30 mars 2013

THE WANTONES : I want you


Acquis chez Emmaüs à Courtisols le 16 mars 2013
Réf : 8345 10584 2 -- Edité par Tôt Ou Tard en France en 2008
Support : CD 12 cm
11 titres

La pochette m'a attiré l'oeil, évidemment. Quand j'ai regardé le détail des titres sur le rabat du CD, j'ai compris que j'avais affaire à un album de reprises de chansons intitulées I want you. Et des reprises probablement choisies par des gens cultivés et pointus puisque, outre les titres évidents de Dylan et Costello, j'ai aperçu les noms de Debbie Harry, des Mabuses, de Christine Perfect, de Christophe J, de Tom Waits et même de Chris Stamey des dB's ! Un fait confirmé par la liste des coupables de ce méfait, cachés sous le nom des Wantones, avec en tête JP Nataf (qui n'était plus Innocents, donc), suivi entre autres de Bertrand Bonello et d'Albin de la Simone.
J'ai un instant pensé qu'il pouvait s'agir d'un projet de maison de disques, qui aurait rassemblé quelques musiciens autour d'un concept plus fumeux que vendeur (il me semble n'avoir pas du tout entendu parler de ce disque au moment de sa sortie). La lecture du dossier de presse (repris chez Yayamusic) m'a appris que c'était plutôt le contraire : des potes qui s'associent pour un projet qui a bien failli ne jamais être édité, puisque son histoire s'étire sur une dizaine d'années, de la fin des années 1990 quand Bertrand Bonello suggère aux Innocents, en panne d'inspiration pour le choix d'une face B à enregistrer, de reprendre une série de I want you, jusqu'à  la sortie du disque en 2008, en passant par la rencontre de JP Nataf et Kim Fahy des Mabuses et l'enregistrement lui-même, en 2001, au Studio Garage, à raison d'un titre par jour (et nuit).
Après l'enregistrement, la bande d'amis s'est attaquée au premier album solo de JP Nataf, Plus de sucre (2004) et les I want you ont été remisés, avant d'être dépoussiérés, mixés et attribués à un groupe de circonstance pour la sortie en 2008.
Même si tout est présenté comme des reprises, il n'y en a en fait que huit, puisque trois des titres ont été écrits spécifiquement pour ce projet, par Christophe J, The Mabuses et Laurie Markovitch (le pseudonyme collectif de Bertrand Bonello, JP Nataf et quelques autres).
L'album s'ouvre avec une version légère d'une chanson de Dean Martin, et là les Wantones se sont plantés car le titre n'est pas I want you, comme ils le pensaient, mais Someday (You'll want me to want you).
Tout ne me plait pas dans le disque, comme le titre de Kiss, extrait de Rock and roll over ou celui de Dylan, qui ne décolle vraiment que sur la fin, quand arrive la voix féminine, celle de Julie Gasnier. Mais il y a plein de choses très agréables à entendre, à commencer par la version punky pop bricolée à boite à rythmes d'un titre de Rockbird, le deuxième album solo de Debbie Harry, la composition de Christophe J ou le bottleneck sur la chanson écrite par Tony Joe White pour le premier album de Christine Perfect/McVie en 1970.
Sur le titre de Chris Stamey, extrait de son album Fireworks, et sur la composition de Laurie Markovitch, dont les paroles sont entièrement en français, on entend une expression bien trouvée pour faire écho à et traduire le I want you anglais : "Avant tout, je te veux". Côté traduction, ce Je te veux semble une évidence pour rendre compte de I want you, même si, comme me le racontait Philippe R., on a reproché il y a quelques mois à Francis Cabrel d'avoir fait ce choix pour son adaptation de Dylan.
En tout cas, Je te veux m'amène au seul oubli criant dans le choix de titres de ce disque. On ne reprochera pas aux Wantones d'avoir volontairement écarté le I want you (She's so heavy) des Beatles ou de ne pas avoir retenu le Je te veux toute à moi des Chaussettes Noires, qui se trouve être une reprise du I wanna be your man des Beatles/Stones, mais si ce disque ne contient pas de reprise du très chaud Je te veux de Fernandel et Germaine Duclos, qui aurait été parfaitement raccord avec les photos rétro de la pochette, ça ne peut être que parce qu'ils ne connaissaient pas son existence. Si c'est aussi votre cas, voici de quoi y remédier :

A écouter :
Fernandel et Germaine Duclos, Je te veux (paroles de Jean Mance, musique de Casimir Oberfeld), de l'opérette Le rosier de Madame Husson, 1937.


