27 juin 2015

LEON RAITER : Léon... tout court


Acquis sur le vide-grenier de Plivot le 3 mai 2015
Réf : 166.584 -- Edité par Odéon en France en 1932
Support : 78 tours 25 cm
Titres : Léon... tout court -/- La chanson du canard (Coin, coin, coin)

J'ai lu récemment Do not sell at any price de la journaliste Amanda Petrusich, sur la quête sauvage et obsessive pour les 78 tours les plus rares (à lire chez Oxford American, un entretien et un extrait). Il y est surtout question des premiers disques de blues, avec plein d'anecdotes plus fascinantes les unes que les autres. Le collectionneur Christopher King l'introduit notamment auprès du célèbre Joe Bussard et à ce moment elle précise que King se souvient très bien de sa première rencontre avec Bussard : il avait six ou sept ans et Bussard s'était pointé chez lui pour acheter toute la collection de 78 tours de son père : 10 000 disques à 10 cents pièce ! Celui-là, pas besoin de consulter un psy pour savoir quel traumatisme lui a refilé le virus de la collectionnite !!
Dans le livre, Petrusich passe un bon moment à essayer de déterminer si la collectionnite est une maladie qui relève de la faculté, une forme particulière d'addiction, de névrose ou d'autisme. C'est probablement un peu de tout ça mélangé ! Pour ma part, je sais que j'en souffre. Je n'essaie surtout pas de me soigner, mais je fais attention à en limiter les symptômes et les effets indésirables : je n'en suis pas comme certains amis à enchaîner les vide-greniers avant l'aube, ou, comme certains collectionneurs du livre, à frapper aux portes dans la campagne pour demander aux vieux s'ils n'auraient pas une caisse de disques qui traînerait à la cave ou au grenier.
Pour ce qui concerne les seuls 78 tours, ça ne fait que deux ans que j'ai commencé à en acheter, et je reste très sélectif. De toute façon, on en voit peu et, une fois écartées l'opérette et la musique classique, il ne reste guère que notre blues à nous, le musette et la chanson (réaliste ou non).
Il n'empêche, je regarde désormais attentivement les 78 tours quand j'en vois, surtout quand, comme c'était le cas à Plivot cette année, je ne trouve aucun autre disque. Le vendeur en avait un carton et, pendant que je l'examinais, il n'a pas arrêté de me faire l'article comme quoi c'étaient des disques vieux et rares et qu'il avait payé le lot cher au départ. Ça lui a permis de me vendre ce disque que j'avais sélectionné au prix inespéré de 2 € (je l'ai vu du coin de l'oeil qui s'en vantait auprès de son épouse juste après). Pour ma part, je préférais payer 1 € de trop plutôt que d'avoir à marchander, d'autant que ce n'est pas si cher pour un disque de plus de quatre-vingts ans...
Je ne connaissais pas du tout Léon Raiter. J'ai pris ce disque parce que je me suis dit que La chanson du canard (Coin, coin, coin), même si ce n'est pas une danse, ça ne risquait pas d'être triste.
Ce n'est qu'une fois rentré à la maison que j'ai appris que vous, moi, tous nous connaissons des chansons dont la musique est signée Léon Raiter. A commencer par Meunier, tu dors ! Si on m'avait posé la question, j'aurais répondu sans hésiter que c'était une comptine du patrimoine, du 18e 19e siècle. Eh bien, non. C'est une composition de 1927 (cinq ans avant ce disque) avec des paroles de Fernand Pothier. Je suis bien certain que les droits afférents ont rarement été réglés quand cette chanson était interprétée dans les kermesses d'écoles ou les colonies de vacances ou imprimée sur des carnets de chant.
On connaît aussi des chansons composées pour Berthe Sylva aussi célèbres que On n'a pas tous les jours vingt ans et Les roses blanches ! Né en 1893 à Bucarest, accordéoniste et fils d'accordéoniste, ne rechignant pas à chanter, Léon Raiter était dans les années 1920 une vedette de la radio et c'est lui qui a lancé la carrière de Berthe Sylva.
En 1932, il était suffisamment célèbre pour être la vedette principale de Léon... tout court, un film de Joe Francis de 53 minutes qui, sans trop de surprise, se passe dans le monde du music-hall.



