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30 août 2009

THE IMPERIAL POMPADOURS : Ersatz


Acquis chez Cash Converters à Cormontreuil en mai 1997
Réf : POMP 001 -- Edité par Pompadour en Angleterre en 1982
Support : 33 tours 30 cm
14 titres

Ce n'est pas si souvent que ça arrive. Au printemps 1997, le Cash Converters de Cormontreuil a mis en vente un gros lot de plusieurs centaines de 33 tours. Vu la quantité, et étant donné que les disques, parfois en plusieurs exemplaires, n'avaient visiblement jamais été écoutés, bien qu'une bonne partie d'entre eux avait plus de quinze ans d'âge, je pense que ce lot venait du stock d'un professionnel, plutôt un grossiste qu'un disquaire d'ailleurs.
A 6 ou 8 F. le disque (et encore moins si on en prenait beaucoup), j'en ai acheté un bon paquet en quelques visites avant que le filon ne se tarisse, choisissant à l'aveuglette par exemple des disques en import de groupes dont je n'avais jamais entendu parler, comme un maxi australien de Whirlywirld sorti chez Missing Link en 1980.
De ce lot, j'ai ramené à la maison au moins deux pépites. L'album Spitballs chez Beserkley d'abord, qui contient quand même un titre (Chapel of love, co-écrit par Ellie Greenwich, qui vient de mourir cette semaine) chanté par Jonathan Richman, dont je n'avais même pas soupçonné l'existence jusque là.
L'autre pépite, c'est cet unique album des Imperial Pompadours, un groupe dont je n'en avais jamais entendu parler non plus. Je n'ai pourtant absolument pas hésité à acheter ce disque, même si je regrette aujourd'hui de ne pas avoir aussi pris l'autre exemplaire qui se trouvait là pour le refiler à un copain. Alors, quels critères pour le choisir ? Une illustration de pochette saisissante, d'abord (d'après une photo d'Elvis, mais je ne l'aurai pas trouvé tout seul), et surtout un graphisme au dos qui m'a rappelé celui du label F-Beat, et une liste des titres improbables, comprenant The crusher, que je connaissais par la version des Cramps, mais aussi See you soon baboon, I want to come back from the world of LSD, Fu Manchu, Moo goo gai pan,...
Internet balbutiait encore à l'époque, avec un modem à 33,3 ko/s, mais j'ai assez vite appris après l'achat de ce disque, grâce à un site consacré au groupe Inner City Unit, que Imperial Pompadours était un projet inité par Barney Bubbles, l'omniprésent graphiste anonyme dont j'avais entendu parler pour la première fois après son suicide en 1983, qui a réalisé des dizaines de pochettes de disques (singles et albums), pour Hawkwind ou pour Stiff, Radar et F-Beat Records entre autres (j'ai déjà eu plusieurs fois l'occasion d'évoquer Barney Bubbles ici).
Bubbles a fait des pochettes de disque toute sa vie, mais un seul disque en tant en tant que musicien, celui-ci. Et quel disque !
Ersatz vaut surtout pour sa face A, une collection de reprises de titres rocka-psycho-psyché-billy tous plus barrés les uns que les autres. Barrés à l'origine, et encore plus déjantés dans la version qu'en donnent les Imperial Pompadours. Il faut dire que la légende veut qu'Andrew Lauder (fondateur avec Jake Riviera de Radar et F-Beat) ait donné à Barney Bubbles une cassette avec les versions originales de ces titres. Bubbles a recopié les paroles, rassemblé en studio quelques potes autour de Nik Turner (d'Hawkwind), avec notamment les musiciens de son groupe Inner City Unit. Les musiciens ont eu le droit d'écouter une fois chaque morceau avant de se lancer dans l'enregistrement. Ensuite, les titres ont été pas mal tripatouillés, voire maltraités, comme Fu Manchu, dont la bande originale aurait été coupée en morceaux et mélangée avant d'être recollée (anecdote pêchée dans Reasons to be cheerful, l'excellent livre consacré à Barney Bubbles par Paul Gorman, livre prolongé par un blog passionnant).
En plus d'être complètement délirants, certains des treize titres de cette face A me plaisent beaucoup, comme I took a trip on a Gemini spaceshift, la chanson de country spatiale crée par Legendary Stardust Cowboy ou, pour rester dans les trips, I want to come back from the world of LSD des Fe-Fi Four Plus 2, dont le titre indique bien que la chanson date de 1967, avec une batterie déchaînée, des cris inquiétants et un saxophone (très présent sur le disque, joué par Nik Turner) entêtant.
Cette reprise de The crusher des Novas est sortie un an après celle des Cramps. La version de Brand new Cadillac de Vince Taylor a été enregistrée un peu plus de deux ans après celle de Clash. Comme on connait bien les chansons, on est un peu moins surpris, mais Cadillac, en 1'23, arrache plus que les Clash et The Crusher surprend car l'enegistrement semble avoir été extrêmement ralenti, du coup on dirait que c'est King Kong qui est au chant. A moins que ce soit Tarzan, qu'on retrouve en ouverture de See you soon, baboon (une chanson créée en 1956 par Dale hawkins), les cordes vocales écrasées, avec un solo de saxo rauque ponctué de rots. Jungle et saxophone sonjt aussi présents sur There was a fungus among us, une chanson de Hugh Barrett and The Victors qui date de 1961.
Pour la face B, pour laquelle Barney Bubbles a plus délégué à Nik Turner et Robert Calvert, le poète qui a écrit certaines des paroles d'Hawkwind, on a droit à un seul titre de 24 minutes, Insolence across the nation, un grand oeuvre sur le thème de la Teutonie éternelle, apparemment, de Louis II de Bavière à Hitler en passant par Wagner. Avec un fond sonore plus ou moins atmosphérique et diverses voix lisant les paroles, inutile de vous préciser que, même pour préparer ce billet, je n'ai pas réussi à écouter intégralement ce titre une deuxième fois, la première remontant au jour de l'achat du disque.

Aux dernières nouvelles, on pouvait télécharger Ersatz chez Mutant Sounds.

