30 novembre 2014

THE PAGE BOYS : You're my kind of girl


Acquis chez Rough Trade à Londres fin 1983 ou en 1984
Réf : WHAAM 10 -- Edité par Whaam! en Angleterre en 1983
Support : 45 tours 17 cm
Titres : You're my kind of girl -/- In love with you

Je regretterai toujours d'avoir vendu, à la fin des années 1980, mon 45 tours Modesty Blaise de Direct Hits, aux mauvais prétextes qu'il ne me plaisait pas tant que ça et qu'il valait un peu d'argent. J'aurais dû le garder, ne serait-ce que parce que c'était un 45 tours Whaam!, le propre label de Television Personalities. Du coup, il ne me reste que huit des quinze singles publiés par le label (ce qui n'est déjà pas si mal), avec d'excellentes choses, Three wishes de TV Personalities, le Gifted children, le premier Pastels, le premier 1000 Mexicans, le Khartomb et d'autres qu'il faudrait que je réécoute mais dont je ne garde pas un grand souvenir, les disques de Le Mat et Marble Staircase.
Et le huitième, c'est donc cet unique disque de The Page Boys (leur discographie est complétée par un troisième titre sur la compilation Whaam! All for art and art for all), et on a affaire à une pépite pure pop, comme dirait Nick Lowe.
Comme presque tout ce qui touche aux Television Personalities, il y a là une fascination extrême pour les années 1960, il suffit de regarder les deux côtés de la pochette, mais ce disque est aussi bien de son époque, avec un son bricolé maison à base de boite à rythmes et de synthés en plus des guitares.
Le groupe était un duo formé de Colin Gregory et Alan Walmsley, originaires du West Yorkshire si j'en crois l'adresse au dos du disque.
Côté paroles, comme les titres le laissent deviner, on est dans la chanson d'amour au niveau des premiers Françoise Hardy, et côté musique, c'est de la pop très réussie, aussi bien dans l'interprétation musicale, le chant et même la production, malgré ou plutôt à cause du côté ultra cheap.
You're my kind of girl fonctionne notamment grâce à sa petite ligne de guitare cristalline, au son de cuivres (je n'arrive pas à imaginer que ça pourrait être de vrais instruments) et aux deux breaks qui suivent le refrain ("You're my kind of girl, wow wow wow wow" : c'est vraiment du basique) avant que ça reparte de plus belle. Je suis presque étonné que Saint Etienne n'ait pas encore eu l'idée de reprendre cette chanson qui leur conviendrait parfaitement.
In love with you utilise les mêmes ingrédients, avec un chant à deux voix encore plus réussi, et est tout aussi bien.
Courant 1984, les TV Personalities ont accepté une somme d'argent du management du groupe Wham pour accepter d'arrêter leur label. Dès 1985, ils en ont lancé un nouveau, Dreamworld. Parmi les toutes premières sorties du label, il y avait le premier disque de One Thousand Violins, un nouveau groupe au sein duquel on retrouvait les deux membres des Page Boys. Je n'ai jamais écouté leurs productions, mais le groupe a sorti avec un certain succès trois singles chez Dreamworld, et d'autres un peu ailleurs avant de se séparer en 1987. Une anthologie, Halcyon days, est parue récemment chez Cherry Red.
Par la suite, Colin Gregory a fondé le groupe baggy The Dylans, qui lui a eu un grand succès. Malheureusement, Alan Walmsley est mort en 1992.


Une publicité pour Whaam! Records parue dans la presse en 1983.

