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28 mai 2022

DELIZIA : Prends le chien


Acquis chez Emmaüs à Saint Nazaire le 26 février 2022
Réf : EP 1037 -- Édité par Disc'AZ en France en 1966
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Prends le chien -- Monsieur le Professeur -/- J'ai rendez-vous -- Laissons-passer les années

Avec celui du Rail Band, c'est l'un des 45 tours intéressants que j'ai achetés chez Emmaüs à Saint-Nazaire le jour de l'ouverture de leurs nouveaux locaux.
La pochette et le nom de l'artiste ne me disaient rien du tout. Par curiosité, j'ai retourné la pochette, j'ai vu que tous les titres étaient signés par Adamo et la mémoire m'est alors revenue : quelques jours plus tôt, j'avais vu sur Arte un documentaire très intéressant, Salvatore Adamo. Quand je chante, et à un moment il y était question de sa petite sœur Delizia, qui s'était lancée elle aussi dans une carrière dans la chanson, sans rencontrer le même succès que son frère. Les bribes d'une chanson qui illustraient ce passage m'avaient fait dresser l'oreille et je m'étais dit qu'il faudrait que je me penche sur la question à l'occasion. Je n'imaginais que cette occasion se présenterait aussi vite !

Adamo, comme Enrico Macias et beaucoup d'autres vedettes des années 1960, je suis tombé dedans quand j'étais petit. Ses plus grands succès sont gravés dans mon bagage culturel. Musicalement ce qu'il fait n'est pas vraiment ma tasse de thé, mais je l'apprécie et le respecte, surtout depuis que je me suis fait la réflexion, à force de voir ses disques dans les vide-greniers et les Emmaüs, qu'il était vraiment à part dans sa génération : en effet, à de rares exceptions comme Pierre Perret par exemple, c'est l'un des seuls chanteurs des sixties qui est l'auteur et le compositeur de toutes les chansons de ses EP. Vérifiez, j'en ai regardé plein et je n'ai pas trouvé d'exception.

Un peu plus tôt cette année, j'ai découvert avec surprise qu'on pouvait associer Jean Ferrat avec l'humour et l'auto-dérision. Avec ce disque je suis aussi tombé de ma chaise : on est loin du freakbeat, mais il y a quand même de la guitare saturée sur un disque associé à Adamo !

Delizia avait 14 ans quand cet EP est sorti, mais ce n'était pourtant pas son premier disque. Un peu plus tôt, en 1964 ou 1965, His Master's Voice aux Pays-Bas avait sorti un 45 tours crédité à Delizzia, avec Prends le chien et Monsieur le Professeur, précisément les deux chansons qu'on trouve en face A de mon disque.
Mais les versions ne sont pas les mêmes. Dans la première version de Prends le chien, la voix de Delizia est vraiment enfantine et l'accompagnement est très discret, avec un arrangement assez conservateur. Pour la deuxième version, où Delizia est accompagnée par Christian Chevallier et son Orchestre, on retrouve les "La la la la la", mais avec des choristes, la voix de Delizia est plus grave et les arrangements sont plus enlevés : rythme marqué, cuivres, cordes, et même déjà un fond de guitare saturée.

C'est la même chose pour Monsieur le Professeur, entre la première version et la seconde, sauf que là il s'agit d'une ballade et la différence est moins marquée entre les deux enregistrements.
Ce qui marque dans cette chanson, c'est la question que l'élève pose en classe, "Dites, Monsieur le Professeur, aimez-vous les deux pièces ou les maillots à fleurs ?"

La vraie surprise vient avec l'introduction de J'ai rendez-vous. Là, c'est une guitare vraiment saturée qui ouvre le bal, et, avec le tempo rapide, les cuivres et l'orgue, on est vraiment dans une ambiance rock.

Laissons passer les années est une chanson lente, la moins intéressante du lot pour moi.

Ce disque de chansons yéyé sympathiques est une bonne surprise, surtout pour ses arrangements. A l'écoute des chansons, on imagine bien Adamo les chanter lui-même.