24 mars 2013

JOSEF K : Chance meeting


Acquis chez Rough Trade à Londres vers 1983
Réf : Postcard 81 5 -- Edité par Postcard en Ecosse en 1981
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Chance meeting -/- Pictures

Je n'ai pas acheté de disques Postcard avant la faillite du label en 1982. Je suis arrivé à Londres en septembre 1983 après la bagarre mais j'ai quand même réussi à en dégoter quatre chez Rough Trade, qui avait encore des stocks. Aucun n'a de pochette illustrée : deux ont la pochette Postcard marron au thème western, deux ont celle avec les dessins rétro en couleurs et ceux-là ont aussi une carte postale incluse. Deux sont d'Orange Juice et deux sont de Josef K. Tous ne sont pas excellents, malheureusement : j'ai toujours eu du mal avec le Poor old soul d'Orange Juice et le It's kinda funny de Josef K est un peu bancal. Simply thrilled honey d'Orange Juice, par contre, est une réussite, mais des quatre c'est ce Chance meeting de Josef K que j'ai le plus écouté, notamment parce que j'aime beaucoup ses deux faces.
Josef K est un groupe assez typiquement new wave : tonalités sombres, tendances intello, guitares emmêlées, chant pas toujours assuré et même un titre phare intitulé Sorry for laughing. Comme certains groupes Factory, ils ont publié des disques en Belgique, une collaboration avec Les Disques du Crépuscule qui s'est poursuivie pour le chanteur Paul Haig après la séparation du groupe, ponctuée de collaborations avec New Order.
C'est la deuxième version de Chance meeting publiée par Josef K. La version originale est sortie fin 1979 chez Absolute sur leur tout premier 45 tours. Je ne sais pas si le budget pour cette nouvelle version pour Postcard était plus conséquent, mais le son reste résolument lo-fi. On entend certes une trompette et, sur la fin, des violons, vrais ou synthétiques, ce qui accentue l'impression que les June Brides ont dû beaucoup écouter Josef K avant de se lancer, mais sinon ça reste globalement touffu et étriqué, comme beaucoup de disques de cette époque. Mais ça ne m'a jamais empêché d'apprécier tous les disques de ce genre !
En face B, Pictures (of Cindy) est un excellent titre, assez court. La guitare twang rappelle Orange Juice, ce qui est somme toute logique car Malcolm Ross a joué dans les deux groupes, mais le chant aussi fait penser à Edwyn Collins, et ça c'est plus surprenant. D'un autre côté, il semble aussi annoncer Felt et Lloyd Cole...

Tous les singles de Josef K ont été compilés sur Young and stupid, un album qui a connu plusieurs éditions mais qui ne semble pas actuellement facilement disponible. On peut donc se reporter avec profit sur Entomology, une autre compilation qui contient les deux faces de ce 45 tours.





La carte postale incluse avec ce disque Postcard.

23 mars 2013

PRIMAL SCREAM : Autobahn 66


Acquis par correspondance via Amazon en mars 2013
Réf : 673312 2 -- Edité par Columbia en Angleterre en 2002
Support : CD 12 cm
Titres : Autobahn 66 (Radio edit) -- Autobahn 66 (Alter Ego remix) -- Substance D (Album version) + Autobahn 66 (Vidéo)

