28 février 2014

FRANCE ANGLETERRE : Michael


Offert par Pascal D. par correspondance en février 2014
Réf : Wang Bang DCC -- Edité par Wang Bang en France en 1982
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Michael -/- Jonathan Richman

Je n'ai toujours pas eu l'occasion de rencontrer Pascal D., mais ça fait déjà cinq ans qu'on se connait, grâce à Philippe Dumez, qui avait reçu de chacun de nous cette année-là une compilation maison sur CD-R pour la nouvelle année. Bien qu'il n'y ait aucun titre commun aux deux disques, il a pensé qu'on pourrait bien s'entendre et a envoyé à chacun une copie de la compile de l'autre. Et effectivement, depuis cette date, nous avons pas mal échangé, Pascal et moi, à coup de CD ou de messages.
En 2011, Pascal a mis sur sa compilation le Jonathan Richman de France Angleterre, un titre mythique pour moi depuis que j'ai découvert l'existence de ce 45 tours vers la fin des années 1980, chez Jean-Pierre Moya. Sachant que Pascal habite près de Rouen, la ville d'origine de France Angleterre, je me suis risqué à lui demander s'il pouvait essayer de m'en récupérer un exemplaire, même si j'étais bien conscient qu'il est très dur de mettre la main dessus.  Pascal avait un avantage, étant ami d'un membre du groupe, mais d'espoir en fausse piste, ça n'a pas été simple. Le copain n'avait plus d'exemplaires du disque et Pascal a dû faire preuve de patience et d'ingéniosité pour en trouver un. Et cette semaine, quand j'ai reçu de sa part un paquet carré d'une vingtaine de centimètres de côté, j'ai immédiatement su qu'il était parvenu à nos fins !

Je n'ai absolument rien su de France Angleterre quand le groupe était actif et a auto-édité trois 45 tours à raison d'un par an de 1980 à 1982. Des membres du groupe ont récidivé sous le nom de Blaxx en 1985. Sur cet ultime disque, le groupe compte cinq membres, Nate et Nathalie aux choeurs, Eric à la batterie, Bruno à la basse et Thierry, l'auteur et compositeur des chansons (dont la face A du deuxième 45 tours, au titre mémorable, Je veux te pénétrer avec une guitare !), au chant, à la guitare et à l'orgue.
La pochette est très bien et le disque dans son ensemble est une grande réussite.
En face A, Michael est en fait une reprise, d'un single de 1969 des Equals, Michael and the slipper tree. Baby come back, je connais très bien et depuis longtemps, mais celui-là je ne suis jamais tombé dessus. France Angleterre ne se contente pas d'adapter la chanson en français (tout en prononçant le prénom du titre à l'anglaise) : ils ont aussi fortement accéléré le rythme et obtiennent donc une excellente note pour cet exercice difficile qu'est la reprise.
L'hommage n'est pas un exercice facile non plus, et en intitulant leur face 1 Jonathan Richman, France Angleterre en rend obligatoirement un. Ils ont sûrement été parmi les tous premiers à le faire. Certes, comme d'habitude, Eno a joué aux premiers de la classe en faisant référence aux Modern Lovers dans The true wheel sur Taking tiger mountain (by strategy) dès 1974, mais pour ce qui est de Jonathan lui-même, je pense que France Angleterre a été le premier, avant les Wampas et Les abeilles en 1987, avant les Rockingbirds et leur Jonathan Jonathan, avant Helen Love et Il fait beau et avant Frank Black et son The man who was too loud (et c'est tout ce qui me vient de tête, mais la liste est sûrement plus longue).



La chanson de France Angleterre, très bonne. Elle ne fait pas un portrait de Jonathan Richman et ne fait pas directement référence à sa musique. Simplement, son "héros" se prend pour lui, et Jonathan apprécierait sûrement le vers "Je fais des rêves dans mon lit, j'les réalise dans la vie". A l'écoute, je me disais que la basse et le côté tendu du rythme me rappelaient un peu le tube de Coutin, J'aime regarder les filles. Je me plante peut-être, mais en tout cas, les paroles citent directement celles de deux autres gros succès de l'époque, Antisocial de Trust et Faut que j'me tire ailleurs de Bill Deraime.

