27 mai 2017

DON'T WORRY BE ANGRRY (VARIOUS ARGHTISTS 2)

https://www.flickr.com/photos/denisgrrr/
Offert par Fabienne M. à Mareuil sur Ay en mai 2017
Réf : GRr 024 -- Édité par !aNGRr! en France en 2017
Support : 4 x 33 tours 25 cm
48 titres

Je ne sais pas comment je me suis retrouvé il y a plusieurs années inscrit sur la liste de diffusion des informations de Madame Macario, mais mes adresses circulent pas mal, ce n'est donc pas trop étonnant.
Et ces lettres de Madame Macario sont mémorables. Ça tient à pas grand chose, la typographie, le vocabulaire, le ton, mais on devine en quelques lignes un personnage, qui se définit comme un arghtiviste culturel, dont on ne doute pas pas qu'il est plein d'enthousiasme et qu'il doit posséder un abattage et une tchatche impressionnants.



Les activités de Madame Macario sont nombreuses et variées. Le chant-hurlement depuis des décennies dans diverses formations (Stanley Kubi, Moustafa Moustache,...), l'organisation de concerts-événements et de tournées, la publication de disques avec le label !aNGRr!, la diffusion culturelle avec son info$hop aNGRRykULTURRa, une disquerie et bouquinerie, la participation aux projets du Cirque Électrique et du festival Sonic Protest,...
Un de ses derniers projets en date c'est ce très beau coffret, qui associe musique et graphisme, sous la forme de quatre 33 tours 25 cm en vinyl de couleur aux pochettes illustrées plein cadre et d'un livre carré de 60 pages.
C'est en fait, vingt ans après, le deuxième volet de la collection Don't worry be angrry. Le premier volume, un 33 tours accompagné d'un livre, avec 19 titres par 6 artistes, est toujours disponible.
Je me suis fait offrir ce volume 2 de Don't worry be angrry, pour soutenir le projet et parce que j'avais repéré plusieurs noms qui m'intéressaient dans la liste des huit artistes au programme musical (un par face de disque).
A commencer par Albert Marcœur, dont j'étais justement en train de me délecter du nouvel album Si oui, oui. Sinon non. Les quatre titres qu'on trouve ici sont je crois précédemment inédits sur disque. Ils ont été enregistrés entre 1972 et 2000 et ont été initialement diffusés comme "bonus" liés à l'achat d'albums en MP3 réédités par Label Frères. Mon préféré est Télé telle quelle, qui s'appelait initialement Télé bonus. Il y a un riff de guitare étonnant ici qui aurait presque pu en faire un tube pop-rock. Comme Déclaration officielle, interprété en public avec le Quatuor Béla, il date de la période de l'album M, A, R et cœur comme cœur. Du coup, je me suis décidé à le commander.
Ensuite viennent Fantazio et Benjamin Colin. Cela fait des années que Le Vieux Thorax me parle de ce musicien Fantazio (contrebassiste) qu'il suit de près. Avec leur projet Monnaie de Singe, ils ont donné 300 concerts improvisés de 1999 à 2014.
L'une des caractéristiques de ce coffret, c'est sa variété. Aussi bien dans les genres musicaux présentés que dans l'origine des titres (rééditions, inédits, anciens, récents,...).
J'ai pris une claque à l'écoute de Tapaz, le premier des quatre titres de Christine Salem inclus ici. La photo de pochette, par Frank Loriou, est assez intemporelle. J'ai cru avoir affaire à une chanteuse soul des années 1970. Pourtant, l'album Larg pa lo kor, dont viennent les quatre titres, date de 2015.
Christine Salem est originaire de La Réunion. Avec son groupe Salem Tradition, elle était présentée comme chanteuse de Maloya, mais en solo elle concocte une mixture personnelle, où j'entends notamment l'écho du rock le plus primitif de Bo Diddley. Il y a ces paroles en créole, d'autant plus fascinantes et mystérieuses pour moi à chaque fois que j'ai l'impression de saisir des bribes de sens ("Réglements de compte les couillons" ?).
On change de disque et complètement de style avec Guess What, un duo orgue-batterie. On a ici cinq extraits de Mondo Giallo, leur deuxième album, qui propose la bande originale instrumentale de quatre films "giallo" italiens imaginaires.
Ensuite, on a carrément la réédition (plus un titre), de And this way red neck do you like it ?, un 45 tours EP de 1989 de Witches Valley, qui figure à juste titre au panthéon garage-fuzz du Vieux Thorax, encore lui.
Les premières notes de l'excellent Gollnish dans les prés… de Gopher Wyborowa m'ont évoqué un croisement entre The Ukrainians et Shrimp Boat. C'est sans doute dû à la formation assez originale, qui associe mandoline, banjo, basse et batterie. J'attendais aussi beaucoup du titre Abba bella ciao, mais l'écoute m'a un peu déçu.
Après Christine Salem, 'autre grande découverte pour moi, c'est Dr. Snuggle et MC Jacqueline.
Leur album est initialement sorti en 2003 sous la forme d'un CD-R partagé avec Rocky Kat. Il a été réédité en 2009 en vinyl, mais c'est épuisé. Il est désormais sur Bandcamp, et on en a huit titres ici. Ils font un excellent hip-hop électronique, avec un gars qui hurle des conneries à se tordre par dessus. Dans le genre, je ne peux que penser à mes potes Les Boum Bomo's (qui sont moins hip hop). Richard. 53 ans est sûrement leur tube, mais La samba, Peine de mort et les autres sont du même tonneau.
La dernière face est pour Unlogistic, un groupe hardcore avec Madame Macario en personne au chant. Il s'agit de tous les titres (sauf un) de leur premier album Capitulation, paru en 2006.