Toute la presse spécialisée fait actuellement le compte à rebours avant la sortie en mai d'un nouvel album de Primal Scream, More light, attente ponctuée par la diffusion des singles 2013 et It's alright, it's OK. Pour ma part, je jetterai volontiers une oreille sur ce disque quand j'en aurais l'occasion mais je suis tout sauf impatient vue la qualité très irrégulière des albums du groupe.
En fait, je n'achète plus les disques de Primal Scream à leur sortie depuis Vanishing Point/Echo dek. Au fil du temps, je me suis procuré XTRMNTR, l'ultime disque publié par Creation et j'ai écouté les deux singles extraits de Riot city blues, ce qui m'a dissuadé d'aller plus loin. Quand je suis tombé à l'automne dernier sur un exemplaire soldé à 50 pence de Beautiful future, leur album de 2008, j'ai réalisé que j'avais carrément zappé l'existence même de ce disque. Je l'ai acheté et écouté une fois et je ne sais pas quand j'aurais envie de tenter une deuxième écoute tant le disque m'a paru anodin.
Je garde par contre plutôt un bon souvenir d'Evil heat, l'album de 2002, que j'ai eu l'occasion d'écouter quelques temps après sa sortie, et j'avais particulièrement apprécié Autobahn 66, ce qui m'a poussé à le commander en single.
Le titre d'abord est très bien trouvé. J'ai toujours assumé qu'il s'agissait d'un amalgame faisant référence à la fois à l'Autobahn de Kraftwerk et au classique (Get your kicks on) Route 66, joué par tout le monde de Nat King Cole à Depeche Mode en passant par Chuck Berry et les Rolling Stones. Je ne me pense pas me tromper, même si j'ai été surpris d'apprendre qu'il existe effectivement une Bundesautobahn 66 en Allemagne. Les paroles sont, comme souvent chez Primal Scream, de la guimauve sans conséquence et ne pointent pas en tout cas vers l'une ou l'autre des deux autres chansons. Musicalement, par contre, ça débute par une séquence synthétique et mélodique qui ne peut dans ce contexte qu'évoquer Kraftwerk, mais Autobahn 66 ne se réduit pas à un ersatz du groupe allemand, comme l'était le clin d'oeil de Supermarket, puisqu'au bout de quelques secondes on retrouve les tonalités pop-psyché qui sont la marque de fabrique de Primal Scream.
Pour cette version single, le titre est réduit de près de moitié mais je l'aime toujours bien. Le remix par Alter Ego rajoute un beat et enlève toute connotation kraftwerkienne. Comme souvent, il n'apporte pas grand chose d'intéressant au titre original. Il s'enchaîne parfaitement par contre avec Substance D, dont on nous dit qu'il s'agit de la version album alors que ce titre ne figurait qu'en bonus de l'édition japonaise de l'album. Il s'agit en fait d'un remix d'A scanner darkly par Andrew Weatherall, co-producteur de l'album sous la bannière des Two Lone Swordsmen, et les deux titres font référence à un roman de Philip K. Dick.
La vidéo jointe au disque n'en dit pas plus que les paroles, mais au bout du compte on a un single de Primal Scream de bonne tenue. La tête de mort sur la pochette est une oeuve de Karlheinz Steinberger de 1962, qui était aussi l'un des éléments de la pochette d'Evil heat.

17 mars 2013

JULIAN COPE : Sunshine playroom


Acquis à Londres ou à Paris en 1983 ou 1984
Réf : COPE 112 -- Edité par Mercury en Angleterre en 1983
Support : 45 tours 30 cm
Titres : Sunshine playroom -- Wreck my car -/- Hey high class butcher -- Eat the poor -- [Land of fear]

Là, typiquement, ma mémoire me joue des tours. Dans mon souvenir, j'avais acheté ce disque au printemps ou à l'été 1983, à Paris chez New Rose ou à la FNAC et je me souviens bien aussi de sa vidéo, mise en scène par David Bailey, qui se passait dans un parc anglais (impossible de la visionner en ligne depuis l'Europe, apparemment). En fait, ce single n'est sorti qu'en novembre 1983, pendant l'année scolaire que j'ai passée à Londres, et je dois confondre dans mon souvenir avec le maxi You disappear from view de The Teardrop Explodes, sorti début 1983. Comme je suis quand même à peu près certain d'avoir acheté ce disque neuf au moment de sa sortie, car je suivais The Teardrop Explodes de près depuis la sortie de Wilder, c'est donc plutôt dans cette ville que j'ai acheté ce tout premier disque de Julian Cope sous son nom.
La photo de pochette fait trop cliché de mode sophistiqué à mon goût, mais c'est bien le seul reproche que je ferai à ce disque.
Il y a plein de points communs entre Julian Cope et Kevin Ayers. Outre que ce sont deux blondinets qui ont un certain air de ressemblance (il suffit pour s'en convaincre de jeter un oeil sur la photo de pochette de l'album World shut your mouth, sur lequel on trouve Sunchine playroom), ils sont tous les deux bassistes à l'origine, ont eu l'occasion de faire appel à des musiciennes nommées St John (Bridget pour Ayers, Kate pour Cope, je ne sais pas si elles sont apparentées...) et partagent un goût certain pour le psychédélisme.
Je dis ça parce que l'arrangement de cordes en intro de Sunshine playroom me rappelle certains enregistrements d'Ayers avec David Bedford. Sauf qu'après l'intro la chanson se poursuit sur un rythme effréné moins couru chez le débonnaire Ayers. En tout cas, avec son refrain "The sun in her hair, the sun in her eyes, there's something that makes me want to go back", cette chanson a effectivement un fort goût de reviens-y, qui n'a cependant pas suffi à en faire un tube.
Ce maxi est affiché comme un EP, et on n'est pas volé, ni sur la quantité, ni sur la qualité, vu qu'aucun des autres titres, tous originaux et tous excellents, n'a ensuite été repris sur l'album.
Wreck my car et Eat the poor, avec un chant qui semble faire sortir Ian Curtis de sa tombe pour le noyer sous la boite à rythmes et les guitares, sont aussi deux titres très rapides, mais c'est peut-être Hey high class butcher qui marque le plus, avec sa voix chuchotée à vous faire froid dans le dos. Je ne sais pas trop de quoi ça parle, mais ce titre aurait pu être utilisé fort à propos par Caro et Jeunet pour la BO de Delicatessen.
Il y a un morceau en plus à la fin du disque, non annoncé, un titre au son assourdi, comme s'il nous arrivait du fin fond de l'enfer, une ébauche de quelques dizaines de secondes avec juste une guitare et la voix de Cope, qui nous chante "When I walk through the land of fear, I don't look to my left, I don't look to my rear, cos I'm, I'm not afraid anymore". Cette chanson, Land of fear, sera enregistrée de façon plus complète et "normale" quelques mois plus tard et sera publiée sur l'une des faces du EP Sunspots.
Les trois faces B de ce maxi ont été ajoutées en bonus aux dernières rééditions en CD de l'album World shut your mouth, sûrement déjà épuisées, mais on doit en cherchant réussir à se procurer à un prix correct cet album qui a très bien vieilli. Par contre, je crois que cette première version de Land of fear n'a jamais été rééditée.