28 août 2009

TELEX : Twist à Saint Tropez


Acquis au Record & tape Exchange de Pembridge Rd à Londres probablement dans la seconde moitié des années 1980
Réf : SIR 4006 -- Edité par Sire en Angleterre en 1978
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Twist à Saint Tropez -/- Le fond de l'air

Pendant longtemps, j'ai laissé passer les disques de Telex sans m'en saisir. Il faut dire que les pochettes - volontairement, c'est pas possible autrement - horribles des éditions franco-belges de leurs premiers 45 tours, comme Moskow diskow, Euro-vision ou We are all getting old, me répulsaient.
Plus tard dans les eighties, j'ai effectivement acheté certains de leurs disques, comme le pressage italien du premier album ou l'une des éditions du troisième produit par Sparks (celle sous le titre Sex ou celle qui s'appelait Birds and bees ?), mais je les destinais à un fan absolu du groupe, Raoul Ketchup.
Ce n'est que par la suite que je me suis mis à glaner pour mon compte les 45 tours de ces héros de la techno-pop dont l'une des grandes qualités est de ne s'être jamais pris au sérieux (ce qui se comprend d'autant mieux que, parait-il, le groupe a été conçu au départ comme un canular; vu son destin, on pourrait parler de canulart...), et l'un des premiers que j'ai achetés, c'est celui-ci, parce qu'il était en bon état, parce que c'était une reprise et parce que la pochette était bien mieux que les pochettes françaises. Il se trouve qu'il s'agit de leur tout premier disque, paru en Angleterre fin 1978.
Kraftwerk ne s'étant jamais prêté à ce jeu, les Silicon Teens étant arrivés un peu plus tard, j'ai bien l'impression que Telex a été l'un des premiers groupes électroniques new wave à s'illustrer dans la reprise de standards du rock (mais pas seulement, sur le premier album ils se sont aussi attaqués à Ça plane pour moi; rappelons que Dan Lacksman de Telex et Plastic Bertrand ont collaboré en cette même année 1978 sur l'excellent Tout petit la planète).
Je vous laisse juge en regardant la vidéo d'époque ci-dessous (c'est encore mieux en voyant le groupe danser), mais je trouve leur reprise très réussie.

La face B, dont le titre complet est Le fond de l'air est rouge, vaut surtout pour ses paroles, qui consistent en la répétition d'une dépêche d'information à propos d'un fait divers concernant l'explosion d'une cuve contenant 1000 litres de sang et de l'acide chlorhydrique dans une banlieue résidentielle près de Lund en Suède. Ces détails sont tellement précis que, contrairement à ce que je pensais initialement, je me dis que la chanson a dû être inspirée par un fait réel.

25 août 2009

COCKTAIL PARTY HERTA



Acquis sur le vide-grenier de la rue de l'Hôpital à Epernay le 23 août 2009
Réf : MLGD 22 -- Edité par Pathé Marconi EMI en France en 1984 -- Disque offert par Herta
Support : 33 tours 30 cm
10 titres

Petit vide-grenier d'été par un temps agréable, plutôt sympa, même si j'ai vu devant moi au premier stand un gars sortir d'un carton le 45 tours La chanson de Slogan de Gainsbourg et Birkin, en parfait état, un disque qu'on ne croise pas tous les jours.
Moi, c'est dans une caisse d'une vingtaine d'albums années 80 en bon état mais sans aucun intérêt que je suis tombé sur ce disque.
Dès que j'ai aperçu le dessin de la pochette, je me suis dit, "Tiens, une pochette de Serge Clerc que je ne connaissais pas". Je me trompais, mais de peu car dans la seconde j'ai aperçu la signature d'Yves Chaland, autre grand nom de la ligne claire française des années 80.
Je n'avais effectivement jamais vu ce disque. Et pour cause, c'est un objet publicitaire qui a été diffusé en 1984 aux détaillants du traiteur industriel Herta.
Il y a donc en pochette une superbe illustration très colorée d'une cocktail party très raffinée et très fifties, mais quand on l'ouvre, on passe aux choses sérieuses avec une toute autre ambiance graphique pour la promotion de trois nouveaux produits dont Herta souhaitait faire des hits : la pâte à tarte en deux variétés et en nouveau conditionnement de 500 g, les croque-monsieur "frais" dans un emballage rigide avec une présentation particulièrement attrayante et les nouvelles saucisses-cocktail Knackinettes, version réduite des célèbres knackis dont le succès assure d'emblée des consommatrices déjà conquises.

Même en bon état à 1 €, même avec une pochette rare d'un artiste recherché comme Yves Chaland, je ne suis pas du tout certain que j'aurais fait l'acquisition de cet objet s'il n'y avait eu à l'intérieur de la pochette un disque qui n'est pas complètement sans intérêt.
Il s'agit d'une compilation pour animer une soirée dansante, bien sûr, sélectionnée parmi l'immense catalogue Pathé Marconi EMI, probablement par quelqu'un de goût de l'agence de publicité Harmony qui a mené cette campagne. Il y a dans le tas de bons titres que je n'avais pas déjà en disque.
La face A, réservée à ces anglophones, est un sans-faute, avec I'm walking de Fats Domino, une reprise de Long tall Sally par Eddie Cochran, les trois premières minutes du John Lee Hooker de Johnny Rivers, celles où il chante surtout le refrain de Satisfaction des Stones, le Just a gigolo/I ain't got nobody de Louis Prima et pour finir, Rocky road blues par Gene Vincent, une reprise de Bill Monroe enregistrée en 1958 qui surprend surtout parce qu'elle fait la part belle au piano plutôt qu'à la guitare, peut-être en référence à la version de ce titre qu'Amos Milburn a enregistrée. La version donnée sur scène fin 1963, où Gene Vincent est accompagné par les Sunlights, est beaucoup plus électrique !
Sur la face B, principalement consacrée à des francophones, ça a tendance à se gâter. Ça commence pourtant tout à fait honnêtement avec Let's twist again par Richard Anthony, un titre qu'on a effectivement toujours envie de danser, avec Richard qui chante en anglais, mais plutôt bien. Dick Rivers chante lui en français, mais pas génialement. C'est dommage car, du point de vue instrumental, Les Chats Sauvages s'en sortent plutôt bien sur Est-ce que tu le sais, reprise du What I'd say de Ray Charles. Ensuite, c'est la catastrophe. Claude François chante horriblement et en anglais Don't play that song again, reprise de son propre La solitude c'est après. Ce qui est sûr, c'est qu'on obéira à l'injonction du titre, et ce qui est évident c'est que le compilateur ne s'est pas remis de cette erreur. Du coup, il perd les pédales et nous sort un grand classique, mais anglophone, un medley des Andrews Sisters, avant de conclure avec un titre imparable "pour les jeunes", le Betsy party de Starshooter. C'est amusant : ça fait deux fois que je chronique cette chanson et c'est à chaque fois sur un disque publicitaire...
Le mois dernier, un exemplaire de cet album a été vendu 82 € aux enchères. C'est peut-être le prix à payer de nos jours pour la reproduction d'un dessin assez rare d'Yves Chaland, mais ça fait un peu cher pour une compilation inégale et c'est carrément énorme pour des saucisses et des croque-monsieur depuis longtemps éventés !