Delizia a sorti des disques tout au long des années 1970. Elle a également été actrice. Elle est morte en 2020 à 67 ans.



Il y a eu au moins deux pressages pour ce disque, puisque le verso de mon édition est celui ci-dessus, mais il en existe un autre avec une photo en studio avec Adamo :


21 mai 2022

LOU REED / JOHN CALE : Nobody but you


Acquis par correspondance via Ebay en avril 2022
Réf : 7599 21555-2 -- Édité par Sire / WEA en Allemagne en 1990
Support : CD 12 cm
Titres : Nobody but you -- Style it takes -- A dream

Au tournant des années 1990, Lou Reed ne s'est pas contenté d'empocher les droits d'auteur pour l'utilisation d'un échantillon de Walk on the wild side par A Tribe Called Quest. Il a aussi sorti son album New York, un disque encensé par la critique (de façon un peu excessive à mon sens), ce qui n'a pas toujours été le cas pour les sorties précédentes dans les années 1980. Et surtout, après avoir repris contact avec John Cale début 1987 lors des obsèques d'Andy Warhol, il s'est lancé avec lui dans un projet pour lui rendre hommage, qui a abouti à l'album Songs for Drella et à de nombreuses prestations en duo en 1989 et 1990.

On a parlé récemment de Songs for Drella car on vient de rééditer le film tourné par Ed Lachman où Reed et Cale jouent toutes les chansons du projet lors des répétitions pour les concerts des 4 et 5 décembre 1989 à la Brooklyn Academy of Music. J'ai vu ce film à l'époque lors de sa diffusion à la télévision (sur Arte je pense) et j'ai l'impression que, comme pour moi, un bon nombre de personnes connaissent plus le projet par sa version filmée que par l'album studio qui est sorti début 1990.
Voilà ce que John Cale dit du projet dans les notes de pochette du disque : "Songs for Drella est une collaboration, la seconde que Lou et moi avons menée à bien depuis 1965. Je dois dire que, bien qu'il ait fait le plus gros du travail, il m'a permis de conserver une position digne tout au long du processus.
Cela constitue ainsi, conformément au but recherché, un hommage à quelqu'un dont on se souvient aujourd'hui avec beaucoup d'amour et d'admiration pour l'inspiration et la générosité dont il a fait preuve au fil des années.
".
La grande qualité de ce projet, c'est qu'il a été réalisé en duo de bout en bout. Même si Lou Reed a visiblement fait plus de boulot, et même si l'expression "il m'a permis de conserver une position digne" interroge un peu sur l'ambiance qui régnait. En tout cas, j'imagine très bien, vu comment les disques de Lou Reed sonnaient à l'époque, ce qu'aurait donné Songs for Drella avec des musiciens de session. J'entends déjà la basse fretless slap et le saxophone ! Mais non, sur le disque comme pour les concerts, c'est juste Lou Reed et John Cale qui font tout, et c'est très bien comme ça.

Ce cycle de quinze chansons, dont cinq sont chantées par John Cale, fait surtout parler fictivement  Andy Warhol et retrace les différentes étapes de son parcours. Pour le dernier titre, Hello it's me, c'est Lou qui s'adresse à Andy, qui exprime des regrets, et qui donne peut-être une piste ("You hit me where it hurt I didn't laugh. Your diaries are not a worthy epitaph") sur la motivation à l'origine du projet, faire que la publication posthume de son journal ne soit pas sa seule épitaphe.

Il y a une grande majorité des chansons que j'aime bien dans Songs for Drella, à commencer par Nobody but you, choisi comme face A de ce single dans le seul pays, l'Allemagne, où un titre a été extrait de l'album. La chanson tourne bien et reste bien en tête. J'aime bien dans les paroles l'utilisation de "Nobody" avec deux sens différents, comme pronom ("there's nobody but you", "il n'y a personne sauf toi") et comme nom ("a nobody like you", "un moins que rien comme toi").
Il y a une courte partie instrumentale dans la chanson et, elle change à chacune des performances, jouée parfois par Cale au piano ou au synthé, ou par Reed à la guitare. Ma préférée est celle à la guitare à la Fondation Cartier.