Merci encore à Pascal pour ce très beau cadeau. Et, puisque l'histoire du rock à Rouen est très riche, si quelqu'un a envie de l'imiter, qu'il n'hésite pas ! Je ne promets pas d'avance de chroniquer le disque, mais le 45 tours des Olivensteins ou Ils veulent coucher avec Sheila/Bip bip d'Oenix ne dépareraient pas dans mes étagères. Il y a aussi beaucoup d'autres villes où des choses intéressantes ont été produites et je trouve toujours le moyen de faire de la place à de nouveaux disques dans mes étagères...



23 février 2014

NEW WAVE


Acquis au Record & Tape Exchange de Pembridge Rd à Londres en 1984
Réf : 6300 902 -- Edité par Vertigo en Angleterre en 1977
Support : 33 tours 30 cm
16 titres

Quand on regarde la pochette, il y a quelque chose de bizarre. La compilation s'appelle New wave, mais le mec en photo qui crache sa bière est clairement un punk. Ça demande quelques explications.
D'abord, notons que ce disque a été édité en 1977, en Angleterre, en pleine vague punk, avant qu'on soit vraiment entré dans le post-punk, donc, et surtout avant que la retombée de nouveaux groupes engendrée par l'explosion punk ait été labellisée new wave.
Si ce disque de punk rock s'appelle New wave, on le doit avant tout à une personne très influente, Seymour Stein, le patron du label américain Sire Records. Il avait décidé que, vu le caractère ordurier du terme "punk" aux Etats-Unis, il aurait du mal à vendre cette musique dans les magasins et dans les foyers. Il s'est donc employé très activement à remplacer le mot punk par une expression qui lui convenait mieux, "new wave rock 'n' roll" (voir Are we not New Wave ? : Modern pop at the turn of the 1980s par Theo Cateforis, page 25). Cela a donné notamment une campagne de publicité dans les médias et les magasins avec le slogan "Don't call it punk", et aussi un double 45 tours promo, New wave rock 'n' roll : Get behind it before it gets past you. Avec le recul, on sait que Stein a plus ou moins réussi aux Etats-Unis à faire désigner le punk "new wave". En Europe, par contre, si le terme a pris, c'est au contraire en opposition au punk, pour qualifier tout ce qui a commencé à apparaître de nouveau en 1977-1978 et qui n'était visiblement pas du punk.



J'ai trouvé ce disque dans la cave au Record & Tape Exchange, pour 50 pence, à l'époque où mon séjour à Londres m'a permis d'y passer des heures. C'était un temps aussi où, des compilations de ce genre à moins d'une livre, il y en avait des centaines. J'ai dû faire des choix, et j'ai souvent des regrets en repensant à ce que j'y ai laissé, comme Is the war over ?, avec les premiers titres de Young Marble Giants. Sur ce disque, il y n'y avait quasiment aucun titre que j'avais déjà, je ne pouvais que me laisser tenter, au bout d'un moment.