23 août 2009

COLIN NEWMAN : A-Z


Acquis par correspondance chez DVD Legacy aux Etats-Unis en octobre 2007
Réf : BBL 20 CD -- Edité par Beggars Banquet en Angleterre en 1988
Support : CD 12 cm
17 titres

C'est assez rare pour être souligné : c'est bel et bien la lecture d'une critique de ce disque (par Jasonaparkes sur Head Heritage, le site de Julian Cope) qui m'a décidé à acheter ce disque.
En 1982, j'avais ramené de Londres pour Philippe R. et/ou François B. le troisième album de Colin Newman Not to et le single qui en avait été extrait, We means we start. Quelque temps plus tard, j'ai dû avoir la possibilité d'écouter le deuxième album, l'instrumental Provisionally entitled The singing fish, mais contrairement à ce que je pensais je n'avais probablement jamais eu l'occasion d'écouter ce premier album solo du chanteur de Wire, A-Z.
Qu'est-ce qui m'a intéressé dans la chronique de Jasonaparkes ? Et bien l'explication que plusieurs des chansons de cet album avaient en fait été écrites pour Wire l'année précédente, pour le troisième album 154 ou en vue du quatrième album qui n'a pas vu le jour, le groupe s'étant alors séparé une première fois. Au moins un titre de ce disque, Inventory, a été joué par Wire sur scène en 79-80.
Quand un groupe se sépare, le chanteur a un énorme avantage sur les autres membres du groupe : il conserve sa voix et sa technique vocale et il emporte ainsi avec lui une bonne part de l'identité du défunt groupe. Je sais bien que les instrumentistes conservent aussi leur technique et leur son, mais la voix c'est pas pareil, c'est vivant et il suffit que le chanteur ouvre la bouche pour rappeler le souvenir de ses performances passées. Il faut aussi préciser qu'en plus du chanteur, on trouve ici le batteur de Wire, Robert Gotobed et son producteur, Mike Thorne, qui produit et joue sur le disque.
Malgré la présence de Thorne, on peut être un peu déçu car le son n'est pas le même que sur les albums de Wire : il est plus sourd, moins clair, et surtout plus synthétique. Tant et si bien que le premier titre, I've waited ages, annonce plus The ideal copy ,l'album du retour de Wire en 1986, qu'il ne rappelle Chairs missing !
A mes oreilles, les titres semblent avoir été répartis de façon très stricte : les numéros impairs sont pour des morceaux au tempo moyen, assez longs et atmosphériques. A l'inverse, les titres pairs sont généralement plus courts, rapides voire même punkys, et plus "pop". Il va s'en dire, que ce sont les titres du deuxième groupe que je préfère, comme & jury (avec des plans de répétition d'un riff à la On returning), Life on deck (qui me rappelle un peu A touching display) ou S-S-S-Star eyes, même si j'aime aussi bien les titres du premier groupe, notamment I've waited ages, avec ses petites voix trafiquées, ou Troisieme.
Le disque est malgré tout un peu déséquilibré car certains des titres les plus réussis sont concentrés à la fin de l'album : les deux singles extraits de l'album, Inventory et le quasi-instrumental B (qui contient des cris bestiaux, à défaut de chant...) et mon titre impair préféré, But no.
Cette édition CD contient cinq titres bonus, trois faces B de single et deux démos de l'album inédites, Not me et Don't bring reminders. Ces deux derniers titres sont tellement bons que j'avais du mal à comprendre qu'ils aient été écartés de l'album, et surtout laissés inédits jusqu'en 1988. En fait, il n'en est rien. Newman a fait figurer une version de Don't bring reminders sur Not to en 1982 et Not me a été enregistré par This Mortal Coil sur le premier album en 1984 (Ils ont aussi repris Alone, un titre de cet album, sur leur deuxième album en 1986, mais Alone est surtout connue on l'entend, dans la version Newman, dans Le silence des agneaux).
Alors, n'hésitez pas à acheter ce disque mais, comme l'écrit Françoise Massacre, n'oubliez jamais qu'il faut se méfier des critiques.

22 août 2009

SAINT ETIENNE : Only love can break your heart


Offert par Luke Hayes/Jeff Barrett à Londres début mai 1990
Réf : HVN2 12 -- Edité par Heavenly en Angleterre en 1990
Support : 45 tours 30 cm
Titres : Only love can break your heart -/- Only love can break your heart (version)

C'est bien Luke Hayes de Chromatone Design (et Revolving Paint Dream) qui m'a offert ce disque, mais comme pendant ce séjour à Londres Luke m'avait emmené saluer Jeff Barrett (à l'époque attaché de presse de Creation Records et autres labels indépendants et fondateur de Heavenly) dans le grand placard qui lui servait de bureau au 83 Clerkenwell Road, un immeuble de folie à l'époque qui abritait toute la fine fleur du rock indépendant anglais, de Creation à Dave Harper qui bossait pour Factory), on l'avait récupéré directement dans le bureau de Jeff.
Luke venait chercher ces test pressings du premier disque de Saint Etienne pour voir ce que ça donnait. Outre que la pochette illustrée (une grosse pièce de puzzle, que je n'ai découverte que plus tard, à la sortie du disque) n'est pas à mon goût l'une de ses réussites, ce disque lui a donné du fil à retordre. Il n'était pas satisfait de l'impression couleur or sur fond violet (c'est effectivement à peu près illisible). Je crois qu'au bout du compte le disque est malgré tout sorti comme ça, mais il a très vite fallu le modifier car un problème plus grave s'est présenté : le code-barres qui était au dos de la pochette n'était pas suffisamment lisible non plus pour les appareils lecteurs des disquaires. Catastrophe, car ces code-barres servaient notamment à comptabiliser les ventes pour l'établissement des charts dans les magasins qui faisaient partie du panel. Là pour le coup il a été décidé de reprendre le design, et au bout du compte l'encre dorée a été remplacée par de l'argentée sur les tirages suivants, comme on peut le constater sur le site très détaillé consacré à la discographie de Saint Etienne.
Je pense que j'avais dû écouter pour la première fois Only love can break your heart l'année précédente, sur la compilation The bridge en hommage à Neil Young, mais la version de Psychic TV ne m'avait pas du tout accroché, contrairement à Winterlong par les Pixies sur le même disque. Bien plus tard, j'ai écouté et beaucoup apprécié l'original de Neil Young, mais la version de Saint Etienne, avec Moira Lambert de Faith Over Reason au chant, m'avait entre-temps fait aimé cette chanson.
En plus de la bonne chanson et de la bonne chanteuse, les ingrédients sont simples pour cette réussite, un piano, qui rappelle celui de la version originale mais qui est là sûrement piqué sur un disque d'italo-house, une rythmique dance indolente et pas trop appuyée, une grosse basse façon reggae dub et des claviers intelligents. De la dance douce à programmer dans les raves et les soirées après les passages techno-house ultra-rapides et avant l'ambient des chill-outs, même si les clients pour Saint Etienne ont probablement plutôt été des fans d'indé que de techno.
La version de la face B s'entend façon reggae, principalement instrumentale avec des petits bouts de vocaux conservés par-ci par-là, mais le son n'est pas trop trafiqué et il n'y a pas d'écho, on n'est donc pas vraiment dans le dub. Les claviers prennent un son de mélodica par moments, qui ne peut dans ce contexte qu'évoquer Augustus Pablo.
Dance, indie, basse reggae, début des années 1990, tout ça évoque aussi obligatoirement Andrew Weatherall, très proche des gens de Creation/Heavenly depuis le succès du Loaded de Primal Scream. Contrairement à mon souvenir, il n'est pas du tout crédité sur cette version originale du maxi, par contre c'est bien lui qui s'est chargé de la face A du maxi remix sorti au même moment. Au passage, et vu le nom du groupe, il n'a pas raté l'occasion de faire une référence à l'une de ses passions, le foot, en intitulant sa version A mix of two halves (Un mix de deux mi-temps), mais je préfère la version originale à la sienne.

