27 janvier 2013

ELVIS COSTELLO : Sweet dreams


Acquis probablement chez New Rose à Paris en 1982
Réf : XX19 -- Edité par F-Beat en Angleterre en 1981
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Sweet dreams -/- Psycho

Le premier des deux concerts d'Elvis Costello auxquels j'ai assisté a eu lieu au Théâtre des Champs Elysées à Paris, le 10 janvier 1982, dans le cadre de la tournée qui a suivi son album country Almost blue. A Nashville, exactement une semaine plus tôt, Elvis et les Attractions, accompagnés à la pedal steel par John McFee, quasiment le 4e Atraction pour cet album, avaient joué 44 chansons ! A Londres trois jours plus tôt, ils avaient été rejoints par le Royal Philharmonic Orchestra pour la moitié des 29 titres joués (le single suivant, I'm your toy, a  été enregistré lors de ce concert).
A Paris, le billet annonçait des Guests et l'affiche précisait qu'il y aurait un quatuor à cordes, et on n'a rien vu de tout ça, sans aucune explication, John McFee étant lui aussi absent. Je dois bien préciser que, pour ma part, c'était aussi bien, car plus le concert faisait la part belle au versant rock/new wave de Costello, plus ça me plaisait.
J'aurais dû être au 2e balcon, mais heureusement les placeuses n'étaient pas trop vigilantes ce soir-là. J'ai pu traîner dans les couloirs, me glisser dans la fosse, à gauche de la scène, et apprécier pleinement le concert. Je n'ai pas été le seul à procéder ainsi puisque, à la fin du premier morceau, je me suis retourné et j'ai constaté que j'avais derrière moi une fine brochette de rockers français, Jean-Louis Aubert et Richard Kolinka de Téléphone et Dauga de Bijou, avait profité de l'obscurité pour rentrer discrètement dans la salle. Ce premier morceau, je l'ai "reconnu" dès le premier coup de caisse claire de Pete Thomas, très sec, qui l'a lancé. C'était la version intrépide de Why don't you love me like you used to do de Hank Williams, titre d'ouverture d'Almost blue. Mais Costello allait bien plus vite que tout le monde à cette époque (en se gavant de speed, c'est entendu) : après deux albums en 1981, dont un de reprises, certes, il avait déjà enregistré le suivant. Alors ce soir là, sur 28 titres joués, il n'y en a eu que 4 d'Almost blue contre 7 d'Imperial bedroom, qui ne sortirait que quelques mois plus tard.



Mon billet, ainsi que l'une des nombreuses publicités parues dans la presse pour annoncer le concert (celle-ci vient d'un numéro de Rock & Folk). Je note une bizarrerie : l'annonce de la distribution française de l'album par Arabella Eurodisc. Je ne m'en souvenais pas, mais la distribution française de F Beat est bien passée de Warner à Arabella Eurodisc en 1982 (Ils ont sorti Imperial bedroom en France), mais Almost blue est sorti en 1981 et mon exemplaire, acheté à la sortie, est bien un disque Warner (référence FB K 58 392). Je me demande si des bisbilles entre distributeurs n'expliquent pas les ratés, côté Guests, de l'organisation du concert du Théâtre des Champs Elysées.



Le 10 janvier 1982, il devait me rester quelques francs reçus en cadeau pour Noël, vu que j'ai acheté, ce qui m'est rarement arrivé, à la fois le t-shirt (très moche) de la tournée, avec les dates dans le dos, et le calendrier de l'année, qui utilise la même photo que la pochette de ce 45 tours.


En préparant cette chronique, je suis tombé hier sur ce documentaire du South Bank show, une sorte d'équivalent anglais d'Envoyé spécial. Une heure de reportage sur Elvis Costello, avant, pendant et juste après l'enregistrement d'Almost blue. Inutile de préciser que c'est précieux et fascinant, notamment pour expliquer les motivations d'Elvis pour enregistrer cet album country et lever le voile sur la relation avec le producteur Billy Sherrill (malheureusement, quand il est interviewé sur son bateau, je ne peux m'empêcher de lui trouver une ressemblance physique avec George W. Bush, ce qui gâte tout). La dernière réédition en date de l'album comporte deux CD, ce serait idéal si la suivante pouvait en plus incorporer un DVD avec ce documentaire.
Petite anecdote : à la fin du reportage, on a des images d'un concert organisé très discrètement à Aberdeen le 30 juillet 1981 pour se faire la main sur le répertoire country. Je n'ai passé qu'une seule soirée de ma vie à Aberdeen, où j'accompagnait Primal Scream et Meat Whiplash qui y donnaient un concert, et c'était précisément au même endroit, l'hôtel Metro.