Je vous propose ma sélection personnelle, à raison d'un titre par face :
  • Albert Marcœur - Télé telle quelle
  • Fantazio et Benjamin Colin - Petites voix
  • Christine Salem - Tapaz
  • Guess What -Il serpente
  • Witches Valley - Go with him to heaven two
  • Gopher Wyborowa - Gollnish dans les prés…
  • Dr Snuggle & Mc Jacqueline - Richard. 53 ans.
  • Unlogistic - Propaganda Macario
Des CD m'auraient suffi (mais les pochettes à elles seules peuvent justifier le vinyl), mais ce coffret est une réussite. Offrez-vous le, ou faites-vous le offrir !

Don’t Worry, Be Angrry – Various Arghtists 2 est disponible jusqu’au 30 juillet en vente directe (de la main à la main) sur le stand « commère-cial » de Madame Macario au Cirque Électrique (Place du Maquis du Vercors, 75020 Paris) ou par correspondance chez CD1D.






Plonk & Replonk, De la presquitude des choses.


Kiki Picasso, image tirée de Mosaïque bordélique.

25 mai 2017

ALBERT MARCŒUR ET LE QUATUOR BÉLA : Si oui, oui. Sinon non


Acquis par correspondance chez Label Frères en mars 2017
Réf : [sans] -- Édité par Béla Label & Label Frères en France en 2017
Support : CD 12 cm
9 titres

