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10 juillet 2016
THE BLOCKING SHOES : Venus
Acquis sur le vide-grenier de Montcetz le 3 juillet 2016
Réf : 3.529 -- Édité par Véga en France en 1969
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Venus -/- Blossom shoes
La semaine dernière, avant d'assister au concert du Eyo'nlé Brass Band dans le cadre du Festival des Musiques d'Ici et d'Ailleurs, je suis passé en plein milieu d'après-midi sur le vide-grenier de Montcetz, à quelques minutes de Châlons, où je n'avais pas dû mettre les pieds depuis les fêtes mémorables dans l'ancienne salle communale à l'époque du lycée.
Même à cette heure tardive (certains stands commençaient à remballer à la fin de mon petit tour), j'ai trouvé des disques intéressants sur deux stands, dont un lot de trois 45 tours de 1969 venant sûrement du même propriétaire, avec Mais non mais non d'Henri Salvador (je m'étais justement fait la remarque dans la semaine que ce disque manquait à ma collection), un EP du groupe Les Musiciens, et ce 45 tours avec une reprise de Venus de Shocking Blue.
Venus est une excellente chanson, dès l'intro à la guitare acoustique. Ensuite, il y a les motifs d'orgue, les parties de guitare électrique, et surtout un refrain efficace, même s'il ne me parait pas si évident que ça dans sa construction, avec d'un côté le "She's got it, yeah baby she's got it" et de l'autre "I'm your Venus, I'm your fire, at your desire".
C'est sûrement le plus gros tube pop-rock d'un groupe hollandais dans l'histoire. Numéro 1 un peu partout dans le monde entier, à commencer par la France et les Etats-Unis. Si vous n'avez pas ce 45 tours dans votre discothèque, il vous le faut, et ça ne devrait pas être trop difficile de le trouver à 50 centimes dans le premier vide-grenier venu.
Évidemment, un tel succès attire les convoitises. Ce n'est pas un hasard si, toutes les éditions françaises du 45 tours de Shocking Blue, même la toute première, comportent la mention "Version originale" imprimée sur la pochette. Un moyen comme un autre de se prémunir contre les copies qui à l'époque parasitaient souvent, au moins marginalement, les ventes des grands succès.
Et, avec ce 45 tours de The Blocking Shoes, on a un bel exemple de copie de tube, comme on a déjà eu l'occasion d'en chroniquer ici pour A whiter shade of pale, Seaside shuffle ou Al Capone.
Les recettes sont peu ou prou à chaque fois les mêmes. On s'attaque d'abord à la pochette, ce qui sert à vendre le disque en magasin. Dans ce cas précis, c'était facile : la Vénus de Milo étant assez ancienne pour être libre de droits, on prend une photo avec exactement le même angle, on l'agrandit et on la colle bien au centre de la pochette.
Ensuite, il y a le nom du groupe qui, associé au titre de la chanson, doit inciter les clients à penser qu'il s'agit du disque original. Dans la lignée des Pro Cromagnum ou Prince of Wales All Stars, je dois avouer que les gens derrière la sortie de ce disque ont fait fort en claquant The Blocking Shoes, une façon très habile de réaliser leur contrefaçon en lui adjoignant la force d'une contrepèterie !
Pour ce qui est de l'enregistrement lui-même, l'idée est généralement de reproduire au plus près l'arrangement et la production du tube original. Ce n'est pas exactement le cas avec la version de Venus par The Blocking Shoes, qui est plus électrique et plus lourde, avec des relents psychés. Pas mal dans le genre.
La face B, Blossom' shoes, poursuit dans la même veine, avec un titre largement instrumental, si ce n'est des sortes de "Na na na" qui donnent ce qui aurait pu être la ligne de chant.
Généralement, les musiciens qui enregistrent ces copies sont des professionnels de studio qui restent anonymes. Dans ce cas précis, on a une information qui nous est fournie par la face B, créditée à Sam Oliver. Discogs nous apprend que Sam Oliver serait un pseudonyme du compositeur Bernard Gérard, réputé notamment pour ses musiques de films, comme Ne nous fâchons pas. Il y a donc fort à parier pour que ce soit Bernard Gérard et son orchestre qui se cachent derrière The Blocking Shoes.
Pour finir, notons quelques bizarreries supplémentaires.
Quelques mois plus tôt, c'est Véga qui avait édité en France le 45 tours précédent de Shocking Blue, Long lonesome road. De façon incongrue, on a donc dans le rappel catalogue au dos de cette contrefaçon une mention pour un disque du groupe qui est plagié !
Dans le même ordre idée, quatre mois plus tard et sûrement de manière très éphémère car on voit rarement ce disque, la maison de disques qui distribuait Véga a réédité Venus de Shocking Blue en France sous licence Pink Elephant. On a donc une réédition officielle du tube présentée au verso strictement de la même façon que sa copie !!
Chez Vinyl Vidi Vici, j'ai aussi appris que ces deux titres de The Blocking Shoes ont été réédités à peine trois mois plus tard par Véga, mais sous le nom de The Planeters, sur un EP partagé avec Raymond Ruer.
A ce niveau de recyclage de contrefaçon, ça devient difficile à suivre. D'autant que, en 1971, Shocking Blue a sorti un 45 tours intitulé Blossom Lady. Je ne pense pas pour autant que les hollandais essayaient de rendre la monnaie de leur pièce à The Blocking Shoes !