23 novembre 2014

SOUCOUPES VIOLENTES : Et pour un oui et pour un non


Acquis chez Royer à Epernay le 6 septembre 2014
Réf : NEW 134 CD -- Edité par New Rose en France en 1990
Support : CD 7,5 cm
Titres : Et pour un oui et pour un non -- Cracher dans la soupe -- Les roses fânées

Chez Royer, régulièrement depuis 2011, ils continuent de sortir de vieux disques de leurs réserves pour les solder. Souvent des vinyls, avec beaucoup de disques de variétés, mais aussi des CD ces derniers temps. En septembre-octobre, j'ai été bien content d'y trouver quelques disques, dont ce maxi des Soucoupes Violentes. Il m'a fallu quelques jours pour me rendre compte que j'avais déjà ce disque dans son édition maxi-45 tours (acheté neuf, visiblement, mais je ne sais plus du tout où et quand), mais même si je m'en étais souvenu, à 50 centimes j'aurais quand même acheté ce mini-CD glissé dans une boite de taille normale avec son adaptateur. Je croyais aussi ne pas avoir déjà chroniqué de disque de ce groupe, mais ils occupaient, avec une reprise de Love potion #9, une face d'un 45 tours Nineteen partagé avec Ben Vaughn.
Ce disque, entièrement chanté en français, est produit par Elliott Murphy, qui était alors leur compagnon de label. Après Marc Police des Wampas et Yves Calvez des Coronados sur les deux premiers albums, ça leur fait une belle brochette de producteurs. Dans leur discographie, ce single s'inscrit pile entre les albums Va savoir (1989) et A des années lumières (1991), le dernier avant la séparation du groupe première période, et il ne figure sur aucun des deux.
Et pour un oui et pour un non est une excellente chanson pop-rock, accompagnée par ce qui sonne à mes oreilles comme une sorte de vibraphone mais est peut-être un clavier. Côté paroles, il est question d'opinion et d'indécision : "Pour faire preuve d'imagination, ceux qui changent pas, c'est des cons, et moi suivant les saisons, du monde je me refais une vision.Et pour un oui et pour un non, on change tout le temps d'opinion, et pourtant, pourtant, à quoi bon.". Selon une biographie officielle, une vidéo de cette chanson a été diffusée par Canal Plus, mais je n'en ai pas trouvé trace en ligne. Elliott Murphy a aussi été leur invité pour un concert à l'Elysée-Montmartre.
Cracher dans la soupe, encore un bon titre de chanson trouvé par Stéphane Guichard, au son plus rock, n'est pas mal non plus, avec les choeurs et l'orgue sur le refrain.
Le disque se clôt avec une reprise d'une chanson écrite par Gainsbourg pour Dutronc. Les roses fânées a été créée en 1972 à la télévision par Dutronc, Gainsbourg et Birkin. Une version en studio a finalement été incluse sur l'album de Dutronc sorti en 1975. Arrivé en 1990, il devenait peut-être un peu convenu de reprendre Gainsbourg, mais cette ode à un gigolo est suffisamment de mauvais goût pour faire sourire ("J'aime les vieilles peaux, j'aime les vieilles paumées" - avec "Gigolo" en réponse en choeur) et, comme toute reprise, elle a l'intérêt de fixer les points de référence du groupe.
Les Soucoupes Violentes volent à nouveau depuis 2007, avec Stéphane Guichard comme seul membre original. L'album S'attendre au pire est sorti en 2009. Un nouveau, Sur tes lèvres (vingt-sept ans après Dans ta bouche... !), est sur le point de sortir. On y trouvera Trop méchante, avec Didier Wampas comme invité.

22 novembre 2014

JULIAN COPE : I come from another planet, baby


Acquis par correspondance probablement chez Action Records en Angleterre à la fin des années 1990
Réf : ECS CD 22 -- Edité par Echo en Angleterre en 1996
Support : CD 12 cm
Titres : I come from another planet, baby -- How do I understand my motorman ? -- If I could do it all over again, I'd do it all over you

