03 octobre 2014

LES BANTOUS DE LA CAPITALE : Sammy na Cathy


Acquis sur le vide-grenier de Bisseuil le 28 septembre 2014
Réf : B1072 -- Edité par La Voix Bantoue au Congo-Brazzaville dans les années 1960 ou 1970
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Sammy na Cathy (Part 1) -/- Sammy na Cathy (Part 2)

Depuis au moins deux ans maintenant, il y a un deuxième vide-grenier annuel à Bisseuil. Ça en fait un de chaque côté du canal. Dimanche dernier, c'était calme, avec peu de marchands et peu de chalands, mais c'était aussi agréable, avec un temps idéal.
Je n'ai trouvé que quelques disques, mais la qualité est bien préférable à la quantité dans ce genre de situation. Les deux plus intéressants, je les ai trouvés dans le carton encore humide de la brume du matin d'un monsieur qui m'a fait grogner sur le coup en demandant 1 € pour ses 45 tours (c'était plutôt 50 centimes partout ailleurs), alors qu'à première vue il n'y avait que de la drosse. A première vue en tout cas puisque, glissés dans des disques de la pire variété, j'ai d'abord trouvé un EP sixties intéressant en parfait état (rendez-vous dans un peu plus tard pour en reparler), puis, sans même une pochette, ce 45 tours dont dont le label "La voix bantoue" m'a instantanément saisi. Et j'ai su tout de suite que j'étais bien tombé quand je me suis emparé du disque pour lire sur l'étiquette le nom du groupe, Les Bantous de la Capitale. J'ai justement lu un peu plus tôt cette année Afro pop : L'âge d'or des grands orchestres africains, de Florent Mazzoleni, avec un chapitre entier sur le groupe, l'un des grands et des plus anciens de la musique congolaise moderne, fondé en 1959 à Brazzaville par des anciens musiciens de l'Orchestre O.K. Jazz. J'avais notamment été surpris d'y lire qu'ils avaient enregistré en novembre 1962 à Paris sous la direction de Loulou Gasté (!), avant d'enregistrer plus d'une centaine de chansons à Bruxelles pour le label Cefa, qui les a éditées sur plus de cinquante 45 tours en l'espace d'un an ! On apprend aussi dans le livre, sans trop de surprise, que La Voix Bantoue est le propre label du groupe.
Bon, sinon, vous vous doutez bien que, même sans pochette, j'ai accepté sans rechigner de payer ce disque 1 €. On se demandera longtemps comment ce disque a voyagé du fleuve Congo à la rivière Marne...
J'ai passé pas mal de temps dimanche à chercher des informations sur Sammy na Cathy, et je n'ai pas trouvé grand chose, hormis la mention dans le livre La chanson congolaise : Son histoire, sa vérité, ses textes et leurs significations, que je n'ai pas pu consulté, que cette chanson a connu beaucoup de succès. A mon grand étonnement, je n'ai vu ce titre listé dans aucune des nombreuses compilations publiées du groupe, et je n'en ai trouvé aucune version en ligne.
Je me suis donc décidé dans la semaine à repiquer en MP3 les deux faces bien fatiguées de mon 45 tours pour vous les proposer ici. Et puis, après réécouté attentivement la face B, avec l'excellente performance vocale en français, j'ai eu un flash : j'ai cherché au cas où des infos sur Les Bantous et Marie Jeanne au lieu de chercher Sammy na Cathy. Et bingo ! En cinq secondes j'avais trouvé sur YouTube Marie Jeanne (Part 1) et Marie Jeanne (Part 2) par Les Bantous de la Capitale qui, vous l'avez déjà deviné, sont la même chanson dans le même enregistrement que celle que l'on trouve sur mon disque ! Du coup, je vous laisse apprécier sans plus la commenter la qualité de cette chanson et de son interprétation : chant, guitares, cuivres, c'est excellent.
Le fait qu'une partie des paroles est en français me la rend encore plus intéressante. On a "Mariage pendant les vacances" sur la face A et surtout la "petite histoire" en face B du gars qui "Depuis que ma mère m'a né" n'a "jamais vu de telles choses" : "J'aimais une fille qui s'appelait Marie Jeanne. Depuis Libreville, je la cherche. Quand je la vois pas mon cœur fait boum boum boum. Je lui ai payé beaucoup de choses. Le machine à coudre. Le voiture. Le clôture. Maire Jeanne m'a fui. Je le porte au plainte. Au parquet. Chez Maître Gomez."
L'enregistrement sur YouTube provient d'un album intitulé Marie Jeanne, publié par Sonafric en 1976. Avec cette référence, j'apprends chez Afrisson que Marie Jeanne 2 est du soukouss...
Comment est-on passé de Sammy na Cathy à Marie Jeanne ? Déjà, un certain temps a dû s'écouler. En voyant mon étiquette de disque, j'étais à peu près certain d'avoir affaire à un disque des années 1960 (pas avant 1963, date à laquelle Samba Mascott, seul crédité pour les deux parties sur le 45 tours, a rejoint le groupe). Les notes de Bakouma S.M. au dos de la pochette de l'album de 1976 font référence à "l'éternel succès Marie Jeanne". S'il était déjà éternel en 1976, il ne datait sûrement pas de la veille...



On pourrait penser à une erreur de titre sur le 45 tours. Mais non, il est bien question de Sammy et de Cathy, surtout sur la face A, mais aussi sur la face B. Ma conviction est que la face B, peut-être chantée par le saxophoniste Nona Arthur, qui est crédité sur l'album, a dû tellement marquéer les esprits que la chanson est devenue connue sous le titre Marie Jeanne après sa parution initiale en tant que Sammy na Cathy.
En tout cas, même s'il s'est bien vendu au départ, j'ai quand même eu beaucoup de chance de trouver ce disque. Je n'en ai trouvé qu'un autre exemplaire en vente en ligne. Et le mien ne porte pas de tampon "Echantillon non vendable" sur l'étiquette. Pourtant, maintenant que je l'ai, je ne suis pas prêt de m'en séparer...!

Clément Ossinonde a édité en 2007 Les Bantous de la Capitale "Bkolo Mboka" : Les rois de la rumba africaine. Chronologie des 48 ans d'existence.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Joli coup. Le manque d'infos, la méconnaissance totale de ttes ces pépites alors que depuis tjrs on est noyé dans le passage répété des mêmes médiocres et de leurs scies, ça en dit long sur la vision du monde de l'occident. C'est qd même extraordinaire qu'on découvre ça grâce à un vinyle sans pochette trouvé dans un vide grenier de trouduculdumonde (s'en vouloir offenser les bissotiers et bissotières!
ph

Pol Dodu a dit…

Un bon point pour votre sérieux, Monsieur Philippe, puisque vous êtes même allé jusqu'à rechercher le nom des habitants de Bisseuil, que je ne connaissais pas moi-même !

Anonyme a dit…

Jolie trouvaille!
Par contre je déconseille les livres de MAZZOLENI qui écrit sur à peu près tout sans y connaître quoique ce soit...
S. de Nantes