15 mars 2013

ELVIS COSTELLO & THE ATTRACTIONS : Highlights from 'Blood & chocolate'—XFIEND 80


Acquis par correspondance via Ebay en mars 2012
Réf : CHOC 1 -- Edité par Imp en Angleterre en 1986 -- Promo only - Not for resale
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Blue chair -- Uncomplicated -- Next time round -- I hope you're happy now (extraits)

Vinyl rouge sang, étiquette couleur chocolat. C'est avec ce 45 tours gravé sur une seule face qu'Imp Records a annoncé à la presse et aux professionnels anglais la sortie de Blood & chocolate en septembre 1986, en choisissant d'y présenter un extrait de quatre des titres de l'album.
1986 aura été une excellente année dans la discographie d'Elvis Costello. Après les décevants Punch the clock et surtout Goodbye cruel world, il a sorti en février l'impérial King of America, à la fois roots et sophistiqué, crédité à The Costello Show, avant de retrouver les Attractions et Nick Lowe pour l'énergique Blood & chocolate, celui de ses disques qui se rapproche le plus dans l'esprit et le son de la pépite This year's model, sûrement en partie grâce à la décision de l'enregistrer majoritairement en direct en studio.
Il y a eu deux singles extraits de l'album, Tokyo storm warning et I want you , et bizarrement aucun ne se retrouve ici. Certes, Blue chair, le premier des quatre titres, est sorti en single en 1987, mais c'était dans une autre version, effectivement meilleure, datant des sessions de King of America.
Uncomplicated illustre parfaitement le ton de l'album, que cette chanson ouvrait et dont les premières paroles lui ont donné son titre. Elvis Costello y est à son maximum de bile, soutenu par le martèlement de la basse et la batterie. Et la source de toute cette hargne se trouve en partie dans un bar parisien, où Costello s'est vu servir du rosé alors qu'il avait demandé de l'eau !
Next time round et I hope you're happy now sont deux excellentes chansons rapides typiques du son Attractions, qui auraient tout à fait eu leur place sur This year's model ou Armed forces. D'ailleurs, si les trois premiers titres sont signés MacManus, le vrai nom de Costello, utilisé pour signer ses compositions en 1986, I hope you're happy now est créditée à Elvis Costello, tout simplement parce qu'elle date de 1984. Une version, rejetée, en avait même été enregistrée pour Goodbye cruel world, ce qui n'a pas empêché Costello de choisir de l'interpréter le 12 septembre 1984, en direct à la télévision aux Etats-Unis dans une émission présentée par Joan Rivers.
En 1985-86, Costello était d'ailleurs en plein crise d'hétéronymie aïgue, puisque, outre Elvis Costello et Declan Patrick Aloysius MacManus, il s'est aussi présenté comme chanteur-musicien sous les noms de Little Hands of Concrete et Napoleon Dynamite et a sorti un single des Coward Brothers en tant qu'Howard Coward !
De nombreuses éditions de Blood & chocolate sont actuellement disponibles. Je conseille vivement, tant qu'on la trouve encore à prix raisonnable, celle en double-CD de 2002 chez Demon ou Rhino.



Elvis Costello and the Attractions, Uncomplicated et I hope you're happy now, en direct en 1986 dans l'émission anglaise The Old Grey Whistle Test.