C'est la chanson-titre de ce film qu'on trouve en face A de mon 78 tours, un fox-trot fantaisiste sur des paroles de Fernand Pothier et Géo Koger, qui se termine bien sûr sur une allusion grivoise.
La chanson du canard est du même acabit. On en retiendra la morale : "Quand la vie est belle, faut savoir rester dans son coin. Coin, coin.", faute de quoi on risque de finir en pâté sur une nationale...
Certaines de ses chansons lui ont largement survécu, mais Léon Raiter lui-même, bien qu'il ait été très célèbre dans les années 1920-1930, est bien oublié aujourd'hui. Je n'ai trouvé trace que d'une seule réédition CD sous son nom, Le chanteur-accordoniste, et d'autres titres sont disponibles en téléchargement. Mais on n'y trouve pas les deux faces de mon disque, qui n'était pas du tout référencé en ligne. Comme quoi, même sans ratisser de long en large la campagne, on peut tomber au hasard sur une vraie rareté.

A écouter :
Léon Raiter : Léon tout court.
Léon Raiter : La chanson du canard (Coin, coin, coin).

18 juin 2015

THE TEARDROP EXPLODES : Tiny children


Acquis au Record and Tape Exchange de Notting Hill Gate à Londres probablement dans les années 2000
Réf : Tear 7 -- Edité par Mercury en Angleterre en 1982
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Tiny children -/- Rachael built a steamboat

The Teardrop Explodes et Julian Cope sont bien représentés dans ma Discographie personnelle de la New Wave, disponible en téléchargement gratuit ou livre imprimé payant, mais on n'y trouve pas ce 45 tours, qui met pourtant en valeur mon titre préféré du deuxième album du groupe.
J'ai dû acheter Kilimanjaro et Wilder coup sur coup et, si j'ai bien plus souvent écouté le second que le premier, c'est surtout à cause de Tiny children.
1981-1982, c'était une époque bizarre. En y repensant, on a l'impression qu'elle était baignée dans une ambiance lugubre et funèbre, dont la bande sonore, de Joy Division à The Cure, était à la limite du suicidaire. Dans le genre, Heaven up here d'Echo and the Bunnymen, n'était pas mal non plus.
Est-ce que, à cette époque plus qu'à d'autres, les jeunes européens étaient tous tristes, engoncés dans des grands manteaux noirs ou des imperméables, plongés dans une crise existentielle ? J'en doute, mais je n'étais pas le dernier à me complaire dans les idées noires, à un moment où j'avais fini par admettre que nous allons tous mourir un jour mais où j'avais encore du mal à admettre que ça n'empêche pas la majorité de la population de continuer à mener sa vie comme si de rien n'était...
Et Tiny children est une bande-son parfaite pour ce genre de rumination. Une chanson lente, dominée par les synthés, avec des paroles adéquates, du style, "La moitié du temps, assis en plein désarroi, je pense à un rêve que je n'ai jamais fait", "Oh, je pourrais faire tout un plat de ce merveilleux désespoir que je ressens" ou encore "Oh, je ne suis pas sûr de ces choses qui comptaient pour moi. Oh non, je n'en suis pas sûr. Plus du tout.". Aujourd'hui encore, quand Julian Cope répète plusieurs fois "Oh no, I'm not sure about those things that I cared about. Oh no, I'm not sure. Not anymore.", je me sens à nouveau merveilleusement désespéré et j'ai presque les larmes aux yeux.
Je ne m'étais jamais fait la remarque, mais quand la batterie arrive vers la fin du morceau, on se rapproche de l'Atmosphere de Joy Division.
Les attentes étaient fortes après le succès de Kilimanjaro, et surtout du single Reward, mais Wilder a été un gros plantage commercial. Tiny children est le troisième 45 tours qui en a été extrait, plus de six mois après la sortie de l'album. On se demande bien pourquoi car je vois mal comment ce "slow" aurait pu avoir un succès façon Everybody's got to learn sometime des Korgis.
Cope avait un sacré talent pour titrer ses faces B à l'époque : Strange house in the snow, Christ Vs Warhol, Window Shopping For a New Crown of Thorns,... Dans le style, Rachael built a steamboat n'est pas si mal. Dommage que la chanson soit très quelconque, avec une basse limite slappée carrément insupportable.


