05 février 2022

TINDERSTICKS : Travelling light


Acquis par correspondance via Discogs en janvier 2022
Réf : WAY 4555 / 854 349-2 -- Édité par This Way Up en Europe en 1995
Support : CD 12 cm
Titres : Travelling light -- Plus de liaisons -- Waiting 'round you -- I've been loving you too long

J'ai longtemps été très présomptueux. Comme je ne buvais pas d'alcool et ne prenais pas de drogues, je pensais que j'étais préservé de certains effets indésirables de ces substances. Pas pour moi le trou noir en me réveillant le matin en me demandant où je suis, comment je suis arrivé là et ce que j'ai bien pu faire la veille (Effectivement, ça ne m'est jamais arrivé). Et puis, comme j'étais pleinement conscient lors de mes périodes d'éveil, notamment lors des soirées et des concerts, je croyais que je ne risquais pas de les oublier. Et là, ça fait bien longtemps que je me suis rendu compte que je me trompais complètement. Il y a plein d'événements qui sont complètement effacés de ma mémoire, et particulièrement, ce que je n'aurais jamais cru possible, des concerts entiers, où j'ai choisi de me rendre, où j'ai passé une soirée entière et dont je n'ai plus aucun souvenir. Pour citer l'oncle de La java des bombes atomiques de Boris Vian, "A mesur' que je deviens vieux je m'en aperçois mieux j'ai le cerveau qui flanche. Soyons sérieux disons le mot c'est même plus un cerveau 'est comm' de la sauce blanche" !

Ça, je le sais depuis longtemps, donc, mais j'ai quand même eu un coup au cœur en juin 2020 quand j'ai recherché une information dans mon agenda de 1996 et que je suis tombé sur ce que j'ai noté de ma présence à l'édition 1996 du Printemps de Bourges :
  • Jeudi 18 avril :
    Soul Coughing
  • Vendredi 19 avril :
    M. Untel, Silvain Vanot, Electric Buttocks, Elliott Murphy, Laurel Aitken
  • Samedi 20 avril :
    De Parels En De Funkie Reddingsbrigade, Lou Reed, Baby Bird, Tindersticks
Je me suis rendu au Printemps de Bourges plusieurs années de suite dans les années 1990, principalement pour deux raisons : pour accompagner les artistes que nous avions sélectionnés en Champagne-Ardenne avec l'antenne régionale des Découverts du Réseau Printemps et pour retrouver en tant que représentant de Radio Primitive nos collègues de toute la France pour une réunion de la Férarock.
Ces séjours étaient très actifs, donc, puisque bien sûr en plus de ces activités j'avais un passe pour les concerts et j'essayais de voir ceux qui m'intéressaient le plus.

Si je reprends la liste ci-dessus et que je fais le point, c'est quand même pas brillant :
  • Pour Soul Coughing, je me souviens plutôt bien de leur précédent concert, aux Transmusicales de Rennes le 3 décembre 1994, mais je dois bien avouer que je n'ai quasiment aucun souvenir de celui de Bourges, sauf peut-être la vague impression qu'il m'avait moins plu que le premier.
  • Pareil pour Elliott Murphy. Je me souviens l'avoir vu au Cirque à Reims et en plein air aux Musiques d'Ici et d'Ailleurs à Châlons, mais je n'ai aucun souvenir de Bourges.
  • Pour Silvain Vanot, j'ai juste le sentiment diffus de sûrement m'y être un peu ennuyé.
  • Pour les Découvertes, je me souviens bien sûr un peu de la prestation scénique du champenois M. Untel, mais surtout de sa caravane qu'il avait installée sur le site du festival et de l'oie qu'il trimballait avec lui. Je ne peux pas dire que je me souviens du concert d'Electric Buttocks le même jour.
    J'ai obligatoirement vu beaucoup d'autres concerts Découvertes sur les trois jours, mais je n'en ai noté qu'un, celui des hollandais De Parels En De Funkie Reddingsbrigade. C'est parce que leur prestation avait dû particulièrement me marquer. Mais pas de façon indélébile car aujourd'hui quand je vois ce nom c'est en fait aux Belges de PPz30 que je pense ! Ça devait être très bien, pourtant...
  • Laurel Aitken, j'avais oublié que je l'avais vu, mais en voyant son nom il m'est revenu qu'il s'était produit dans le chapiteau Magic Mirrors, là-même où j'avais vu l'année précédente d'autres papys du ska, les Skatalites.
  • Bon, des trous dans la mémoire, j'en ai plein et je commence à y être habitué et à vivre avec (d'autant mieux que je ne peux rien y faire...). Mais le nom qui me pose vraiment problème dans la liste c'est de lui de Lou Reed. Lou Reed !
    Certes, j'avais soigneusement évité la reformation du Velvet Underground en 1993 (par principe, les reformations ne m'intéressent pas) et je suis bien content d'avoir interviewé Moe Tucker à Reims en 1992 (une interview inutilisable pour cause de piles usées !), mais Lou Reed m'intéressait et m'intéresse beaucoup, et je ne suis pas surpris que, étant sur place et n'ayant pas à payer mon billet, je me sois arrangé pour assister à tout ou partie de son concert au Pavillon.
    Le problème, c'est que je n'en ai aucun souvenir. Et pire, alors qu'avec mon optimisme béat j'ai tendance à penser que ma mémoire peut être ravivée par une photo, une affiche ou un enregistrement, eh bien même la prestation filmée de Lou Reed interprétant Sweet Jane ce jour-là ne provoque aucune étincelle dans ma cervelle...! C'est désespérant.
  • En fait, le seul souvenir un peu précis des concerts de Bourges 1996 en-dehors de M. Untel c'est celui de Baby Bird et Tindersticks à La Hune, qui devait être la salle à l'étage de la Maison de la Culture de Bourges. Et encore, vous allez le voir, c'est très fugace. Je ne sais même plus si c'était l'après-midi, ou en toute fin de soirée. Plutôt en fin de soirée, en fait, et peut-être bien que j'ai quitté le concert de Lou Reed pour aller m'enfoncer dans les moelleux fauteuils de La Hune.
    Je ne me rappelle pas vraiment de Baby Bird, si ce n'est que le concert avait dû me décevoir à peu près autant que ses disques, que j'avais achetés sur la foi de critiques dithyrambiques.
    Quant à Tindersticks, c'était bien. Doux, lent,... Je me souviens très bien avoir été pris d'une douce torpeur et, après trois jours de festival intensif, m'être laissé tomber dans un demi-sommeil où j'étais bercé par leur musique et la voix de Stuart Staples.

