30 août 2025

NIKKO : Songs for free-DOM


Acquis chez Récup'R à Dizy le 24 mai 2024 
Réf : Dan's A 061 -- Édité par Conquering Lion Music / Tour Des Miracles en France en 1994
Support : CD 12 cm
7 titres

A la ressourcerie, ce CD inconnu m'a suffisamment intrigué pour que j'ouvre la boite et découvre au dos du livret une liste de pointures du reggae ayant participé à l'enregistrement. Pour les seuls noms que je connaissais, il y a Earl "Chinna" Smith, Congo "Ashanti" Roy, Sticky Thompson, Ras Michael, Stranger Cole. Pas mal pour ce qui est visiblement une production indépendante.

Il s'agit du premier album de Nicolas Coralie, alias Nikko, né à Cayenne en Guyane, qui connaissait déjà bien le studio Leggo à Kingston puisqu'il y avait déjà enregistré l'année précédente avec son groupe Universal Youth et Ras Bendjih l'album The teachings of his imperial majesty.

Le titre de l'album est en anglais, mais il contient une référence spécifiquement française. En effet, pour "Freedom", il y a un tiret entre "Free" et "DOM",  qui est bien orthographié en majuscules sur la tranche du CD. Il est donc question de chansons qui libèrent un Département d'Outre-Mer, ce qui était le statut administratif de la Guyane dans la période qui a précédé la création en 2016 de la Collectivité Territoriale de Guyane.

La première chanson, This song, a aussi un titre en anglais, ce que je commençais à déplorer à l'écoute, avant de me rendre compte que je ne comprenais pas la majeure partie des paroles du refrain inaugural, qui sont en créole. Mais, avec le couplet qui a suivi, en grande partie en français, j'ai compris que cette chanson est un hymne au créole : "Sur notre continent y a anglais, portugais, espagnol, mais ici chaque communauté a pour symbole d'unité le créole. On écrit le créole on veut le mettre à l'école, mais c'est la langue de la rue, des dialogues sans protocole.". Un sujet, et des langues, qui sont souvent représentés ici.

Les trois chansons suivantes présentent un éventail de genres liés au reggae : le ragga dancehall pour Bon ké sa ("Spéciale dédicace à tous les hypocrites, tous les parasites"), le lovers rock avec Jeune fille et le ska pour la chanson suivante. Cette dernière, je l'ai écoutée sans vérifier son titre sur la pochette et je me suis tout de suite dit que c'est en quelque sorte une réécriture de Guns of Brixton de The Clash ("It's when they kick off your front door, then you know that they are coming, the Babylon with their pistol in their fingers, with the gun in their arm."). Musicalement, les deux chansons sont différentes, mais j'ai découvert ensuite, sans trop de surprise, que celle de Nikko, qui me plaît bien aussi, s'intitule Guns. Nikko a abordé cette thématique au moins une autre fois par la suite avec Posé to gun.

La chanson suivante, c'est le premier succès de Nikko, Guyana nice. On la trouvait déjà sur l'album d'Universal Youth et Ras Bendjih. Elle a été remixée pour l'occasion. C'est un ragga sur la situation de la Guyane qui, je suppose, reste d'actualité trente ans plus tard : "Sur toutes les télés dans toutes les radios, tout le monde dit que la Guyaner est le pays le plus beau (...) Tout le monde est d'accord pour dire qu'on n'est pas des zéros. Mais en Guyane vaut mieux être subordonné de l'Etat, mais en Guyane on n'aime pas tellement les rastas. (...) En Guyane t'es un français mais en France t'es un négro. Cayenne ne doit pas devenir un futur Soweto".

L'album se conclut avec des versions instrumentales de This song (Dub mix song) et Jeune fille (Dread locks dub).

Depuis ce premier album, Nikko poursuit avec succès son parcours musical. Il a notamment joué en métropole, aux Antilles, au Brésil... En 2022, il a donné à Cayenne avec le groupe Authentic Voice un concert pour fêter ses trente ans de carrière. Il s'ouvre avec Guyana nice et il interprète également This song.




Un documentaire à propose de Guyana nice est disponible ici.


Nikko, Jeune fille, en direct dans l'émission Tan'o show sur Premiere TV.