Cet album est édité en Angleterre par Vertigo, un label du groupe Phonogram, qui distribuait alors Sire, ceci explique cela. Il sert donc à faire la promotion du catalogue Sire, mais aussi d'autres étiquettes du groupe. Ça donne une sélection très hétéroclite de douze artistes (dont quatre ont droit à deux titres chacun).
Il y a d'abord des précurseurs du punk. Si les New York Dolls sont ici parfaitement à leur place (avec Personality crisis surtout), ce n'est pas absolument le cas pour Patti Smith, surtout que le titre choisi est Piss factory, la face B de son tout premier disque, Hey Joe, un OVNI limite free jazz. Par contre, c'était intéressant pour ses fans de trouver ce titre ici car le 45 tours original ne devait pas être facile à trouver. Smith au moins a côtoyé les punks au CBGB's, ce qui n'est pas le cas de Skyhooks, les véritables intrus ici (les seuls à ne pas être listés au recto de la pochette, d'ailleurs), puisque Horror movie a certes été un tube dans leur pays en Australie, mais c'était en 1974 !, et ils ont plus à voir avec le glam que le punk.
Il y a aussi de purs rockers, qui se trouvent là surtout par la force de l'air du temps, les Flamin' Groovies (Shake some action), notre Little Bob Story national (une reprise d'All or nothing des Small Faces produite par Sean Tyla et extraite de Livin' in the fast lane) et les Runaways.
Côté punk, les américains de chez Sire sont présents en force, avec un doublé dans les dents des Ramones (Judy is a punk / Suzy is a headbanger), les Dead Boys (surtout avec Sonic reducer, un titre créé par Rocket From The Tombs et donc co-signé par David Thomas de Pere Ubu) et Richard Hell, avec l'excellent Love comes in spurts, extrait de son premier album, qui n'était pas encore sorti quand cette compilation a été diffusée. Pour les anglais, les compilateurs ont pris sous licence un classique de chez Stiff, le New Rose des Damned et aussi inclus un groupe d'un label proche de Phonogram, les Boomtown Rats, avec leur tout premier single, Lookin' after n° 1. Si ce titre est très punky, la suite allait très rapidement sonner beaucoup plus new wave.
Il y a ici un groupe, un seul, qui n'a jamais sonné rock ou punk , et qui très vite allait devenir emblématique de la new wave, au sens où on l'entend le plus communément. Il s'agit des Talking Heads, présents avec Love goes to buildings on fire, leur excellent premier single. C'est presque un crime de ne pas l'avoir inclus sur leur album 77 et c'est à cause de ça que, avant d'acheter cet album, je n'avais jamais entendu cette chanson. Je pense d'ailleurs que c'est surtout la présence de ce titre qui m'a décidé à l'acheter, un achat que je ne regrette absolument pas !