Ce qui est amusant dans cette histoire, c'est que le "Venus" de Shocking Blue, toute "version originale" qu'elle soit, était un plagiat incontestable de "The Banjo song", une chanson sortie en 1963 du groupe The Big 3 où figurait la jeune Mama Cass Elliot et Tim Rose, qui allait devenir plus tard un folk-singer connu. C'est Tim Rose qui avait écrit cette nouvelle musique sur les paroles du traditionnel "Oh Susanna". Robbie van Leeuwe, le compositeur de Shocking Blue avait au moins le mérite de savoir reconnaître un tube en puissance, quitte à se l'approprier :)
RépondreSupprimerJean-Pierre,
RépondreSupprimerJ'avais lu cette histoire de "Venus" largement inspirée d'une autre chanson, mais je n'étais pas allé écouter "The banjo song". C'est clair que Tim Rose aurait été en droit de réclamer une part des millions que la chanson a dû rapporter à Robbie van Leeuwe...
C'est une bonne pioche mon gars, je ne connaissais pas the banjo song et il n'y a rien à dire de plus: incroyable que ça n'a pas fait de vague, mais tim rose est un curieux cas puisque le hey joe de hendrix est un remake de la chanson de Rose qui lui même avouait que c'est une chanson qu'il avait entendu jeune,il était surtout doué pour reprendre des morceaux et en faire des versions personnelles (morning dew bien avant le dead) et avec succès. Tim Rose n'a pas eu de pot alors qu'incontestablement il était talentueux et pour les rockeurs vieillissant il a été une figure par ci par là pendant des décennies. ph
RépondreSupprimerGérard Brent chante en 64 la version française de Banjo song sous le titre de: Sans pitié pour lui.
RépondreSupprimerS'engager sur la V.O. de Hey Joe est aussi dangereux qu'un champ de mine. Les Surfaris ont la primeur de l'enregistrer en septembre 65 mais la chanson reste dans les cartons pour, déjà, des problèmes de droits. Les Leaves sortent le disque, eux, en novembre. Les pauvres Surfeurs doivent attendre le printemps 66 pour voir enfin Decca publié leur œuvre. Entre temps plusieurs Hey Joe étaient dans la nature.
En parlant de Decca (France)ces derniers avaient publié dans le sillage de Brian Hyland un Itsy bisty...par un mystérieux Brandy Rayland N° 1 aux USA. Une belle contrefaçon.
Phil II
Merci pour tes commentaires, Phil II. J'ai bien noté pour le Brandy Rayland, superbe contrefaçon que je ne manquerai pas d'ajouter à ma collection si j'en ai l'occasion !
RépondreSupprimerBonjour, cette histoire de Brandy Rayland m'a quand même intrigué. Et d'après Discogs ça serait bien Briand Hyland l'interprète. Ils listent d'ailleurs tous les pseudos, sans doute involontaire, du chanteur. On peut imaginer l'imprimeur faire une coquille (une couille, dans leur jargon) ou la maison de disques lui donner les instructions par téléphone. Entre le niveau d'anglais de nos ailleux, quoique le notre..., et la technologie téléphonique de l'époque (allo mademoiselle maillot 38-37) rien est impossible. En analysant le verso de la pochette espagnole, copie-carbone de la française, on note que Itsy bitsy est repris par plusieurs chanteurs avec le fameux slogan: N°1 en Estados Unitos. Bref c'est la chanson qui est en tête des classements US mais la confusion est volontaire concernant l'interprète.
RépondreSupprimerIl me revient enfin une anecdote. En 84, Radio France Isère (FBI actuellement) organisait un jeu, classique à la radio, où ils fallait reconnaître la vedette qui chantait. Une auditrice répond à l'animateur: Brian Hyland, après avoir entendu Itsy bitsy. " Ah! Désolé, c'est presque que ça, mais il s'agit de Brandy Rayland". Déstabilisée l'auditrice insiste mais mollement. J'avais pris ma plume pour écrire à François Dom (le meneur de jeu) en lui expliquant que ce disque était un OVNI est que la VO était bien de Brian Hyland. Il avait gentiment lu ma lettre à l'antenne. Tout ça pour dire que c'est peut-être une est une seule version. Un possesseur du EP nous donnera la bonne réponse. Phil II.
Brandy Rayland est le guitariste de jazz belge Freddy Sunder, décédé en août dernier à l'âge de 85 ans. La Bibliothèque nationale de France a numérisé l'EP, et les extraits en ligne confirment qu'il n'agit pas de Brian Hyland.
RépondreSupprimerÀ noter sur l'étiquette, "Brandy Raylant" au lieu de Rayland. Portant cette même orthographe, les enregistrements sont aussi sortis par Decca en Belgique et par le label économique Starlet en Allemagne.
bon sang mais c'est bien sûr...incroyable et super de voir qu'il y a des personnes qui s'y connaissent à ce point, je me fais l'effet d'un gentil amateur dilettante en lisant tout ça!
RépondreSupprimerph
Merci pour l'info Boursin. 30 ans de ma vie était un enfer, du style "Mais qui est en première base?" Phil II
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