Allez, on en vient enfin à ce 45 tours, Sweet dreams, le second à être extrait d'Almost blue. Si pour le premier, Good year for the roses, Barney Bubles avait réalisé une de ses pochettes les plus absconses (et les moins belles, Costello l'aurait détestée et fait remplacée par une pochette neutre de F Beat), pour celle-ci, il a fait dans le sobre et le classique, utilisant une photo d'Elvis déguisé en chanteur country, cravate ficelle comprise. Même les titres des chansons sont parfaitement lisibles !
Comme pour la plupart des chansons de l'album, j'ai découvert Sweet dreams avec cette version d'Elvis Costello. L'original a été écrit et chanté par Don Gibson en 1956, mais à l'époque il s'est fait parasiter par Faron Young, qui en a aussitôt enregistré une version qui a eu plus de succès que la sienne. Cette chanson est devenue un classique, notamment repris par Patsy Cline et Emmylou Harris.
Dans le documentaire, on voit Elvis et les Attractions répéter la chanson avant d'aller à Nashville, où on assiste à une partie de l'enregistrement. Puis on le voit réécouter la chanson terminée à Londres, visiblement satisfait après les ajouts de choeurs et de cordes. Il faut dire que c'est l'une des grandes réussites de l'album, l'une des chansons qui réalise le mieux la synthèse entre le monde d'Elvis et celui de Nashville.



La face B, Psycho, est un chef d'oeuvre qui glace le sang. Officiellement, cette reprise d'une chanson de Leon Payne, enregistrée pour la première fois par Eddy Noack, a été enregistrée en concert à Los Angeles le 16 février 1979, mais il a depuis été précisé qu'Elvis a réenregistré la voix en studio.
Musicalement, la version d'Elvis Costello n'est pas très différente de l'originale, mais avec l'interprétation d'Elvis, cette histoire d'un tueur conscient qu'il est devenu fou, au point de conseiller à sa mère de sortir, fait littéralement froid dans le dos.
Plusieurs autres versions sont disponibles en téléchargement chez Boogie Woogie Flu, mais pas celle de T. Tex Edwards, déjà chroniquée ici. En tout cas, Psycho et quelques autre des faces B, dont Your angel steps out of heaven et My shoes keep walking back to you, justifient complètement, pour qui n'a pas les singles, l'achat d'une réédition en CD de l'album.

26 janvier 2013

THE SPINTO BAND : Oh Mandy


Acquis d'occasion en Angleterre vers 2011
Réf : RDTCDX 18 -- Edité par Radiate en Angleterre en 2006
Support : CD 12 cm
Titres : Oh Mandy -- Let's see what develops -- Road to Newark + Oh Mandy (vidéo)

J'ai découvert et beaucoup apprécié Oh mandy de The Spinto Band grâce à un MP3 fourni par le festival South By South West sur son site pour son édition 2006.
Quelques années plus tard, j'ai trouvé lors de l'un de mes voyages en Angleterre le CD single d'occasion à tout petit prix, et j'ai sauté dessus. Depuis cette date, j'avais plus ou moins prévu de parler de ce disque ici et, étant donné que je m'apprête à voir le groupe en concert la semaine prochaine à La Cartonnerie de Reims, il me semble que c'est le moment ou jamais de le faire.
Je n'avais pas cherché à en savoir plus, mais à l'époque j'étais persuadé que The Spinto Band était un tout jeune groupe qui débutait. Certes, on n'avait jamais entendu parler d'eux auparavant, mais je me trompais complètement : en fait, le groupe existe depuis 1996, a enregistré l'équivalent de quatre albums plus ou moins de démos sous le nom de Free Beer, plus trois autres sous le nom de The Spinto Band de 1999 à 2001, avant de sortir en 2005 Nice and nicely done, l'album qui contient Oh Mandy.
Du temps a passé, mais Oh Mandy a gardé tout son charme. C'est une chanson joyeuse et entraînante, portée par ce qui doit être une mandoline, un son de clavier qui me fait un peu penser à du theremin et la voix plaintive du chanteur. Il y a un côté folk-rock naïf qui me rappelle Poi Dog Pondering ou, plus près de nous, Noah and the Whale ou Phosphorescent. Je ne sais pas si la vidéo, incluse dans le CD, a bénéficié d'un gros budget, mais en tout cas le travail d'animation est très réussi et a dû prendre un temps fou.
Les deux faces B ne sont pas sur l'album. Je ne sais pas si on ne les trouve qu'ici ou si elles ont été pêchées sur l'un des précédents albums auto-produits.
Let's see what develops garde la voix un peu plaintive, mais a un son très différent de Oh Mandy, avec une boite à rythmes et de l'électronique très en évidence. Road to Newark est un titre noisy pop sympathique, mais beaucoup plus classique.
The Spinto Band a sorti l'album Shy pursuit en 2012, chez les amis de 62TV. Le suivant, Cool cocoon, arrive dans quelques jours. Ils ont terminé une précédente tournée européenne il y a quelques semaines à peine et, si j'en crois
la chronique des Inrocks de leur concert à la Maroquinerie
, j'ai toutes les chances de passer un très bon moment samedi soir prochain à La Cartonnerie.