Les deux autres titres font partie de ceux chantés par Cale. J'aime bien Style it takes, qu'on aurait pu trouver sur l'un de ses albums, même si le son des synthés est un peu daté. J'aime moins A dream, l'un des derniers titres composés pour le projet.

Parait-il que, après la parution de l'album, Cale a juré de ne plus jamais collaborer avec Reed, et une tournée prévue a été annulée. Mais, le 15 juin 1990 à la Fondation Cartier, après qu'ils aient joué quelques titres de Songs for Drella, Sterling Morrison et Moe Tucker les ont rejoint sur scène pour jouer Heroin, ce qui a mené à la reformation du Velvet Underground en 1993. Après quoi, Cale aurait juré, encore une fois, de ne plus jamais travailler avec Lou Reed !


Lou Reed et John Cale, Nobody but you. La "vidéo officielle", soi-disant. Ce n'est pas la version studio de l'album, mais celle en public du film Songs for Drella.


Lou Reed et John Cale, Style it takes et Nobody but you, en direct dans l'émission Sunday night en 1989.


Lou Reed et John Cale, Nobody but you, en concert à la Fondation Cartier à Jouy-en-Josas le 15 juin 1990 à l'occasion de l'exposition Andy Warhol System : Pub-Pop-Rock.


Lou Reed et John Cale, Nobody but you, en direct à la télévision.


Lou Reed et John Cale, Nobody but you, en direct dans l'émission A + E Revue diffusée le 8 juin 1990.


Lou Reed, Nobody but you. Sans John Cale, mais avec une allumette dans la bouche.


Lou Reed et John Cale, Songs for Drella. Le film entier d'Ed Lachman. Toutes les chansons de l'album filmées pendant les répétitions des concerts des 4 et 5 décembre 1989 à la Brooklyn Academy of Music à New York.

14 mai 2022

A TRIBE CALLED QUEST : Can I kick it ?


Acquis par correspondance chez Momox en janvier 2022
Réf : ZD44182 -- Édité par Jive en Europe en 1990
Support : CD 12 cm
Titres : Can I kick it ? (7" radio edit) -- Can I kick it ? (Extended Boilerhouse mix) -- Can I kick it ? (Phase 5 mix) -- If the papes come (Remix)

Dans l'euphorie créée par Three feet high and rising de De La Soul, j'ai acheté à leur sortie les albums d'autres membres du collectif Native Tongues, Done by the forces of nature des Jungle Brothers et Peoples's instinctive travels and the paths of rhythm d'A Tribe Called Quest.

Sur mon exemplaire de ce dernier, un des premiers pressages donc, tous les titres sont signés par les membres du groupe, principalement Q-Tip et Ali Shaheed Muhammad, y compris Can I kick it ?, qui s'ouvre avec l'un des "samples" les plus évidents et reconnaissables entre tous, la ligne de basse de Walk on the wild side de Lou Reed.
Apparemment, le groupe pensait sincèrement que son label avait fait le nécessaire pour obtenir l'autorisation d'utiliser cet échantillon sonore. Ce n'était pas le cas. Lou Reed, ou plus sûrement son éditeur et leurs avocats, sont alors intervenus. Il auraient pu faire un procès, obtenir des dédommagements ou faire retirer cette version du commerce. A la place, un compromis a été proposé à A Tribe Called Quest : vous pouvez continuer à utiliser cet enregistrement, mais la totalité des droits d'auteur ira à Lou Reed.
Le mal était fait, le disque sorti et les enjeux financiers sûrement trop grands : cette proposition a donc été acceptée, et ceci explique pourquoi, sur ce single et sur les éditions suivantes de l'album, Lou Reed est crédité comme le seul auteur de Can I kick it ? ! Et le groupe n'a jamais touché un sou sur cette chanson.
Reed a ainsi préservé ses droits et ses petites affaires, mais c'est quand même un peu exagéré. Déjà, comme le précisait Rolling Stone, il y a d'autres titres échantillonnés sur ce morceau. Et puis, même si ces quelques notes de basse sont pour beaucoup dans ce qui fait l'intérêt de cette chanson, il y a quand même plein d'éléments apportés par ATCQ, à  commencer par les paroles.