Bref, pour résumer en une phrase mon Printemps de Bourges 1996 : j'ai complètement oublié le concert de Lou Reed où j'étais éveillé, mais je me souviens m'être endormi à celui de Tindersticks !

Mais intéressons-nous au disque du jour, extrait du deuxième album de Tindersticks, dont ils devaient faire la promotion lors de cette tournée en 1996. Pour autant, je ne pense pas qu'ils aient joué Travelling light à Bourges, car c'est un duo avec Carla Thogerson des Walkabouts et je ne pense pas qu'elle était présente ce jour-là, ni une autre chanteuse.
Tindersticks a enregistré pas mal de duos, à commencer par A marriage made in heaven en 1993, en hommage marqué à Nancy Sinatra et Lee Hazlewood, mais Travelling light est mon préféré. Je ne suis pas un grand fan de pop orchestrale, mais quand il y a des cordes chez Tindersticks, comme ici, c'est toujours parfaitement dosé et jamais sirupeux et le résultat est superbe et prenant de bout en bout. Je ne sais pas comment le lien s'est fait avec Carla Torgerson, mais quand on écoute The light will stay on, le single des Walkabouts extrait de l'album Devil's road paru lui aussi en 1995, on comprend très vite que les groupes suivaient des chemins très proches l'un de l'autre à cette époque.

Pour les faces B, Waiting 'round you, est un instrumental où les claviers jouent un rôle important. Il annonce peut-être leur travail sur des musiques de film.
Quant à I've been loving you too long, cette reprise d'Otis Redding est parfaite pour la voix bien grave de Stuart Staples. On dirait bien qu'ils la jouent plus lentement que l'originale. Avec cette voix et ce rythme, je ne peux m'empêcher de penser au Lambchop de cette époque, celle de leur premier album.

Le single anglais, en 45 tours et en CD, ne contient que ces trois titres. Pour l'édition européenne que j'ai achetée, le label a intercalé en supplément Plus de liaisons, la version en français de No more affairs, un autre titre au rythme très lent, paru initialement sur un 45 tours une face en bonus de la version vinyl du deuxième album.
Je ne vais pas me plaindre de cet ajout, au contraire, car c'est une des chansons des Tindersticks que je préfère, ne serait-ce parce que j'apprécie toujours quand les non francophones se lance dans ce genre d'aventure. Comme pour d'autres, comme par exemple Julian Cope avec  Traison (C'est juste une histoire) de Teardrop Explodes, on se demande ce qui au départ leur a donné l'envie de tenter l'adaptation en français. En tout cas, je ne pense pas qu'à l'époque Stuart Staples imaginait que, quelques années plus tard, il viendrait s'installer en famille dans la Creuse (ni qu'il se ferait une moustache à la Lee Hazlewood...).

Sinon, Tindersticks a joué au moins une autre fois au Printemps de Bourges, en 2014, mais cette fois c'était dans la cathédrale Saint Etienne. Pour marquer les trente ans du groupe, ils sortent prochainement une compilation, Past imperfect, sur laquelle on trouvera Travelling light, et prévoient une tournée européenne en mars-avril.


La vidéo de Travelling light, tournée volontairement en Super 8 pourri, sans aucun membre du groupe. Les personnages principaux sont joués par Matt, qui travaillait sur les tournées du groupe, et Ilona, alors employée à la boutique Rough Trade. Ce sont eux aussi sur la pochette du disque.


Les Tindersticks retrouvent Carla Torgerson pour interpréter Travelling light pendant leur tournée de 2003.

2 commentaires:

Charlie Dontsurf a dit…

Les concerts totalement oubliés, il y en a. Pour moi, le plus gros, c'est CURE à Caen en 1981. J'y étais, c'est sûr, c'est tout. La dernière fois que j'ai vu TINDERSTICK en concert, c'était tellement lent que c'était chiant. Pourtant, je me souviens d'un excellent concert des mêmes au Festival de Beauregard. Il y a aussi les concerts dont on se souvient parce ... qu'on n'y est pas allé ! Pour moi, les BEACH BOYS, version complète, à Londres en 2012. 3 heures de show ! Mauvaise décision. Et ceux où on a pas pu aller. Comme PERE UBU ce week-end à Canterbury. (Pas sûr de pouvoir revoir le groupe en concert). Pas pire toutefois qu'un pote qui devait en être, s'est retrouvé bloqué sur la route par le convoi des "libertés" et n'a pas pu embarquer sur le ferry. La rage, quoi.

Pol Dodu a dit…

Ah Charlie... Si j'avais vu Cure en 1981, je crois que je m'en souviendrais...!
En tout cas, en plus ce cette belle collection d'oublis et de ratés, heureusement qu'il y a plein de bonnes expériences de concert dont on garde au moins des bribes de souvenir !!!