22 février 2014

LES FRERES GOYETTE : Fidèles, tenaces et frères


Acquis par correspondance chez Grosse Boîte / Dare To Care en octobre 2013
Réf : BOITE-36 / DTC-4298 -- Edité par Grosse Boîte / Dare To Care au Canada en 2013
Support : CD 12 cm
17 titres

Je n'aime pas trop me répéter ici mais en octobre, pile trois ans après Rencontre du troisième âge, Les Frères Goyette ont sorti un quatrième album, Fidèles, tenaces et frères. J'ai attendu, et il ne s'est rien passé. Pas de sortie dans nos contrées, pas de chronique, encore moins d'annonce de concerts. Alors, finalement, je vais me répéter, parce que ce disque et ce groupe me plaisent trop pour que je contribue à les laisser passer inaperçus.
Ceux qui auraient besoin d'un point d'entrée un peu familier dans cet album peuvent commencer à la piste 4, Laurie, une reprise de Daniel Johnston. La première fois que j'ai écouté le disque, c'était en voiture, sans possibilité de lire les notes de pochette, donc. Je ne connaissais pas assez bien la version originale pour la reconnaître à l'écoute, et je n'ai pas pensé un instant que ça pouvait être une reprise, tant, avec son adaptation en français, le groupe s'est approprié cette pièce, tout en respectant l'esprit de la chanson. Un exercice réussi, donc.
La thématique sports d'hiver et montagne de la pochette n'a rien à voir avec les Jeux Olympiques, rassurez-vous. Dans l'un des interludes parlés qui contribuent à faire le sel de leurs albums, on entend Mario et Sylvain s'engueuler,"C'est pas facile de faire un album (...) C'est chacun sa technologie, c'est chacun ses épreuves, chacun sa montagne. A chacun son Everest". Ça pourrait être un bon résumé de tout le disque, d'autant que c'est enchaîné avec Métal au versant nord, l'histoire d'un fan de métal bien décidé à grimper l'Everest, en perfecto et en jeans ! D'autres titres mentionnent la neige et le froid, mais ce sont des fausses pistes pour qui croirait avoir affaire à un album concept, car Doigté des neiges est à propos d'un gars qui se coupe le pouce sur un banc de scie  et Un thermos d'eau chaude dans une longue guerre froide file la métaphore russo-soviétique.
Dans l'ensemble, on est dans la stricte continuité de Rencontre du troisième âge, la seule évolution notable étant un son plus électrique sur quelques titres, surtout dans la deuxième moitié du disque (Moéneau de cire, Gros Buck). Je continue parfois à penser à du Lambchop pécore et survitaminé à l'écoute de mes pièces préférées du disque, Un coup d'tonnerre avant l'orage, Morning man ou l'instrumental Black banjo.
J'espère toujours qu'un organisateur aura les reins assez solides pour inviter Les Frères Goyette à jouer près de chez nous. Dans l'attente, étant donné que je n'ai pas l'intention de traverser l'Atlantique, la seule lecture de la liste de leurs de concerts récents ou à venir suffit à me dépayser : Brasserie artisanale Albion à Joliette, Le Boquébière à Sherbrooke, Théâtre Petit Champlain à Québec, Rond coin à Saint-Eli-de-Caxton, Centre Culturel St-John à Bromont, La Sala Rossa à Montréal, Bistro Le Mouton Noir à Val-David, Sea Shack à Sainte-Anne-des-Monts, Auberge Vallée de la Rouge à La Conception, Cabaret de la Dernière Chance à Rouyn-Noranda, Le Zaricot à Ste-Hyacinthe, Le Magasin Général à Notre-Dame-Des-Bois, Angélus Bistro à Deschambault-Grondines, Le Petit Chicago à Gatineau, Le Sous-Bois à Chicoutimi...

