05 février 2011

GO-KART MOZART : Tearing up the album chart


Acquis par correspondance chez Amazon en juillet 2005
Réf : BRUM 2 CD -- Edité par West Midlands en Angleterre en 2005
Support : CD 12 cm
12 titres

Après le deuxième album de Denim, Denim on ice, que j'ai très peu écouté, je me suis un peu désintéressé des activités de Lawrence. La compilation Novelty rock ne m'a pas tenté car j'en avais déjà la grande majorité des titres. Je n'ai pas été au courant sur le moment de la mésaventure survenue en septembre 1997 à Lawrence quand son ultime tentative d'avoir un hit planétaire avec Summer smash sur la major EMI a capoté au dernier moment, le label ayant annulé la sortie du disque au prétexte que la gaité affichée de ce tube au second degré collait mal avec l'émotion suscitée par le "Summer crash" de Diana Spencer. Et quand Go-Kart Mozart a sorti son premier album, Instant wigwam and igloo mixture, j'ai dû être plus ou moins au courant mais je ne me suis pas senti suffisamment concerné pour chercher à écouter ou acheter ce disque. Par contre, allez savoir pourquoi, quand Tearing up the album chart est arrivé à la mi-2005, je me suis dit que c'était quand même un album de Lawrence et j'ai eu envie de le soutenir en achetant le disque et surtout de voir où il en était musicalement.
Et à l'écoute, le premier bonheur c'est de découvrir que Lawrence est effectivement bien là, et surtout qu'il a conservé sa voix et sa façon de chanter de petit frère de Lou Reed. Musicalement, on reste exactement dans la lignée de Denim, avec une certaine distance par rapport aux sujets traités, pour ne pas dire des chansons au troisième degré la plupart du temps, et des références toujours aussi nombreuses aux années 1970, à commencer par la pochette, dont le lettrage est inspiré d'un album de James Last. Quant aux photos, Lawrence fait très fort, puisqu'on le voit en bob et en maillot de bain en couverture du livret ("I still want to be a star but I just sold my guitar and you know the way things are..."). A l'intérieur, qui se déplie en poster, il est dans la même tenue sur une photo plus grande, assis sur un couvercle de toilettes, et on arrive à lire le message écrit sur son ventre (Il avait déjà utilisé ce support en 1990 pour la pochette de la compilation Bubblegum perfume) : "Go-Kart Mozart — Classic upstarts".
Si la continuité avec Denim est si forte c'est parce que, comme Lawrence l'expliquait notamment dans une interview pour Magic en 2003, il s'agit en fait de projets inséparables, les sorties sous le nom de Denim étant réservées aux disques avec un budget conséquent sortis par de gros labels, les "faces B" ou enregistrements faits avec des bouts de ficelle étant réservés à Go-Kart Mozart. Ceci explique pourquoi quatre des titres de cet album devaient initialement sortir sur Denim take over, le troisième album du groupe qui n'a finalement jamais vu le jour.
Au bout du compte, alors que j'ai fini par acheter aussi Instant wigwam and igloo mixture, je dirais que Tearing up the album chart est mon album préféré de la production post-Felt de Lawrence. C'est un album court et compact de douze bonnes chansons, avec une unité très forte, même si la palette de sons va du rock électrique à la pop seventies, en passant par les différentes évolutions des sons synthétiques du début des années 70 aux années 80 (de Jean-Jacques Perrey à la new wave, concrètement). Même si je suppose que le budget ne correspondait pas aux espérances de Lawrence, le son est excellent et les participants au projet assez nombreux, avec notamment Terry Miles et W H Smiffy (le Smithy de Denim, probablement) aux synthés, Tony Barber (ex-Buzzcoks de deuxième génération) et Steve New (Rich Kids, qui est mort à 50 ans en 2010) aux guitares.
Comme j'aime tout le disque, j'ai du mal à en isoler des titres. Après avoir fait référence précédence à Chicory Tip et Foghat, Lawrence cite cette fois Marmalade, un groupe écossais du tout début des années 70, sur Listening to Marmalade, peut-être son titre le plus électrique depuis Index en 1979 ! Bizarrement, Electric rock & roll l'est beaucoup moins, électrique. C'est au contraire un titre très synthétique, presque new wave, sur lequel Lawrence chante au début un peu comme Jona Lewie, dont il a justement repris le Seaside Shuffle de Terry Dactyl and the Dinosaurs en face B de Summer smash. A chaque écoute, ça me fait drôle de l'entendre chanter "Ooh rock & roll"...
Summer is here est très pop et est peut-être à considérer comme un Summer smash bis. Les deux titres qui s'enchaînent On a building site, dont la rythmique rappelle In the Summertime de Mungo Jerry, et Fuzzy duck, une valse rythmée par un son étranglé de canard électronique, sont peut-être ceux où Lawrence donne le plus l'impression de nous tirer la jambe et d'avoir sa langue dans la joue, comme disent les anglais.
Plus de quinze ans après son départ de Felt, il semble que Lawrence avait encore un message à faire passer à Maurice Deebank. Il utilise pour Delta Echo Echo Beta Alpha Neon Kettle l'alphabet radio international, mais le message reste cryptique, il semble juste être question du souvenir d'un contrôle policier. Le titre lui-même sonne comme du Devo ou du Taxi-Girl première période.
Au moins deux titres font clairement référence au monde de la drogue et des drogués, At the DDU (Au centre anti-toxicomanies), qui commence assez électrique avant de partir dans une envolée pop, sur un refrain surprenant, "You know that massive shot of meth won't hit you at the DDU", et Donna & the Dopefiends ("Hey Donna come on, I want to score, Hey Donna come on, I want some more"). C'est un monde qui de prime abord aurait semblé complètement étranger au Lawrence de Felt, mais ces paroles et les photos d'un Lawrence décharné donnent à penser qu'il y a du vécu là-dedans, ce que confirme un article de 2010 du Guardian qui parle d'une période où Lawrence a été au fond du trou, accro à l'héro et sans domicile.
Cette période semble heureusement révolue et 2011 devrait être une année pleine de projets réalisés pour Lawrence (mais méfions-nous, ces projets étaient déjà annoncés pour 2010 et Lawrence est coutumier des reports incessants), avec deux disques pour mettre un point final à Go-Kart Mozart, le mini-album Mini-Mart et l'album On the hot dog street, et deux projets avec Paul Kelly, le documentaire, Lawrence Of Belgravia, dont une ébauche a été projetée à Londres il y a déjà plusieurs années, et un livre de photos de Felt accompagnées d'extraits du journal de Lawrence.

Tearing up the album chart est toujours disponible, notamment chez son distributeur Cherry Red.

2 commentaires:

Richard Müller a dit…

Juste reçu Poem of the River aujourd'hui (le CD, j'ai encore le vinyle que je ne peux plus écouter), et ravi d'apprendre plus sur la vie de Lawrence après Felt !

Pol Dodu a dit…

Richard,
"Poem of the river", excellent choix ! C'est l'un de mes préférés de Felt. J'imagine qu'avant d'arriver sur ce billet récent, tu es tombé sur celui où je parle justement de "Poem of the river"