20 décembre 2016

JEAN DRÉJAC : Vous présente un nouveau jeu de société (des auteurs)


Acquis chez Emmaüs à Tours-sur-Marne le 17 décembre 2016
Réf : V 45 P 2030 -- Édité par Véga en France en 1960
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Les poils du nez -- Faut pas gamberger -/- Étire ton zinzin -- Quand on est amoureux

Faute de vide-grenier en cette saison, j'ai fait un tour chez Emmaüs samedi dernier. Coup de chance, la pièce à disques était ouverte. Il y en avait beaucoup, mais très peu de nouveaux depuis ma dernière visite. Je les ai donc passés en revue très vite, mais à un moment je suis revenu en arrière pour observer celui-ci avec plus d'attention car j'avais vu qu'il était question de présenter un jeu et je me suis dit que c'était peut-être un disque publicitaire.
Je connaissais Jean Dréjac de nom mais c'est tout. Je n'aurais pas pu dire qu'il est surtout réputé comme auteur de chansons, dont les paroles de Ah ! Le petit vin blanc, ni qu'il a aussi été interprète, mais avec une discographie limitée.
Quand j'ai vraiment regardé la pochette, j'ai eu un sursaut. Autant le disque de Dréjac d'à côté dans la pile a l'air des plus sérieux (Octobre, avec une peinture d’Édouard Pignon en pochette), autant celui-ci est complètement délirant.
"Un nouveau jeu de société (des auteurs)" ? Il y a clairement un clin d’œil à la SACEM (dont Dréjac a longtemps été vice-président par la suite), mais on n'en saura pas beaucoup plus.
Les "éléments du jeu" sont quand même présentés : un piano, une machine et un magnétophone, clairement les outils de travail de l'auteur-compositeur, plus un tube et une locomotive, une source d'inspiration, le cadre noir de Saumur (!), et, drapant l'artiste, la robe de chambre "Foskifo" !!
Le délire continue au dos. Deux des chansons du Hit Parade sont quand même titrées Les poils du nez et Étire ton zinzin !
Les notes de pochette nous présentent un ouvrage de référence fictif, Le grand Dréjac illustré, avec notamment des définitions pour Tube, Locomotive, Bide,... Je connaissais la définition, différente, de "tube" par Boris Vian. Dréjac n'est peut-être pas aussi percutant, mais il s'est visiblement bien amusé.
Tout cela ressemble au résultat d'une grosse blague potache, au gage issu d'un pari stupide et bien arrosé. Malheureusement, je n'ai aucune idée de ce qui a amené à produire cette pochette. Si quelqu'un connaît l'histoire, les commentaires sont bienvenus.
En achetant le disque, je me disais que le contenu gravé sur les sillons serait sûrement moins fou que la pochette. J'avais malheureusement raison, mais le premier titre, Les poils du nez, est quand même bien barré. Le héros en est un gamin de quatre ans qui a fait une grande découverte : "Avant qu'on ne nous vende l'air au mètre ou au poids, Messieurs je vous le demande, chantez tous avec moi : Pour bien respirer, faut se couper les poils du nez, et vas-y Gégéne, à toi l'oxygène, et vas-y Gégéne, à toi de respirer". Soit dit en passant, de nos jours on ne vend pas encore l'air, mais on a réussi à créer un marché spéculatif des quotas d'émissions de CO2 !
Jacques Courtois et ses marionnettes ont repris cette chanson en 1963:



Les trois autres titres sont bien plus sages. Ils ont tous aussi été interprétés par d'autres que leur auteur, mais dans des versions sérieuses. N'empêche, je note que, sur le tableau du Hit Parade au recto de la pochette, ils sont listés dans cet ordre : "Étire ton zinzin, faut pas gamberger quand on est amoureux". Ça ne doit pas être un hasard, même si je regrette de ne pas réussir à y associer le premier titre.
Faut pas gamberger a été interprétée par Patachou  en 1960 quant à Étire ton zinzin, sur une musique de Michel Legrand, c'est Rosalie Dubois qui l'a interprétée en 1961. Et précisons pour ceux qui ont les idées mal placées que le zinzin en question est un accordéon !
Quand on est amoureux a été interprétée également par Marcel Amont dès 1959. Les paroles originales sont de Jean Dréjac, mais la musique est reprise de Il piccolo montanaro, enregistrée par Renato Carosone. L'instrumentation de Carosone est bien plus intéressante et délirante, dommage que ni Amont ni Dréjac ne l'aient suivi dans cette voie.
En tout cas, voici une découverte étonnante, et j'espère un jour en savoir plus sur l'histoire de ce disque.

Je ne vais pas m'énerver une fois de plus, mais ce 45 tours fait partie des collections publiques de la Bibliothèque Nationale de France. Bibliothèque qui a rémunéré des sociétés privées pour numériser une partie de ses disques. Chouette, sauf que les contrats prévoient une exclusivité de commercialisation des titres numérisés pendant plusieurs années. On peut donc acheter les titres en MP3, les écouter chez Deezer (en se connectant pour avoir les titres en entier), mais pour écouter plus que des extraits sur le site de la BNF, il faudra encore attendre plusieurs années.



3 commentaires:

Kevin du 77 a dit…

Si je ne dis pas de bêtises tous les disques jusqu'à 1962 sont désormais dans le domaine publique du coté de la production, donc rien n'empêcherait quelqu'un de les encoder et de les commercialiser s'il paie les droits d'auteurs ?

Pol Dodu a dit…

Je pense que, globalement, tu as raison Kevin. C'est bien pour ça que j'apprécierais que notre bibliothèque nationale s'organise pour numériser les disques du domaine public figurant dans ses collections publiques de façon à pouvoir non pas les commercialiser mais les mettre librement à disposition de tous, sans attendre.

Anonyme a dit…

la pochette est excellente c'est l'exemple type de l'humour français potache oscillant entre humour populo et références intello ("drapant l'artiste") , jean yanne entre autres saura en faire bon usage.Pour étire ton zinzin j'entends éteins ton zizi mais je dois avoir l'oreille pervertie! Quant à la politique de la BN en la matière c'est sûrement un des éléments qui fait de la france une exception culturelle! Bravo , très belle pioche ph