J'ai arrêté d'acheter les albums de Julian Cope au moment de leur sortie après la déception My nation underground. Par la suite, j'ai récupéré deux bons disques, Peggy suicide et 20 mothers, et les singles que j'ai continué d'acquérir me font dire qu'il y a évidemment de très bonnes choses sur Jehovahkill, Autogeddon et Interpreter.
La preuve, avec ce premier single extrait d'Interpreter en 1996, un album qui, outre l'intérêt marqué par Cope pour les mégalithes, la cosmologie et pas mal de signifiants néo-hippies, est en partie inspiré par sa participation aux grands mouvements de protestation qui ont eu lieu contre en 1995 et 1996 contre les travaux de la déviation de Newbury et les destructions forestières qu'ils allaient entraîner.
Même s'il était déjà embarqué dans l'enregistrement de longues pistes ambiantes et ésotériques, Cope n'avait pas perdu la main en 1996 pour composer d'excellentes pépites psyché-pop. C'est le cas ici avec I come from another planet, baby et on s'en rend compte dès l'intro, avec les deux guitares, l'une acoustique et l'autre saturée (on n'est pas si loin de Sunspots). Ça démarre ensuite sur un rythme assez rapide bizarrement dédoublé sur la caisse claire. Ensuite, un couplet à deux étages assez rapidement expédié avant le refrain emballant, et sa prononciation exagérée de "baby". Il y a des bruitages dans tous les sens sur les refrains suivants, un petit riff de synthé, et le tout est emballé et pesé magistralement en 3'20.
La bonne surprise c'est que, même s'il n'a pas été retenu pour l'album, le deuxième titre, How do I understand my motorman ? est de la même excellente veine, celle des deux premiers albums solo, avec un excellent refrain aux voix doublées. Une chanson à inclure dans la compilation future (si elle existe déjà, je l'ai ratée) des excellentes faces B de Julian Cope.
Patatras par contre pour le dernier titre, If I could do it all over again, I'd do it all over you, neuf minutes éprouvantes d'illustration sonore sur laquelle Cope débite, en parlant, une longue histoire où il est entre autres question d'un gars qui ressemble à Boris Becker, avec quand même des saillies amusantes ("Wouldn't it be great if Tangerine Dream had been really sexy ?"). Mais il y a pire, et surtout plus long : le CD 2 de ce single, un remix dans le style "Wessex post-ambient therapy musics" de I come from another planet, baby intitulé Ambulence, dans lequel on n'entend que quelques bribes de la chanson originale et qui dure plus de trente-deux minutes ! Et ce deuxième disque, comme c'était pas cher, j'avais commis l'erreur de l'acheter en même temps que cet excellent single.


17 novembre 2014

THE SHAKY HANDS : Lunglight


Offert par Philippe D. à Paris le 3 juillet 2014
Réf : VVR1051942P -- Edité par Memphis Industries en Angleterre en 2008
Support : CD 12 cm
13 titres

Voilà donc le disque de The Shaky Hands dont l'écoute m'a donné envie de ressortir mon Duende de Shrimp Boat.
Comme pour beaucoup des disques offerts par Philippe D. l'été dernier, c'est un CD promo sous pochette cartonnée, sans aucune indication sur la composition du groupe et la production du disque. Et à chaque fois je profite de l'occasion pour découvrir ces groupes inconnus avec le minimum de préjugés, en évitant absolument de me renseigner sur eux avant d'avoir écouté le disque.
Là, dès les premières secondes, j'ai senti qu'il y avait quelque chose de spécial. Un rythme surprenant, des sons décalés, qui pourraient aussi évoquer Pavement, mais c'est donc bien à Shrimp Boat que j'ai pensé lors de cette première écoute. Il n'y a pourtant sûrement aucun rapport direct, et je parierais bien que les membres de The Shaky Hands ne les connaissent pas mais, même à presque une génération d'écart, avec les mêmes ingrédients et en essayant pareillement de se tenir à la marge des normes de la chanson pop-rock, on arrive à un résultat assez proche dans l'esprit, même si Les Mains Tremblantes sont sûrement un peu moins décentrées que le Bateau à Crevettes.
The Shaky Hands est un groupe de Portland, qui a sorti quatre albums pendant son existence de 2003 à 2011. La formation était des plus volatiles : la simple lecture des multiples changements de personnel dans leur biographie a commencé à me donner le tournis. Lunglight est leur troisième album et c'est un excellent disque, qui commence par un enchaînement imparable de quatre titres, A new parade, Loosen up, Air better come et We are young, qui n'est pas sorti en single mais pour qui une vidéo a été diffusée. Par la suite, comme avec Shrimp Boat, les rythmes varient, avec des sonorités un peu reggae (No say), voire tropicales (Show me your life). Le groupe se lâche un peu sur la fin avec trois titres un peu plus longs qui s'enchaînent aussi très bien, Love all of, Wake the breathing light et Oh no.
Après Deerhoof et The Shaky Hands, j'espère qu'il me reste encore d'aussi bonnes découvertes à faire dans la pile de disques de Philippe !