Cela fait quelques années maintenant que je suis abonné à la Lettre d'Albert Marcœur. La parution est irrégulière (plus d'un an entre la 39e et la plus récente, la 40e), mais c'est toujours un plaisir de la lire. On y trouve des informations sur ses projets, bien sûr, mais aussi des anecdotes, réflexions, coups de gueule...
L'annonce de la parution sur disque d'une collaboration avec un quatuor à cordes avait retenu mon attention, et j'ai encore plus dressé l'oreille quand j'ai écouté un titre chez Culturopoing. Ça m'a décidé à commander le CD illico, et j'en suis bien content car le disque est réjouissant de bout en bout.
Si oui, oui. Sinon non est écrit et composé par Albert Marcoeur, qui chante et joue de la table sonore et des percussions. Le quatuor Béla ne se contente pas de jouer des cordes, puisque trois de ses membres contribuent des voix : des chœurs, mais aussi des effets sonores, comme le son des roulettes de valises ou le bourdonnement des mouches. Chapeau !
A l'origine,il y a un spectacle créé en 2013 au Théâtre des Bouffes du Nord à Paris dans le cadre du festival La voix est libre, avec apparemment une scénographie particulière, avec Marcœur, ses partitions et quelques accessoires assis à une table au centre de la scène, et les musiciens du quatuor en arc de cercle derrière lui. Des représentations ont lieu régulièrement depuis. La prochaine est prévue le 5 août aux Utopies Festivales de Pisy.
La production du disque a pris un peu de temps, puisque les enregistrements datent de 2015. Il s'ouvre sur une introduction instrumentale de plusieurs minutes, avant qu'Albert Marcœur n'aligne expressions toutes faites et lieux communs, ce qu'il désigne comme des Pirouettes pour des prunes.
J'aime toutes les chansons, je ne vais donc pas les lister une à une, mais toujours est-il que, quel que soit le style des compositions, Marcœur a un style qui lui est propre, qu'on peut retracer dès ses premiers enregistrements il y a plus de quarante ans jusqu'à ces chansons sur Les mouches, les produits d'Entretien ("Y'a plus de papier cul"), l'école libre qui est privée... Outre Les valises à roulettes et Les deux petits vieux, le titre qui a le plus attiré mon attention initialement est La fanfare des Laumes, est un peu à part sur le disque, à la fois parce qu'il contient des échantillons musicaux d'autres disques et parce que les paroles sont issus du témoignage d'un ancien tubiste recueilli par Claude Marcœur.

L'album est en vente chez Label Frères, où l'on peut écouter des extraits de tous les titres, et chez Quatuor Béla, où deux titres sont en écoute intégrale.


Albert Marcoeur & le Quatuor Béla, Les valises à roulettes, lors de la création en 2013 de Si oui, oui. Sinon non pour le festival La voix est libre au Théâtre des Bouffes du Nord à Paris.


Albert Marcoeur & le Quatuor Béla, Les mouches, en 2014 au Festival Sonic Protest au Cirque Electrique à Paris.


Albert Marcoeur & le Quatuor Béla, Déclaration officielle, en 2014 au Festival Sonic Protest au Cirque Electrique à Paris. Cette chanson, parue à l'origine en 1998 sur M, A, R et cœur comme cœur, ne figure pas sur l'album.

20 mai 2017

TONY MILTON : À l'Épi-Club


Acquis sur le vide-grenier de Germaine le 30 août 2015
Réf : 90 S 366 -- Édité par Versailles en France en 1962
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Meet me at the Madison Square -- I can't stop loving you -/- Oh yeah, ah ah -- Well I told you

