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28 juillet 2022
BLUES DE BRESSE
Acquis chez Récup'R à Dizy le 25 juin 2022
Réf : 6990003 -- Édité par Vogue en France en 1990 -- Ce compact disc vous est offert en exclusivité par Bresse Bleu -- Disque hors commerce interdit à la vente
Support : CD 12 cm
14 titres
Même après la parution de mon livre Vente interdite en 2018, je continue à m'intéresser aux disques hors commerce. Je ne prévois pas d'en faire une réédition augmentée, mais pourtant, quand je regarde les chroniques publiées depuis sa sortie je vois bien que je ne manque pas de matière. Et ce CD y aurait tout à fait sa place.
Il y avait un arrivage de 45 tours ce jour-là à la ressourcerie, et j'ai fait une razzia d'une quinzaine de disques. Par contre, c'est le seul nouveau CD intéressant que j'ai trouvé.
Une fois n'est pas coutume pour ce genre de disque, c'est quand j'ai vu la liste des titres, presque tous issus du catalogue Chess, que je me suis vraiment décidé à l'acheter.
1000 exemplaires de ce CD ont servi de lot pour les participants à un concours organisé dans le cadre d'une campagne publicitaire pour Bresse Bleu, mais mon exemplaire était destiné à un détaillant, pas à un client, puisqu'on trouve dans le boîtier du CD, en plus du livret de quatre pages, une plaquette pliée en huit de présentation de l'opération de promotion de la gamme de fromages.
Le jeu, et donc aussi la campagne publicitaire, a eu lieu du 7 mai au 30 juillet 1990, mais le slogan "Bresse Bleu, le blues de Bresse" était déjà utilisé depuis 1988. Il en est question dans un article du Monde du 27 novembre 1988 sur la présence des noirs dans la publicité (Merci Philippe R. !) :
"Les Noirs font désormais leur apparition dans les publicités les plus inattendues. Ainsi le tout nouveau spot pour le Bresse bleu imaginé par Publicis Conseil. On y voit un musicien de jazz, Noir, penché sur une guitare à laquelle il arrache des sons nostalgiques. Slogan final, en forme de générique : " C'était Bresse bleu, le blues de Bresse ". Les fromagers avaient plutôt pour habitude, jusqu'ici, de vanter leur produit sur fond de villages et de tonnelles ensoleillées bien de chez nous.
En guise d'explication, la plupart des publicitaires, comme Béatrice Dallies-Labourdette (Publicis Conseil) ou Bruno Suter (Eldorado), invoquent un souci d'universalité. Un produit destiné à tout le monde, commentent-ils, doit être perçu comme apprécié par le monde entier, races et couleurs confondues. (...)
Certains avancent une explication culturelle. Les États-Unis et ce qui en vient continuent de fasciner. Pour un oui ou pour un non, les publicitaires situent leurs saynètes outre-Atlantique : les glaces Gervais, par exemple, présentées, on ne sait pourquoi, comme " à l'américaine ". Les Noirs font inévitablement partie de ce décor. Ils apportent à ces mises en scène une touche de couleur locale, une garantie d'authenticité."
Quoi qu'il en soit, plus de trente ans plus tard, tout un pan de la publicité continue de s'appuyer sur des terroirs idéalisés et des pseudo-méthodes traditionnelles bien de chez nous...
Voici le spot de pub dont il est question dans l'article :
Il y a beaucoup à dire sur cette campagne publicitaire. Elle repose entièrement sur le jeu de mots bleu/blues, mais il n'y a strictement aucun autre rapport entre le produit en question et tout ce que véhicule la musique blues. Je me demande vraiment si cette campagne a vraiment pu inciter qui que ce soit à acheter du fromage...
Quand à l'opération promotionnelle, la première question qu'on se pose est celle du public visé. Alors là, mystère. En 1990, qui écoutait du blues ? Qui aurait pu être suffisamment fan de cette musique pour être touché par cette campagne au point d'acheter du fromage et de participer à un concours ? Peut-être des hommes de 40 à 60 ans ? Certainement pas des ménagères de moins de 50 ans, et encore moins des jeunes. Pourtant, la plaquette semble indiquer que cette dernière tranche d'âge pouvait être visée, puisqu'elle présente le blues comme un "thème jeune". Permettez-moi d'en douter, tout comme pour l'utilisation du téléphone pour le jeu qui est présentée comme un "mécanisme original"...! Même en 1990, c'était tout sauf exceptionnel !
En tout cas, la possibilité de gagner sans obligation d'achat l'un des quatre voyages en Louisiane, pour le simple coût d'un appel à Paris, a quand même pu en attirer certains qui voulaient tenter leur chance.
Vogue a sorti des disques Chess en France depuis au moins les années 1960. Ils avaient donc un important catalogue à leur disposition pour concocter une sélection de titres pour ce CD, et en conséquence on a droit ici à un Panthéon des grands noms du genre. Et, signe que le blues m'intéresse, la moitié des 14 artistes a déjà été chroniquée ici : Memphis Slim, Albert King, Chuck Berry, John Lee Hooker, Big Bill Broonzy, Bo Diddley et Lightnin' Hopkins. Pile la moyenne, pas si mal pour un enfant de la new wave !
Mine de rien, il y a une majorité des titres que je ne connaissais pas bien sur ce disque. Les plus belles surprises pour moi ont été, la reprise par Lightnin' Hopkins de What did I say de Ray Charles, Moving d'Howlin' Wolf, avec une rythmique particulière, Blues with a feeling de Little Walter et la version de Worried life blues par Chuck Berry.
Le jeu de mots bleu/blues, Bleu de Bresse n'est ni le premier ni le dernier à l'avoir fait. Certains ont même fait deux fois plus fort (de fromage), puisqu'il existe à Niévroz dans l'Ain une association nommée Rock fort et blues de Bresse !
Quant à moi, je n'ai qu'une déclaration à faire : Tous les fromages que j'aime, ils viennent de là ils viennent du blues.
Lightnin' Hopkins, What'd I say, version en direct et commentée dans une émission de télévision.
comme tu le dis on peut se demander ce qui leur a passé par la tête pour une telle campagne de pub, tout ça à partir d un jeu de mots, c'est désarmant. ceci dit ça m'a permis de découvrir le what'dI say version Hopkins: une merveille et dire que c'est à peine vu sur youtube,qt à moving c'est excellent et du très bon wolf. quant aux fromages bluesy c'est très drôle
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