22 août 2025

FRÉDÉRIC BOTTON : Attention à la grosse boule qui descend l'escalier


Offert par Fabienne M. à Mareuil sur Ay en février 2025
Réf : EP 6364 -- Édité par CBS en France en 1967
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Attention à la grosse boule qui descend l'escalier -- Ma grand tante Olga -/- T'es mon poisson chat -- Les allumettes

En début d'année, j'ai vu passer l'extrait télé en couleur de la Radio Télévision Suisse réalisé pour Attention à la grosse boule qui descend l'escalier (à voir ci-dessous).
J'ai trouvé ça bien délirant, j'ai vérifié s'il y avait un disque correspondant, j'en ai trouvé un exemplaire disponible à prix correct et je me le suis fait offrir...!
Au bout du compte, ce 45 tours n'est peut-être pas renversant musicalement, mais il est intéressant et c'est un bel objet discographique.

La pochette s'ouvre, mais pas comme récemment avec le Guy Cornély en tournant le recto vers la gauche. Là, on l'ouvre vers le haut, et c'est là qu'on se rend compte que ce recto est moins haut que la pochette dans son ensemble et que la mention "Frédéric Botton" est en fait imprimée sur la pochette intérieure. Une fois ce rebord soulevé, on découvre l'artiste entouré d'allumettes. Avec le Luna, c'est le deuxième disque chroniqué ici avec une pochette qui est à la fois d'allumettes que de disque.
Il est précisé au dos qu'on a affaire à une "pochette spéciale modèle exclusif CBS disques" (Je n'ai pas trouvé d'autres pochettes utilisant ce modèle exclusif, si vous en avez, ça m'intéresse).

La voix opératique dès le début d'Attention à la grosse boule qui descend l'escalier m'a tout de suite fait penser à Pourquoi un pyjama ? de Régine. Les deux disques ont des points en commun : d'abord Alain Goraguer, qui est à la direction d'orchestre dans les deux cas (décidément, c'était un musicien qui aimait les facéties et la loufoquerie, rappelez-vous dans ces années-là son Orgogoriental); et surtout, le pyjama est suivi sur le disque par La grande Zoa, l'un des plus grands succès de Régine, une chanson écrite par Frédéric Botton.
C'est le premier disque que j'ai avec Botton comme interprète, mais il est surtout réputé comme auteur-compositeur et, rien que dans ma discothèque et outre La grande Zoa, je trouve l'EP Sans astérique de Dani, deux chansons sur l'album A nu d'Alice Sapritch et C'est à qui tout ça par Henri Salvador.

C'est vrai que, à l'écoute, on a l'impression que Frédéric Botton a quelques limites en tant que chanteur, mais sa Grosse boule est vraiment divertissante. A la fin, on apprend que "ces boules qui roulent ce sont des carrés masqués", et là ça renvoie directement à un disque auquel j'avais déjà pensé, à cause de la pochette ouvrante et de la présence d'un autre grand chef d'orchestre français, Michel Colombier : le fameux disque carré Ode au rémois de Daniel Laloux.
Et sinon, je n'ai jamais écouté l'émission, mais je ne suis pas surpris d'apprendre que cette chanson était l'un des génériques de La grosse boule d'Ariel Wizman et Edouard Baer sur Radio Nova.

J'ai l'impression que le truc de Frédéric Botton, c'était de prendre des rythmes de danse à l'ancienne genre charleston ou tango, qui mine de rien étaient assez populaires dans les années 1960, et de leur associer des paroles rigolotes. C'est réussi avec Ma grand tante Olga, où il est question de polka piquée et avec T'es mon poisson chat, avec arrangement orchestral léger et chœurs.

Pour Les allumettes, les violons m'ont rappelé Les sucettes de France Gall. Vérification faite, ce  n'est pas complètement étonnant : c'est aussi Alain Goraguer qui a orchestré le disque de France Gall.

Les quatre chansons de ce 45 tours ont été incluses en 1968 sur le premier album de Frédéric Botton, qui est mort en 2008 à 71 ans.




Frédéric Botton, Attention à la grosse boule qui descend l'escalier, extrait de l'émission Gallantly, diffusée par la Radio Télévision Suisse le 20 avril 1968. L'émission complète, avec France Gall en vedette et aussi un jeune Henri Dès, est visible ici.


Frédéric Botton, Ma grand' tante Olga, le 3 décembre 1966 dans l'émission Bienvenue à Jean-Pierre Chabrol proposée par Guy Béart.