Bon, j'ai plus ou moins entrepris de ranger ensemble certains de mes 45 tours arrangés et dirigés par Mickey Baker. C'est en partie pour ça que j'étais retombé sur le Vic Upshaw.
Je me doutais bien que, au long de son riche parcours, le Popcorn n'était pas la seule "nouvelle danse" à laquelle il s'était attaqué. Rien que pour la période 1962-1965, j'ai trouvé dans l'impressionnante liste des sessions publiée par Surfinbird, des mentions du Twist, de la Bossa Nova (chez Régine) et du Snap.
Mais il y a eu surtout le Madison, que Mickey Baker a largement contribué à populariser avec Le grand M de Billy Bridge.
Je l'ai. Pas mal, surtout l'orgue et la deuxième partie, mais le chant est très variété. Je lui préfère ce disque de Tony Milton sorti quelques semaines plus tard, lui aussi avec "Arrangements et orchestre, Mickey Baker", avec un gros rond "Madison" au recto et la mention de ce mot dans le titre principal.
L'Épi-Club mentionné sur la pochette est le premier club ouvert par Jean Castel, en 1957. J'ai aussi un 33 tours paru à la même époque, Twist à l'Épi-Club.
J'ai écouté ce disque quand je l'ai acheté en 2015, mais sûrement un peu distraitement. Il faut dire qu'il était dans la pile qui contenait le Bobby Lewis et le Chiefs (l'ancien propriétaire est le même) et en plus son écoute n'est guère confortable : si la pochette est en état tout à fait correct, le disque est râpé et, même lavé à l'eau, il craque, fait plein de parasites et compte deux ou trois rayures.
Là, je l'ai réécouté et je trouve toujours la face A assez quelconque. Meet me at the Madison Square est un original co-signé par le chanteur et Mickey Baker. I can't stop loving you est une reprise de Don Gibson. Pour une fois que ce n'est pas Oh, lonesome me qui est repris, c'est sa face B ! Cette chanson de 1957 a été un succès pour Ray Charles en 1962, et ce n'est absolument pas un hasard si on la retrouve ici.
En effet, Tony Milton, de son vrai nom Tony Middleton, est un chanteur américain. Comme beaucoup d'artistes noirs américains qui trouvaient chez nous un bon accueil, il est venu faire carrière à Paris en 1962. Contrairement à Memphis Slim et Mickey Baker, qui sont restés en France toute leur vie, lui est reparti aux États-Unis après quelques années, mais il a enregistré quelques disques chez nous, dont celui-ci. Selon la citation que l'on trouve chez Soul Music HQ à propos de ce disque, Tony a dit "Ouais, ils voulaient un truc à la Ray Charles, alors c'est ce que j'ai essayé de leur donner.".
Le quatrième titre du disque, pas mal du tout, est d'ailleurs une reprise de Well I told you, une chanson créée en 1961 par Richard Barrett and the Chantels, qui est une réplique à Hit the road Jack.
Mais la perle du disque, et cette fois à la deuxième écoute je ne m'y suis pas trompé, c'est Oh yeah, ah ah, un original de Mickey Baker, un rhythm and blues entraînant et dansant, parfaitement chanté par Milton, avec un saxophone bien épais et un très bon rythme.
Chez Surfinbird toujours, on apprend que l'enregistrement s'est fait le 23 mai 1962, et que l'orchestre de Mickey Baker comprenait ce jour-là Ivan Julien, Raymond Katarzynski, Hubert Rostaing, William Boucaya, Georges Arvanitas, Barthélémy Rosso, Léo Petit, Pierre Michelot, Arthur Motta, Armand Molinetti et des chœurs féminins.
Ce titre n'a été édité qu'en France, mais il vaut bien des productions américaines.
En cherchant la chanson en ligne, j'ai découvert qu'on voit Tony Milton l'interpréter dans le film Nous irons à Deauville.
Un gars a eu la bonne idée de mettre l'extrait correspondant sur
YouTube:



Ça me convient parfaitement, mais si ça vous dit, vous pouvez même vous taper le film entier sur YouTube (voir ci-dessous), avec Louis de Funès et Michel Serrault dans leurs œuvres. Moi, j'ai tenu cinq minutes.
J'ai donc encore trouvé une perle inconnue en chinant dans mes propres étagères. J'espère que d'autres s'y cachent encore !
Quant à Tony Middleton, il est assez vite retourné aux États-Unis où, aux dernières nouvelles, il poursuivait sa carrière de chanteur. Dans les années 1960, il a notamment enregistré une version de My little red book avec l'orchestre d'un de son compositeur Burt Bacharach.

La Bibliothèque Nationale de France, établissement public s'il en est, a confié à des sociétés privées le soin de numériser son exemplaire du disque de Tony Milton, ainsi que des milliers d'autres faisant partie non seulement des collections publiques, mais aussi plus largement du domaine public.
En foi de quoi, aux termes des contrats signés, il faut payer 0,99 € par titre pour accéder à ces chansons, ou attendre encore quelques années pour qu'elles soient effectivement disponibles librement.
D'ici là, on doit se contenter de 30 secondes d'écoute, sur le site Bnf Collection par exemple. Ce qui laisse juste assez de temps pour s'interroger sur l'étrange mention "Copyright BNF Collection 2014" qu'on y trouve.



