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03 septembre 2022
DISCO REGGAE BAND : Sticks man
Acquis chez Récup'R à Dizy le 5 août 2022
Réf : 60038 -- Édité par Elver / Ibach en France en 1977
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Sticks man -/- Robber man in dub
L'intérêt d'avoir des 45 tours à 10 centimes à la ressourcerie, c'est que ça permet de prendre des paris sans risquer trop gros.
La seule mention de "Disco reggae" n'a pas suffi à me décider à prendre celui-ci, d'autant que je sais qu'Ibach est vraiment un label de variété (leur plus grande vedette était Carène Cheryl), mais elle m'a suffisamment intrigué pour que je sorte le disque de sa pochette. Et c'est quand j'ai vu que la face B était un dub, comme sur la plupart des 45 tours de vrai reggae, que j'ai été suffisamment intrigué pour mettre le disque dans ma pile d'achats. Je me demandais bien comment ça pouvait sonner du reggae à la sauce disco trafiqué en dub !
J'ai vraiment été bien avisé de me lancer car, une fois rentré à la maison, quand j'ai cherché ce disque dans Discogs, j'ai eu la surprise de voir que, d'une manière générale, il est attribué non pas au Disco Reggae Band mais à Black Slate, un groupe de reggae britannique de bonne réputation. Par chez nous, ils sont plutôt connus pour un mini-tube qui date de 1980, Amigo, et je ne pensais pas qu'ils avaient fait beaucoup de disques avant ça. C'est effectivement en 1980 qu'ils ont sorti leur premier album, mais ils ont accompagné d'autres artistes sur des 45 tours dès 1975 et sorti les premiers singles sous leur nom seul, dont celui-ci, en 1976.
Sticks man est un excellent reggae roots. Rien à voir avec du disco. Dans le style, je préfère ce titre à la plupart des chansons que j'ai entendues d'autres groupes de reggae britannique de l'époque comme Steel Pulse ou Matumbi. Initialement, je pensais que le "sticks" faisait référence à la fumette, mais non, il est question de "stick up", des "hold up" en bon français, des agressions par des voleurs qui s'attaquent aux habitants du quartier pour les dépouiller du peu qu'ils ont.
La face B, Robber man in dub, est une version largement instrumentale de la face A. Un peu sage pour un dub, mais très bien quand même.
Ce disque de Black Slate a eu un certain succès chez lui en Angleterre. Mais, vous demandez-vous, comment se fait-ce que, une fois arrivé en France, il soit crédité au Disco Reggae Band, sans qu'il y ait aucune mention du groupe original, si ce n'est que la chanson est bien attribuée à ses deux auteurs, Anthony Brightly et Elroy Bailey ?
Ce qui est sûr, c'est que le 45 tours original anglais ne fait aucune référence à du "Disco reggae". Pour la suite, c'est assez mystérieux, mais je pense que la transition s'est faite par le Bénélux, où le disque a pour le coup été un grand succès. Or, l'édition belge, comme l'hollandaise, mentionnent toutes les deux "Disco Reggae Band & Black Slate" sur la pochette et "Disco Reggae Band Black Slate" sur la rondelle.
Pourquoi ça ? Eh bien, l'époque étant au disco, j'ai bien l'impression que le distributeur Music Master Disco Service a pris l'habitude de mentionner "Disco reggae" ou "reggay" sur ses parutions, comme ce fut le cas aussi sur un disque de Tommy McCook.
L'autre mystère, c'est l'apparition d'un crédit de production pour Eddie de Gucht, alors qu'il s'agit bien de la version originale produite par Brightly et Bailey.
Pour l'étape suivante, je pense que le contrat pour l'édition française du 45 tours a été passé entre Ibach et le label du Bénélux. Et là, seule la mention de Disco Reggae Band a été conservée, Black Slate étant carrément passé à la trappe. Pour une fois, la seule mention correcte sur la pochette en-dehors du titre est celle, par ailleurs souvent trompeuse, de "Version originale" !!