15 août 2025

BRIAN WILSON : Love and mercy


Acquis par correspondance via Discogs en août 2025
Réf : W7814CD / 921 032-2 -- Édité par Sire en Allemagne en 1988
Support : CD 7,5 cm
Titres : Love and mercy (LP version) -- One for the boys (LP version) -- He couldn't get his poor old body to move

Après la mort de Brian Wilson en juin dernier, j'ai notamment repensé à sa chanson Love and mercy, en me disant que c'est peut-être le tout dernier classique qu'il a composé.
C'est une chanson toute simple, aux paroles en trois très courts couplets de deux vers (très grossièrement sur la violence, la souffrance et la solitude dans le monde) et un refrain tout aussi court qui est une ode à l'amour et à la pitié.
Cette chanson a peu fait parler d'elle à sa sortie en 1988, mais elle a pris de l'importance par la suite. Elle a notamment donné son titre au film biographique sur Brian Wilson de Bill Pohlad, sorti en 2015.

J'ai fait des recherches, et j'ai retrouvé à quelle occasion j'ai fait la connaissance de Love and mercy. C'était en 2002, sur un CD compilation du magazine Uncut (un très bon cru, ce CD). La version qu'on y trouve est tirée du Live at the Roxy Theatre de 2000.
Comme toutes les versions parues après la version originale, elle est assez dépouillée et très belle. Brian Wilson avait pris l'habitude de terminer ses concerts avec cette chanson.

Cette première version, elle ouvrait l'album solo sans titre de 1988. Un album à la genèse des plus complexes. Certes, le fer de lance des Beach Boys relançait sa carrière après des années de maladie, mais il était sous la coupe de son médecin/gourou Eugene Landy.
Le générique de l'album est long comme deux bras (on y trouve l'excellent Andy Paley), Landy est abusivement crédité comme co-auteur de certaines chansons (cela sera rectifié lors des rééditions) et le son est assez typiquement années 1980.
Cela donne donc une version album de Love and mercy avec un arrangement assez quelconque, avec synthé et batterie à l'avenant, même s'il y a des voix à la Garçons de Plage.

Love and mercy est le second single qui a été extrait de l'album. Mon exemplaire est une édition mini-CD, un bel objet avec une pochette cartonnée ouvrante à la taille du CD (il existe une édition en boite plastique avec un adaptateur).
Autant la pochette de l'album est elle aussi assez quelconque, autant je trouve celle du single très réussie. Elle est due à Katsuhiko Hibino, un artiste japonais au profil très intéressant, qui est également président d'université et directeur de musée. Étant donné que le nom de l'artiste et le titre sont parfaitement intégrés à l’œuvre, je dirais que celle-ci a dû être réalisée spécifiquement pour la publication du disque.

Dans une réédition de l'album, on trouve en bonus un commentaire de Brian sur Love and mercy. Je n'ai pas tout saisi, mais il enchaîne sur une courte version en solo au piano de la chanson, qui est bien meilleure que la version album et qui peut être considérée comme une matrice pour les autres versions publiées, notamment la deuxième version studio sur l'album suivant I just wasn't made for these times (1995), la version acoustique en face B du single Walking down the path of life (2005) et la version instrumentale au piano sur l'un de ses ultimes albums (At my piano, 2021), sans compter les versions en public. 

One for the boys est un autre titre de l'album. C'est drôle car les crédits officiels donnés par le label sur YouTube indiquent que ce serait de fait un duo avec Andy Paley, où les deux joueraient plein d'instruments et chanteraient. Dans les faits, j'entends un titre complètement a cappella, sans paroles...! Le message n'est pas évident à décoder, mais il est plus que probable que les Boys à qui ce titre est dédié sont les Beach Boys.

Le dernier titre, He couldn't get his poor old body to move, est un inédit des sessions de l'album. Il est co-signé et co-produit par Lindsey Buckingham de Fleetwood Mac. On est en plein dans la recréation d'une chanson pop à la Beach Boys, avec un son actualisé. Dans ce style particulier, ce n'est pas mal et ça aurait très bien pu concurrencer Kokomo, le tube des Beach Boys à la même époque.

Cette chronique est dédiée à l'ami Charlie Dontsurf, qui a vu en quelques semaines disparaître les principales forces créatives des sites qu'il anime, beachboys.fr et ubudance.com. Avec aussi bien sûr une pensée pour Brian Wilson, David Thomas (grand fan des Beach Boys), et Andy Paley, qui lui est mort quelques mois plus tôt, en novembre 2024.




Brian Wilson, Love and mercy, en concert en 1989. Extrait de l'émission The Beach Boys - Endless Summer TV show.
Brian a l'air particulièrement en forme.
C'est la seule des versions live avec un arrangement pop-rock. Je l'aime bien et la préfère de loin à la version de l'album.
Il y a couplet en plus par rapport au disque : "I was praying to a God who just doesn't seem to hear. Oh, the blessings we need the most are what we all fear.".