16 août 2009

MARC TAYNOR ET SES COW-BOYS : Endlessly


Acquis sur le vide-grenier de Chaltrait le 15 août 2009
Réf : SO 5072 -- Edité par Odéon en France vers 1960
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Endlessly -/- Aux Hawai

Bien plus que d'autres évoqués ici, ce disque encapsule une bouffée de nostalgie pour toute une génération de français qui a connu l'ORTF des années soixante, quand il y avait deux chaînes en noir et blanc sans télécommande, quand les émissions commençaient à midi et étaient précédées de l'horloge à spirale (des amis de la famille en avaient une reproduction dans leur cuisine : cela donnait du sel à nos visites chez eux) et que des pannes techniques nécessitaient souvent l'intervention d'une speakerine et la diffusion d'un interlude.
L'un de ces interludes vedette de la télé était le petit train rébus de Maurice Brunot. Celui-là, mes grands-parents en avaient une reproduction en jouet en bois (fabriqué en exclusivité pour tous pays par Educo, selon le verso de la pochette du disque). Vu le nombre d'enfants qui passaient dans la maison, il avait évidemment très vite perdu des wagons. Apparemment, à l'époque où j'ai eu l'occasion de voir ce petit train à la télé, plutôt vers la fin de la décennie, ce n'était plus le petit train rébus mais le petit train de la mémoire, qui proposait un dessin à reconstituer.
La musique aussi a évolué au fil des années, celle-ci étant la première, utilisée lors de la création de ce programme en 1960. C'est peut-être pourquoi je m'étais dit, lorsque j'ai trouvé ce morceau sur un CD de génériques télé il y a environ dix ans, que je ne l'aurais pas reconnu d'emblée s'il n'avait pas été précisé sur la pochette que c'était la musique du petit train.

Cette musique, Endlessly, est donc signée par Marc Taynor et son orchestre. Sur la page qui lui est consacré par le site Amour du rock'n'roll, on constate qu'initialement le nom complet de l'orchestre était plus drôle : Marc Taynor et ses cow-boys motorisés ! (en jeep plutôt qu'à cheval d'après la pochette). Sur ce disque, ils faisaient d'ailleurs avec Laisse Paul tranquille un hommage à Les Paul, qui est mort cette semaine à 94 ans.
On apprend aussi sur cette page qu'Endlessly n'a pas été enregistré spécifiquement pour le petit train : ce titre, avec Aux Hawai et deux autres, figure sur un EP (réf. Odéon SOE 3517), sorti probablement en 1959, année du succès de ce titre aux Etats-Unis. Car Endlessly est une version instrumentale d'une chanson à succès. Quand on cherche des informations sur cete chanson, on ne trouve initialement, si on se fie aux crédits imprimés sur le disque, que des sites français. En effet, le nom "Otiset" me paraissait peu anglophone. Vérification faite, après correction de l'erreur du label ou de l'imprimeur qui ont supprimé l'espace entre le premier nom et le "et" qui figurait avant "Benton", les auteurs de cette chanson sont bien Clyde Otis et Brook Benton, ce dernier étant également l'interprète original d'Endlessly.
Marc Taynor (Marc Poincignon de son vrai nom), faisait principalement dans la musique western, ce qui ne l'a pas empêché d'enregistrer de la variété et des "pots-pourris paillards"... Il était saxophoniste (ténor, j'imagine, sinon c'est pas drôle) et chef d'orchestre.
Indépendamment des souvenirs télé, ce qu'il y a de très bien avec ce disque, c'est que la musique est excellente ! J'aime ça beaucoup mieux que la version originale de Brook Benton. Je ne sais pas s'ils se sont inspirés d'un arrangement pour une autre reprise instrumentale préalable, mais le rythme de ce boléro est ici très ralenti, ponctué par le saxophone. Cependant, la vraie vedette ici, c'est la guitare, peut-être tenue par Christian Juin, dans le plus pur style twangy guitar de Duane Eddy.
Avec un titre comme Aux Hawai, on pouvait espérer que la face B nous propose de la musique des îles. A part quelques effets de slide, ce n'est pas le cas, mais ce cha cha cha tout en légèreté est malgré tout des plus agréables.



En plus du train jouet et de ce disque, le petit train de la télé a fait l'objet au fil du temps de nombreux produits dérivés, dont au moins une BD et plusieurs autres disques. Celui décliné sur la Normandie ne m'intéresse pas du tout, mais j'aimerais bien tomber un de ces jours sur Le petit train de la télé en Champagne !