The Teardrop Explodes, Tiny children, en direct dans l'émission The Old Grey Whisle Test, le 1er avril 1982.

17 juin 2015

LES BARIO : Enregistrés en public avec Gilbert Richard


Acquis chez Emmaüs à Tours-sur-Marne le 13 juin 2015
Réf : DS-16004 -- Edité par Del Sol en France en 1964
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Les clowns chez vous -/- Voilà comment je chante -- Zéro pointé

Je suis allé chez Emmaüs à Tours le 6 juin. J'y ai trouvé une poignée de CD intéressants et deux livres, mais j'ai été étonné qu'il n'y ait visiblement aucun vinyl nouveau depuis ma précédente visite deux ou trois mois plus tôt. L'explication est venue dans le courant de la semaine, par la presse : la communauté organisait une vente thématique de disques 33 tours et 45 tours ce samedi 13 juin ! Le plus étonnant est que la vente n'était pas annoncée sur place la semaine précédente.
Donc, tout le stock en attente, bien trié, était en vente samedi dans une salle spéciale. Rien d'exceptionnel à y glaner malheureusement, sauf pour les fans de Sheila, Claude François ou Dalida car il y avait des dizaines de EP de chacun d'eux. J'ai quand même trouvé un album et une poignée de 45 tours, dont celui-ci, pour une pure séquence nostalgie.
Les Bario, pour nombre d'enfants comme moi à la fin des années 1960 et dans les années 1970, c'étaient les clowns. Les seuls dont on connaissait le nom, ceux qu'on voyait à la télé, en noir et blanc à La piste aux étoiles et par la suite en couleurs. Leur nom sur les affiches de cirque devait rameuter du monde (il est possible que je les ai vus en spectacle mais je n'en ai aucun souvenir) et, comme nous étions deux frères et une soeur à la maison, ça ne m'étonnerait pas qu'on ait essayé de temps en temps de monter un numéro à leur façon.
Les Bario à cette époque, c'étaient deux hommes, Nello et Freddy, et une femme, Henny. J'ai toujours trouvé que les deux hommes avaient calqué leur look sur les Pieds Nickelés. Sachant que, en-dehors de la scène, Nello et Freddy étaient fréres et Henny et Freddy mariés, ça nous fait si je compte bien deux frères, un mari, une femme, une belle-soeur et un beau-frère dans le groupe. Pas mal pour un trio !
Celui qui fait office de Monsieur Loyal sur ce disque, c'est Gilbert Richard. Son nom me disait rien, mais dès que j'ai vu sa photo, j'ai reconnu un animateur télé de nos jeudis puis de nos mercredis.
Je n'ai plus huit ans, alors évidemment les sketches présentés ici me font moins rire. C'est du classique, avec une présentation, un numéro musical et un sketch sur l'école. Il me semble que ce dernier était essentiel dans les spectacles des Bario, avec les personnages du bègue, du rigolo et de l'institutrice sévère. Quand j'ai écouté le disque, ça a éveillé des souvenirs, et quand j'ai revu le sketch L'institutrice tiré d'une émission télé de 1976, j'ai compris pourquoi : c'est grosso modo le même que Zéro pointé douze ans plus tôt. Ça explique aussi pourquoi le seul autre 45 tours référencé des Bario que j'ai trouvé s'intitule Les Bario à l'école.