Et puis, si on va par là, on peut se demander jusqu'à quel point Lou Reed est "l'auteur" de la ligne de basse de Walk on the wild side. Il existe peut-être une version démo studio de la chanson, mais malheureusement je ne l'ai pas trouvée, mais je me demande bien quelle était cette ligne de basse avant qu'Herbie Flowers arrive en studio en 1972 pour une session de trois heures et enregistre la basse, comme il l'explique dans la vidéo ci-dessous, en deux passages, à la contrebasse et à l'électrique, ce qui lui a valu d'augmenter son cachet, de 12 à 17 £ apparemment, mais il n'a eu aucun point de pourcentage sur les droits d'auteur.
Lou Reed n'était pourtant pas insensible au rap. Il avait exprimé son intérêt pour ce genre musical dès 1984, et s'était même lancé en 1986 sur son album Mistrial dans The original wrapper.

Sur ce single, la version principale de Can I kick it ? a été remixée par le duo anglais Boilerhouse. Outre la version raccourcie à la radio, on a droit à une version allongée.
On peut faire aussi l'expérience de la chanson sans la basse de Walk on the wild side, avec le Phase 5 mix. Là, c'est assez jazzy et je préfère l'autre version !
Le dernier titre, If the papes come, est une face B inédite, avec un invité, Afrika Baby Bam des Jungle brothers.




A Tribe Called Quest, Can I kick it ?, en direct dans l'émission Showtime at the Apollo.


Herbie Flowers explique en 2010 dans The One Show comment il a enregistré la basse de Walk on the wild side.

07 mai 2022

ELIOTT : Think about it


Acquis chez The Message à Troyes le 25 mars 2022
Réf : 200379 -- Diffusé en France vers 1981
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Think about it -/- Good to me

Après l'afro-funk du Rail Band, on va s'intéresser à disque franco-funk !...

J'ai fait le voyage à Troyes pour y voir jouer l'ami Gontard, qui fait tourner son dernier album Akene et qui inaugurait pour l'occasion une formule en trio, une configuration qui alternera selon les dates et les circonstances avec l'habituelle formation à cinq, avec basse et batterie.


Gontard en Pac-Man et en concert à The Message à Troyes le 25 mars 2022, avec Morzini et Ray Bornéo. Photo : Pol Dodu.

Un excellent concert, dans une ambiance très sympathique. The Message, au centre ville de Troyes, est un bar-disquaire, qui accueille des concerts plusieurs fois par semaine.
Comme il y avait des bacs de disques, j'ai passé ma soirée à admirer et examiner machinalement tout un paquet de belles pochettes. Mais il s'agissait quasi-exclusivement de rééditions vinyl récentes et je n'éprouve aucun intérêt pour le vinyl du 21e siècle. Je préfère autant un CD...
Mais il y avait une exception : sous un bac de 33 tours j'ai très vite repéré une caisse de 45 tours à 1 €. Pas grand chose à en tirer, puisqu'il y avait par exemple plusieurs EP de Claude François, mais ma curiosité a payé quand j'ai été intrigué par la pochette ouvrante d'un disque manifestement publicitaire.
On sait l'intérêt que je porte au disque hors-commerce. Il suffit pour s'en convaincre de lire les chroniques présentes ici, dont une partie a été rassemblé dans le livre (disponible en téléchargement gratuit) Vente interdite.
J'ai donc sorti cette pochette moche, avec ses photos de commerces parisiens, en me demandant bien quel disque pouvait être glissé dedans. Je pensais à des imitations par Jean Valton, ou à l'annonce d'une opération commerciale comme pour l'Opel Far East trip ou Monsieur Maurice.
Je sors donc le disque de sa pochette et je vois que la première chanson est co-signée par "Otis Reeding" (j'ai mentalement aussitôt corrigé le nom d'Otis) . Je retourne le disque et je constate que l'autre chanson est signée "J. Brown". Dans ce contexte, ça m'a suffi pour que j'aille aussitôt payer mon euro au comptoir, un petit peu intrigué et excité, en me demandant sur quoi j'avais bien pu tomber.