Brian Wilson, Love and mercy, en concert au Radio City Hall de New York le 29 mars 2001 à l'occasion de An all-star tribute to Brian Wilson.


Brian Wilson, Love and mercy, en concert au Royal Festival Hall de Londres le 30 janvier 2002. Inclus dans la bande originale du film Love & Mercy – The life, love and genius of Brian Wilson.
Cette série de concerts a donné le CD/DVD Brian Wilson presents Pet sounds live. Andy Paley figure dans le groupe.




10 août 2025

EDDY MITCHELL : Chacun pour soi



Acquis d'occasion dans la Marne probablement entre 2000 et 2011
Acquis chez Damien R. à Avenay Val d'Or le 29 avril 2024
Réf : 71185 -- Édité par Barclay en France en 1967
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Chacun pour soi -- Au-delà de mes rêves -/- Alice -- Mes promesses

Après avoir acheté un exemplaire de ce disque à Damien l'an dernier, j'ai découvert en le rangeant que j'en avais déjà un autre. Pour une fois, j'ai une bonne excuse pour ce doublon : les deux rectos de pochette sont complètement différents, même s'ils ont pour point commun d'avoir une photo de Jean-Pierre Leloir.
Difficile de savoir quelle pochette a remplacé l'autre (le verso et le disque lui-même sont identiques pour les deux éditions), mais il me semblerait logique chronologiquement que la première soit celle avec la photo de groupe. Lettrage au goût du jour de 1967, photo orangée mais sombre, titres des chansons peu visibles. Franchement, ce n'est pas une réussite.
Par contraste, la photo d'Eddy Mitchell devant l'avion de la TWA, et le reste de la maquette "claquent" bien et la pochette remplit parfaitement son rôle, qui est d'attirer le client et de faire vendre le disque, tout en donnant bien le contexte, puisque la photo montre Eddy à l'atterrissage aux États-Unis, là où ont été enregistrés les quatre titres de cet EP.

J'ai connu Eddy Mitchell quelques années plus tard, dans les années 1970. Il faisait partie des gens qu'on voyait régulièrement dans les émissions de variétés du samedi, et il avait des tubes : Pas de boogie woogie, C'est la vie, mon chéri, Sur la route de Memphis... On avait même à la maison le 45 tours C'est un rocker / Bye bye Johnny B. Goode, c'est à dire deux adaptations de Chuck Berry. C'est sans doute celui-ci que j'aurais chroniqué en premier si j'avais conservé l'exemplaire familial, ou si j'en avais racheté un depuis.
Cela fait un moment que je picore ici ou là certains des EP de Monsieur Eddy, mais j'y fait plus attention depuis que j'ai été accroché par la reprise de sa Société anonyme par les Ready-Mades.

Ce qui est certain, c'est qu'Eddy Mitchell est un grand fan de musique. Je pense que, s'il s'est lancé en 1964 pour Barclay dans la collection Eddy Mitchell présente les rois du rock, c'est plus pour faire partager sa passion que par intérêt commercial.
Pour sa carrière solo, il s'est rendu à Londres dès 1963 pour enregistrer le London All Star, un conglomérat de pointures de studio, de Big Jim Sullivan à Vic Flick, en passant par Arthur Greenslade et Jimmy Page.

Mais en 1967, en pleine vogue rhythm and blues, Londres ne suffisait plus à Eddy. Il a choisi de s'envoler aux Etats-Unis pour y enregistrer, d'où le libellé générique au verso de la pochette qui annonce Rn' B U.S.A.
Les résultats de cette session ont été publiés sur la face B d'un album intitulé De Londres à Memphis, mais ce titre est un peu trompeur car, si c'est probablement à Memphis, la ville de Stax, qu'Eddy a atterri, il a enregistré à plus de deux cents kilomètres de là, à Muscle Shoals en Alabama. Pas à FAME, mais dans un autre des grands studios de la ville, Quinvy, qui juste avant ça s'appelait Norala (à lire : Quin Ivy and his Norala and Quinvy studios par Pete Nichols, notamment la partie 3, qui couvre la session d'Eddy, et la 4, où il est question de la session de Dick Rivers au même endroit quelques mois plus tard).