13 août 2009

SONOKO : La débutante


Acquis probablement à Reims en 1987
Réf : CRAM 056 -- Edité par Crammed en Belgique vers 1987
Support : 33 tours 30 cm
19 titres

C'est avec la compilation It's a Crammed, Crammed World! 2 que j'ai découvert Sonoko. Il y avait dessus Wedding with God, qui reste mon titre préféré d'elle, un OVNI musical de toute beauté (dédié à Nijinsky) : chant velouté comme du yaourt (c'est du japonais, principalement !), choeurs séraphiques (dignes des angelots de la pochette de l'album), instrumentation discrète. A la fin de la chanson, on se sent aussi proche d'être marié avec Dieu qu'un curé dans sa 2cv sur une route de campagne un dimanche matin entre deux messes.
Musicalement, je ne vois qu'un point de comparaison, le Subway de Thick Pigeon, paru sur un autre label belge, Crépuscule. Ce n'est d'ailleurs sûrement pas un hasard : initialement, en 1984, Sonoko n'avait envoyé ses démos qu'à trois labels qu'elle aimait beaucoup, Crépuscule, Cherry Red et Crammed. Après des sessions avortées pour Cherry Red avec Morgan Fisher au Japon, c'est finalement à Bruxelles pour le label aux oreilles curieuses Crammed que Sonoko enregistrera en 1986 pendant six mois son premier -et unique à ce jour - album, avec Colin Newman et le duo Vincent Kenis/Marc Hollander d'Aksak Maboul/Crammed à la production.
Je trouve la pochette du disque très réussie. Sur cette photo, avec la peau très blanche, Sonoko ressemble à une poupée de porcelaine qui dit non, et elle est entourée de colifichets (photo, cassettes, éventail, dentelle,...) qui évoquent le bric-à-brac d'influences et de cultures que constitue le disque. Ici, les musiques occidentales et notamment françaises qui ont marqué Sonoko nous reviennent déformées par l'écho et le choc culturel d'un voyage aller-retour jusqu'au Japon. Juste avant elle, Kazuko Hohki avait un peu fait de même, avec son album de reprises de Brigitte Bardot notamment. Depuis, il y a eu bien sûr les Pascals.
Une grosse moitié de l'album est composée par Sonoko, l'autre consiste en reprises qui, de Nino Rota à Gabriel Fauré, en passant par Brigitte Bardot et Suicide, tissent ce réseau de références/influences qui donne sa couleur aux disques.
Wedding with God a beau s'y trouver, ainsi que Souvenir de la mer, un titre électropop light arrangé par Alig de Family Fodder et une version du In heaven de la BO d'Eraserhead, j'ai tendance à préférer la deuxième face (ou plutôt, pour respecter la dénomination employée par Sonoko la face Garden) à la première (face Heaven) car elle comporte une séquence imparable de sept titres : Cheri cheri (reprise légère du Cheree de Suicide), Une histoire de plage (reprise de Brigitte Bardot), La poupée qui fait non (la deuxième reprise "exotique" de ce classique de Polnareff que j'ai connue, après celle de Cristina sur Ze), Marienbad (l'autre sommet du disque, un original en hommage à Alain Robbe-Grillet), I love how you love me (reprise des Paris Sisters), Les gauloises bleues et BB (plus une berceuse qu'un hommage à BB).
Pour Les gauloises bleues, je m'étais attendu à entendre une reprise de 14 ans les gauloises d'Eric Charden. Mais non. Il est bien précisé sur la pochette qu'il s'agit d'une chanson traditionnelle entendue dans le film Les gauloises bleues de Michel Cournot. Ce n'était pas le cas en 1987, mais aujourd'hui, même si la chanson est pour le coup effectivement interprétée en yaourt, il ne me faut pas plus de quelques secondes pour identifier ici Wayfaring stranger, que je connais désormais dans des versions de Johnny Cash, Howe Gelb ou M. Ward.
Après la sortie de son disque, Sonoko a vécu plusieurs années à Paris avant de retourner au Japon. En 2002, elle annonçait travailler sur du matériel pour un nouvel album.
La débutante a été inclus dans la campagne de réédition Crammed global soundclash en 2003 et est donc disponible en CD. Il y a aussi plusieurs titres en MP3 sur le site de Sonoko.
Je ne sais pas si elles le connaissent, mais sinon ce disque serait une bonne idée de cadeau à faire à Sierra et Bianca de Cocorosie, ce genre d'album devrait leur plaire...

11 août 2009

TAMMY WYNETTE : Stand by your man


Acquis d'occasion dans la Marne vers 2006
Réf : EPC 7137 -- Edité par Epic en France en 1975
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Stand by your man -/- Your good girl's gonna go bad

Ouh la la. Pendant très très longtemps, je n'aurais pas approché Tammy Wynette avec des pincettes, même après que The KLF soit allé la débaucher au fin fond des States pour la version single de Justified and ancient. Pourquoi tant de haine, ou plutôt de dédain mal placé ? Parce que Tammy Wynette représentait pour moi tout à fait l'establishment country qu'il était de bon ton de mépriser (avec plein de bonnes raisons, d'accord mais pas sans nuances), et surtout parce que Tammy Wynette c'était avant tout pour nous en Europe Stand by your man. Et les paroles de Stand by your man ça donne à peu près ça :
  • Parfois c'est dur d'être une femme
    De donner tout son amour à un seul homme
    Tu passeras de mauvais moments
    Lui il prendra du bon temps
    A faire des choses que tu ne comprends pas
    Mais si tu l'aimes, tu lui pardonneras
    Même si tu ne le comprends pas
    Et si tu l'aimes
    Oh sois fier de lui
    Car après tout ce n'est qu'un homme
    Soutiens ton homme
    Donne-lui deux bras pour s'accrocher
    Et quelque chose de chaud où se réfugier
    Quand les nuits sont froides et solitaires
    Soutiens ton homme
    Et dis au monde que tu l'aimes
    Continue à lui donner tout l'amour possible
    Soutiens ton homme