13 mars 2013

TUXEDO MOON : Scream with a view


Acquis à La Petite Boutique Primitive à Reims vers 1989
Réf : PRE 7 12 -- Edité par PRE en Angleterre en 1980
Support : 45 tours 30 cm
Titres : Nervous guy -- Where interests lie -/- (Special treatment for the) Family man -- Midnite stroll

J'ai vu Tuxedo Moon deux fois sur scène, à chaque fois dans le cadre du Festival Musiques de Traverses de Reims. Je me souviens surtout du concert du
22 mai 1982, cette fameuse journée où étaient aussi programmés Etron Fou Leloublanc, This Heat, Kas Product et les Raincoats. Si le 18 mai 1985, au même programme que The Legendary Pink Döts, Tuxedo Moon était, je crois bien, en trio, Winston Tong était présent en 1982 et je le revois encore, la grande classe, en costume, déambulant nonchalamment dans les allées de fauteuils de la grande salle de la Maison de la Culture (aujourd'hui La Comédie), avec un micro sans fil ou alors un très long cordon. J'ai noté à l'époque qu'il se tenait à un moment devant la scène, à un mètre de moi, avec des petits carrés projetés sur son visage. J'avais trouvé l'ensemble fascinant, percutant et visuel et j'avais été  particulièrement marqué par une chanson, que je ne connaissais pas (je n'avais aucun disque de Tuxedo Moon à ce moment), chanson que j'ai eu la chance de trouver moins de deux ans plus tard, à Londres, sur la compilation Masterpieces du magazine Sounds et du label Charisma.
Je ne sais pas pourquoi, suite au concert j'associais ce titre particulièrement avec Winston Tong. Il a fallu encore quelques années de plus, jusqu'au moment où j'ai acheté cette édition anglaise du EP Scream with a view, tirée d'un lot venant du même propriétaire que, entre autres, mes 45 tours de Faust pour que j'apprenne,grâce aux notes de pochette, que Winston Tong ne figure pas du tout sur ce disque. (Special treatment for the) Family man, puisque c'est de cette chanson qu'il s'agit, est en fait un titre écrit par Steven Brown, qui garde toute sa magie et tout son mystère même après plus de trente ans, avec une ambiance sonore très particulière, concoctée avec une basse électrique jouée à l'archet, des rototoms, du synthé, le sax soprano et le chant singulier de Steven Brown.
Ça reste mon titre préféré de ce disque, même si j'aime beaucoup aussi celui qui l'ouvre, Nervous guy, auquel je trouve un petit côté Residents, dont le label Ralph a sorti plusieurs disques de Tuxedo Moon, mais en plus "normal". Where interests lie, avec sa guitare et sa boite à rythmes, est très bien aussi. En fait, il n'y a que Midnite stroll, le morceau le moins "pop", qui ne soit pas trop à mon goût.
Ce maxi était sorti juste avant le premier album de Tuxedo Moon, Half mute. Aujourd'hui, ses quatre titres se trouvent en bonus de la réédition de l'album chez Crammed.


Une vidéo réalisée en 1985 pour Family man.


Family man en direct le 24 mai 1983 dans les studios de TVE à Madrid pour l'émission La Edad de Oro.


Nervous guy en direct dans l'émission Glenn O' Brien's TV Party, à la fin des années 1970 ou au début des années 1980.

11 mars 2013

TELEX : Euro-vision


Acquis par correspondance via Ebay en février 2012
Réf : 101301 -- Edité par Vogue/RKM en France en 1980
Support : 45 tours 17 cm
Titres : Euro-vision -/- Troppical