12 mai 2017

THE MICHELS : Blue moon


Acquis sur le vide-grenier d'Avize le 8 mai 2017
Réf : HIT 451 -- Édité par Roy en France en 1961
Support : 45 tours 17 cm
Titres : THE MICHELS : Blue moon -- THE TOP-HITS : Surrender -/- CHIBBU KLEBER : Pony time -- THE TOP-HITS : Apache

Le temps était correct à Avize lundi dernier et j'ai trouvé quelques disques. Rien de génial ni en qualité ni en quantité, mais j'ai quand même été bien content de trouver, pour 50 centimes, ce 45 tours en très bon état.
Il me semble que je connais cette pochette. Je l'ai peut-être déjà vue chez Dorian Feller. Belle réussite en tout cas, complètement d'époque, avec sa pin-up blonde en polo tricoté sur un maillot de bain, plus des nœuds rouges dans les couettes !
J'ai examiné rapidement le disque sur place, et sur le coup j'ai cru avoir affaire à une édition française d'une production d'un label américain spécialisé dans les éditions pas chères d'airs connus, comme Pontiac/Remington par exemple.
J'avais vu en tout cas qu'il y avait des versions d'Apache des Shadows et de Blue moon. Du coup, j'étais persuadé que, pour ce dernier titre, ce serait une version instrumentale, comme celles de Santo & Johnny ou Marcel Bianchi.
C'est à l'écoute du disque, quand j'ai découvert que Blue moon était chanté et que le titre était attribué à The Michels (à ne pas confondre avec le duo contemporain de Rennes), que j'ai compris ce qui se passait.
Il faut imaginer la scène, en 1961, un peu partout dans les provinces françaises. Un gars se pointe chez l'épicier du coin, qui a quelques disques en vente, et lui dit qu'il voudrait le 45 tours d'une chanson qu'il a entendue à la radio. "Bloumoune" ça doit s'appeler, et le groupe, c'est "Ze quelque chose, avec un prénom je crois". Et le gars repart tout content avec son disque de The Michels, alors que la chanson qu'il a entendue à la radio, c'était celle du groupe américain de doo-wop The Marcels !! Mais bon, rien de grave, la version des Michels est très compétente et aussi proche que possible de celle des Marcels, en plus il y a trois autres succès sur le disque et ça coûtait moins cher !
Même type de procédé sur l'autre face pour la version du célèbre Pony time de Monsieur Twist, Chubby Checker. Là, comme on l'a vu dans le passé avec Shocking Blue/The Blocking Shoes, l'identité originale est à la fois contrefaite et contrepète pour créer un monstre digne de Frankenstein, Chibbu Kleber !!!
Je suis de plus en plus fasciné par l'ingéniosité mise en œuvre au fil des années par l'industrie du disque pour parasiter commercialement les plus grands succès, des multiples "versions originales" aux pochettes copiées, en passant par les assonances sur les noms. Du coup, je viens de créer une nouvelle catégorie, parasite, pour les disques de ce genre chroniqués ici.
Je ne sais pas quels musiciens de session se cachent derrière le nom The Top-Hits mais, outre la version d'Apache, ils proposent ici une interprétation chantée de Surrender, un tube d'Elvis Presley, une adaptation par Doc Pomus et Mort Shuman d'une ballade napolitaine de 1902.
J'ai cherché à en savoir plus sur le label Roy, et j'ai vite compris que, malgré sa bannière avec son beau slogan en anglais "The best is my desire", ça devait être un label français, puisque parmi ses quelques parutions dont j'ai trouvé la trace, il y a un Conte érotico-sadique de Mike Sady, ou O bone Jesus par Les Petits Chanteurs de Saint-Louis de France. J'ai aussi noté que certains disques Roy étaient distribués par Disques Président, un label justement spécialisé dans les productions économiques vendues hors du réseau des disquaires spécialisés. J'ai eu confirmation des liens très proches entre les deux labels en découvrant un autre 45 tours compilation, Only the hits, avec une pin-up brune cette fois sur la pochette, mais les deux mêmes versions de de Blue moon et Pony time, plus deux autres reprises créditées à The Top-Hits.
On note que le nom des interprètes n’apparaît que sur l'étiquette du disque. Aucun nom d'artiste sur la pochette : on a pris soin d'effacer ceux des Marcels et de Chubby Checker sur les extraits de classement Cash Box au dos :




Une nouvelle fois, un grand bravo à tous les gens chez Roy qui ont pris tant de peine à imiter au plus près ces tubes pour réussir à vendre quelques centaines ou milliers de disques. Même s'il s'agit en quelque sorte de contrefaçons, je veux bien trouver quelques autres beaux disques de ce genre au cours de cette saison des vide-greniers.