Les Bario, L'institutrice, dans l'émission Système deux le 4 avril 1976.

15 juin 2015

DAVID HOLMES : 69 police


Acquis chez Oxfam à Brighton le 8 juin 2015
Réf : GOBCD 30 -- Edité par Go Beat en Angleterre en 2000
Support : CD 12 cm
Titres : 69 police -- 69 police (Kieran's remix) -- 69 police (Skylab remix)

Allez, comme à la radio, on va enchaîner Roudoudou et David Holmes. Ce n'est pas un hasard, bien sûr, puisque c'est l'écoute de 69 police qui m'a donné envie de ressortir Roudoudou des étagères.
J'ai failli laisser passer ce disque quand je l'ai vu chez Oxfam, mais je me suis souvenu que j'aimais bien cette chanson, que j'ai découverte sur la bande originale du film Ocean's eleven plutôt que sur l'album Bow down to the exit sign sur lequel elle a d'abord paru. En plus, contrairement à l'habitude chez Oxfam, à 50 pence pour un disque en état neuf, le prix était très correct.
Comme Peace and tranquility to Earth, 69 police est un disque de DJ avec une palette sonore variée. La base du morceau, c'est  Ad gloriam, une chanson de Le Orme, un groupe proto-progressif italien. L'autre titre-source est Oh! Calcutta, de la comédie musicale du même titre. Notons que le titre Oh! Calcutta vient de celui d'une peinture de Clovis Trouille, un jeu de mots sur "Oh, quel cul t'as !" qui, si j'ai bien retenu les récentes leçons de Philippe R. est ce qu'on nomme techniquement en anglais un "mondegreen".
Les deux titres-sources sont sortis en 1969 et cela a sûrement un rapport avec le titre du morceau de David Holmes, qui est à la base un instrumental, mais l'un de ses intérêts est que ses quelques paroles sont en français (D'où sûrement la mention "Le cinema mobile on doit salute" sur la pochette). Le "discours" au début n'est pas un sample, c'est une intervention vocale de l'acteur-auteur Sean Gullette. Si j'arrive assez bien à déchiffrer le début ("C'est les sixty-nine police qui vient en ce théâtre. A bientôt. Ça doit les agiter assez bien."), c'est beaucoup plus coton pour la suite. Je saisis quelques mots isolés, mais plus du tout le sens général. Du coup, on a droit à une vidéo parisienne pleine de clichés, dans laquelle David Holmes a l'air quelque peu perdu.
La version originale de 69 police est parfaite pour moi, mélodique, entraînante et dansante. On a droit ici à deux remixes. Celui de Kieran Hedben (Four Tet) m'a fait peur au début car il démarre avec des percussions, mais les bons éléments de la chanson apparaissent ensuite et ça donne à l'ensemble un côté plus LCD Soundsystem. Et pour le coup, il y a un petit sample supplémentaire en français à la fin. Le Skylab remix est moins intéressant, mais au moins ce n'est pas complètement un massacre.

13 juin 2015

ROUDOUDOU : Peace and tranquility to Earth


Offert par La Radio Primitive dans un bar de Reims vers 2004
Réf : 7243 8958142 3 -- Edité par Delabel en France en 1999
Support : CD 12 cm
Titres : Peace and tranquility to Earth (Edit) -- Toutes ces femmes -- Effervescence