Des extraits de tous les titres du disque sont en écoute chez Juno.

15 novembre 2014

SHRIMP BOAT : Duende


Acquis probablement chez Parallèles à Paris en 1992
Réf : R27882 | A-HAON 022-2 -- Edité par Rough Trade | Bar None en Angleterre en 1992
Support : CD 12 cm
16 titres

Cette semaine, l'écoute d'un album de The Shaky Hands, l'un des disques offerts par Philippe D. cet été, m'a donné l'envie de réécouter cet album de Shrimp Boat. J'ai longtemps pensé que Duende était leur premier album, mais en fait c'est juste le premier distribué par chez nous. Avant ça, depuis 1988, ils avaient sorti deux cassettes, Some biscuit et Daylight savings, et un album, Speckly.
Quand on a reçu Duende à La Radio Primitive en mars 1992, j'en ai passé un extrait trois semaines de suite dans mon émission Vivonzeureux!, et je crois bien qu'on en passait aussi dans Sueur d'hommes avec Raoul Ketchup et Phil Sex.
Shrimp Boat est un groupe de Chicago, associé par la suite au post-rock car deux de ses membres ont fondé The Sea and Cake, mais si Shrimp Boat fait du post-rock, alors je découvre à l'instant que j'adore le post-rock ! (Seul le dernier titre, Tartar's mark est assez jazz et free pour être insupportable à mes oreilles).
Non, la recette de Shrimp Boat, avec des ingrédients simples (basse, guitare, batterie, plus un peu de banjo, de saxophone et de trompette joué par les quatre membres du groupe), c'est de bricoler (voire d'improviser en studio, mais ça ne se sent pas) des compositions attrape-tout, associant souvent rythmes bancals et sons discordants. J'ai acheté le disque en CD peu de temps après sa sortie, mais en l'écoutant il m'est souvent arrivé de vouloir vérifier s'il tournait à la bonne vitesse !
Le disque s'ouvre avec un instrumental, Back to the Ukraine (le pays était à la une de l'actualité pour d'autres raisons en 1991, lorsqu'il a retrouvé son indépendendance). Lorsque Jing jing démarre, on croit que le disque va être entièrement instrumental, mais non, on découvre au bout de quelques secondes le chant légèrement étranglé, de Sam Prekop ou Ian Schneller.
Il y a dans ce disque des éléments de folk, de blues, de rock bien sûr. On pense tour à tour à des Feelies plus déjantés, à des Feelings moins braillards, à Camper Van Chadbourne aussi, ou à Califone et aux disques instrumentaux de Calexico.
Je n'ai trouvé qu'un seul titre en ligne sur YouTube, l'excellent Sunday crawls along, avec une partie instrumentale qui me semble bien faire référence à Egyptian reggae.
"Duende", ça sonne espagnol, et effectivement ça veut dire "lutin". Aucun rapport, mais le titre du disque que je préférais à l'époque, Chimp, me fait furieusement penser aujourd'hui aux Pixies, ceux excités et dérangés de Come on pilgrim. Parmi mes autres titres préférés, il y a aussi New song waltz, River of wine avec ses cuivres et l'instrumental Duende.
Je m'étais procuré peu de temps après sa sortie l'abum suivant, et le dernier du groupe, Cavale, mais il ne m'avait pas plu autant.

Des extraits de trente secondes des titres de Duende sont en écoute chez AllMusic.
Aum Fidelity a édité en 2004 un coffret d'archives de Shrimp Boat, Something grand, et a ressorti Speckly. Le label japonais Bomba a lui réédité les autres disques, qu'on trouve assez facilement à prix correct.
A lire : un entretien de Ian Schneller, de Shrimp Boat (en anglais), avec Quentin Legrand pour Hyacinth Magazine.

