17 juillet 2022

GAMOVER : Le prince reggae


Offert par Le Vieux Thorax à Reims le 4 juin 2022
Réf : [sans] -- Édité par Le Vieux Thorax en France en 2022
Support : CD 12 cm
23 titres

Fedakar Yildirim est né en Turquie en 1969. Arrivé très jeune à Reims avec ses parents, il y est mort soudainement en décembre dernier.
Dès les années 1980, il a été impliqué dans de nombreux projets musicaux, dont les groupes Tchernobyl Rats, Aldo Magic Band, Dynamo et Les Morveux.
A partir de 1996, sous le nom de Gamover, il a concocté de nombreux titres en utilisant des échantillons sonores, notamment à base de reggae/ska. Fedakar s'est intéressé au reggae parce qu'il était fan des Clash. J'ai bien pensé à lui quand leur collaboration inédite sur Rock The casbah avec Ranking Roger de The Beat a été diffusée ce printemps. 
Il a publié cinq albums, en suivant l'évolution technologique des formats, de la cassette au MP3 en passant par le CD-R. Fedakar m'a confié trois de ses titres pour les compilations Vivonzeureux!, deux pour Excusez-moi, je me suis occupé un peu de tout et un pour Surprise partie hoptimiste.

Parmi ses copains dès l'école primaire, il y avait Le Vieux Thorax et son frère Clément. A l'initiative du Vieux Thorax, ses amis se sont réunis pour une grande fête d'hommage le 4 juin chez Les Vieux de la Vieille à Reims. A cette occasion, une anthologie CD des enregistrements de Fedakar a été distribuée aux participants. Cette édition CD était très limitée et à diffusion privée, mais la version numérique est disponible pour tous sur la page Bandcamp du Vieux Thorax.



Le titre d'ouverture, Gilong gilong, est bien représentatif des bidouillages sonores de Gamover, construits sur ordinateur à partir de diverses sources, instrumentales et vocales. Et dans ce cas précis, il me semble bien que c'est justement la voix de Joe Strummer qu'on entend prononcer "Ah gilong gilong".

L'évolution musicale de Fedak depuis ses premiers groupes jusqu'à ses productions avec Gamover est parfaitement illustrée par la juxtaposition de deux des titres du CD : Rossignolet des bois en 1989 avec Aldo Magic Band, version d'une chanson traditionnelle du folklore, interprétée notamment par Pierre de Grenoble. Là, c'est énergique, avec le son de flûte caractéristique du groupe et déjà une bonne grosse ligne de basse par Fedakar. Tandis que pour Rossignolet dub wah (titre très bien vu !), il a fabriqué un morceau ska/dub en y ajoutant l'enregistrement peut-être collecté de la chanson par un homme.
Il avait aussi retravaillé un titre d'un autre de ses anciens groupes, Dynamo, pour en faire Right man dub.

Les influences de la culture musicale turque de Fedakar s'entendent dans un bon nombre de ses productions, particulièrement ici sur Diloy, l'excellent Work in progress, et aussi Wailing voices, un titre sur lequel Dorian Feller est invité à la guitare et qui utilise la ligne de basse du Smoking my ganja de Capital Letters.

Les interventions vocales sur les disques de Gamover ne sont pas toutes des échantillons collectés de-ci  de-là. Au contraire, certaines de ses plus grandes réussites sont chantées par des amis invités. On retrouve dans cette sélection l'excellent Je reste club, en collaboration avec M. Untel, et trois des chansons écrites avec L'Incohérent des Combinaisons aux paroles et au chant, O vergeture (Hey hey hey), L'alerte au gros rouge, où l'on entend des bouts de l'Omega man de Basement 5, et Le prince reggae, que nous avons choisi pour donner son titre à l'album. Sur ce dernier titre on entend notamment à la quinzième seconde quelques notes de guitare. A chaque écoute du CD, je les "reconnaissais" sans pouvoir les placer. Il m'a fallu six bonnes semaines, même après avoir affiné les choses en me disant que c'était de la new wave, pour précisément identifier le Wide boys du premier album d'Ultravox!...!

L'album officiel se conclut de manière mélancoliquement tout à fait appropriée avec Bonsoir. Sur le CD, il y a en plus un morceau, fantôme à double titre, d'abord parce qu'il n'est pas indiqué sur la pochette, et surtout parce que c'est un inédit pour lequel Le Vieux Thorax n'a retrouvé aucune indication de date ou de titre. Pour le coup, c'est un morceau frénétique et enjoué, visiblement basé sur un vieux ska.

Les auto-productions de Gamover ont été diffusées de manière très confidentielle du vivant de Fedakar. Ma réaction en écoutant la compilation a été de me re-dire à nouveau combien tout ça est d'excellente qualité. Si Le prince reggae peut faire découvrir sa musique à un nouveau public, son but sera largement atteint.






2 commentaires:

Anonyme a dit…

beaucoup de bonnes et très bonnes choses dans la musique, la pochette est réussie, c'est un bel hommage, mais aussi pour un sacré parcours technique: partir des K7 pour arriver à l'ordi c'est pas rien.

Pol Dodu a dit…

Le vieux Thorax vient de rééditer en ligne Un bonheur insoutenable, le premier album cassette de Gamover, paru en 1996.