Chanter ça en 1968, à 26 ans, avec un mariage, trois enfants et un divorce au compteur, c'était à coup sûr ne pas s'affirmer comme une protestataire en puissance. On comprend que les mouvements féministes aient pris ce tube (n°1 des charts country, n°19 des charts pop) en grippe à l'époque.
En l'écoutant attentivement, la chanson elle-même n'est pas si mauvaise. C'est de la country très traditionnelle, certes, avec une pedal steel un peu plaintive qui accompagne certains couplets, mais il n'y a rien de sirupeux et l'attaque des refrains, avec tous les instruments ensemble (guitare électrique, basse et steel notamment) n'est pas violente, je n'irais pas jusque là, mais étonnamment agressive, surtout pour une chanson que le propriétaire original de mon exemplaire, sûrement un DJ professionnel, avait classée comme slow.
Bizarrement, pour une raison ou pour une autre, cette chanson n'est sortie en single en Angleterre qu'en 1975, mais ça a été un gros tube, et c'est à ce moment-là que le 45 tours est sorti dans toute l'Europe, avec souvent la mention "N°1 en Angleterre", comme pour ce pressage français.
Même si Stand by your man est justement considérée comme un classique, je ne crois pas que ça ait fait un gros tube en France. Reste que ce 45 tours est assez courant et j'ai dû le laisser passer des dizaines de fois avant de me décider à l'acheter. Et si au bout du compte j'ai sauté le pas, outre que le disque était en bon état et pas cher, c'est avant tout parce que la face B de cette édition européenne propose Your good girl's gonna go bad, la chanson titre du premier album de Tammy en 1967, un titre qui m'intéressait car il est repris en version instrumentale sur l'album Jonathan goes country. C'est ce titre que le DJ a soigneusement rayé pour ne pas se tromper de face, sur la pochette et sur la rondelle.
Musicalement, le ton n'est pas le même que sur la face A. Là, on est dans une ambiance honky-tonk, avec de la country presque rock'n'roll, un peu dans l'esprit de ce que faisait Buck Owens. Par contre, pour les paroles, on n'est pas si loin que ça de Stand by your man, puisque la chanson met encore en scène une femme bien sous tous rapports (qui n'a même jamais vu l'intérieur d'un bar), qui menace son mari de mal tourner, si c'est vraiment ça qui l'attire chez les femmes. Elle envisage même de se maquiller comme un camion volé et d'apprendre à aimer le goût du whiskey !
Avec un autre point de vue, le même genre de situation sera repris par George Jones (mari de Tammy Wynette de 1969 à 1975) en 1968 avec Your angel steps out of heaven : là, c'est un gars qui prévient le mari que son ange d'épouse qui a fait de leur foyer un paradis fréquente une autre sorte de paradis quand il est au boulot, là où il y a de la musique et où elle peut se faire payer à boire.
C'est cette chanson que JC Brouchard vient de reprendre en face A de son 45 tours virtuel, sur Vivonzeureux! Records, avec un léger glissement de sens , puisque, de Your good girl's gonna go bad (Ta gentille femme va mal tourner) on est passé à Your good guy's gonna go bald (Ton beau mec va devenir chauve) !

09 août 2009

PABLO MOSES : A song


Acquis à Châlons-sur-Marne vers 1981
Réf : 6313 047 -- Edité par Island en France en 1980
Support : 33 tours 30 cm
8 titres

L'autre jour, j'ai aperçu la couverture d'un livre consacré aux 100 albums essentiels du reggae. Je n'ai pas pris le temps de le feuilleter, et donc je ne sais pas si ce disque de Pablo Moses figure bien dedans. Je sais parfaitement que ce type de sélection est par définition très subjectif, mais à mon sens aucune liste de ce genre ne pourrait se passer de A song, un album parfait, qui occupe une place à part dans l'histoire du reggae.
C'est Daniel C. qui m'a fait découvrir ce disque, en cassette, sur un chantier d'été en pleine Champagne crayeuse. Dès que j'ai pu, j'ai acheté ensuite le 33 tours. Le reggae, le soleil, l'été, ça va parfaitement ensemble, mais A song est un disque pour toutes les saisons, pour les après-midis de printemps, les soirs d'automne et les dimanches matin d'hiver.
Si on devait utiliser un seul mot pour qualifier ce disque, celui qui conviendrait le mieux serait sûrement "cool". Cool, comme calme et doux. Doux, comme le chant de Pablo Moses et
sa voix haut perchée. Calme comme les rythmes de l'album, enregistré à Kingston et mixé à Londres, avec une liste de pointures du reggae longue comme le bras parmi les participants, des frères Chung (c'est Geoffrey qui produit) à Robbie Sakespeare et même Sly Dunbar sur un titre, d'Earl "Wire" Lindo à Cedric Brooks, avec même parmi les choristes deux des I-Threes et Freddy McGregor.
La bio de Pablo Moses chez AllMusic nous apprend que, entre la parution de son premier album Revolutionary dream et celui-ci, son deuxième, il aurait étudié pendant deux ans à la Jamaica School of Music. Cette information est éclairante pour comprendre cette album car, comme le titre du disque, qui est aussi celui du premier morceau, l'indique, la première face de ce disque est consacrée à des chansons sur la musique : outre A song, nous avons Music is my desire ("It sets my heart on fire, It's what I require, yeah ah", une proclamation que je pourrais faire mienne), une ode au dub (Dubbing is a must "To enjoy reggae music") un peu surprenante dans ce contexte car la production suave et délicate de cet album est à l'opposé du côté rentre-dedans de bon nombre de remixes dub, et enfin une chanson sur une danse, le Revolutionary step.
Dans la même veine musicale, la face B aborde des thèmes plus courants du reggae, sur la spiritualité, Jah et les rastafaris. Les deux sommets de la face sont Each is a servant et Protect I, mais même sur One people, peut-être le titre le moins exceptionnel du disque à mon goût, la finesse du mixage des cuivres est impressionnante.
Evidemment, quand l'album Pave the way est arrivé dans les bacs l'année suivante, je me suis précipité pour l'acheter... et j'ai été immensément déçu ! C'est loin d'être un mauvais disque, mais il n'a pas l'atmosphère et le son particulier de A song, c'est juste du reggae ordinaire. Pendant longtemps, j'ai quand même mis de l'espoir dans l'écoute de Revolutionary dream pour retrouver la magie de A song, mais quand j'ai enfin fini par avoir l'occasion de l'écouter, j'ai aussi été déçu. Je ne retrouve pas non plus sur ce bon disque, le plus réputé de Pablo Moses (qui pour le coup figure dans une autre liste des 100 meilleurs albums de reggae), la magie de A song.
Au bout du compte, je pense qu'il faut se contenter d'apprécier pleinement le plaisir de l'écoute de A song, sans chercher à le renouveler ou le prolonger ailleurs. Ce disque est un monde à lui seul, un monde cotonneux et sophistiq
ué. Pas grand chose à voir musicalement, mais si on devait lui trouver un équivalent, ça pourrait être un autre très grand album de 1980, le Colossal youth des Young Marble Giants.
Pablo Moses tourne encore. En juillet 2009, il était même en concert en France, notamment à Mulhouse. Quant à cet album, il ne semble pas être actuellement disponible à la vente, ce qui est un scandale, d'autant plus qu'Island célèbre en fanfare cette année ses cinquante ans.
Une édition Deluxe de l'album aurait été sortie par Young Tree en 2005, avec un disque de titres dub et live en bonus. Un classique comme celui-là n'a pas vraiment besoin d'être dilué ou complété, mais de toute façon, si Pave the way existe bien en Deluxe sur ce label, je ne suis pas sûr que A song ait effectivement été distribué sous cette forme car on n'en trouve aucun exemplaire en vente. Du coup, les exemplaires de l'édition CD chez Mango/Island de 1991 commencent à s'arracher à prix d'or. Sinon, on trouve l'album en téléchargement sur plusieurs blogs, ou à emprunter dans les bonnes médiathèques, comme celle d'Epernay.

