16 octobre 2022

GANG OF FOUR : What we all want


Acquis d'occasion à Londres en juin 1982
Réf : 12EMI 5146 -- Édité par EMI en Angleterre en 1981
Support : 45 tours 30 cm
Titres : What we all want -/- History's bunk !

Quand j'ai ressorti au printemps dernier ma vieille cassette d'une émission Feedback de Bernard Lenoir enregistrée à la radio en 1981, j'ai (re)découvert le Gamma Goochee mais j'ai aussi beaucoup apprécié le titre qui ouvrait l'émission, What we all want de Gang of Four enregistré en concert à Paris au Palais des Arts, "le lundi précédent", soit probablement au printemps 1981.
La cassette a beau avoir plus de quarante ans, l'enregistrement a beau avoir été fait sur un radio-cassette pourri, probablement en mono et à partir de la diffusion en grandes ondes (je pense que France Inter n'était pas encore diffusée en FM à cette époque), je me suis dit en réécoutant ce titre que c'était quand même vachement bien. Et ça m'a donné envie de ressortir mon disque.

Lors de mon tout premier séjour à Londres en septembre 1981, je m'étais offert en neuf le single qui venait de sortir, To hell with poverty (et j'avais même investi dans un t-shirt !). Pour le second séjour en juin 1982, alors que je possédais déjà l'album Solid gold, j'avais quand même investi 2 £ dans ce maxi d'occasion car la face B ne figurait pas sur l'album. Je ne l'ai pas trouvé chez un disquaire mais dans une caisse posée sur un trottoir du quartier de Kensington, devant une boutique qui vendait du bric à brac.
Pendant toutes ces années j'ai cru qu'il me manquait la pochette du maxi, mais même pas : un tour chez Discogs m'a appris que seul le petit 45 tours avait eu droit à une pochette illustrée.

A l'époque, Solid gold m'avait un peu déçu par rapport à Entertainment!, mais c'est très relatif : c'est un excellent album, d'une grande homogénéité, et What we all want paraissait un choix évident pour en extraire un single, même si je ne suis pas vraiment surpris qu'il n'ait eu aucun succès.
Ce qui me frappe aujourd'hui à la réécoute, c'est la puissance de ce morceau. Pas de solos, rien de spectaculaire, mais un son rock énorme, qui s'impose dès l'introduction, avec les trois instruments qui entrent en scène tour à tour, la guitare, la batterie et la basse. Ce qui surprend dans la suite, c'est que la guitare sonne par moments un peu comme un violon. Il n'y a pas l'accroche tueuse qui en ferait un classique de la trempe de Damaged goods, mais c'est une excellente chanson et l'une de mes préférées du groupe.
Et comme souvent avec les paroles des bonnes chansons, elles sonnent bien, parfois comme un slogan, mais même en les ayant eues écrites noir sur blanc devant soi, il est difficile de les interpréter de façon univoque, même si on sent bien qu'elles ont quelque chose d'existentiel. J'en ai retenu deux phrases, "You can't help being hard up" ("Tu ne peux pas t'empêcher d'être fauché") et, dans une façon de réécrire une expression populaire notamment utilisée par les Stones, le vers final, "What we want's not what we get".
Une version live de What we all want, enregistrée le 30 mars 1981 à l'Hammersmith Palais de Londres, est sortie officiellement en 1982 sur l'EP américain Another day / Another dollar. Elle me parait moins furieuse, avec une basse déjà presque "slap", et je préfère l'enregistrement crade du concert de Paris.
En 2005, notamment pour faire la nique à leur ancien label EMI, et après une tournée avec les quatre membres originaux de Gang of Four, trois d'entre eux ont ré-enregistré une bonne sélection des titres de leur première période pour l'album Return the gift. La démarche n'a pas grand intérêt, même si les nouvelles versions, y compris celle de What we all want, sont d'excellente facture.

La face B, History's bunk!, est précédemment inédite. Je pensais qu'elle datait des sessions de Solid gold, mais il n'y a pas de crédit pour le co-producteur de l'album Jimmy Douglass.
Je me suis longtemps demandé ce que signifiait le titre. En faisant quelques recherches pour cette chronique, j'ai appris qu'il s'agit d'une référence à une expression utilisée à maintes reprises par Henry Ford, "L'histoire c'est plus ou moins du bidon", qu'il utilisait pour opposer l'intérêt de l'innovation technologique à celui pour l'histoire/le passé/la tradition. Ça n'a pas empêché Ford de financer quelques temps plus tard la création de Greenfield village, un musée à ciel ouvert, en expliquant qu'il en avait surtout au fait que l'histoire écrite s'intéressait principalement aux politiciens et aux héros de guerres. C'est précisément à ça que les paroles de la chanson de Gang of Four font référence.

Peu de temps après la sortie de ce disque, le bassiste Dave Allen a quitté le groupe, entre autres pour former Shriekback. Le groupe s'est séparé une première fois en 1984, après la sortie du quatrième album, Hard. Par la suite, le parcours du groupe a été des plus chaotiques, au fil notamment (mais pas seulement) des retrouvailles et des engueulades entre le guitariste Andy Gill et le chanteur Jon King.
A partir de 2012, Gill a continué à jouer et enregistrer sous le nom de Gang of Four, contre l'avis de King. Celui-ci tient maintenant sa revanche puisque, après la mort d'Andy Gill en février 2020, une version de Gang of Four tourne actuellement, avec Jon King et le batteur original Hugo Burnham, plus la seconde bassiste Sara Lee et la guitariste Dave Pajo.
C'est quand même pathétique ! A la rigueur, on pourra s'intéresser plutôt au coffret 77-81, qui contient des démos et un concert inédits en plus de l'intégrale de la période.
En tout cas, le groupe et Solid gold restent d'actualité, même après plus de quarante ans : au verso de l'album, sous la gravure qui dépeint une décapitation, on trouve comme légende "J'espère qu'ils maîtriseront le prix de l'essence" !


Gang of Four en concert à la Music Biennale à Zagreb le 17 mai 1981. Excellente prestation, avec What we all want qui débute à 9'07.


Gang of Four, What we all want, en concert à Gateshead le 31 juillet 1982, en première partie de The Police.


Gang of Four, What we all want, en direct dans l'émission de télévision allemande Rockpalast le 10 mars 1983.


Une publicité pour l'album et le single parue dans Sounds le 21 mars 1981.


La pochette du petit 45 tours What we all want.

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