20 janvier 2013

LIO : Amoureux solitaires


Acquis d'occasion probablement au début des années 1990
Réf : 102 444 -- Edité par Arabella en France en 1980
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Amoureux solitaires (Dis moi que tu m'aimes) (Lonely lovers) -/- Petite amazone

Ca fait un petit moment que j'ai envie de chroniquer un disque d'Elli et Jacno, mais je n'arrive pas à en choisir un. J'hésite principalement entre Oh là là, Le téléphone et Main dans la main. Au bout du compte, l'évidence s'est imposée à moi : le mieux, c'est quand même de commencer par leur plus grande réussite pop, qui est aussi leur plus grand succès populaire, Amoureux solitaires, la chanson qu'ils ont écrite et réalisée pour la face A du deuxième 45 tours de Lio, en 1980.
Je ne sais pas de qui est venue l'idée d'abandonner (très provisoirement) l'équipe gagnante de Banana split (Hagen Dierks/Jacques Duvall et Jay Alanski pour l'écriture des chansons, Marc Moulin et Dan Lacksman de Telex pour la production) pour travailler avec Jacno, tout auréolé du succès de son Rectangle, mais ça c'est révélé être un coup de maître.
Ce titre a été enregistré en juin 1980, juste un mois avant le premier album d'Elli et Jacno Tout va sauter et son single un peu cousin de celui-ci, Je t'aime tant. La chanson, alors inédite, date des Stinky Toys, qui la chantaient en anglais. Je crois qu'on a été nombreux à être très déçus quand on a fini par entendre un enregistrement de cette version originale sur la compilation Inédits 77-81 d'Elli et Jacno...
Côté instrumental, c'est parfait. Jacno n'a rien retouché à la recette de son disque solo : vraie batterie et vraie guitare électrique, mais basse synthétique et mélodie jouée d'un doigt au synthé. On note juste à un moment parmi les sons électroniques du synthé, qui joue visiblement le rôle habituellement dévolu aux cuivres.
Côté paroles, c'est parfait aussi. On est dans une ambiance copains proche de l'idole Françoise Hardy, mais sans la pseudo-innocence sixties. Au contraire, on pourrait penser que cette idée de prétendre qu'une vie triste a l'allure d'un film parfait reflète un sentiment assez partagé au début des années 80 (qui a abouti, soulignons-le, à des horreurs comme les nouveaux romantiques).
Le chant de Lio est parfait, encore et aussi. J'imagine qu'Elli aurait pu chanter Amoureux solitaires très bien par elle-même, mais je ne suis pas sûr qu'un tel enregistrement aurait eu autant de succès, car Lio était portée par l'immense succès de Banana split et son image toute neuve de Lolita.
Amoureux solitaires a été un tube de l'automne-hiver, saisons qui conviennent parfaitement à son sentiment. J'aimais beaucoup la chanson à l'époque et je pense que j'ai pas mal dansé dessus, mais je n'ai pas acheté le 45 tours neuf. Parce que j'avais d'autres priorités, mais aussi beaucoup par snobisme.
En face B, Petite amazone est une chanson agréable, avec un accompagnement synthétique minimal, qui est produite par l'équipe de Banana split, comme tout le reste du premier album de Lio, à l'exception d'Amoureux solitaires. La réédition CD de l'album d'il y a quelques années est déjà épuisée, mais pour vous procurer ces deux chansons, il suffit d'aller dans n'importe quel vide-grenier ou dépôt-vente de France ou de Navarre, où vous êtes à peu près certain de trouver, pour pas cher, un exemplaire de ce 45 tours, qui s'est vendu à plusieurs millions d'exemplaires.