05 août 2009

COMET GAIN : Réalistes


Acquis par correspondance chez Amazon en France en juillet 2009
Réf : krs 378 -- Edité par Kill Rock Stars aux Etats-Unis en 2002
Support : CD 12 cm
12 titres

C'est Elodie du fanzine Applejack qui, au détour d'un échange d'emails, m'a signalé que mon alter égo JC Brouchard était mentionné dans les notes de pochette de cet album de Comet Gain, leur quatrième. Première nouvelle ! Etant donné que je ne connaissais Comet Gain que de nom, à part peut-être un titre ou deux égarés sur des compilations, ma curiosité a été vivement aiguisée, et j'ai aussitôt commandé l'album.
Elodie m'avait précisé qu'elle avait la version vinyl de l'album. Heureusement, car sur le CD c'est imprimé tellement petit qu'il faut presque une loupe pour déchiffrer sous l'intitulé "réalistes !" la liste non pas de remerciements mais de "Simples noms" qui figure au verso du livret. Et effectivement, sur une ligne qui commence par Peter Townsend et Durutti et se termine par Sarah Utter et Theo, on trouve bien la mention JC Brouchard, juste après Dan Treacy. Quel honneur !
Il ne m'a pas fallu trop longtemps pour comprendre comment ce nom s'était retrouvé dans cette liste. D'abord, le groupe est de Glasgow, comme une bonne partie des membres ou des proches de Biff, Bang, Pow !, mais surtout, on trouve dans la liste des titres She never understood, soit une reprise de Biff, Bang, Pow ! justement. Un très bon choix d'ailleurs car il s'agit de l'une des grandes réussites d'Alan McGee et Dick Green (Ce titre, paru à l'origine en 1987 sur le deuxième album The girl who runs the beat hotel, est actuellement disponible sur le CD Waterbomb!, un disque que je ne saurais trop vous conseiller. Ceux qui ont la chance de le trouver pourront écouter sur la compilation The acid house album une "alternate version" de cette chanson, enregistrée fin 1985 lors de sessions prévues pour Submarines, ou Sixteen velvet Fridays, un album jamais paru).
Il parait évident que c'est la présence de cette reprise qui explique le clin d'oeil dans les notes de pochette à celui qui fut le "conseiller spirituel" de Biff, Bang, Pow ! de 1985 à 1988.
La version que donne Comet Gain de She never understood est tout à fait digne des versions originales. La guitare douze cordes utilisée par BBP! laisse ici la place à une guitare électrique plus furieuse, qui donne ce titre un son plus proche de celui d'Oblivion, le 3e album de BBP!, que du second. Ils doivent être bien fans de Creation puisque, début 2009, ils reprenaient sur scène Ballad of the band de Felt (vidéo à voir sur YouTube).
Dans son ensemble, du titre à la pochette en passant par certaines paroles, Réalistes se place sous le signe du cinéma, comme le confirme une interview entièrement placée sur ce thème disponible sur le site de Kill Rock Stars.
A part une mention en passant au Legal man de Belle and Sebastian, la chronique de Pitchfork de cet album ne fait référence qu'à de la pop lo fi, certes, mais uniquement en mentionnant Sonic Youth. La seule explication possible doit être que le rédacteur de cette chronique est américain, car pour le coup les points de référence de Comet Gain sont évidents et absolument pas cachés par le groupe : il s'agit de tout ce qui touche à la noisy pop des années 80, et de tout ce qui influençait déjà à l'époque les groupes concernés, des sixties au punk. Même en se cantonnant aux groupes écossais, on ne manque pas de points de comparaison, des Pastels à Urusei Yatsura, en passant par les Shop Assistants et tout un pan du catalogue Creation bien sûr.
Même si, du coup, ce disque est plus rétro que novateur, il est dans l'ensemble très réussi, à part un petit coup de mou vers le milieu de l'album (Carry on living et Moments in the snow).
Les deux titres d'entrée, The kids at the club (j'aime particulièrement la reprise instrumentale très électrique à la fin) et Why I try to look so bad (à télécharger chez Kill Rock Stars), sont imparables. Le chant sur I close my eyes to think of God me fait penser à celui d'Andrew Innes avec The Revolving Paint Dream, les cuivres sur Labour ne peuvent que rappeler The June Brides, et j'aime beaucoup le chant à deux voix sur Movies.
Au bout du compte, même s'il s'agit d'un genre musical que je ne suis plus de près car j'en ai pas mal fait le tour, voilà un album que j'ai beaucoup apprécié et qui m'a bien éclaté. Je ne regrette pas mon achat, et pas seulement à cause du clin d'oeil. Désormais, je guetterai Comet Gain s'ils passent pas trop loin en concert, ce qui doit bien arriver puisqu'il semble qu'au moins l'un des membres du groupe habite Bordeaux.
Au passage, j'ai appris qu'un autre groupe avait enregistré une reprise de She never understood. Ils ont pris le nom de la ville écossaise d'Aberdeen (d'où sont originaires les Jasmine Minks), mais sont américains ! On peut écouter un extrait en ligne de leur version et ce qui est amusant c'est que, ralentie et chantée par une fille, leur version sonne tout à fait comme les chansons de BBP! chantées par Christine Wanless.

02 août 2009

THE BLACK INSPIRATION : Rythm and blues show


Acquis sur le vide-grenier de Moslins le 26 juillet 2009
Réf : 658 092 GU -- Edité par polydor/Privilège en France à la fin des années 1960
Support : 33 tours 30 cm
14 titres

Il devait vraiment y avoir un marché pour les compilations de rhythm and blues en France à la fin des années 1960 et au début des années 1970.
Chez Atlantic, qui avait notamment le catalogue Stax à sa disposition, on connait surtout la série Formidable Rhythm and Blues, la plus longue (12 volumes) et celle qui a été le plus souvent rééditée au fil des ans. Mais, comme nous le montrent les excellentes pages que leur consacre le site français consacré à Otis Redding, Atlantic a largement exploité le filon avec des séries plus courtes intitulées Surboum, Incroyable ou Terrible.
La concurrence ne s'en est pas laissé compter : par exemple, Chess a sorti au moins trois volumes d'une série avec un titre similaire, Remarquable, une maquette proche et une photo de pochette de Jean-Pierre Leloir comme pour les compilations Atlantic. Mais on se gardera bien de crier trop vite au scandale car Chess était à l'époque distribué en France par Barclay, et c'est bien Barclay qui a lancé la série Formidable, avant que Filipacchi ne reprenne la distribution Atlantic.
Par contre, on est dans un tout autre cas de figure avec ce Rythm and blues show, qui représente un bel exemple de parasitage commercial.