08 mai 2017

SPACE ART : Nous savons tout


Acquis sur le vide-grenier de Vauclerc le 30 avril 2017
Réf : 49 389 -- Édité par If en France en 1978
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Nous savons tout -/- Mélodie moderne

Comme beaucoup de gens je crois, je connais surtout Space Art pour son tube synthétique de 1977, Onyx. On voit aussi beaucoup le deuxième album et son 45 tours Speedway, tous les deux avec en pochette une tête de scaphandre sur fond rose, mais je ne les connais pas du tout.
L'autre jour, sur le vide-grenier très venteux de Vauclerc, je me suis arrêté sur ce 45 tours de Space Art parce que je ne connaissais pas du tout la pochette, avec un pompier dessiné (par Gilles Lacombe) qui rappelle justement le scaphandre des autres disques, ni le titre Nous savons tout, et parce que j'ai été intrigué par la mention "Le premier groupe de vulgarisation scientifique" sous le nom du groupe.
A défaut d'explications sur la pochette, je pensais qu'il y aurait dans la chanson correspondante un lien avec ce slogan, mais non, le chant est tout au Vocoder et les seules paroles compréhensibles sont le titre, ce qui est une façon très lapidaire de présenter l'ensemble des connaissances scientifiques ! Je me disais que ceux qui s'expriment pourraient être des savants fous, mais pas trace d'eux dans les sillons du disque, a priori.
Je ne le savais pas, mais Space Art était un duo, composé de Dominique Perrier aux claviers et de Roger/Bunny Rizzitelli aux percussions. Comme beaucoup de musiciens électroniques français, ils ont eu l'occasion de travailler avec Jean-Michel Jarre. Musicalement, ils en sont proches, ainsi que de Vangelis, voire même Kraftwerk par certains aspects. Bien avant Daft Punk, dont ils font sûrement partie des inspirateurs, ils apparaissaient masqués sur scène, en tenue de vulcanologue.
Bunny Rizzitelli est mort en 2010, mais Dominique Perrier est toujours actif. Son Dominique Perrier Project a notamment sorti en 2012 un Space art tribute.
Le groupe a publié trois albums entre 1977 et 1981, mais ce 45 tours, qui n'a pas dû trop se vendre, est sorti entre le deuxième et le troisième album mais ne figure sur aucun d'entre eux. Ça explique peut-être pourquoi je le connaissais si peu.
Dans le style, Nous savons tout est un titre qui fonctionne bien, avec séquenceurs, boîtes à rythmes, synthé et Vocoder. Je ne sais pas ce qu'elle a de précisément moderne, mais je n'ai pas été surpris de découvrir que la face B Mélodie Moderne est un instrumental électronique.
L'intérêt pour ce style de musique est fort ces derniers temps. Le maxi original Nous savons tout a été réédité aux Etats-Unis par Dark Entries. A la fin de l'an dernier, c'est Because Music qui a sorti en France un EP de remixes de Space Art. On y trouve trois versions de Nous savons tout, et la première d'entre elles reste très proche de l'originale.





07 mai 2017

TELEVISION PERSONALITIES : I was a mod before you was a mod


Acquis neuf je ne sais plus où vers septembre 1995
Réf : OVER 41 CD -- Édité par Overground en Angleterre en 1995
Support : CD 12 cm
11 titres