J'ai accroché à Peace and tranquility to Earth à première écoute, dès qu'on a reçu le premier album de Roudoudou Tout l'univers : Listener's digest à la Radio Primitive en 1998. Je crois bien que c'est justement lors d'un blind-test organisé par la radio dans un bar quelques années plus tard que j'ai fini par récupérer ce single, comme celui des Fabulous Trobadors.
Depuis longtemps maintenant, ce titre est surtout connu car il a servi à illustrer des pubs et des films, notamment, c'est même écrit sur la pochette ici, un célèbre documentaire sur la coupe du monde de foot de 1998, Les yeux dans les bleus. Mais ça ne m'empêche pas de l'apprécier toujours autant.
Roudoudou, c'est un certain Laurent Etienne, DJ et ancien animateur de Radio Nova au début des années 1980. J'avais complètement oublié sa connexion avec Oui Oui (il a chanté avec le groupe avant la sortie du premier disque), mais elle n'est pas surprenante, rien qu'avec le recensement des références rétro-nostalgiques communes à toute une génération : le nom du groupe (pour moi plutôt la BD Roudoudou que les bonbons-coquillages, que je mangeais et que j'appréciais, mais je ne me souviens pas qu'on les appelait comme ça) et le titre de l'album, avec cette encyclopédie rouge Tout l'univers que nous avions à la maison et le parallèle avec le magazine Sélection du Reader's digest.
Roudoudou est un DJ et Peace and tranquility to Earth fait partie de ces grands morceaux pop qui sont une sorte de collage sonore parfaitement réalisé et efficace. Il y a la voix de Richard Nixon téléphonant aux astronautes sur la lune en 1969, avec l'expression qui donne son titre au morceau. Il y a aussi l'entêtante boucle de guitare qui lui donne tout son sel, et qui viendrait selon certains d'un titre d'I Muvrini, mais plus probablement selon d'autres (dont moi), de l'intro de My dear and kind Sir, la face B d'un single d'un obscur groupe garage, The Harbinger Complex. Mais il y a aussi la basse, les percussions et les sons orientaux, et c'est toute la tambouille admirablement dosée qui fait de ce morceau une réussite. L'ambiance spatiale est là aussi, et en réécoutant ce single je me suis dit qu'il s'enchaînerait parfaitement bien avec le Higher than the sun de Primal Scream.
La vidéo réalisée pour illustrer Peace and tranquility to Earth est légère et rigolote. Elle a dû passer en boucle sur les chaînes musicales et a certainement contribué au succès de ce single.
Une telle mayonnaise musicale n'est pas si facile à monter et à faire tenir et dans mon souvenir le reste de l'album ne m'avait pas particulièrement accroché l'oreille. On en a deux extraits ici. Le très court Toutes ces femmes, avec sûrement la voix de Salvador Dali, passe bien la rampe, mais j'ai plus de mal avec l'assez long et jazzy Effervescence.
Et figurez-vous que j'ai assisté à un concert avec Roudoudou à l'affiche. C'était le 19 octobre 1999 à L'Usine de Reims, dans le cadre du festival Octob'rock. J'y étais pour voir Gorky's zygotic mynci et Stereolab.  Roudoudou s'y produisait, après les deux groupes je crois, en tant que DJ Roudoudou, et c'était juste ça qu'il proposait (il n'a fait vraiment de la scène qu'à partir de 2001) : une prestation de DJ passant des disques, avec du mix et des effets sonores, mais rien de plus. Sachant qu'il était tard et que l'inconfort de L'Usine rendait le lieu parfaitement inadapté à ce genre de prestation, j'ai dû attendre qu'il passe Peace and tranquility to Earth avant de m'éclipser très vite.



06 juin 2015

DOGBOWL : Zone of blue


Offert par 62TV par correspondance en mai 2015
Réf : BC0711LP et BC0711PR -- Edité par 62TV en Belgique en 2015
Support : 33 tours 30 cm + CD 12 cm
11 titres