C'est la règle pour le jazz, mais très rare pour les variétés, surtout pour un 45 tours : le recto de la pochette nous donne en détails les participants aux sessions d'enregistrement du 26 au 28 mai 1967 dont on trouve ici quatre extraits. Comme il est précisé, ils ont pris part à des enregistrements des grands noms du R 'n' B, et rien qu'en parcourant la liste je reconnais plusieurs noms de ces grands musiciens de session : Roger Hawkins, David Hood, Eddie Hinton, Spooner Oldham, Wayne Jackson...

Eddy Mitchell et son équipe ont fait preuve d'une grande assurance pour l'occasion : ils auraient pu se contenter d'adapter des titres américains, il y en a pléthore, mais non, on trouve sur ce disque quatre originaux, signés Eddy/Claude Moine pour les paroles et Pierre Papadiamandis pour la musique.
Des originaux, mais répondant tous aux critères d'un morceau rhythm and blues typique. Le résultat est très solide, même s'il n'est pas renversant.

J'aime beaucoup en tout cas Chacun pour soi, avec des paroles un peu dures où il question de fermer la porte à une ex qui retente sa chance ("C'est à ton tour de pleurer, à moi de jouer. Oh ! Que tu m'aimes encore ou pas, ça ne m'intéresse pas, de ma vie je t'ai rayée"). Les chœurs, les cuivres, les ponctuations d'orgue sur le refrain sont très réussis.

Alice est une belle ballade, très réussie, qui respecte tous les canons du genre. Je crois que c'est la plus connue des chansons du disque, qui est longtemps restée au répertoire d'Eddy.

Avec Mes promesses et Au-delà de mes rêves, on a un autre titre rapide et un lent. Les ingrédients sont là, mais la sauce a un peu de mal à prendre.
C'est quand même au bout du compte un projet intéressant, avec deux pochettes pour le prix de deux.

Amigos, le dernier album en date d'Eddy Mitchell, est sorti en 2024. A 83 ans, il a dû annuler pour raisons de santé sa tournée prévue cet été.


Eddy Mitchell, Chacun pour soi, en direct à la fin de l'émission Télé dimanche le 12 novembre 1967.


Eddy Mitchell, Chacun pour soi, en direct dans l'émission Hip hip show le 8 septembre 1967.
Au-delà du fil pris dans le pied de micro, il y a visiblement un problème au début au moment du titre écourté Je ne me retourne pas, mais je ne comprends pas le mot prononcé par Eddy après "Tout de suite", ni le sens des "Merci", "Y en a un". Je crois qu'il y fait encore référence tout à la fin ("Y a trois merci").
Le public de toutes ces émissions de télé est amorphe, quand il ne passe pas son temps à entrer et sortir...!



Eddy Mitchell, Chacun pour soi, en direct à la télévision.


Eddy Mitchell, Chacun pour soi, mimé à la télévision le 4 septembre 1969.


Eddy Mitchell, Alice, en direct à la télévision.


Eddy Mitchell, Alice, mimé à la télévision.


Eddy Mitchell, Alice, mimé à la télévision, visiblement dans les années 1970.


Eddy Mitchell, Alice, en direct à la télévision, accompagné par l'Orchestre d'Ivan Jullien, le 29 janvier 1977. Muscle Shoals est bien loin !


Eddy Mitchell, Mes promesses, mimé à la télévision.

04 août 2025

THE ELEVENTH HOUR : Voulez-vous coucher avec moi ce soir


Acquis sur le vide-grenier de Oiry le 6 avril 2025
Réf : SG 518 -- Édité par Disc'AZ en France en 1974
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Voulez-vous coucher avec moi ce soir (Lady Marmalade) -/- He did ya good '(But I'll do that better)

J'ai trouvé ce disque le même jour que la cassette de Fawzi Al-Ayedi, juste avant la fin de mon tour sur la broc de Oiry.
J'ai misé un euro sur ce disque tout simplement parce que j'ai été très surpris d'apprendre que, potentiellement, le grand tube Lady Marmalade de Labelle est une reprise.
Il y a pas mal de classiques qui, on finit souvent par l'apprendre, ne sont pas originaux. J'ai en tête par exemple I love rock and roll, Bette Davis eyes ou Love will keep us together. Un gars, Bob Leszczak, a même publié trois livres sur le sujet Who did it first ?.

Je dis "potentiellement" car l'expérience m'a appris qu'il faut être très méfiant vis-à-vis des allégations figurant sur les pochettes de disques. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elles ne sont pas plus fiables que des paroles d'évangile, et souvent encore moins !
Si on s'en tient simplement aux mentions "Version originale", on a déjà exploré ici de beaux cas d'école, Mamy blue en étant un exemple particulièrement gratiné. Il y aussi la "version originale chantée" d'un instrumental, la "version originale anglaise" d'un tube originellement en anglais mais, subtilité, interprété par un groupe hollandais ! Il y a encore la "seule version originale" d'Al Capone et la "very original" ! On a même connu la "version originale" qui est en fait une nouvelle version par l'interprète originale...