Pour mon livre Television Personalities : Journal d'un fan de chambre, toujours disponible en téléchargement gratuit ou en version imprimée, j'ai réécouté et commenté tous les albums studio du groupe, et c'est I was a mod before you was a mod qui m'a le plus agréablement surpris, alors que j'ai été un peu déçu par le sombre Closer to God et l'album de la reformation My dark places. Au bout du compte, je dirais que c'est l'un de mes albums les plus réussis et l'un de mes préférés du groupe, avec les deux premiers et My painted word.
J'ai acheté ce disque dès sa sortie. Je l'ai apprécié, mais assez superficiellement car je ne l'ai pas écouté tant que ça. Je ne l'ai passé qu'une paire de fois dans mon émission Vivonzeureux!  (En attendant la mort...), même si je n'ai pas oublié de le faire figurer en fin d'année dans mes choix de 95.
Cet album est de fait un disque solo de Dan Treacy. Après la fin en 1993 de la période en trio du groupe, la plus stable puisqu'elle durait depuis 1993, diverses formations du groupe ont tourné, mais pour les disques, enregistrés au Toe Rag Studio de Liam Watson, avant que ça devienne le point de passage obligé de tous les amateurs de son authentique, dont les White Stripes, c'était surtout Dan seul, avec l'assistance de Liam pour la batterie et les percussions.
Ces enregistrements ont produit plusieurs singles sur Vinyl Japan et Little Teddy, des titres originaux et des reprises, mais la plupart sont aussi plombants que leurs titres (I don't want to live this life, Do you think if you were beautiful you'd be happy ?, Time goes slowly when you're drowning). Et la grande réussite d'I was a mod before you was  a mod c'est que, mếme si les paroles pour la plupart ne sont pas spécialement gaies, même si elles font souvent fonction d'auto-psychanalyse, les chansons sont suffisamment fortes pour les habiller de manière réjouissante, même dans les cas les plus sombres, comme As John Belushi said ("Spent my days in bed, medication fed my head, but now I know that I'll get all the sleep I need when I am dead, as John Belushi said"; une version instrumentale au piano solo de cette chanson est parue cette même année 1995, sous le titre Who will be your prince ?, en face B du single Do you think if you were beautiful you'd be happy ?.), A stranger to myself ("I'm a danger to myself and I won't deny it's true, and in the stillness of the night I feel so troubled through and through, and I know I have to change but it's easier said than done and after all nobody said that life had to be fun") et Everything she touches turns to gold.
Dan joue de la guitare, du piano, de l'orgue, du glockenspiel, et très souvent il fait plusieurs voix sur les chansons et chante plutôt mieux que d'habitude. Sur certains morceaux rapides, comme l'excellente chanson-titre (sortie l'année suivante en single, dans une version remixée décevante), I can see my whole world crashing down ou A long time gone, cela donne une sorte de garage minimaliste du plus bel effet.
Little Woody Allen n'aurait pas déparé sur le premier album And don't the kids just love it et, dans la série des références à des noms connus, on a un troisième exemple ici avec Evan doesn't ring me anymore, en souvenir du soir où le mur de Berlin est tombé. Deux chansons légères, tout comme Things have changed since I was a girl.
Plus je l'écoute, et plus j'apprécie ce disque dans son ensemble, de la première à la dernière note, y compris la deuxième moitié du disque avec I can see my whole world crashing down et Something just flew over my head. On trouve encore le CD original à un prix très correct. Après la plaisanterie des rééditions des premiers albums pour le Record Store Day (vinyls marbrés à 30 £, ben voyons), je crois que Fire Records a en projet un programme de réédition plus complet. Ce sera peut-être l'occasion de donner un coup de projecteur sur ce disque méconnu.

L'album entier est en écoute sur YouTube.

01 mai 2017

VIC UPSHAW : Dance the Popcorn


Acquis sur un vide-grenier probablement à Châlons-en-Champagne vers 2010
Réf : SG 146 -- Édité par Disc'AZ en France en 1970
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Popcorn crazy -/- Popcorn lesson