Une fois rentré à la maison, il ne m'a pas fallu longtemps pour retrouver la fiche de ce disque dans Discogs, avec sa pochette originale, simple mais beaucoup plus belle :


La pochette originale du 45 tours.

Faisons le point : la pochette ouvrante a été réalisée principalement pour faire la promotion de commerces parisiens ouverts 24 h/24. Le disque a été choisi comme support publicitaire pour cette opération, mais le 45 tours glissé dans la pochette n'a strictement rien à voir avec la campagne publicitaire. J'imagine qu'un stock d'invendus a été récupéré et je ne serais pas surpris qu'on trouve des disques différents d'une pochette à l'autre.
Je suppose que cette campagne date des fêtes de fin d'année 1981, et l'indice qui me le fait penser ce sont les pots de peinture de l'encart Uni Ricard : le pot vide "1981" est renversé et mis de côté, et le pot tout neuf et coloré "1982" est au premier plan...

En-dehors de ce disque visiblement auto-produit, peut-être son unique sortie, je n'ai trouvé aucune information sur Eliott. Les seules choses intéressantes qu'on apprend sur la pochette originale, c'est que l'enregistrement s'est fait au studio LBS par l'ingénieur du son Bruno Lambert.

En tout cas, le gars Eliott avait du goût pour le choix de ses reprises. Son Think about it est une version de l'excellent tube composé et produit par James Brown pour Lyn Collins en 1972 (J'ai le 45 tours original, je le chroniquerai peut-être ici un jour...).
Le groupe qui accompagne Eliott s'en sort pas mal, mais ce ne sont pas les J.B.'s comme sur l'original et il y manque ce qui fait pour moi la particularité de ce titre, le son un peu grave de l'orgue qui donne la rythmique funky pendant toute la chanson. Au chant, Eliott n'a pas la puissance d'un James Brown, mais au moins son accent anglais n'est pas répulsif.

Good to me est à l'origine un slow d'Otis Redding, paru en 1966 en face B de Fa-fa-fa-fa-fa (Sad song) et sur The soul album. Pour le coup, la version d'Eliott de Good to me est intéressante, avec un bon arrangement de cuivres, d'orgue et de guitare. C'est mon titre préféré des deux.

Ce disque est inconnu, mais suffisamment réputé pour que ses titres aient été repris sur deux compilations.

Quand quitté The Message en fin de soirée, Gontard et sa bande étaient en train de faire honneur à une andouillette de Troyes cuisinée par un resto voisin. On était en plein dans l'esprit de la pochette de mon disque !
Et peut-être que j'aurai l'occasion d'y retourner prochainement, puisqu'Arlt y est annoncé en concert le 30 juin prochain, suite à la sortie d'un nouvel album, Turnetable !

A écouter : Eliott : Good to me.



01 mai 2022

ORCHESTRE RAIL BAND : Moko diolo


Acquis chez Emmaüs à Saint Nazaire le 26 février 2022
Réf : 01451973 -- Édité par RCAM au Mali en 1973
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Moko diolo -/- Tamadiara

C'était le premier jour de vente dans les nouveaux locaux d'Emmaüs Saint Nazaire. Avec Philippe R., prudemment, on avait décidé d'y aller pendant midi, en se disant que ce serait la cohue à l'ouverture. Et on a bien fait, car ça bouchonnait encore dans le secteur quand on est arrivé, au point qu'on se serait cru sur le parking d'un des hypermarchés voisins. Mais ça s'est vite calmé, et on a pu tranquillement fureté partout. Et au bout du compte il s'est avéré que les centaines de personnes passées avant nous n'avaient pas tout raflé, notamment au rayon 45 tours puisque j'y ai trouvé plusieurs disques très intéressants, dont Le bûcheron de Franklin Boukaka et celui-ci, sur lequel je me suis précipité dès que j'ai repéré le nom du groupe sur sa pochette dessinée. A 1 €, c'est pour l'instant l'une de mes meilleures trouvailles de l'année. Comme l'indique un tampon au dos, mon exemplaire a été vendu initialement par le magasin Technafric, à Bamako même.