L'Eurovision, hormis peut-être en 1974 et 1975 avec Abba et Teach-In, quand j'avais l'âge de vibrer à ce genre de tube, j'ai toujours trouvé ça ringard, comme presque tout le monde, il semble, même si ce concours fait la une des médias chaque année. Alors, inutile de préciser que, quand en 1980 j'ai vu dans les bacs ce 45 tours de Telex intitulé Euro-vision, je l'ai soigneusement évité, pour ne pas dire snobé. Le 45 tours suivant m'avait lui aussi rebuté, par ses titres (Getting old/En route) et par sa pochette.
La chanson elle-même est loin d'être ce que Telex a fait de mieux. Le refrain, minimal, est relativement accrocheur, mais l'ensemble, surtout les couplets, est assez pinpin, ce qui est assez logique, vu le sujet, car ce titre traite bel et bien du concours Eurovision de la chanson.
En fait, on a affaire ici à l'un de ces disques particuliers dont le principal intérêt n'est pas la musique gravée dans les sillons. Le coup de maître, digne de Dada, qu'a réussi Telex avec Euro-vision, c'est de parvenir avec cette chanson à être sélectionné pour représenter la Belgique dans l'édition 1980 du concours.  C'est un peu comme The KLF, qui a enchaîné les numéros 1 en suivant les instructions de son propre manuel avant de brûler ses bénéfices (1 million de livres sterling) dans un happening controversé. Ou c'est comme si Kraftwerk avait vraiment réussi à faire tourner des robots à sa place pendant que les membres du groupe couraient une étape du tour de France.
Telex a donc pu, à l'Eurovision, parler de l'Eurovision et décrire le spectacle en train de se passer. Ce qui est juste un peu dommage, c'est que leur plus grande réussite à été leur sélection et ce passage officiel dans le concours. Ils n'ont ni été lauréats, ce qui aurait valu son pesant de cacahuètes, ni suffisamment provocateurs pour subvertir le concours de l'intérieur. Je viens même de découvrir, puisque par le plus grand des hasards on m'a offert hier le 45 tours de Profil, qui représentait la France au concours en cette année-là, qu'aux  "Beaux messieurs, belles dames" de Telex, Profil répondait presque sur le même ton par un Hé hé m'sieurs dames qui, lui, n'avait rien d'ironique.
En face B, Troppical est un instrumental synthétique assez sympathique.

03 mars 2013

AYERS AND ARCHIBALD : Banana follies


Acquis par correspondance vers 1998
Réf : HUX007 -- Edité par Hux en Angleterre en 1998
Support : CD 12 cm
15 titres

Kevin Ayers est mort le 18 février. J'ai quelques regrets de n'avoir jamais assisté à l'un de ses concerts. Au début des années 2000, alors que j'avais fini par m'intéresser à sa musique, il a joué plusieurs fois en Belgique, mais je ne l'ai pas su à temps. Il y a eu en 2006 l'excellent concert en duo avec Max La Villa, qu'on a pu pendant un temps télécharger sur son site. Après la sortie de son ultime album, The unfairground, j'ai guetté de près l'annonce l'annonce d'une éventuelle tournée, mais mes espoirs ont vite été douchés. Il y a bien eu des projets de concerts, sous l'égide de Mojo notamment, mais cette brève a ensuite été publiée : "Néanmoins.........De nombreuses personnes ont écrit en se demandant quand Kevin risquait de s'aventurer à sortir à nouveau et à tourner. N'ayant jamais été un grand fan de la vie en tournée et toujours terriblement nerveux à l'idée de se produire en public, Kevin répugne de plus en plus ces temps-ci à se forcer à le faire. 'Je préfèrerais aller pêcher plutôt que de participer à la compétition', cela demeure son point de vue sur tout ça. Ainsi soit-il.". Quelques temps plus tard, le "site officiel" de Kevin Ayers fermait...
Plutôt que d'essayer de résumer la philosophie de Kevin Ayers (mais Laisse le bon temps de prendre, le titre de l'article de Vivonzeureux! que j'avais publié, reprenant des paroles de la chanson Whatevershebringswesing, convient toujours très bien), voilà ce que Kevin Ayers lui-même disait, dans l'émission de télé Pop 2, à l'occasion d'un concert à la Taverne de l'Olympia en mai 1970 : "La musique que je préfère moi c'est quand on est dans un café avec des gens et on prend une bouteille de vin et on fait des chansons ensemble, on rigole ensemble. Je trouve qu'il y a trop, il y a trop de musique sérieuse, il y a trop de gens qui prend la musique sérieusement, sur scène et tout ça. C'est toujours un grand truc, spécialement sur scène. Moi j'préfère la musique très, très léger, très entre les gens, beaucoup de communication, beaucoup de, beaucoup de choses drôles, comme ça, pas avec des, les messages très lourdes, importants.". Notons qu'Ayers a appliqué ce précepte jusqu'au bout. Le soir de l'annonce de sa mort, on apprenait dans les infos de France Inter qu'il jouait régulièrement de façon impromptue dans le café de Montolieu, où il vivait. Il y avait même laissé une guitare sur place avec un petit mot disant grosso modo "En joue qui veut".
Toujours en 1970, mais sur scène un peu plus tard, Ayers s'est adressé au public : "Bon, alors, la prochaine chanson, j'ai fait un traduction de les paroles, en français. Beaucoup de coexistence, mais co-vivance, pas de chance, c'est dimanche dans l'esprit de ce système gris. Les révolutions doit être célébration pour éviter l'ennui, pas à cause de cela. La vie c'est l'activité de la tête et de la jambe. Alors, continue d'être actif, ne dormez pas, surtout ne le prends pas sérieusement, ne vous prenez pas sérieusement, nous sommes tous les idiots. Mais ça va pour l'instant. Révolution doit être pour faire la vie plus simple et plus plaisirable, pour être vivant et pas seulement existant. Alors, vous savez très bien de quoi je parle. On vous donne cette chanson, s'appelle Ballade banane.". Ceci à une époque où la révolution était présente dans tous les esprits... En tout cas, il ne suffit malheureusement pas de prendre la vie du bon côté pour que tout soit rose. En 1992, Kevin Ayers, dans une citation reprise par Simon Reynolds en 2013, déclarait "De 17 à 40 ans j'ai passé un très bon moment, aucune raison de me plaindre. Mon problème c'est que je ne savais pas quoi faire du reste de ma vie".