09 novembre 2014

JOHN LEE HOOKER : Shake it baby



Offert par Fabienne M. au vide-grenier collections de Dizy le 1er novembre 2014
Réf : 10 644 -- Edité par Brunswick en France en 1963
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Shake it baby -- Hey baby -/- I'm nervous -- I wanna see my baby

Le week-end dernier, il y avait une petite bourse aux collections à Dizy. Peu de disques, sauf sur le stand d'un grand amateur, qui vend des doubles de sa collection à prix raisonnable. J'avais longuement hésité devant ce superbe EP de John Lee Hooker, à la très belle pochette en parfait état, à peine plus cher que ce que je mets habituellement pour un disque. On était à peine sorti que je commençais déjà à regretter de ne pas l'avoir pris et Fabienne a abrégé mes tourments en décidant sur le champ de me l'offrir. Demi-tour, donc, et achat du disque, avec en cadeau bonus par Michel, le vendeur, la pochette vide d'un autre superbe EP, enregistré lui aussi lors du American Folk Blues Festival, mais un an plus tard, en 1963.
Bon, je ne cacherais pas que j'ai eu un instant de déception une fois arrivé à la maison. J'avais vérifié l'état du disque (nickel) et repéré que c'était le bon label, Brunwick, le bon titre général, American Folk Blues Festival, et le bon artiste principal crédité (on reviendra sur ce point), John Lee Hooker. J'avais aussi vu qu'il y avait bien "baby" dans le premier titre, mais dans le feu de l'action je n'avais pas noté qu'il s'agissait non pas de Let's make it baby, le disque correspondant à ma pochette, mais de Shake it baby, enregistré le même jour et sorti juste avant. Fâcheux, mais je me suis vite consolé car 1) les quatre titres du EP Shake it baby sont vraiment excellents et 2) la pochette de Let's make it baby est bien plus réussie que l'autre.
J'ai toujours connu les tournées American Folk Blues Festival lancées par le duo Horst Lippmann et Fritz Rau, par les disques qui ont été édités au fil des années et aussi par l'annonce des éditions qui ont eu lieu dans les années 1980, mais je ne m'y étais jamais intéressé dans le détail et je n'étais pas suffisamment conscient de l'importance qu'elles ont eues pour la diffusion du blues en Europe. Il suffit de dire que la première édition, en 1962, au cours de laquelle ce disque a été enregistré, alignait John Lee Hooker, donc, mais aussi Memphis Slim, Willie Dixon, Helen Humes, Shakey Jake, Sonny Terry et Brownie McGhee, Magic Sam et T-Bone Walker ! Le tout pour une grosse quinzaine de dates en octobre, surtout en Allemagne, mais aussi en Suisse, Autriche, Angleterre et à Paris, ponctuées d'enregistrements radio et télé et de jam sessions dans des clubs une bonne partie de la nuit après les concerts.
Mais le 18 octobre 1962, ce n'est pas dans un club que tous les musiciens de la tournée se sont retrouvés (à l'exception d'Helen Humes, qui avait un contrat d'exclusivité avec un label), mais au studio Deutsche Grammophon de la ville, pour une session qui a duré jusqu'à cinq heures du matin, dont l'enregistrement a fait l'objet d'un album-souvenir douze titres, le premier de la série. Cet album a été édité en France par Polydor.
L'enregistrement s'est donc fini le 19 au matin à Hambourg. Le 19 au soir, toute la bande était à Paris et faisait un bœuf mémorable une bonne partie de la nuit aux Trois Maillets. Le 20 au soir, ils étaioent à L'Olympia pour deux concerts mémorables, à 18h et minuit. Le compte-rendu de cette soirée par Christian Casoni dans le magazine Blues Again est captivant (Haw! Haw! Haw! Haw! 1962: John Lee Hooker à l’Olympia).
Avant l'album, Brunswick a édité en France deux EP tirés de la session du 18 octobre 1962, Shake it baby et Let's make it baby. Ces deux disques ont été très vite repressés sous étiquette Polydor, comme l'album. Les deux EP sont crédités au seul John Lee Hooker, mais les renseignements discographiques fournis au dos des deux pochettes indiquent bien que, dans les deux cas, il n'est présent comme artiste principal (guitariste-chanteur) que sur le premier titre.
Dans le cas qui nous préoccupe (le disque que j'ai), il s'agit de Shake it baby, un excellent rhythm and blues rapide qui, j'ai été surpris de l'apprendre, a eu un très bon succès commercial en France (100 000 exemplaires auraient été vendus). A tel point qu'il a une importance culturelle particulière puisque c'est sur Shake it baby que Claude Brasseur, Samy Frey et Anna Karina dansent dans une scène fameuse de Bande à part de Jean-Luc Godard. Dans le film, le titre a été réorchestré par Michel Legrand, avec de l'orgue et des cuivres notamment, mais dans le reportage télé réalisé sur le tournage de la scène, c'est bien la version de Hooker qui est diffusée. Hooker enregistrera une vraie version studio de Shake it baby en 1965 pour son album It serve you right to suffer.
Les trois autres titres n'ont rien à envier à Shake it baby. I wanna see my baby de T-Bone Walker pourrait même être la suite du premier. Hey baby de l'harmoniciste Shakey Jake est un excellent blues. Quant à I'm nervous de Willie Dixon, un titre à la fois excellent et hilarant, sorti initialement sur son premier album Willie's blues en 1959, il y a un intérêt supplémentaire car il ne figure pas parmi les douze sélectionnés pour l'album.
Les versions de Hey baby et I'm nervous présentées en vidéo ci-dessous ne sont pas celles du disque, mais elles ont été enregistrées au tout début de la tournée, le 4 octobre 1962 à Baden-Baden, pour l'émission Jazz gehört und gesehen de Horst Lippman.
Excellent disque donc, et superbes pochettes. Maintenant, si vous voulez me faire des cadeaux, sachez qu'il me manque la pochette du Brunswick 10 644 ainsi que les disques du Brunswick 10 650 et du Fontana 466.024 ME !