En fait, je connaissais le Rail Band uniquement de réputation : autant j'ai depuis des années une compilation des Ambassadeurs, le groupe suivant de Salif Keita, autant je n'avais jusque là aucun disque, ni même aucun titre sur une compilation, de cet orchestre fondé et dirigé initialement par le saxophoniste Tidiani Koné, qui jouait plusieurs fois par semaine au Jardin du Buffet de la Gare de Bamako au Mali. Parmi les autres membres importants de ce groupe au long cours, il y a eu Mory Kanté et le guitariste Djelimady Tounkara.
Son lien avec le Buffet de la Gare n'a pas uniquement donné son nom au Rail Band : le nom complet du label R.C.A.M. qui a sorti ce disque et quelques autres du groupe est Rail Culture Authentique Malienne. Et ce n'est pas tout, puisque mon 45 tours appartient à la série Pop-Rail et un agent de la voie est dessiné sur la pochette. Juste après est sorti  un autre 45 tours, dans la série Rail-Typique, avec un agent de la traction sur la pochette :



A priori, ce sont les deux seuls 45 tours rendant hommage aux métiers du rail. Quand on regarde la discographie du groupe, on se rend compte qu'ils adoraient les séries, même si c'était pour les arrêter aussitôt commencées : un seul disque dans les séries Pop-Rail, Rail-Typique et Rail-Concert, mais plusieurs quand même dans les séries Folk-Rail et Rail-Danse.

Ce 45 tours date de la première et grande période du groupe, avec Tidiani Koné au saxophone, Djelimady Tounkara à la guitare principale, Mory Kanté au chant et à la guitare. Salif Keita, chanteur principal jusque là, a quitté le groupe en 1973. Je ne sais pas s'il est encore présent sur ce 45 tours (Je ne le pense pas car il n'est pas mentionné dans les notes de pochette).

Avec Philippe, on a été surpris quand on a écouté Moko diolo. Pour ma part, je m'attendais à un son très "africain", genre rumba congolaise, et initialement j'ai surtout trouvé que c'était beaucoup plus proche du funk à la James Brown, avec en plus, sans surprise car le chef d'orchestre joue de cet instrument, un saxophone très présent. Cette impression a été tempérée au fil des écoutes, mais je pense vraiment que ce titre est très inspiré par le funk. Je ne sais pas si Moko jolo sur l'album Rail Band de 1973 et sur le même label est la même chanson et éventuellement la même version que ce
Moko diolo.

Le funk est aussi présent sur Tamadiara, mais le rythme de base est plus original, le riff est accrocheur, et la guitare est plus présente et fait jeu égal avec le saxo. C'est de loin mon titre préféré des deux. Je dansais dans le salon de Philippe dès la première écoute !

Les notes de pochette nous donnent des informations sur le thème des deux chansons. Moko diolo, avec Mory Kanté au chant, flétrit la vanité de l'homme superficiel. Le titre désigne un homme-caparaçon. J'ai dû aller voir dans le dictionnaire pour apprendre que le caparaçon est une housse d'ornement cérémoniale pour chevaux !
Le titre complet de la face B est Tama diyara mali deun la, ce qui signifie Qu'elle est belle ma marche des maliens et serait, selon l'auteur anonyme des notes de pochette, "la ballade de l'homme heureux qui a atteint ses objectifs de l'heure et qui s'en revient" !

Ce disque est suffisamment réputé pour avoir fait l'objet en 2016 d'une réédition en quasi fac-similé par Goma Gringa, un label brésilien, s'il vous plaît. Pour ma part, je suis très content d'être tombé sur l'original !