Sauf erreur de ma part, le seul enregistrement de concert publié pendant qu'Ayers était vraiment actif est sa face du disque June 1, 1974, où il partageait l'affiche avec John Cale, Eno et Nico. Mais depuis les années 1990, on a eu droit à un grand nombre de d'éditions de sessions ou de concerts, dont beaucoup avaient à l'origine été enregistrés et diffusées par la BBC, ce qui au passage confirme la place que tenait Ayers sur la scène anglaise de l'époque, même s'il n'a jamais vendu énormément de disques.
Banana follies a justement été enregistré par la BBC le 20 septembre 1972 (et diffusé le 10 octobre).Kevin Ayers et le bassiste Archie Leggett se sont produits ensemble à partir du printemps 1972 sous la bannière Ayers and Archibald. Il reste peu de documents de cette collaboration, à l'exception d'une session de cinq titres enregistrée le 17 mai 1972 pour l'émission de Bob harris sur la BBC, éditée en 1996 par Strange Fruit sur Singing the bruise.
Cette collaboration a culminé en septembre 1972, du 6 au 24, quand Ayers, Archibald et leurs amis ont présenté un spectacle de music-hall intitulé Banana follies. Voilà ce qu'en disait Kevin Ayers en 1998 dans les notes de pochette du CD : "Je ne sais plus trop comment nous avons planifié nos débuts au cabaret, mais soudain nous y étions, en costume de soirée, entourés de palmiers et de bananes, à jouer des chansons et à s'autoriser à faire ce qui nous paraissait drôle sur le moment. Cet événement n'aurait jamais dû être gravé sur disque - ces happenings en partie improvisés sont rarement, voire jamais, consignés sur bande. L'échange entre l'artiste et le public est souvent visuel et des réponses subtiles comme le rire apparaissent, c'est le moins qu'on puisse dire, mystérieuses. Je me souviens qu'on a beaucoup ri et que des litres et des litres de vin ont été bus. Je doute qu'on s'en sortirait avec cette approche non-professionnelle de nos jours, mais ça a fonctionné de manière nonchalante à l'époque, il y a bien longtemps !".
Bon, c'est clair qu'il fallait sûrement être sur place pour apprécier pleinement ce spectacle, mais Ayers était quand même bien modeste. La partie vraiment cabaret au début, avec notamment David Bedford et Lol Coxhill, est certes anecdotique, même si elle n'est pas désagréable. Elle comprend Pretty little girl, Two little pigeons, que Lol Coxhill avait enregistré pour son album Ear of the beholder en 1971 (un disque sur lequel Ayers joue de la guitare), 'Orrible orange et la pièce radiophonique des années 1930 Murder in the air, que Lol Coxhill gravera sur un maxi en 1977. Mais les deux-tiers du disque correspondent à un concert "classique" de Kevin Ayers, et l'ensemble est excellent.
Je crois que le seul des titres alors déjà paru sur disque est Whatevershebringswesing. Le dernier jour du spectacle, Robert Wyatt a accepté de monter sur scène et a chanté sur cette chanson, comme il l'a fait pour la version en studio. Il n'était pas là le 20 septembre, mais la version est quand même très bonne.
A l'issue de cette série de spectacles, un album Banana follies était plus ou moins prévu, et des sessions ont effectivement eu lieu. Mais
Ayers était un véritable feu follet à l'époque et, quelques semaines plus tard il avait formé un nouveau groupe, Decadence, qui s'est séparé après quelques mois d'existence. Si bien que, quand l'album a fini par arriver en mai 1973, intitulé Bananamour, il ne contenait que trois des titres de ce spectacle, O wot a dream, le single-hommage à Syd Barrett, Interview et The end, devenu entre-temps Beware of the dog.Trois autres titres enregistrés en studio en septembre 1972 seront finalement inclus sur la compilation Odd ditties en 1975, Fake Mexican tourist blues, Take me to Tahiti et Don't sing no more sad songs.
Mais Bananamour a conservé d'autres éléments de son creuset des Banana follies, comme le duo de bananes dessiné de la pochette et la grande photo intérieure de la pochette, qui représente Ayers et Leggett en costume blanc autour d'un échiquier dont les pièces sont sculptées dans des bananes : c'est ainsi qu'ils apparaissaient sur scène au tout début du spectacle.
Par la suite, Kevin Ayers a fini par intégrer les autres chansons du spectacle dans sa discographie. Le très court Ball bearing blues est apparu en 1974 sur The confessions of Dr. Dream and other stories. La chanson du film L'ange bleu, Falling in love again, chantée dans sa version originale en allemand par Marlene Dietrich, est apparue en 1975 sur Yes we have no mananas. Quand au Hat song, qu'il jouait déjà avec The Whole World en 1970, il s'est retrouvé en 1978 sur Rainbow takeaway.
Ce disque est donc un document sympathique et précieux, d'autant que les principaux protagonistes, Archie Leggett, Davi Bedford, Lol Coxhill et Kevin Ayers, sont désormais tous morts.