La photo de pochette n'a rien à voir avec le contenu de disque et, pour la promotion en France, le "groupe" a même été remplacé par deux danseurs. J'imagine bien que Black Slate n'a rien su à l'époque de ce qui se tramait en France avec son disque.
Ibach a même poussé le bouchon jusqu'à sortir un album de Disco Reggae, avec la même pochette que le 45 tours. Il s'ouvre avec Sticks man, mais c'est le seul titre de Black Slate qu'on y trouve. Il y a aussi African woman de Winston Fergus, un autre single de reggae britannique de 1977, et les six autres titres sont dus à un groupe maison français composé de Charles Algarra, Edilda, H. Goldera (alias Humbert Ibach, alias Humbert Petruci) et Slimane Abdeladim.
C'est une histoire bien mouvementée pour un simple 45 tours.
La chanson Sticks man elle-même a continué à vivre sa vie depuis sa sortie initiale en 1976.
En 1980, Black Slate en a publié une nouvelle version, Sticks man '80, sur la deuxième édition de son album Amigo. Je n'aime pas cette version.
Il y a aussi eu des rééditions de la version originale en 1980 et en 1982.
En 1986, peut-être inspiré par le fait d'avoir côtoyé Black Slate sur l'album de Disco Reggae, Slimane Abdeladim a publié aux Pays-Bas une reprise de Sticks man sous le nom de Slim.
Et, démonstration supplémentaire de l'impact de Sticks man au Bénélux, il y a eu en 1993 en Belgique un remix techno/house de Sticks man crédité à K.E. Black Slate. Autant dire qu'une vraie version disco d'époque aurait presque été préférable !
Enfin, Sticks man est revenu sur le devant de la scène l'an dernier, puisqu' Anthony Brightly a raconté les débuts de Black Slate, et notamment l'enregistrement de Sticks man, dans un moyen métrage réalisé par Daniel Glenn-Barbour et intitulé The sticksman record.
Pour ma part, je veux bien trouver des bizarreries discographiques comme celle-ci toutes les semaines, surtout à 10 centimes !
Le Disco Reggae Band, tel qu'il est apparu à la télévision française, soit deux danseurs avec le disque en fond sonore...!
Un reportage sur le reggae britannique de The London Weekend Show diffusé en novembre 1977. On n'y voit pas et on n'y entend pas Black Slate, mais il y est question du succès de Sticks man à partir d'ici (25'24).
La bande annonce du film The sticksman record (2021), qui raconte les débuts de Black Slate.
Black Slate, Sticks man, en session studio en 2012.
dans un autre genre ces méandres d'édition me font penser à tous ces disques de tribute band avant l'heure (fin 60's et 70 surtout) dont le but était de vendre en trompant le client.Une réunion de musiciens de studio et hop le disque était présenté en jouant sur la confusion comme si c'était le groupe original. le tout à un prix cheap et une pochette bien dégueu. Ds ces disques il y a des très bonnes versions, pas tjrs mais svt, mais personne n'est crédité,ni aucune nationalité ni lieu d'enregistrement. est ce que ça s'est bien vendu? Personne ne sait semble t il. J'en ai qqes uns pink floyd, stones, beatles etc Aura t on des détails un jour sur ces ovnis? Quelqu'un fouineur comme le pol s'y collera peut être un jour!
RépondreSupprimerDans ce genre de groupes, il y en a un qui est désormais bien connu et répertorié, c'est The Rock Band Revival, qui comptait dans ses rangs rien moins que Dick Rivers et Alain Bashung.
RépondreSupprimerEt il y a un autre point commun avec le Disco Reggae Band car l'un des albums du Rock Band Revival a lui aussi une photo de pochette par Michel Laguens.
Je pense que ces disques se vendaient pas mal, vu qu'on les trouve encore sur les brocs.