02 novembre 2014

LES CALAMITES : Vélomoteur


Acquis neuf en solde à Reims vers la fin des années 1980
Réf : 887 253-2 -- Edité par Polydor en France en 1988
Support : CD 12 cm
Titres : Vélomoteur -- J'en ferais bien mon quatre-heure -- Vélomoteur (Version longue)

Après A bride abattue et Pas la peine, on poursuit et on termine notre survol de la courte discographie des Calamités avec leur tout dernier disque paru, Vélomoteur.
Un disque très particulier, puisqu'il est sorti alors que le groupe s'était séparé en 1985 après Pas la peine. Le succès de ce disque au Top 50, rien à voir avec la diffusion confidentielle des premières sorties chez New Rose, a été tel que, pour le grand public, c'est le seul et unique disque du groupe. Pour les rockers un peu puristes, c'est sûrement le disque de la trahison, du portrait de pochette signé Pierre et Gilles à la production léchée de Daniel Chenevez de Niagara.
Pour ma part, ce qui compte c'est que la chanson est une grande réussite pop, et aussi que ce disque existe par la volonté d'un fan, Daniel Chenevez, qui a convaincu la moitié du groupe (Caroline Augier et Mike Stephens ne sont pas de la partie) de se reformer pour enregistrer deux titres qui étaient restés dans les cartons du groupe au moment de sa séparation.
Question production, le seul vrai reproche qu'on peut faire à Vélomoteur, c'est une batterie au son très eighties et mixée très en avant (mais on était justement en plein dans les années 1980...). Du coup, l'orgue par exemple est très discret. Dans un style très proche avec voix féminines, références sixties à fond et son années 80, je ne vois qu'un autre groupe, les écossaises de Strawberry Switchblade, un groupe lui aussi initialement obscur, qui a eu un grand tube, Since yesterday. ,
C'est un des rares cas où je conseillerais la Version longue (près de cinq minutes) plutôt que la version radio. Contrairement à l'habitude, cette version n'est pas un remix à rallonge censément pour discothèque et, quand on repasse à la version radio après l'avoir écoutée, on a l'impression que la chanson commence en plein milieu et la longue intro avec guitares et chœurs en "Du du du" manque vraiment.
Comme souvent chez Les Calamités, les paroles sont très réussies, avec l'exploit d'utiliser une langue assez châtiée, tout sauf rock. Le mot "vélomoteur", par exemple, on le voit sur les certificats d'assurance, mais je crois n'avoir jamais entendu quelqu'un l'utiliser dans la vie courante. On parlait de Mobylette, de mob, de bécane, de tire, de chignole, mais pas de vélomoteur.
C'est comme l'expression "en faire son quatre-heures", qui donne son titre à la face B, J'en ferais bien mon quatre-heure, petite métaphore pâtissière pour un garçon à croquer, en version dépouillée pour le coup avec juste de la guitare acoustique et des voix.
Au total, voilà l'un des rares grands succès du Top 50 qu'on peut consommer sans modération. Ce grand succès fait qu'on peut trouver régulièrement ce disque en 45 tours pour pas cher.