02 mars 2013

BIJOU : Bijou


Acquis probablement chez Carrefour à Châlons-sur-Marne vers 1981
Réf : 6886 216 -- Edité par Impact en France en 1980
Support : 33 tours 30 cm
12 titres

Le label Impact était à Philips/Phonogram ce que Music For Pleasure était à Pathé Marconi/EMI : une étiquette qui servait à rééditer des "enregistrements originaux" d'artistes du catalogue, via des compilations vendues à un prix imbattable. Chez Impact, variétés françaises et étrangères se côtoyaient : plusieurs volumes de Serge Gainsbourg ou Johnny Hallyday, mais aussi de Chuck Berry et des Platters.
Pour Bijou, il n'y a eu qu'un seul volume, qui a fait mon bonheur pour environ 18 francs, d'autant que je n'avais aucun de leurs disques avant ça et que cette première compilation du groupe est un excellent résumé de sa discographie des débuts jusqu'à l'album En public. En plus, la sélection des titres de cette publication "grand public" peut aussi faire le bonheur du fan pointu, puisqu'on trouve trois faces A de 45 tours hors album (Si tu dois partir, la reprise énergique de Bob Dylan via Fairport Convention, Betty Jane Rose, l'original signé Gainsbourg et Je pense à toi, dont la face B instrumentale est ici enchaînée à la face A) et même une véritable rareté, une version de C'est un animal, sortie à l'origine uniquement en 45 tours promo, différente de celle de l'album Danse avec moi et peut-être même meilleure car plus tendue et plus ramassée.
Bijou s'est formé en 1975 et a grandi au moment où le punk se développait, ce qui lui a valu un passage au festival de Mont-de-Marsan en 1976 et un superbe autocollant jaune les traitant de "1er groupe punk français" sur la pochette de leur premier album en 1977. Quelques temps plus tôt, ils auraient été assimilés au pub-rock. Produit par Sparks en 1979, le groupe a pris des tonalités new wave. En fait, ça ne fait aucun doute, Bijou est tout simplement un groupe de rock 'n' roll et, s'ils avaient des pairs à leur époque, il fallait traverser la Manche pour les trouver : autre trio, The Jam avait aussi une oreille sur les sixties et l'autre sur l'énergie du moment.
Depuis la reprise de Dutronc, La fille du Père Noël jusqu'à la version live de Vieillir, ce disque est justement un excellent album de rock. J'aime particulièrement l'enchaînement des quatre premiers titres de la face B, avec Le kid, le presque tube extrait de Pas dormir, dont je gardais un souvenir mitigé mais à la réécoute j'ai trouvé qu'il s'était fortement bonifié en vieillissant, le classique Betty Jane Rose, apogée de leur collaboration avec Gainsbourg, et deux de leurs meilleurs originaux, OK Carole et Danse avec moi.
Au cours des trente dernières années, j'ai glâné quelques autres disques de Bijou, albums et singles, mais si je ne devais en garder qu'un, celui-ci ferait parfaitement l'affaire. Je n'y ferais qu'un changement : remplacer L'amitié, la petite chorale entre potes qui clôt l'album, par Les papillons noirs, une autre reprise, certes, de Gainsbourg, encore, mais elle est excellente et pendant des années je n'ai connu que la version Bijou de cette chanson créée par Michèle Arnaud et Serge Gainsbourg.


Bijou joue OK Carole en concert, dans sa formation canonique en trio.


Bijou, Danse avec moi, en direct dans l'émission Chorus sur Antenne 2 en 1978, avec l'apport de deux choristes et d'une section de cuivres.