf que cette fois-ci elles ont héritées de paroles anglaises par Boris Bergman pour la première et, je suppose, Dave Cooper et Bernie pour la seconde et elles sont devenues Son of man et Master of love. Je ne les ai pas trouvées en ligne.
Si vous pensiez que c'était fini, vous aviez tort ! En 1975, Juan Bau a sorti un 45 tours, avec en face B El Mont del Olivar. Je vous laisse deviner le titre original de cette chanson adaptée en valencien.
En partant d'un disque inconnu, on arrive si je compte bien à cinq versions de la face A et trois de la face B, c'est pas mal !
Et ce n'est encore pas tout...
En effet, en rentrant chez moi au retour d'Emmaüs, je me suis rendu compte que j'avais déjà visité la page Discogs d'Emmanuel Booz. Je l'avais déjà oublié, mais c'était à peine une semaine plus tôt.
Et tout est venu du premier album de Renaud, qu'on vient de m'offrir et que j'ai écouté. En examinant les crédits, j'ai vu que les arrangements et la prise de son sont crédités à Scarabée Blanc. J'ai cherché à savoir qui se cachait derrière cet intitulé. Je n'ai pas trouvé, mais en parcourant Discogs, j'ai atterri sur un 45 tours de Booz, puis sur sa discographie, où j'ai découvert qu'il avait publié en 1969 chez Barclay, juste après Le Mont des Oliviers, un 45 tours et un 33 tours intitulés Au restaurant d'Alice. Eh oui, vous avez raison, il s'agit bien d'une version française d'Alice's restaurant d'Arlo Guthrie, enregistrée à Londres en présence de l'américain, rencontré par l'entremise de Boris Bergman, qui a traduit les paroles. Si vous voulez en savoir plus, il y a un extrait de la chanson ici et on peut télécharger l'album là.
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