C'était le premier vide-grenier dans ce petit village qu'est Moslins. En général, c'est plus propice aux bonnes affaires. Là, il a suffi d'un stand avec un monsieur sympa, qui m'a dans un premier temps proposé de le débarrasser de sa caisse à vendanges pleine d'albums pour 10 €. J'ai refusé, mais comme j'avais déjà repéré qu'il avait dans sa caisse des albums africains de Côte d'Ivoire, je lui ai demandé le prix des disques à l'unité. Etant donné qu'il ma répondu 20 centimes, j'ai examiné toute la caisse avec attention, et j'ai sélectionné huit albums, principalement des disques africains ou de folk américain, plus cette compilation de rhythm and blues.
Quand j'ai retourné ce disque avant de l'acheter pour y jeter un rapide coup d'oeil, j'ai bien cru avoir à faire à l'une de ces séries moins connues et plus rares d'Atlantic.
J'ai une excuse pour m'être fait avoir : j'avais encore écouté le Formidable vol. 4 la semaine précédente et le dos de pochette est vraiment quasiment identique :



Ce n'est qu'en examinant mes achats quelques instants plus tard que j'ai découvert le pot aux roses : l'album ne propose pas les versions originales des standards listés, mais bel et bien des reprises par un groupe inconnu, The Black Inspiration, dans la longue tradition de l'industrie du disque. Pendant un instant, j'ai ressenti une grosse déception, puis je me suis dit aussitôt qu'après tout ce spécimen de parasitage était intéressant en tant que tel, avec sa faute d'orthographe à "Rythm" et sa maquette du verso habilement détournée.
Au recto de la pochette, on ne trouve pas une photo de Leloir, mais une illustration de JC Trambouze, un gars qui a signé pas mal d'illustrations de pochettes, de Henri Tisot à Dick Annegarn, en passant, et c'est amusant, par toute une série de 45 tours "Disc jockey" du début des années 1970, dont bon nombre pour des artistes Stax, mais les vrais cette fois !
Cela tend à confirmer que l'initiative de sortir cette compilation est bien venue de Polydor France, mais la grande question est de savoir d'où viennent les bandes de The Black Inspiration : de France, ou d'ailleurs ? La question reste ouverte. On sait qu'il y avait de très bons musiciens de rhythm and blues en France à l'époque, mais ce qui me fait penser à des américains, c'est que les chanteurs sont visiblement anglophones, ou en tout cas ils ont un très bon accent qui ne trahit pas de façon évidente des origines françaises.
Musicalement, les enregistrements proposés ici n'ont pas la pêche ni la clarté de production des enregistrements Stax, mais il s'agit de reprises tout à fait correctes.
Les titres rapides, notamment, passent plutôt bien comme Mustang Sally, avec des choeurs réussis, Sweet soul music et It takes two, une reprise d'un duo de Marvin Gaye et Kim Weston. L'orgue est très présent, et d'ailleurs c'est lui qui répond plutôt que les choeurs à l'invitation "Your turn" dans la version de Fa fa fa fa fa.
Les titres lents passent généralement un peu moins bien, mais je trouve les versions de My girl et Summertime réussies.
Au bout du compte, celui qui a acheté cet album, sûrement à prix réduit, n'a pas fait une mauvaise affaire. Ces compilations étaient surtout utiles pour les boums, et l'état de mon disque et de sa pochette prouve qu'il a dû en vivre un bon paquet.
Pour ce qui me concerne, j'aimerais bien qu'on me dise qui joue sur ce disque. On ne trouve bien sûr aucune information sur un groupe qui se serait appelé The Black Inspiration, vu qu'il s'agit évidemment d'un nom de circonstance. Comme j'aime bien me raconter des histoires, il me plait à penser qu'un certain Alan Shelly pourrait avoir participé à cette aventure. Après tout, cet excellent musicien de soul français, qui a beaucoup enregistré avec Manu Dibango, et que j'ai découvert tout récemment grâce à la présence de son titre You can do it sur une compilation sixties Top of the Pops, avait largement le niveau pour produire un enregistrement tel que ce Rythm and blues show, et il se trouve qu'il enregistrait pour Philips, un label du même groupe que Polydor à l'époque en France, il me semble...

Ajout du 6 mai 2016 :

Cela aura mis près de sept ans, mais j'ai enfin fini aujourd'hui par percer le secret de ce disque. Je sais enfin quelle est son origine et je connais ses interprètes principaux. Il y a encore quelques semaines, on en parlait avec Philippe R., qui a retrouvé un autre exemplaire de la pochette, avec, c'est presque logique, un disque Rhythm and Blues Formidable à l'intérieur, et on s'étonnait qu'aucun indice n'ait encore fait surface.
Tout est parti de la fiche Discogs de ce disque de The Black Inspiration, que je suis allé consulter en espérant y trouver des indices.
Il n'y avait rien sur la fiche elle-même, mais en commentaire quelqu'un posait la question de savoir si c'était le même disque que Soul & inspiration par The Black Cats. Eh bien, la réponse est oui ! Les quatorze titres sont les mêmes, ils ont juste été mélangés pour fabriquer les séquences façon Formidable et on peut vérifier sur Deezer par exemple que les enregistrements sont bien identiques.
Le disque original a été édité en Allemagne en 1968 par Tip, une filiale de Deutsche Grammophon, carrément. Et, grâce aux notes de pochette, on apprend que les Black Cats étaient un duo composé de Melvin Jackson et Bill Mars, deux américains arrivés en Allemagne comme soldats et qui avaient décidé de s'y établir pour faire carrière dans la chanson.
Je ne sais pas s'ils ont enregistré quoi que soit d'autre par la suite, mais leur interprétation sur cet album est vraiment de grande qualité. On ne sait toujours rien des (bons) musiciens qui les accompagnent, et on n'en saura sûrement jamais rien car ils ne sont pas crédités sur le disque original, mais je suis déjà bien content de connaître enfin l'origine de ces enregistrements.