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13 janvier 2019
DANIEL FORESTAL ET HENRI DEBS QUINTET : En ka senti en ka houmba
Offert par Fabienne M. à Mareuil sur Ay le 7 janvier 2019
Réf : DD 18 -- Édité par Debs en France en 1963
Support : 45 tours 17 cm
Titres : En ka senti en ka houmba -- Oh ! Je t'en prie, reviens -/- Manno -- Le métis
On ne peut nier, comme l'indique Arnaud Simetiere chez Médiapart et dans sa Causerie musicale, que l'une des tendances musicales actuelles est au créole, avec une vague de rééditions et aussi de nouvelles créations qui s'en inspirent (voir, rien qu'ici, Sages Comme des Sauvages, Mélissa Laveaux, Saodaj').
Certes, Born Bad a sorti les compilations Disque la rayé et Antilles méchant bateau, mais sinon, assez significativement, les français ne se sont pas précipités pour rééditer largement les musiques antillaises des années 1950 à 1970. On attend encore une grande rétrospective des disques Célini/Aux Ondes et, pour les Disques Debs, c'est le label anglais Strut qui a publié l'an dernier une première rétrospective, Disques Debs international vol. 1, un bel hommage à Henri Debs, qui est mort en 2013.
L'album s'ouvre avec un titre de Daniel Forestal. Certes, une page entière lui est dédiée dans le livre Mémoires et vérités sur la musique aux Antilles d'Henri Debs (toujours disponible chez Antilles Mizik et fortement conseillé), mais sinon je ne connaissais pas Daniel Forestal et je n'avais aucun titre de lui dans ma collection.
Strut a très bien choisi ce premier titre. Je l'ai écouté pour la première fois en voiture en partant au boulot et ma journée a été d'un coup illuminée :
Cette chanson est extraite du 45 tours DD 28 Daniel Forestal et sa guitare et bénéficie énormément d'un arrangement minimal avec guitare et percussions. Il existe une autre version, que je ne connais pas, enregistrée à Paris avec l'Orchestre Robert Joyce et publiée sur le 45 tours Le fond du verre, mais je ne pense pas qu'il soit possible d'enregistrer une meilleure version que celle-ci qui, aussi bien pour sa musique que ses paroles, est un concentré de simplicité, d'émotion et de joie de vivre, semblable à ce que peut nous apporter Jonathan Richman en concert et dans un grand nombre de ses chansons sur disque.
Idéalement, j'aurais bien aimé chroniquer ici le 45 tour Daniel Forestal et sa guitare, mais je n'en ai pas trouvé d'exemplaire en vente (Du coup, pour l'instant, je n'ai écouté aucune des trois autres chansons de cet EP). Alors j'ai fait un pas de côté et repéré cet autre disque, sorti un peu plus tôt (DD 18), en bon état et à un prix correct, et je me le suis fait offrir pour les fêtes.
Comme l'indique le tampon au dos du disque, mon exemplaire a été vendu chez Week End Musical, un commerce situé rue Lamartine à Fort de France en Martinique. Coïncidence, car le siège de Disques Debs, également indiqué au dos, était aussi rue Lamartine, mais à Pointe à Pitre en Guadeloupe.
Sur ce 45 tours, Daniel Forestal est accompagné par le quintet d'Henri Debs, je savais donc que je ne retrouverais pas ici le dépouillement de Ces p'tits je t'aime, mais j'ai quand même eu de la chance d'en retrouver un peu de l'ambiance car le dernier titre du disque, Le métis, est un instrumental avec Daniel Forestal à la guitare solo et, comme Ces p'tits je t'aime, il est annoncé comme étant dans le style cubain guaracha. C'est excellent, et ludique également. Visiblement, Daniel Forestal était un excellent guitariste.
Le titre principal, En ka senti en ka houmba, est présenté comme étant dans le style houmba, que je ne connais pas mais dont je suspecte qu'il a été inventé pour l'occasion. Selon le dictionnaire créole guadeloupéen Wabap, "senti" signifie "ceinture" et "houmba" "besace" ou "gibecière", mais je ne me hasarderai pas à donner une traduction du titre ou des paroles. En tout cas, la chanson est une réussite, avec de belles parties de piano (par Henri Debs) et de cuivres. Tardivement (probablement dans les années 1990) et toujours pour Henri Debs, Daniel Forestal a réenregistré En ka senti en ka houmba pour son album Daniel Forestal story (Le magnifique).
L'autre titre rapide et chanté du EP, présenté lui aussi comme un succès dans les notes de pochette, est Manno, très proche dans l'esprit et la production d'En ka senti, mais un peu inférieur.
Le dernier titre, Oh ! Je t'en prie, reviens, est présenté comme un boléro, autant dire un slow. Aussi bien musicalement que pour le chant, c'est celui que j'aime le moins, même si Henri Debs brille aussi au piano. Il a aussi été réenregistré pour Daniel Forestal story.
Daniel Forestal est mort à 83 ans en octobre 2016. Il a sorti son premier disque en 1956. Il a vraiment joué un rôle important dans la musique guadeloupéenne pendant toutes ces années. Avec ses compositions et ses interprétations, d'abord, qu'il a fait voyager au-delà de la France, au Canada, en Allemagne ou aux États-Unis, mais aussi en tant que professeur de collège enseignant le français, la musique et l'histoire-géographie : bon nombre de ses élèves ont fait carrière par la suite. Après avoir appris les claquettes à New York, il a également fondé une école de danse et de claquettes à la Maison de la Culture du Raizet, avec laquelle il a produit le spectacle Soleil Show, qui a tourné en Guadeloupe de 1981 à 1985.
Pour en savoir plus sur Daniel Forestal, vous pouvez regarder l'émission de de France Télévision de 2012 Mémoire vivante de Guadeloupe ou Fruits de la passion (On y l'y voit notamment interpréter superbement seul à la guitare quelques secondes d'En ka senti en ka houmba) et écouter les propos recueillis par Marie-Line Dahomay pour La Médiathèque Caraïbe le 30 décembre 2005.
A écouter : Le métis et En ka senti en ka houmba
excellent ainsi que le docu. Quelle pépinière, devant tant d'activités, devant l'importance donnée à la musique (mais aussi à la danse, la poésie) on a l'impression qu'ici il ne se passait pas grand chose à la même époque. Je ne le connaissais pas du tout et je découvre en peu de temps le rôle prépondérant du bonhomme. Encore bravo pour cette découverte, une pépite. Ph
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