Fidèles, tenaces et frères est en vente chez Grosse Boîte, et aussi en écoute et en vente sur Bandcamp.




16 février 2014

PASCAL COMELADE : Avis aux inventeurs d'épaves


Offert par Fabienne M. à Mareuil-sur-Ay en novembre 2013
Réf : BEC5161638 -- Edité par Because en France en 2013 -- n° 286/300
Support : 168 pages 20 cm + 2 x 45 tours 17 cm
Titres : Under my thumb -- Let me try  -/- Sunny afternoon -- Brown sugar & Smoke on the water -- Ramblin' rose -/- The sad skinhead -- Sex machine

En 1993, Pascal Comelade a édité Danses et chants de Syldavie, une compilation sous-titrée Apologie de la reprise individuelle. Depuis 1981 avec l'album Sentimientos et encore aujourd'hui, les reprises, et plus largement les références (musicales ou dans les titres) à la culture musicale (surtout le rock) font partie intégrante du travail de Pascal Comelade.
Par ailleurs, depuis quelques temps, il montre de plus en plus souvent ses créations graphiques : sur ses propres pochette de disques, en couverture de livre ou lors d'expositions, comme Rocanrolorama per males arts. Cette production grahique a presque systématiquement un lien avec la musique.
A l'automne dernier, avec ce très beau livre-disques, Pascal Comelade a fait la synthèse de tout ça. On connait grâce à Patrice Caillet le discographisme récréatif, soit la modification ou la re-création ponctuelle par un anonyme d'une pochette d'un disque. Avec son Avis aux inventeurs d'épaves, Pascal Comelade va plus loin et il systématise cette pratique de la reprise de pochettes de disques (ou d'étiquettes centrales quand les disques n'ont pas de pochette).
Pour ce projet, entamé en 2007, il ne s'est pas intéressé à n'importe quels disques : ce sont des 45 tours de sa propre collection qu'il a entrepris d'illustrer à taille réelle en "technique mixte sur carton".
La sélection des 166 disques concernés nous en dit tout autant sur l'évolution du graphisme des pochettes de 45 tours des années 1960 à 1980 que sur les goûts musicaux de Pascal Comelade. Très vite en tout cas, comme quand on examine les disques d'un copain ou quand on farfouille dans les bacs d'un disquaire spécialisé, on se retrouve à trier les disques concernés entre ceux qu'on connait, ceux qu'on ne connait pas, ceux qu'on a, ceux qu'on aimerait avoir...
Sans surprise, le programme est ici très pointu. Il y a quelques disques que j'ai effectivement (John Fred, Procol Harum, Jumpin' Jack flash, Joan Jett, Question Mark and the Mysterians, Manfred Mann, The Lemon Pipers, Arthur Brown, Free, Shocking Blue, MC5), dont certains ont même été chroniqués ici (Louie Louie, Satisfaction, The letter, Denis, God save the Queen). Pour la plupart cependant, ce sont des disques que j'aimerais bien avoir ! Sans être trop gourmand, j'aimerais bien tomber au coin de la rue (et pour pas cher, si possible) sur Reverberation (Doubt) de The Thirteenth Floor Elevators, Love makes sweet music de Soft Machine, Surfin' bird de The Trashmen, Pachuco cadaver de Captain Beefheart and his Magic Band. Et je vais peut-être m'arrêter là parce que j'en suis qu'au premier tiers du bouquin !
Plus étonnant, il y a dans le lot toute une série de groupes que je ne connais pas, dont plusieurs formations psychédéliques anglaises : The Primitives, The Kinetics, The Balloon Farm, Grapefruit, The Brogues, Blues Magoos, Cupids Inspiration, The Syn, The Gun, Love Affair, The Cake, The Groupies et Ronnie Self.
Et il n'y en a pas que pour les yeux car les reprises graphiques sont accompagnées de huit reprises sonores, sur deux 45 tours insérés dans la couverture du livre. Une étiquette sur le cellophane précise même "avec des reprises inédites". Ce n'est pas le cas de la majorité d'entre elles, il me semble, puisque Let me try (MC5) et Sunny afternoon (The Kinks) étaient sur Danses et chants de Syldavie et Ramblin' rose (MC5 encore) sur A freak serenade. Under my thumb sur N'ix (un album avec Enric Casasses), Brown sugar sur Compassió pel dimoni n'étaient sorties jusque là sur disque qu'en Espagne. Je ne suis pas certain que la version de Smoke on the water est différente de celle de Live in Lisbon and Barcelona. Je ne connaissais pas cette très courte version de Sad skinhead de Faust et la version de Sex machine est un document qui me rappelle le concert du Bel Canto Orquestra à Reims le 8 mai 1986. Comme c'était son habitude à l'époque, le groupe avait terminé le concert debout et aligné, à danser et chanter cette chanson.
Il faut vraiment être passionné par le rock pour se lancer dans un projet pareil, et aussi pour s'y intéresser. Mais je crois qu'on est quelques-uns dans ce cas... 