19 janvier 2013

COUNTRY GIANTS VOL. 6


Acquis chez Age Concern à Douvres le 5 janvier 2012
Réf : CDS 1153 -- Edité par Camden/RCA en Angleterre en 1973
Support : 33 tours 30 cm
12 titres

Je suis tombé deux fois sur cet album en trois jours. La première fois, je l'ai laissé, mais la deuxième, il était à la fois pas cher et en bon état, et je visitais une toute dernière boutique avant la fin de mon escapade anglaise. J'ai donc craqué et ajouté ce disque à ma petite pile, qui comprenait notamment un Best of du Velvet Underground en cassette qu'un autre client d'au moins 75 balais a lorgné en me disant que, s'il l'avait vu avant moi, il ne l'aurait pas laissé passer.
Les notes de pochette au dos de l'album commencent ainsi : "Un simple coup d'oeil aux artistes présents sur cet album montrera que la promesse de son titre est largement tenue, car si jamais une assemblée de géants de la Country a mérité son nom, c'est bien cette compilation". Ce à quoi j'ai eu instantanément envie de répliquer : "Un simple coup d'oeil à la pochette de ce disque ne donnera aucune indication sur les artistes présents sur cette compilation, même s'il favorisera sa vente presque autant que la liste de géants de la country présents sur cette compilation"...
Vous vous souvenez peut-être qu'on avait parlé ici d'un 45 tours compilation appelé Country guitar (Great country and western hits), premier volume d'une série à succès lancée par RCA. Sur la pochette, il y avait deux cowboys qui s'en allaient au loin dans un décor de western. Il est clair que ce sixième volume de la série Country giants est un descendant direct de ce premier disque. Les deux sont édités en Angleterre par RCA, et trois des quatre artistes présents sur le 45 tours se retrouvent sur cet album (Jim Reeves, Hank Snow et Jim Ed Brown des Browns).
On pourrait croire que tout oppose les grises et guindées années cinquante et les futiles et colorées années soixante-dix. Et pourtant, non. Pour ce qui est des pochettes, chaque fois le label s'est appliqué à illustrer le plus fidèlement possible un aspect de la musique Country and Western qu'il contient : le westen pour le 45 tours et la campagne (country) pour cet album. D'où ce choix de photo d'une fille de paysans en salopette, protégée du soleil par un chapeau à fleurs, qui participe de bon coeur à cette activité essentielle de l'année agricole qu'est la moisson. Cette iconographie n'était pas réservée à l'austère country, voir aussi les Hot hits et les Pop hits.
Côté musique, on trouve ici à la fois des titres récents (au moment de la parution, bien sûr) et des grands succès comme les deux titres de Jim Reeves et le classique des classiques, I'm movin' on de Hank Snow. Que ce soit des chanteuses ou des chanteurs qui officient, la majorité de l'album est constituée de titres très commerciaux, voire carrément pop : (I never promised you) A rose garden de Dottie West, Morning de Jim Ed Brown, Just for what I am de Connie Smith, Never ending song of love de Dickey Lee, One tin soldier de Skeeter Davis et les deux Jim Reeves.
Mais, outre le Hank Snow, il y a quelques excellents titres dans le lot : The taker de Waylon Jennings, une chanson écrite par Kris Kristofferson et Shel Silverstein, la reprise de Four strong winds par Bobby Bare, et aussi les deux titres de Jerry Reed, surtout la reprise instrumentale du tube de Ray Charles All I ever need is you avec Chet Atkins, extraite de leur album commun Me and Chet (les deux coquins avaient sorti quelques temps plus tôt Jerry and me !).
En tout cas, voilà un disque assez léger et ensoleillé pour éclairer un week-end d'hiver, à passer au chaud en regardant les vidéos ci-dessous, même si les versions ne sont pas celles du disque (celle de Bobby Bare, sans choeurs et avec la guitare plus en avant, est largement supérieure).


Bobby Bare, Four strong winds, en 1965.


Waylon Jennings The taker et We had it all, en 1975.


Jerry Reed et Chet Atkins ensemble pour une version chantée de All I ever need is you.

13 janvier 2013

JACQUES MARTIN : Je demande Melle Angèle


Offert par Marie-Claire B. à Saint-Memmie le 30 septembre 2012
Réf : 2607 902 -- Edité par WIP en France en 1976
Support : 2 x 45 tours 17 cm
Titres : Je demande Melle Angèle (Porte n°1 à porte n°7) -- Je demande Melle Angèle (Porte n°8 à porte n°14) -/- Je demande Melle Angèle (Porte n°15 à porte n°21) -- Je demande Melle Angèle (Porte n°22 à porte n°28) (Et finale)