Voilà un superbe objet. Un 33 tours d'un bleu soutenu, avec deux peintures de Stephen Tunney / Dogbowl, accompagné, et c'est la seule configuration pour moi qui peut valider l'achat d'un vinyl récent de nos jours, de la version miniature de l'album en CD.
Bon, il se trouve, ce qui ne gâte rien, que, à la demande de Philippe Decoster, j'ai signé au dos de la pochette un texte (en anglais) de présentation de Dogbowl.  Je vais essayer de ne pas simplement dupliquer ce texte ici, d'autant qu'il y a aussi, et c'est plus intéressant et beaucoup plus inventif, un texte de Dogbowl lui-même à l'intérieur, qui commence comme ça : "Bienvenue dans la Zone de Bleu ! C'est ce qu'ils m'ont dit, il y a longtemps quand j'étais un astronaute dans l'espace pour la première fois, pilotant mon propre Module Lunaire que j'avais fabriqué à partir d'un camion-benne et d'un réfrigérateur et de plein de trucs trouvés à la décharge. Des guitares électriques, des baignoires, une table de billard, un siège de toilette cassé, un aquarium, trois cents appareils photos cloués ensemble. Pas d'ordinateur - C'était il y a bien longtemps et j'étais un jeune homme."
Contrairement à l'album Flan de 1992, qui était clairement présenté comme "Les chansons du roman de Stephen Tunney", il n'y a pas de rapport particulier a priori entre Zone of blue et le deuxième roman de Stephen, One hundred percent lunar boy, mais je n'ai pu m'empêcher de faire des connexions entre les deux car, dans ce roman qui se passe dans le futur, une quatrième couleur primaire joue un rôle essentiel et l'une des héroïnes a justement les cheveux bleus. La bonne nouvelle, c'est que ce roman a été traduit en français en 2012 sous le titre Quand on s'embrasse sur la lune. J'ai juste été surpris qu'il sorte dans une collection étiquetée "jeunesse". Ce n'était pas le cas pour l'édition originale. Cette "perle d'humour qui déborde de génie créatif" peut tout aussi bien plaire aux adultes.
Les deux précédents albums originaux de Dogbowl, Songs for Narcisse (2005) et Fantastic carburetor man (2001) sont très bien, mais ils avaient été enregistrés quasi-intégralement en solo. Or, que ce soit sur disque ou sur scène, jouer en groupe apporte de la vie et de la pêche aux chansons de Dogbowl et justement, pour ce nouvel album, Dogbowl retrouve ses amis belges du groupe Poney, qui ont tourné avec lui au début du siècle et qui l'accompagnaient déjà sur deux titres du Best of Dogbowl volume II.
Pour ma part, je trouve que Dogbowl compose d'excellentes chansons et qu'il chante très bien. La preuve en est donnée une fois de plus ici avec dix nouvelles chansons toutes très solides. Ca donne un album uniformément d'une grande qualité.
Le ton est donné d'entrée avec Long island railroad, avec un son électrique, plus le saxophone de Marleen Cappellemans (également aux choeurs), qui rappelle les premiers albums en groupe de Dogbowl, avec Race Age, Lee Ming Tah et son frère Christopher Tunney à la clarinette. J'ai d'abord accroché aux premières écoutes à Transister sister et I love you I love you, mais petit à petit, je me suis mis à vraiment apprécier l'ensemble, à commencer par Long white line, Saturnian soap opera, Blue ambulance et Zone of blue.
Le onzième titre est une reprise, Love in vain de Robert Johnson. Je connais la version de son créateur et j'ai déjà dû écouter la version des Stones, sans particulièrement l'apprécier. Là, j'ai vraiment redécouvert la chanson, et elle s'intègre tellement bien au reste du disque qu'en entendant "When the train left the station, it had two lights on behind. The blue light was my baby and the red light was my mind" je suis allé vérifier si Dogbowl n'avait pas modifié les paroles. Pour l'occasion, j'ai l'impression qu'il est seul, avec une rythmique qui me rappelle immanquablement Young Marble Giants.
Pour marquer la sortie de l'album, Dogbowl est venu en Europe en avril, donner quatre concerts en Belgique et en France. Je me suis rendu à celui de Gand, dans le très beau Vooruit Café. L'occasion pour Dogbowl de jouer ses nouvelles chansons pour la première fois sur scène et de montrer qu'elles passent bien la rampe, avec seulement deux anciennes chansons (Hello Helen et Hot day in Waco) sur un peu plus d'une heure de concert.

Zone of blue est en vente chez 62TV.





Dogbowl au Vooruit Café à Gand, le 9 avril 2015. Photo : Pol Dodu.