J'ai acheté ce disque avant tout parce qu'il est écrit et interprété par Mickey Baker. Je ne l'ai pas chroniqué ici sur le moment car j'avais été un peu déçu par ma première écoute.
Mais je suis tombé dessus récemment en rangeant mes disques et je lui ai donné une deuxième chance (j'adore chiner dans ma propre collection, il y a plein de bons disques et c'est pas cher !). Sans que ce soit génial, c'est quand même pas mal du tout, alors voilà.
Cet exemplaire a un intérêt particulier pour moi : l'étiquette dorée du vendeur apposée au recto de la pochette. Étape, ainsi c'est ça le nom de la boutique du Centre commercial Hôtel de Ville (CHV) située entre le Prisunic et le Grand Bazar de la Marne, qui vendait de l'électro-ménager et des disques ! Celle-même où j'avais vu My Sharona en vitrine. Jamais je n'aurais retrouvé ce nom tout seul.
Ce qui est sûr c'est que ce 45 tours de Vic Upshaw a dû rester quelques années dans les stocks d’Étape. En effet, il est sorti sûrement début 1970, alors que la rénovation du centre-ville de Châlons, vilipendée en 1977 par Jean-Marie Boëglin et Cabu dans le livre Ouvrez le massacre, n'a dû aboutir à l'ouverture du CHV que vers 1973. Actuellement, après plusieurs restructurations, c'est devenu la Galerie de l'Hôtel de Ville.
Quant au disque lui-même, comme des centaines d'autres, dont le Oye oye reggae, il a pour but de surfer sur une danse en vogue. Dans ce cas précis, le Popcorn, lancé par James Brown en 1969 avec le 45 tours instrumental The Popcorn, qui ouvre l'album entièrement instrumental du même titre. James Brown a lui-même exploité le filon avec carrément trois autres 45 tours sortis la même année, le tube chanté Mother Popcorn (You got to have a mother for me), Lowdown Popcorn et Let a man come in and do the Popcorn.
Ce 45 tours est visiblement entièrement calqué sur Mother Popcorn. En plus de parasiter James Brown, pour ajouter un argument commercial on a inscrit sur la pochette la mention "Direct from the U.S.A.", ce qui est exagéré et trompeur car, certes, la danse a été lancée aux Etats-Unis et, certes, Mickey Baker et Vic Upshaw sont tous les deux originaires de ce pays, mais cet enregistrement est évidemment une production cent pour cent parisienne.
VIc Upshaw a sorti quelques disques au cours de sa carrière, et il a été aussi comédien, mais il était avant tout danseur et maître de ballet. C'était l'un des chorégraphes favoris de la télévision française, et c'est lui qui, en 1976, a chorégraphié la "nouvelle danse" reggae au François patrice-Saint Hilaire. On en apprend un peu sur son parcours en écoutant l'Inter Actualités de 13h du 13 mai 1970 (voir ci-dessous), dont il était l'invité.
C'est un contrat au Lido qui l'a incité à quitter Hollywood pour Paris, où il s'est installé. Il venait d'obtenir le Prix du meilleur chorégraphe à La nuit du cinéma et de diriger le ballet d'une production de l'opéra-bouffe La Périchole, mais cette année-là il a aussi mis en scène le strip-tease du Crazy Horse Saloon.
C'est à cette occasion qu'avec Alain Bernadin, le patron du Crazy Horse, ils ont eu l'idée de ce disque, après avoir découvert le Popcorn lors d'un séjour à  Las Vegas.
La leçon de danse illustrée de rigueur au verso de la pochette nous est donc sûrement fournie par deux danseuses du Crazy Horse en plus de Vic, et ça explique "l'aimable autorisation" du cabaret, dont le numéro de téléphone, ça mérite d'être noté, était "BAL 69-69" !
Pas de surprise à l'écoute du disque. Popcorn crazy est une approximation tout à fait compétente de Mother Popcorn. On n'en attendait pas moins de Mickey Baker. Sur le modèle des 45 tours de James Brown, Popcorn lesson est une sorte de deuxième partie de la face A, avec juste un peu de voix au début. Je trouve que ce titre fonctionne mieux.
Vic Upshaw est resté à Paris jusqu'à sa mort dans cette ville en 1990, à juste 50 ans.


Journal radio Inter Actualités de 13h du 13 mai 1970. Entretien de Sophie Dumoulin et Bernard Valette avec Vic Upshaw à partir de 41'30. Il est question de Popcorn crazy à partir de 47'30.