Je demande Melle Angèle est, avec A la pêche aux moules, l'une des deux chansons qui ont connu une grande vague de popularité en 1975-1976 grâce à l'émission du dimanche de Jacques Martin et ses compères, Le petit rapporteur.
Personnellement, j'ai été beaucoup plus marqué à l'époque par La pêche aux moules que par Melle Angèle, je n'ai donc jamais eu l'idée d'acheter ce disque, que j'ai pourtant bien dû croiser des centaines de fois dans des bacs. Mais ma soeur me l'a offert, alors je m'y suis intéressé, et si j'en parle aujourd'hui ce n'est pas tant pour la chanson elle-même que pour le soin apporté à la réalisation de cet objet discographique, conçu avant tout comme une grosse blague.
Pour l'historique de la chanson, lancée en janvier 1976, le mieux c'est de se reporter au livre de Pierre Bonte, C'était le bon temps : La bande du Petit Rapporteur, paru en 2008. On y apprend que, après le très grand succès d'A la pêche aux moules, la sauce avait beaucoup moins bien pris avec l'air choisi pour lui succéder, Rapetipa. C'est sur la suggestion de Pierre Desproges et dans le but de "faire encore plus idiot" que Jacques Martin a ensuite jeté son dévolu sur Je demande Melle Angèle, une chanson de marche issue du répertoire des scouts, pour en faire une tentative d'épuisement du comique de répétition chanté. Il suffit de regarder l'extrait d'émission ci-dessous ,où on voit la première apparition de la chanson dans Le petit rapporteur, pour constater que cet essai est transformé bien avant que Melle Angèle ne soit entonnée pour la quatorzième et dernière fois du jour !
Malgré la suggestion de Stéphane Collaro, Jacques Martin avait choisi de ne pas sortir de version sur disque d'A la pêche aux moules, ce qu'il a amèrement regretté quand la version de Nestor le Pingouin a fait un carton. Du coup, il avait été décidé dès le départ d'enregistrer et de diffuser sur disque Je demande Melle Angèle, et ça c'est fait sous la forme d'un luxueux double 45 tours, avec pochette à rabats, édité sur son label WIP par Simon Waintrob, surtout connu pour avoir été le producteur de Mike Brandt.
Le tout est présenté comme un disque de musique classique des plus sérieux, à commencer par les notes de pochette, signées Jacques Martin, qui énoncent quand même quelques vérités, comme "Dès les premières mesures, l'indigence des textes, la surprenante médiocrité de la musique, conjuguent leurs efforts pour empêcher le thème de se développer et pour le maintenir volontairement au niveau de la rue, là même où il a pris naissance.".
Il y a quelques petits détails que j'ai trouvés bien vus, comme la durée de la porte n°17, indiquée à 3' contre 20" pour les 27 autres, avec cette précision : "La concierge était bègue. Il y a aussi les fins de face. Pour la partie chantée, tout est à peu près identique, à part les numéros de porte qui changent, mais ensuite Jacques Martin intervient pour faire un numéro de lèche successivement à Europe 1 (face A), RTL (B), France Inter (C) et RMC (D), soit les quatre seules radios nationales de l'époque. La blague aura fonctionné à merveille si une seule de ces radios a un jour passé la face d'une des trois autres !
Il y a des clins d'oeil jusque dans les détails (Collaro intervient comme castrat, avec l'aimable autorisation des choeurs de la Chapelle Sixtine, et l'adresse de Simon Waintrob est donnée à la Maison d'arrêt WIP), mais ce que je trouve de plus réussi, vu le contexte, c'est la mention "Existe en triple version 30 cm. pour les programmateurs consciencieux ou mélomanes.".
Je suis consciencieux et mélomane et, si quelqu'un met la main sur un exemplaire de cette édition en 30 cm, je m'engage solennellement à l'écouter intégralement et à le chroniquer ici-même !



12 janvier 2013

THE CROCKETTS : Hello & good morning


Acquis à The Hospice Shop à Canterbury le 4 janvier 2012
Réf : bdg 5000353 -- Edité par Blue Dog en Angleterre en 1997
Support : CD 12 cm
Titres : Will you still care -- Stunner -- Cars and football -- Wednesdays in my bed