01 novembre 2014

JOHNNIE TAYLOR : I could never be President


Acquis sur la braderie-brocante d'Ay le 26 octobre 2014
Réf : 169 055 -- Edité par Stax en France en 1969
Support : 45 tours 17 cm
Titres : I could never be President -/- It's amazing

Généralement, à cette époque de l'année, je n'attends trop rien de la braderie-brocante d'Ay, où le côté braderie prédomine et où les brocanteurs sont surtout des professionnels concentrés ici car il y a très peu de manifestations organisées les dimanches d'automne.
Pourtant, il peut faire beau, même en automne, et on peut trouver des disques à prix correct, même chez certains pros. Dimanche dernier, j'ai été tout content d'acheter quelques disques sur trois stands différents, dont quatre 45 tours années cinquante et soixante très intéressants, auprès d'un collectionneur qui vend une partie de son surplus. 5 € les quatre disques, ça reste dans mes prix, et ce disque de Johnnie Taylor faisait partie du lot.
En fait, je ne connaissais pas vraiment Johnnie Taylor, même si je dois avoir son Who's making love et d'autres de ses titres sur des compilations, et même si Philippe R. m'avait justement parlé de lui il y a quelques semaines.
Si j'ai choisi ce disque, c'est pour Stax, bien sûr, et pour l'association entre la photo de ce noir très chic en veston-chemise-cravate et le titre I could never be President. En voyant ça, j'ai aussitôt pensé que, si Johnnie "ne pourrait jamais être Président", c'est parce qu'il est noir et je me suis dit que les choses avaient un minimum évolué quarante ans plus tard avec l'élection d'Obama.
Il s'avère que, si le narrateur de la chanson "ne tiendrait pas une journée" comme Président, ça n'a rien à voir avec une couleur de peau, qui n'est pas explicitement mentionnée dans les paroles. C'est un peu décevant, mais la chanson a en fait l'apparence d'une chanson d'amour, tout en faisant passer quelques messages politiques : "je baisserais les impôts juste pour te faire plaisir" et "je rapatrierais les gars du Vietnam pour les stationner devant ta porte afin que le monde ne te fasse pas de mal".
La très bonne nouvelle, c'est que la chanson est très bonne, un funk léger propulsé par une bonne partie des MG's, avec des cuivres et des choeurs et une bonne prestation de Taylor.
En face B, It's amazing, n'est pas mal du tout non plus. Il y a des cordes, mais ça reste funky, dans une ambiance qui anticipe un peu les BO de Shaft.
On retrouve ces deux titres sur son album The Johnnie Taylor philosophy continues, lui aussi sorti en 1969. Cet album a été édité en France à l'époque, avec une pochette différente et au recto un autre titre, Testify, celui de la chanson d'ouverture.