Au moment où j'écris, des exemplaires de cette édition limitée sont toujours en vente chez Because.



09 février 2014

NON! : Dé/composés


Acquis par correspondance chez Optimum en janvier 2014
Réf : Mono-Tone 013 -- Edité par Mono-Tone en France en 2013
Support : 45 tours 30 cm
9 titres

C'est une chronique dans le dernier Abus Dangereux qui m'a donné envie d'acheter ce mini-album. Il y était question d'un disque de reprises de gens comme Elvis Costello ou Devo, on comprend déjà que mon oeil a été attiré, mais en plus ces reprises sont adaptées en français. Et les adaptations en français, ça me plait. J'en ai même fait quelques-unes, en vrai (, ou ) et beaucoup plus en rêve.
J'ai d'abord pensé écouter des extraits ou voir une vidéo, mais dans un premier temps, je n'ai rien vu du tout. Pas de Bandcamp ou de Soundcloud, rien sur Youtube (en fait, le disque est présent sur des sites que je ne fréquente guère, comme Deezer, Spotify et les sites de téléchargement). De toute façon, à partir du moment où le groupe s'est échigné à éditer son disque en vinyl, c'est celui-là qu'il me fallait.
Je ne connaissais pas du tout Non!, qui se décrit comme faisant de la No Pop Nihiliste. J'ai vu quelque part leur musique qualifiée d'électro-punk et ça leur va très bien. Leur biographie nous apprend que Non! est un duo basé à Nice, formé de Didier Memphis, des Dum Dum Boys, et de Karyn Brunella, qui ont aussi joué ensemble dans l'un de leurs nombreux projets, The Love Machine. Ils chantent tous les deux, à tour de rôle ou ensemble. Musicalement, on peut les rapprocher de Dr. Mix and the Remix ou de Kas Product, mais des deux groupes chantent en anglais. Dans l'esprit, avec le ton souvent désabusé de Karyn, on pense plus souvent encore aux Olivensteins.
Les neuf titres de ce disque enregistré à la maison datent originellement des années soixante, soixante-dix, quatre-vingts et deux mille. Certaines chansons, comme L.S.D. des Pretty Things, Millionaire de Justin Love (ou Justin Trouble) ou Trop de musique de Kim Salmon ont conservé leur titre et leur thématique originale, mais les autres ont des paroles entièrement nouvelles et développent une thématique du refus de la  vie "normale", parfaitement résumée par les premières paroles du disque : "On dit qu'il ne faut jamais renoncer, que l'obstination finira par payer, mais à quoi bon ? Non, non, non, non, non, quand on sait bien qu'à la fin, ça mène vraiment à rien. A quoi bon commencer à travailler, quand on a qu'une hâte c'est d'arrêter ? Mais à quoi bon ? Non, non, non, non, non. Autant renoncer d'entrée et ne pas même essayer. Oh, à quoi bon."
Le groupe a indiqué les interprètes originaux des chansons reprises, mais pas leur référence précise. Je sais donc que des chansons excellentes comme A quoi bon ou Plutôt mourir sont des reprises d'Electric Light Orchestra et de de Giorgio Moroder, mais je ne connais pas les titres anglais, même si initialement j'avais pensé à I feel love pour le Giorgio Moroder, mais je dois me planter. Pour ces deux là, ça ne m'empêche pas de dormir. C'est le même cas pour La drogue d'Ike & Tina Turner, mais là j'aurais bien aimé trouver la référence.
Pour une excellente séquence de trois titres sur la face B, je n'ai eu besoin d'aucune recherche pour associer Non non non au Nag nag nag de Cabaret Voltaire et Mais qu'est-ce que tu veux que ça me foute ? au Pump it up d'Elvis Costello and the Attractions. Pour Devo comme pour les autres, la chronique d'Abus ne précisait pas le titre repris. En attendant de recevoir le disque, je m'étais dit que ce serait bien si le titre repris n'était pas une évidence comme Mongoloid, Jocko Homo (qui auraient parfaitement convenu à la thématique du disque, mais je ne le savais pas), Girl U want ou Whip it, et j'avais même espéré, pour coller à mon planning de chroniques, que le titre sélectionné soit The day my baby gave me a surprize. Un peu osé comme pari, mais je suis tombé dans le mille ! Une semaine chargée est, à ma connaissance, la première version en français de cette chanson. Le refrain ("Whaou hou hou hou, hou hou hou", pour rappel) a été conservé tel quel, le reste des paroles n'a rien à voir avec une traduction de l'original.
Le disque se conclut avec Trop de musique, version de Too much music, piochée par Non! sur E(a)rnest, un obscur album auto-produit en 2002 par l'australien des Scientists et des Beasts of Bourbon. Je découvre à cette occasion que l'album de Kim Salmon contient des titres en français comme L'exhumation d'Yves Montand et Touche-moi rien. Voilà une piste à creuser...
En tout cas, Dé/composés est la bande-son idéale pour les cigales qui veulent danser tout l'hiver.

L'édition vinyl de Dé/composés est disponible notamment chez Optimum ou Abus Dangereux. La version numérique est disponible sur les principales plates-formes.

08 février 2014

DEVO : The day my baby gave me a surprize


Acquis probablement à La Clé de Sol à Châlons-sur-Marne en 1979
Réf : 2097 993 -- Edité par Virgin en France en 1979
Support : 45 tours 17 cm
Titres : The day my baby gave me a surprize -/- Penetration in the centrefold