Bon, il se trouve que, pour une fois, l'allégation est correcte : ce groupe The Eleventh Hour est bien le premier à avoir enregistré et publié Lady Marmalade.
La chanson a été co-écrite par Bob Crewe, qu'on connaît notamment pour Silhouettes et les tubes qu'il a écrits pour Frankie Valli et les Four Seasons (dont Walk like a man), et un certain Kenny Nolan, qui était entre autres le chanteur d'un groupe de requins de studio, The Eleventh Hour.
Apparemment, la version originale de Lady Marmalade par The Eleventh Hour était considérée par ses auteurs comme une sorte de démo. Elle a quand même été incluse en juin 1974 sur le premier album du groupe, qui a un titre de compilation, The Eleventh Hour's greatest hits 1974 AD.

Avant d'écrire la chanson, Crewe avait séjourné à La Nouvelle Orléans. Très vite, il l'a fait écouter à Allen Toussaint, qui a décidé de l'enregistrer avec le groupe Labelle. Leur version est sortie en septembre 1974 sur l'album Nightbirds et en novembre en 45 tours.
C'est cette version que tout le monde connaît. C'est celle-là dont, à douze ans, je me faisais un plaisir de chanter à tue-tête le refrain "Voulez-vous coucher avec moi ce soir ?", comme je le faisais un peu plus tôt avec "les putains" d'On ira tous au paradis de Polnareff. Je ne le savais pas, mais il est question aussi de prostitution avec Lady Marmalade, qui est le récit d'une passe à La Nouvelle Orléans, qui fait "rugir la bête sauvage" à l'intérieur d'un pékin moyen, qui se repasse le film de cette nuit mémorable par la suite, une fois revenu dans sa grise vie quotidienne. Au passage, on peut se permettre de sourire de l'affirmation de la chanteuse Patti Labelle qui a expliqué qu'elle ne connaissait pas le sens du refrain en français qu'elle a chanté. C'est possible, mais elle parle anglais et tout le reste de la chanson, écrit dans cette langue, laisse très bien comprendre de quoi il est question.
 
Et que vaut la version de The Eleventh Hour par rapport à celle de Labelle ? Eh bien, c'est beaucoup moins bien ! Elle est plus lente, et surtout assez bancale, pas groovie ni funkie pour un sou, même si tous les ingrédients sont là. Le chant est lui aussi très guindé. On a droit à un solo de saxo, et après la chanson semble presque s'arrêter, alors qu'il reste encore une minute à courir.
Ce n'est sûrement pas un hasard si cette version n'est pas sortie en 45 tours aux États-Unis. D'après ce que je vois dans Discogs, il n'y a qu'en France et au Brésil qu'un single a été publié, sûrement pour récupérer un peu de miettes du succès de Labelle.
Devant ce succès, The Eleventh Hour a remis le couvert et publié en 1975 une deuxième version de Lady Marmalade sur l'album Hollywood hot. Elle est plus rapide, un peu plus disco, dure une minute de plus. Elle passe un peu mieux, inspirée par la version Labelle, mais c'est pas encore ça, et la partie instrumentale dans la deuxième moitié, avec encore du saxo, est difficile à supporter.

La face B, He did ya good (But I'll do that better) est aussi extraite du premier album. Musicalement, on est dans la même veine et ça reste pataud. Et je crois que je préfère ne pas essayer de comprendre toutes les paroles ("I got a muscle Mama", "You'll get your satisfaction guaranteed")...!

Après l'aventure Eleventh Hour, Kenny Nolan s'est lancé dans une carrière solo. Et figurez-vous qu'il a eu un grand succès en 1976, avec la chanson I like dreamin' qui a été un tube aux États-Unis. Mais l'avion et le vedettariat c'était visiblement pas son truc et par la suite il s'est concentré sur l'écriture de chansons. 

Il y a plusieurs groupes nommés The Eleventh Hour, mais j'ai été surpris de voir, sur la page Bandcamp où l'on trouve les deux albums du groupe qui nous intéresse aujourd'hui, que deux concerts sont annoncés en Angleterre pour août-septembre. Je me demande bien quelle est la formation du groupe (Kenny Nolan n'en fait certainement pas partie).