Je me souvenais d'avoir déjà lu des chroniques sur les Crocketts. Positives ? Négatives ? La musique était-elle susceptible de me plaire ? Aucune idée, mais à 50 pence le CD, l'intérêt c'est qu'on peut acheter sans trop se poser de questions. Du coup, j'ai pris ce disque et, pour être sûr de ne rien rater, j'ai pris un autre maxi, James Dean-esque, trouvé dans la même étagère de cette boutique d'association caritative.
Outre le nom du groupe, pas inconnu, il y avait un autre critère pour choisir ce disque : sa photo de pochette qui, de manière très évidente, fait référence à celle, devenue iconique, de l'album Spiderland de Slint, prise par Will Oldham. Ils ne sont peut-être pas les seuls autres, mais Giant Sand s'est aussi amusé à prendre une photo de ce genre, en 1999, pour une photo de promotion au moment de la sortie de l'album Chore of enchantment. Ça ne peut être qu'une coïncidence, mais ce disque des Crocketts est édité par Blue Dog, une filiale de V2, le label qui devait initialement sortir Chore of enchantment !
Cette photo a sûrement été prise au Pays de Galles, là où The Crocketts se sont formés alors qu'ils étaient étudiants à l'Université d'Aberystwyth. Je parie que l'eau ne devait pas être chaude !
Will you still care est le premier titre extrait en single du premier album du groupe, We may be skinny & wirey. Il y a eu trois autres singles, Loved ya once, Flower girl et Explain.Toutes les photos ont visiblement été prises lors de la même session et certaines de ces pochettes sont plus marquantes visuellement, surtout Loved ya once, où on les voit encore dans l'eau. Celle de l'album me fait un peu penser au Heaven up here d'Echo and the Bunnymen, le vol d'oiseaux en moins.
L'ensemble de ce Hello & good morning est d'excellente tenue. Dans la première partie de Will you still care, le chanteur Davey MacManus me fait un peu penser à Bobby Bare Jr, et effectivement on a affaire ici à un pop-rock nerveux pas éloigné de ce que pouvaient faire, pour n'en citer que deux, le groupe Bare Jr, justement, et les écossais d'Urusei Yatsura.
Le deuxième titre, Stunner, est le meilleur du lot. Je trouvais dommage qu'il ne soit pas en face A du maxi, alors que ses paroles en fournissent le titre général, ni même sur l'album, mais l'explication tient sûrement dans le fait qu'une première version de ce titre était déjà parue l'année d'avant sur le tout premier disque du groupe, Frogs on a stick. Je dis ça, mais les deux titres suivants, Cars and football et Wednesdays in my bed ne sont ni sur l'album ni sur aucun autre disque alors qu'ils sont pourtant excellents tous les deux, proches thématiquement et musicalement des Undertones boutonneux des deux premiers albums.
Après leur deuxième album en 2000, The Crocketts ont été lâchés à la fois par leur éditeur et par leur label. Le groupe n'a pas survécu longtemps, mais deux des membres du groupe ont ensuite formé The Crimea, groupe qui a sorti son troisième album fin 2011.


The Crocketts, Will you still care, en concert à Bedford, en 2000.

06 janvier 2013

BRIGITTE FONTAINE ET ARESKI : Ça va faire un hit


Acquis chez Dorian Feller à Villedommange le 30 décembre 2012
Réf : 129 052/529 052 -- Edité par Byg en France en 1974
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Ça va faire un hit -/- Quand les ghettos brûleront