Je me suis intéressé à Devo en 1978, après avoir lu des articles sur eux dans Best et Rock & Folk, et surtout après les avoirs vus un dimanche midi dans Chorus. J'ai donc acheté mes premiers disques d'eux, Q : Are we not men ? A : We are Devo ! et Satisfaction un peu de temps après leur sortie. Mais pour la suite, que j''attendais de pied ferme, il m'a fallu patienter. Dans mon souvenir, l'attente a été longue, mais en fait il ne s'est passé que quelques mois avant que le deuxième album, Duty now for the future, ne s'annonce, et il a même été précédé de six semaines par ce premier extrait en single. J'avais donc du nouveau Devo à me caler entre les oreilles à peine le bac français passé. Je crois me souvenir qu'on l'a écouté un après-midi d'été chez Pascal P. à La Croix Jean-Robert.
A l'époque, je trouvais que ce 45 tours revêtait une certaine aura de mystère. Près de trente-cinq ans plus tard, ce mystère est loin d'être dissipé et ce disque m'intrigue toujours !
Prenons la photo de pochette d'abord. Certes, elle n'est peut-être pas aussi bizarre que celle de Satisfaction, mais quand même. Qu'est-ce qu'ils font assis sur ce lit (d'une chambre d'hôtel ?), ce mec habillé en pantalon de tergal et chemisette et cette nana avec la robe relevée sur les cuisses ? Et pourquoi ces masques rigolards ? On ne serait pas surpris qu'il y ait du sexe joyeux dans l'air...
Bon, maintenant la chanson. J'ai eu un peu tendance à l'oublier au fil des années, mais il y a encore de vrais sons de guitare sur Duty now for the future, et The day my baby gave me a suprise est l'une des chansons qui a un bon gros son de guitare saturée en arrière-plan. Elle a surtout un rythme biscornu très surprenant, qu'on doit sûrement à feu le batteur Alan Myers. Autre particularité pour un disque visant les passages en radio et les hit parades, les paroles du refrain consistent uniquement en "Whaou, hou hou hou, hou hou hou". Pas facile de faire un tube de l'été avec ça ! On se concentre donc sur les paroles des couplets, et là encore c'est très mystérieux. Ainsi donc, le narrateur a reçu un message de sa chérie, griffonné sur son lit d'hôpital, elle annonce qu'elle va quitter sa chambre toute blanche et froide, revenir vivre avec lui, et à nouveau le regarder. Il est aussi mentionné que, le visage tremblant, elle essaie d'ouvrir les yeux. Jusqu'à aujourd'hui, je n'avais jamais analysé les paroles à ce point et je m'étais toujours demandé ce que pouvait être cette surprise. J'avancerais bien l'hypothèse que c'est le fait qu'elle puisse à nouveau voir. Pendant des années, à cause de la vidéo (vue guère plus d'une fois à la télé au moment de la sortie du disque), qui montre les membres du groupe se passer un bébé de main en main, avant de l'envoyer en l'air pour qu'il retombe dans une piscine gonflable, j'ai pensé que la surprise c'est que la chérie est enceinte, qu'il y a eu un "accident heureux", comme dans la chanson de Martin Circus. Je me plantais, bien sûr. Le WikiDevo avance que cette chanson continue l'histoire de Space junk sur le premier album. Je pense qu'il se plante aussi. S'il y a un rapport avec une chanson précédente de Devo, je voterais clairement pour Sloppy (I was my baby gettin'), la face B de Satisfaction, aussi présente sur le premier album : la chérie a acheté une voiture la veille, qui ne l'a pas menée loin car elle a "raté le trou". On aurait les suites de l'accident dans The day my baby gave me a surprise... Je trouve que ma théorie se tient ! Il y a aussi une référence qui semble bien vue, trouvée chez SongMeanings, aux paroles de St James Infirmary de Louis Armstrong : "I went down to St.James Infirmary, Saw my baby there, She was stretched out on a long, white table".
Pour Penetration in the centrefold, même sans comprendre les paroles, on savait d'emblée que le sexe était bien présent. C'est plutôt le "centrefold" qui posait question. Je ne savais pas que cette "pliure centrale", c'est la page centrale d'un journal ou d'une revue et que, par extension, c'est aussi la photo de fille à poil que les magazines érotiques avaient pris l'habitude d'y mettre. La chanson a été inspirée à Devo par un numéro de Hustler, qui a été le premier de ces magazines à grande diffusion à y faire figurer une pénétration. La chanson vaut surtout pour la façon qu'a Mark Mothersbaugh de hurler "Penetration !" sur le refrain. Elle a été enregistrée pendant les sessions pour le premier album à Cologne.
Si Devo a tourné une vidéo pour The day my baby gave me a surprise, projetée dans certains concerts, ils n'ont jamais interprété ce titre sur scène. Il existe par contre une version démo, publiée sur Recombo DNA, qui est très bonne, et peut-être même supérieure à la version officielle. Pour ma part, j'ai quand même un excellent souvenir de cette chanson en concert, grâce à l'excellente version qu'en ont donné Dogbowl et Poney à La Comédie de Reims le 22 février 2002.




Devo dans l'émission de télé allemande Rock Pop le 13 octobre 1979.