Comme pour le 45 tours d'Ultravox!, je suis retourné fouiller dans les cartons que Dorian Feller prépare en vue de futurs vide-greniers ou bourse aux disques et j'ai été très content d'y trouver cette pépite de Brigitte Fontaine et Areski qu'il avait en double. Mine de rien, ils ont essaimé quelques simples comme celui-ci au fil du temps, souvent avec des titres hors album, mais ces disques ne courent pas les rues et je suis bien content d'avoir celui-ci, même s'il n'est pas tout à fait aussi exceptionnel que, par exemple Le goudron / Les beaux animaux.
En 1974, pour se prouver qu'ils conservaient leur indépendance vis-à-vis de Pierre Barouh et Saravah, Fontaine et Belkacem ont signé avec Jean Karakos et Byg, chez qui ils ont sorti deux disques, ce 45 tours, avec une pochette signée Brigitte Fontaine, et l'album L'incendie.
Les arrangements de ce disque sont signés Jean-Claude Vannier, avec qui Brigitte Fontaine avait déjà travaillé en 1968 pour l'album Brigitte Fontaine est... ?. Ils ont à nouveau collaboré en 2006 sur l'album Libido.
Dans le livre de Benoît Mouchart Brigitte Fontaine : Intérieur / Extérieur, Brigitte Fontaine explique : "Aussi incroyable que cela puisse paraître, oui, nous étions persuadés que ça allait faire un hit !". Evidemment, Ça va faire un hit n'en a pas du tout été un, de hit. Pourtant, c'est sûrement ce que le duo Fontaine/Areski a enregistré de plus heavy, de plus directement rock. L'intro est excellente, une guitare rythmique saturée qui, bizarrement me fait un peu penser aux Residents, une guitare électrique solo façon heavy metal et de la batterie. Il y a matière à faire un bon sample. Ensuite, ça se gâte car la guitare vraiment seventies et le son heavy rock l'emportent. Il y a même des choeurs sur le refrain, et le tout est beaucoup trop normal.
De toute façon, ce titre avait peu de chance de faire un succès car le simple fait de l'annoncer dans les paroles crée une distance qui l'éjecte de la sphère pop. Avec un refrain bien niais, ca avait peut-être une petite chance de fonctionner.
Brigitte Fontaine ne semble pas garder un excellent souvenir de ce 45 tours puisque, toujours dans le livre de Benoît Mouchart, elle dit à propos de la face B Quand tous les ghettos brûleront : "Je n'aime pas le militantisme relou, et cette chanson s'inscrit, hélas, dans cette catégorie.".
Pour le coup, je la trouve un peu sévère. Certes, cette chanson n'est pas tout à fait du calibre de certains autres de leurs titres qu'on pourrait pourtant qualifier de "politiques", comme Moi aussi ou Le 6 septembre, mais, cette fois-ci en conservant leur son et les influences orientales et avec un rythme très enlevé, ce court duo chanté par Brigitte et Areski est malgré tout un titre d'excellente facture.
En attendant que je trouve leurs autres 45 tours (on peut rêver...), je vous propose de vous faire une idée des fameuses prestations en public de Brigitte Fontaine et Areski en regardant un extrait d'une émission presque contemporaine de ce 45 tours, La rose rouge (1973).


Les deux faces de ce 45 tours figurent en titres bonus sur la réédition toute récente de L'incendie, disponible uniquement en téléchargement.

02 janvier 2013

BUDDAH BOOM VOL. 1


Offert par Philippe R. à Bouilly le 26 décembre 2012
Réf : 0920 038 -- Edité par Barclay en France vers 1969
Support : 33 tours 30 cm
12 titres

Voilà un très beau cadeau de Noël que m'a fait Philippe, un disque qui a appartenu un temps aux collections de l'ORTF/Radio France, avant d'échouer en 2012 dans un Emmaüs de l'Ouest de la France.
Cet album contient quelques raretés des années 1967-1968, mais il est particulièrement intéressant, comme d'autres disques dont j'ai eu l'occasion de parler ici, pour ce qu'il nous raconte des pratiques de l'industrie du disque.
Il s'agit au départ d'une compilation du catalogue de Buddah Records, un label qui, signalons-le au passage, a été fondé par les patrons de Kama Sutra pour se sortir d'un contrat de distribution avec MGM.
En France, c'est Barclay qui était chargé de distribuer Buddah.  Vers 1968-1969, Barclay a édité dans sa série Panache une compilation Buddahrama, qui présentait un échantillon des publications du label. Une bonne partie des titres (mais pas tous) était aussi disponible en 45 tours en pressage français. Voici la pochette de Buddahrama :



Quelques temps plus tard,Barclay a réédité cette compilation et l'a rebaptisée, vous l'avez deviné, Buddah boom. Enfin, quand je dis "réédité", c'est un abus de langage car en fait, l'album initial a été re-commercialisé avec la même référence et une nouvelle pochette, mais le disque lui-même est le disque original : l'étiquette indique Buddahrama et pas Buddah boom.
Mais pourquoi ce nouveau titre et cette nouvelle pochette ? Ceux qui connaissent les disques de la collection Formidable rhythm and blues l'auront instantanément compris en voyant la deuxième pochette : pour tenter de récupérer quelques miettes du succès phénoménal de cette collection et des quelques autres (Surboum rhythm and blues, Incroyable, Terrible et Remarquable...) qui l'ont accompagnée dans ces années où le rhythm and blues s'est d'un seul coup trouvé très en vogue en France. J'ai déjà eu l'occasion de parler ici de la collection Formidable, et on trouve une présentation détaillée de ces albums et .
Il ne faut pas commettre l'erreur de penser que Barclay s'est livré ici à un acte de parasitage commercial, voire de pure contrefaçon, comme par exemple Polydor l'a fait avec l'album Rythm and blues show. En effet, même si par la suite les disques Formidable du label Atlantic ont été réédités par Filipacchi, c'est bien Barclay qui a lancé ces séries de disques avec une face lente et une rapide et des titres enchaînés, proposant ainsi "un programme tout fait pour votre boîte de nuit ou vos surboums". Barclay, qui avait à l'époque en distribution, outre Atlantic, Stax, Atco, Chess et Jubilee, les labels qui ont fourni la matière à ces différentes compilations.
Le verso de Buddahrama est le même celui de Buddah boom, à l'exception du titre. C'est à dire que la maquette est identique à celle des disques Formidable à partir du volume 3 : encres noir et bleu, grosses flèches bleues pour indiquer les "50% rapide" et les "50% lent", slogan "Enchaînés sans interruption... Comme dans une discothèque... 12 tubes formidables" en haut. Visiblement, quelqu'un chez Barclay a pensé que ça ne suffisait pas, et ils se sont attaqués au recto pour la deuxième édition : lettrages avec les grosses initiales, indication du volume en noir, liste des artistes et, élément essentiel, une photographie en couleur prise par Jean-Pierre Leloir.
En fait, il n'y a qu'une chose qui manque, et Barclay n'a pas osé aller jusqu'à l'utiliser, c'est la mention "Rhythm and blues". Et pour cause, contrairement à Atlantic, Stax ou même Chess, il est assez difficile d'appliquer cette étiquette à Buddah, qui était avant tout un label pop, dont les plus grands succès étaient même carrément du bubblegum (en français : de la guimauve).
Les compilateurs ont malgré tout essayé de contourner cet obstacle en plaçant en début de disque les deux titres les plus soul/r'n'b du lot, Soul is takin' over
d'Henry Lumpkin et If I didn' t love you de Toni Lamarr. C'est sûrement pour ça que le seul vrai tube présent sur l'album, Green tambourine des Lemon Pipers, classé numéro 1 des ventes aux Etats-Unis, est relégué en fin de face A. Ça fait pluisieurs bons titres, si on y ajoute une autre sucrerie pop psychédélique (Land of Oz par Le Cirque) et Sure 'nuff 'n yes I do, un des meilleurs titres du tout premier album édité par Buddah, le Safe as milk de Captain Beefheart and his Magic Band (mon exemplaire s'appelle Dropout boogie), dont on se demande comment il a pu se retrouver signé sur le même label que tous les autres ici présents.
Si la face rapide passe encore à peu près, la face lente, après les deux premiers titres, Baby baby please de Timothy Wilson et le slow de Beefheart, I'm glad, ne propose que de la soupe tiède et indigeste.
Plusieurs des artistes ici présents ont eu une très courte carrière, réduite à un ou quelques disques, et je pense que certains des titres de cette compilation ont rarement été réédités. Cette compilation a dû très peu se vendre et, à ma connaissance il n'y a jamais eu de volume 2. Au bout du compte, c'est quand même l'histoire éditoriale du disque qui me parait la plus intéressante ici. Et si vous voulez me faire un cadeau, pour rester dans les objets promotionnels étranges, il y a ce 45 tours promo de Green tambourine diffusé par Barclay sous le nom d'artiste Les Citrons Pressés qui me fait bien saliver !


Les Citrons Pressés et leur tambourin vert s'en prennent à un gros nounours sur un plateau télé à Cincinnati !

01 janvier 2013

MES GRANDES TROUVAILLES DE CHINE 2012

C'est une tradition encore toute jeune, inaugurée l'an dernier : regarder la liste des billets de l'année écoulée et proposer une sélection des  découvertes de disques d'occasion, principalement faites en vide-grenier, qui m'ont le plus marqué.
Cette tradition perdurera tant que j'en aurai la matière. C'est le cas cette année, mais ça tient beaucoup à la chance : plus de la moitié de ces disques ont été trouvés sur seulement trois stands différents. Même en ne comptant que ceux qui proposent des disques, ça en laisse des centaines où je n'ai rien trouvé de vraiment intéressant !

Un clic sur le titre ou la pochette vous emmènera sur la chronique correspondante.

Notamment pour l'histoire de Cobra Man...

Une brillante tentative de détournement...

Avec le témoignage de Pierre Dieuzey lui-même en commentaire.

Un 45 tours sixties de Franco !

Dépaysement garanti...

Une pochette de Barney Bubbles, trouvée en allant voir une exposition sur... Barnay Bubbles !

Une surprenante production années 70 de Salvador.

L'équivalent de la découverte d'un 45 tours inconnu du MC5...

She's not there des Zombies repris par le chanteur des Zombies. Enfin presque...

Un incunable du rock, ou presque. En pressage américain.

Un autre classique. En pressage français cette fois : Vive Les Troggs !

Pour la découverte d'une face B insoupçonnée d'A Trois Dans Les WC.
 
L'animal rock 'n' roll n'est pas tout à fait celui que vous connaissez...